Alimentation : vers une réhabilitation des acides gras
Mots clés : Alimentation, FRANCE, Éric Bruckert, AFSSA
Par Anne Jouan
18/03/2010 | Mise à jour : 07:48 Réactions (19)
Les frites font partie des aliments riches en acides gras.
Un avis de l'Afssa estime que ces graisses vilipendées
doivent être consommées, mais en quantité raisonnable.
Comment s'y retrouver dans la jungle des acides gras, qui foisonne d'informations
contradictoires ? L'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) vient de rendre
un avis concernant les apports nutritionnels conseillés pour les acides gras, que l'on retrouve au
niveau alimentaire dans les graisses animales, végétales et, bien sûr, dans les huiles. L'objectif
de cet avis est d'informer les professionnels de santé pour prévenir certaines pathologies
comme les maladies cardiovasculaires, le diabète, l'obésité et certains cancers, liées
notamment à l'alimentation.
Aujourd'hui, on ne dispose pas de données scientifiques satisfaisantes pour pouvoir affirmer
quelle quantité et quel type d'acides gras nous devons manger par jour pour être en bonne
santé, explique en substance le Pr Éric Bruckert, responsable de l'unité d'exploration
métabolique pour la prévention des maladies cardio-vasculaires à l'hôpital de la Pitié-
Salpêtrière à Paris. Pour obtenir la preuve absolue de ce qui est réellement bon pour la santé
en matière d'acides gras, il faudrait mettre en œuvre des expérimentations «grandeur nature»
impossibles techniquement à réaliser. Les chercheurs savent cependant que les acides gras
trans (présents dans les gâteaux et viennoiseries industriels mais également dans les produits
laitiers) sont les seules graisses dont le seul effet est d'augmenter le mauvais cholestérol et de
faire baisser le bon. De la même façon, il est vivement conseillé d'éviter de consommer de
l'huile de palme, de l'huile hydrogénée et de l'huile de coprah.
En France, on considère actuellement que sur 2 000 calories consommées par jour par un
adulte, 40 % proviennent des graisses, qu'il s'agisse de graisses cachées (dans la viande, la
charcuterie, le fromage) ou ajoutées (huile, beurre). Or, les recommandations habituelles pour
avoir une santé cardio-vasculaire satisfaisante penchent plutôt du côté de 30 % de calories
journalières provenant des acides gras. «Mais 35 % constituent un compromis faisable et
acceptable», relève le Pr Bruckert.
D'un point de vue pratique, et afin de ne pas transformer la préparation d'un repas en un
véritable casse-tête, il suffit de respecter quelques règles simples. Moins d'un tiers des acides
gras doit provenir de graisses saturées (essentiellement d'origine animale, à savoir de viande
rouge, de charcuterie, de beurre ou de fromage). Les deux autres tiers sont des graisses
insaturées : les oméga 6 (huile de tournesol), les oméga 3 (les poissons) et l'huile d'olive.
Quelques principes simples peuvent également être appliqués pour ne pas faire la cuisine une
calculatrice à la main. Il suffit par exemple de manger du poisson au moins deux fois par
semaine (qu'il soit gras ou non), de varier les huiles (faire un jour une vinaigrette avec du
tournesol et le lendemain avec de l'huile d'olive).
En ce qui concerne la quantité de la viande acceptable, tout dépend de la quantité de fromage
et de charcuterie consommée dans la même journée. Plus on mangera de fromage, plus il
faudra se restreindre sur la viande. «De toute façon, la viande n'est pas indispensable pour la
santé. Ne pas en consommer peut être préjudiciable uniquement pour les femmes qui ont
souvent des carences en fer à cause de leurs menstruations», explique le Pr Bruckert. Il est
malgré tout important de comprendre que les graisses font partie intégrante de l'alimentation et
qu'il est fondamental d'en manger, puisque les graisses insaturées sont nécessaires à un bon
fonctionnement cardio-vasculaire. «Si on les supprime complètement, on augmente
automatiquement la consommation de glucides, relève Marie Favrot, directrice de l'évaluation
des risques nutritionnels et sanitaires à l'Afssa. Et l'on sait désormais que les régimes
amaigrissants dans lesquels on supprime trop de graisses ne sont pas efficaces.» Les États-
Unis, qui préconisent à leurs concitoyens de consommer 30 % de lipides, ne sont effectivement
pas un modèle en matière de lutte contre les problèmes de surpoids.