ISFEC – Master 2 - 2011 I.Robert Didactique générale Sciences cognitives / Histoire de l’enseignement / Epistémologie ----------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Sciences cognitives - Sciences de la cognition « Cognisciences » ; Les sciences cognitives regroupent un ensemble de disciplines scientifiques dédiées à l'étude et la compréhension des mécanismes de la pensée humaine, animale ou artificielle, et plus généralement de tout système complexe de traitement de l'information capable d'acquérir, conserver, utiliser et transmettre des connaissances. Les sciences cognitives reposent donc sur l'étude et la modélisation de phénomènes aussi divers que la perception, l'intelligence, le langage, le calcul, le raisonnement ou même la conscience. Regroupement de différentes disciplines En tant que domaine interdisciplinaire, les sciences cognitives utilisent conjointement des données issues d'une multitude de branches de la science et de l'ingénierie depuis la linguistique, l’anthropologie, la psychologie, les neurosciences, la philosophie, l'intelligence artificielle... Nées dans les années 1950, les sciences cognitives forment aujourd'hui un champ interdisciplinaire très vaste dont les limites et le degré d'articulation des disciplines constitutives font toujours débat. Schéma concernant les six disciplines scientifiques constituant les sciences cognitives et leurs liens interdisciplinaires, par l'un des pères fondateurs du domaine, G. A. Miller. Les traits pleins symbolisent les disciplines entre lesquelles existaient déjà des liens scientifiques à la naissance des sciences cognitives ; en pointillés, les disciplines entre lesquelles des liens ont émergés depuis lors. => émergence de disciplines autonomes telles que la neuropsychologie ou la psycholinguistique…. La didactique semble se situer entre la psychologie, l’épistémologie et les sciences sociales. Champ de recherche Travail sur : - le fonctionnement du cerveau ; - opérations mentales - opérations de machines réalisées par l’homme (ordinateurs / Intelligence artificielle (I.A.)…) => tenter d’appréhender la cognition de la même façon que l’abord des phénomènes physiques, biologiques et psychologiques. Une critique Un gros problème des sciences cognitives est leur difficulté à prendre en compte les aspects affectifs et culturels de la connaissance (Sociologie / Anthropologie…). Le courant du cognitivisme Le cognitivisme est l'un des deux principaux courants des sciences cognitives. Il est fondé sur l'idée que l'esprit est une machine de traitement symbolique de l'information (métaphore de l'ordinateur), c'est-à-dire qu'il opère sur des représentations en fonction de leurs propriétés syntaxiques plutôt que de leur signification. La simulation et la modélisation informatique peuvent fournir de nouveaux moyens d'étudier le fonctionnement de l'esprit rejoignant ainsi le projet de la cybernétique d'intégrer dans un même cadre théorique l'étude des systèmes naturels et artificiels. [Autre courant = connexionisme] Quelques processus cognitifs Attention L'attention est grosso modo la capacité à se concentrer sur certains stimuli ou, au contraire, l'impossibilité de traiter plus d'une certaine quantité d'informations à un moment donné. Mémoire La mémoire permet de retenir des informations pour les réutiliser ultérieurement. La notion de mémoire insiste sur les structures et processus intermédiaires entre l'acquisition de ces informations et leurs conséquences sur le comportement. Elle fait l'objet de nombreux travaux en sciences cognitives, aussi bien du point de vue de la psychologie ou des neurosciences que de la modélisation. Les chercheurs se sont ainsi attachés à mettre en évidence les différentes structures composant la mémoire en se basant à la fois sur des expériences et sur les dysfonctionnements observés chez des patients cérébrolésés. On distingue le registre sensoriel (grande quantité d'informations sous forme visuelle pendant quelques millisecondes), la mémoire à court terme (nombre limité d'éléments sous forme verbale pendant quelques secondes) et la mémoire à long terme (informations sémantiques, en pratique sans limite de durée ou de capacité). La mémoire de travail a pour rôle non seulement de contenir des informations en provenance des systèmes sensoriels mais aussi des informations extraites de la mémoire à long terme pour être utilisées par les processus de raisonnement et de prise de décision. De nombreuses recherches portent également sur les représentations mentales qui organisent ces informations. Enfin, de nombreux travaux portent sur les processus d'encodage, de stockage et de récupération. Plusieurs expériences soulignent le rôle de la mémoire dans l'expertise (ainsi les bons joueurs d'échecs ne diffèrent pas des débutants par leur vitesse de traitement mais par l'organisation des informations sur le jeu). Histoire de l’enseignement Champ de réflexion, d’études et de recherches. Histoire des formes institutionnalisées d’enseignement et d’apprentissage. Histoire des processus d’éducation et de socialisation de l’enfance et de la jeunesse. Grandes diversités d’interventions : - savantes => sociologiques, philosophiques, ethnologiques… ; - pratiques => pédagogues, formateurs, administrateurs ; - spontanées => comparaison naturelle de sa propre éducation avec celle de ses parents ou de ses enfants. foisonnement d’études et de publications. Epistémologie Etude critique des principes, des hypothèses et des résultats des diverses sciences. Epistémologie ou non? - L’étude des écarts entre la science enseignée et celle qui se pratique (transposition didactique) est nécessaire pour inscrire l’action éducative dans un projet continu. Mais cela relève plus de la méthodologie que de l’épistémologie. - On peut penser à l’étude critique des principes, des démarches d’une discipline, mais c’est plutôt alors de l’étude des fondements didactiques qu’il s’agit. L’attitude épistémologique est d’abord critique ou historique et concerne plus particulièrement les sciences. L’étude épistémologique peut être aussi appliquée (épistémologie appliquée) = conception de nouveaux contenus d’enseignement (construction des concepts, détermination de leur niveau de formulation, élucidation des problèmes, choix des matériels et démarches) Principaux courants épistémologiques [Tiré d’un article universitaire de Martin Riopel, Université du Québec à Montréal]. Nous résumons ici, dans un tableau, le nom des principaux courants épistémologiques, l'époque où chacun d’eux a dominé la pensée, les tendances pédagogiques correspondantes à chaque courant ainsi que quelques philosophes ou scientifiques qui leur sont associés. Courant Description Tendance (didactique et*) Philosophe pédagogique scientifique ou Rationalisme (17e siècle) Toute connaissance valide Insister sur l'importance de la Platon (428-347 av. J.provient essentiellement de rationalisation au détriment de C.) l'usage de la raison. l'expérimentation. Descartes (1596-1650) Leibnitz (1646-1716) Kant (1724-1804) Empirisme (18e siècle) Toute connaissance valide Insister sur l'importance de Anaximène (610-545 provient essentiellement de l'expérimentation au détriment de av. J.-C.) l'expérience. la rationalisation. Bacon (1561-1626) Locke (1632-1704) Newton (1642-1726) Berkeley (1685-1753) Positivisme (19e siècle) La science progresse en se fondant sur des faits mesurés dont elle extrait des modèles par un raisonnement inductif rigoureux. Tout ce qui n'est pas directement mesurable n'existe pas. Reconnaître l'importance complémentaire de l'expérimentation et de la rationalisation en insistant sur la démarche scientifique qui fait progresser la science. Sextus Empiricus (160-210) Comte (1718-1857) Stuart Mill (1806-1873) Mach (1838-1916) Bridgman (1882-1961) Bohr (1885-1962) Carnap (1891-1970) Constructivisme (20e siècle) Les connaissances scientifiques (observations et modèles) sont des constructions subjectives qui ne nous apprennent rien de la réalité. Insister sur le caractère arbitraire ou subjectif des modèles scientifiques en encourageant l'élève à construire ses connaissances. Héraclite (550-480 av. J.-C.) Protagoras (485-410 av. J.-C.) Brouwer (1881-1966) Piaget (1896-1980) Réalisme (20e siècle) Les modèles scientifiques sont des constructions destinées à prédire certains aspects d'une réalité objective qui existe indépendamment de l'observateur. Insister sur la différence entre les modèles, qui sont construits par les scientifiques, et la réalité, qui existe indépendamment des modèles. Les modèles sont des approximations successives de la réalité. Aristote (384-322 av. J.-C.) Reid (1710-1796) Planck (1858-1947) Russel (1872-1970) Einstein (1879-1955) * Rajout de la formatrice. Quelques « profils » de praticiens en lien avec les courants - Un professeur de science d'allégeance rationaliste aura évidemment tendance à insister sur l'importance du raisonnement (au détriment de l'expérience) en allant peut-être, dans les cas extrêmes, jusqu'à éliminer complètement l'expérimentation du processus d'apprentissage de l'élève. Un cours de science correspond, pour ce professeur, à une suite de raisonnements analytiques que l'élève doit réussir à comprendre, à reproduire et à maîtriser. - Un professeur de science d'allégeance empiriste aura tendance à insister sur l'importance de l'expérimentation par les élèves dans le but de mettre en évidence des lois approximatives ou de vérifier des hypothèses. Les raisonnements qui permettent de déduire rigoureusement ces lois seront considérés non-essentiels et, dans les cas extrêmes, pourront être éliminés du processus d'apprentissage de l'élève. Un cours de science, pour ce professeur, correspond à une suite d'expériences cruciales que l'élève doit réussir à comprendre, à reproduire et à maîtriser. - Un professeur de science d'allégeance positiviste aura tendance à reconnaître l'importance complémentaire de l'expérimentation et du raisonnement dans l'apprentissage de l'élève, en insistant sur la démarche qui permet d'analyser statistiquement un ensemble de mesures afin d'obtenir un modèle aussi simple que possible. Un cours de science correspond, pour ce professeur, à une suite d'expériences que l'élève doit réussir à comprendre, à reproduire, à maîtriser et à relier logiquement entre elles par un raisonnement inductif rigoureux. - Un professeur de science d'allégeance constructiviste aura tendance à insister sur le caractère arbitraire ou subjectif des modèles scientifiques, en encourageant l'élève à construire ses propres connaissances. Pour ce professeur, l'expérimentation ne sert qu'à vérifier la cohérence interne de la construction. Un cours de science correspond, pour ce professeur, à une suite de modèles reconnus actuellement par le milieu scientifique que l'élève doit réussir à comprendre, à construire et à maîtriser. à adopter les procédures d'enseignement constructivistes où l'élève est au cœur des apprentissages. - Un professeur de science d'allégeance réaliste aura tendance à souligner les rôles complémentaires du raisonnement inductif, du raisonnement déductif et de l'expérimentation dans la recherche de nouvelles connaissances scientifiques, à insister sur la différence entre les modèles (qui sont produits par les scientifiques) et la réalité (qui existe indépendamment des modèles), et à reconnaître une composante subjective et créative dans l'élaboration des théories scientifiques. Un cours de sciences correspond, pour ce professeur, à une suite d'expériences, de raisonnements et de modèles que l'élève doit réussir à comprendre, à construire et à maîtriser dans le but de prédire le monde qui l'entoure. Conclusion La didactique semble ne pouvoir être perçue et comprise pour et par elle-même. Elle réclame de s’intéresser à d’autres domaines de recherche afin d’en percevoir la définition et les limites. Le travail autour du lexique précédent permet d’aborder la didactique de façon la plus globale possible. L’intérêt et l’acte de recherche autour de ce qu’est la didactique permet d’éclairer et d’enrichir nos pratiques pédagogiques présentes ou futures.