Variables complexes Yves Chiricota, professeur DIM, UQAC Cours 8MAP111 8/ 12/2015 2 1. INTRODUCTION Notice Ce document se veut un aide mémoire exhaustif concernant portant sur les variables complexes pour le cours 8MAP111. 1 Introduction Les nombres complexes apparaissent de façon naturelle lorsqu’il est question de résoudre des équations polynomiales p(x) = 0, où p(x) est de la forme p(x) = a0 + a1 x + a2 x2 + a3 x3 + · · · an xn . Considérons l’équation x2 − 1 = 0, il est facile de constater que celle-ci possède les solutions x = 1 et x = −1. En fait, ce sont les deux seules solutions. Qu’en est-il de l’équation x2 + 1 = 0 ? Pour résoudre cette équation, nous avons besoin d’un nombre spécial, appelé nombre imaginaire et désigné par i, qui satisfait la propriété i2 = −1. Ce nombre a été introduit à l’époque de la renaissance. 2 Nombres complexes • L’ensemble des nombres complexes est défini comme suit: C = {a + bi | a, b ∈ R}, où i est défini par la propriété i2 = −1. On écrira z = a + ib pour désigner un nombre complexe. On appèle a la partie réelle de z et b la partie imaginaire. On peut représenter ces nombres dans un plan, le plan complexe. En ce sens, un nombre complexe peut aussi être considéré comme un point dans le plan. 8MAP110 YC 8/ 12/2015 2. NOMBRES COMPLEXES 3 Si z = a + ib, on écrit Re z pour désigner la partie réelle de z et Im z pour désigner la partie imaginaire. Avec ces notations, Re z = a et Im z = b. • L’ensemble C est muni d’opération d’addition et de multiplication qui satisfont les mêmes propriétés que celles satisfaites par les nombre réels. Le nombre 0 + 0i = 0 est le neutre pour l’addition et 1 + 0i = 1 est le neutre pour la multiplication. Si z1 = a + bi et z2 = c + di, on a Somme: z1 + z2 = (a + c) + (b + d)i Produit: z1 z2 = (ac − bd) + (ad + bc)i Conjugué : z̄ = a − bi 1 z a b = a2 +b 2 − a2 +b2 √ Norme : |z| = a2 + b2 (on a z z̄ = |z|2 ). Inverse multiplicatif : = z z̄ La figure suivante illustre le conjugué d’un nombre complexe. 8MAP111 YC 8/ 12/2015 4 2.1 2. NOMBRES COMPLEXES Forme polaire • Il est très commode de représenter les nombres complexes sous forme polaire. Si z = a + bi, la forme polaire de z est r(cos θ + i sin θ), où p r = a2 + b2 est appelé le module de z et θ est l’angle entre l’axe des Ox et le vecteur (a, b) dans le plan complexe. L’angle θ est appelé l’argument de z qu’on écrit arg z. Notons que si z = r(cos θ + i sin θ), alors on a aussi z = r(cos(θ + 2πk) + i sin(θ + 2πk)), où k ∈ Z. Bref, l’argument de z n’est pas défini de manière unique car si θ est l’argument, alors tous les angles de la forme θ + 2πk, avec k ∈ Z le sont aussi. On définit l’argument principal de z en posant la contrainte −π < θ ≤ π. L’argument principal de z = a + bi se calcule à partir des valeur de a et b par arctan ab , b arctan a + π, Arg (z) = arctan ab − π, π 2 π −2 si si si si si a>0 a<0 a<0 a=0 a=0 et et et et b≥0 b<0 b>0 b<0 Si z = 0 + 0i, Arg z n’est pas défini. • On a les propriétés suivantes pour module et de l’argument de nombres complexes z1 et z2 . - |z1 z2 | = |z1 | |z2 | - |z1 + z2 | ≤ |z1 | + |z2 | (inégalité du triangle) - arg z1 z2 = arg z1 + arg z2 2.2 Formule d’Euler • La formule suivante est très utile, elle s’appelle formule d’Euler : z = r(cos θ + i sin θ) = reiθ . 8MAP110 YC 8/ 12/2015 2. NOMBRES COMPLEXES 5 Si z1 = r1 eiθ1 et z2 = r2 eiθ2 , on a z1 = z2 ⇔ r1 = r2 et θ1 = θ2 + 2πk. Bref, les deux nombres complexes sont égaux si et seulement si leur module et leur arguments sont égaux entre-eux (modulo 2πk). La formule d’Euler simplifie énormément le calcul avec les nombres complexes. z1 z2 = r1 eiθ1 r2 eiθ2 = r1 r2 ei(θ1 +θ2 ) 1 1 1 z −1 = = iθ = e−iθ z r re 2.3 Racines n-ièmes • La racine n-ième de x est la solution en y à l’équation y n = x. Par exemple, 2 est la racine troisième de 8 car 23 = 8. En d’autres mots, y est la racine n-ième de x si y multiplié n fois par lui-même donne x. On écrit √ n x ou encore 1 xn pour désigner la racine n-ième de x. • Supposons que z = reiθ , on a wn = z ⇔ wn = rei(θ+2πk) (k ∈ Z) √ (θ+2πk) ⇔ w = n rei n (k = 0, 1, 2, . . . , n − 1) On obtient ainsi n racines n-ièmes distinctes. Chacun des ces n nombres complexes w distincts satisfait l’équation wn = z. • Un cas particulier intéressant est celui des racines n-ièmes de l’unité. Ce (θ+2πk) sont les solutions de l’équation wn = 1. On trouve w = ei n , avec (k = 0, 1, 2, . . . , n − 1). Le diagramme suivant illustre les racines sixièmes de l’unité. 8MAP111 YC 8/ 12/2015 6 3 3.1 3. FONCTIONS COMPLEXES Fonctions complexes Domaines dans le plan complexe C. La notion de voisinage d’un point z est fondamentale dans l’étude des fonctions complexes. Le voisinage d’un point est défini à partir de la définition suivante. • Définition: une boule ouverte de rayon a centrée en z0 est l’ensemble des nombres complexes z tels que |z − z0 | < a. On écrira Ba (z0 ) pour désigner cet ensemble. Ainsi, Ba (z0 ) = {z ∈ C | |z − z0 | < a}. Le voisinage à distance de z0 ∈ C est l’ensemble des points de Ba (z0 ). • Définitions: Soit S ⊂ C, un point z est un point intérieur à S s’il existe un voisinage de z à l’intérieur de S. En d’autres termes, z est un point intérieur à S si il existe (suffisament petit) tel que B (z0 ) ⊂ S. Dans le 8MAP110 YC 8/ 12/2015 3. FONCTIONS COMPLEXES 7 même ordre d’idée, un point z est un point extérieur si il existe un voisinage de z complètement à l’extérieur de S. Un point qui n’est ni intérieur, ni extérieur est appelé un point frontière de S. Un sous-ensemble S est dit connexe si toute paire de points de S peut être reliés par une courbe continue complètement contenue dans S. Un domaine est un sous ensemble ouvert connexe. Un sous-ensemble S ∈ C dit ouvert si tous les points de S sont des points intérieurs. Le sous-ensemble S est dit fermé s’il contient sa frontière. Si il existe un boule Ba (z) qui contient S, on dit que S est borné. La frontière d’un domaine S est l’ensemble de ses points frontière. On utilise la notation ∂S pour désigner la frontière de S. 3.2 Fonctions • Une fonction complexe f définie sur un domaine D est une règle qui associé à chaque élément de D un nombre complexe w appelé la valeur de f . Une fonction complexe correspond à peu de choses près à une transformation de R2 → R2 . 8MAP111 YC 8/ 12/2015 8 3. FONCTIONS COMPLEXES • Exemple de fonctions: f (z) = z 2 1 1+z f (z) = ez f (z) = • En terme de coordonnées, avec z = x + yi, on peut écrire une fonction f sous la forme f (z) = f (x + yi) = u(x, y) + iv(x, y), où x, y ∈ R. Par exemple, si f (z) = z 2 , on a z 2 = (x + yi)2 = (x2 − y 2 ) + (2xy)i. Dans ce cas, u(x, y) = x2 + y 2 et v(x, y) = 2xy. • La fonction exponentielle complexe joue un rôle important en sciences appliquées, en particulier dans le domaine du traitement du signal lorsqu’il est question de calculer des transformées de Fourier. En voici une définition: ez = ex+yi = ex eyi . Quelques propriétés de ez : - Quelque soit z ∈ C, ez 6= 0; - e0 = 1; - ezw = ez ew ; - ez = ez+2πk . • Exemple: Calcul des racines de f (z) = ez − 1. Posons z = x + yi, il s’agit de résoudre l’équation ez = 1. On a ez = 1 ⇔ ex eiy = 1 ⇔ ex (cos(y) + i sin(y)) = 1 + i0 ⇔ ex cos y = 1 et ex sin(y) = 0 Vu que ex > 0 quelque soit x, ex sin(y) = 0 ⇒ sin(y) = 0, on en conclut que y est de la forme πk, mais si y est de cette forme on a cos(y) = ±1. 8MAP110 YC 8/ 12/2015 3. FONCTIONS COMPLEXES 9 Or sous notre hypothèse, on sait que ex cos y = 1 et de plus ex > 0. On a donc forcément cos(y) = 1. On peut conclure que ex = 1, d’où x = 0 et y = 2πk, ainsi la solution de l’équation ez − 1 = 0 est de la forme z = 2πki. On remarquera que cette équation, qui possède une solution unique dans R, en a une infinité dans C. 3.3 Différentiabilité • Le concept de limite dans le plan complexe est similaire du même concept dans R à la différence près qu’on peut approcher les valeurs de plusieurs façon dans le plan complexe tandis que dans R, on ne peut approcher une valeur que par la gauche ou par la droite. • Définition: On dit que lim f (z) = w z→z0 si pour toute valeur ∈ R, il existe δ ∈ R tel que |z − z0 | < δ ⇒ |f (z) − w)| < . On dit que la limite de f (z) lorsque z tend vers z0 est w. Cela veut dire que peu importe la distance donnée, on peut trouver une valeur δ telle que si z est à une distance inférieure à δ de z0 , alors f (z) sera à une distance inférieure à de w. En d’autre termes, cela signifie intuitivement que l’on peut approcher f (z) aussi près qu’on le désire de w en approchant z de w0 . • La dérivée d’une fonction complexe est définie par une formule similaire à une dérivée de fonctions réelles. Définition: Soit f (z) une fonction complexe définie sur un domaine D. La dérivée de f au point z0 est définie par df f (z) − f (z0 ) (z0 ) = f 0 (z0 ) = lim z→z0 dz z − z0 si cette limite existe. Dans ce cas, on dit que la fonction est différentiable en z0 . • Les règles de dérivations pour les fonctions complexes sont semblables aux règles concernant les fonctions réelles. Si f et g sont des fonctions complexes et si c ∈ R, on a entre autres: d dz c = 0; d dz cf d = c dz f; d dz (f + g) = d dz f 8MAP111 YC 8/ 12/2015 + d dz g; 10 3. FONCTIONS COMPLEXES d n dz z d n−1 = n dz z ; ( fg )0 = f 0 g−f g 0 ; g2 (f (g(z)))0 = f 0 (g(z))g 0 (z). 3.4 Équations de Cauchy-Riemann • Soit f (z) une fonction complexe. Écrivons f (z) = f (x + iy) = u(x, y) + iv(x, y). Les équations de Cauchy-Riemann sont ∂u ∂v = ∂x ∂y et ∂u ∂v =− ∂y ∂x Exemple: Vérifiez que la fonction f (z) = ez satisfait les équations de Cauchy-Riemann. Pour ce faire, écrivons f (z) = f (x + iy) = ex eiy = ex (cos y + i sin y) = ex cos y + iex sin y. On a donc u(x, y) = ex cos y et v(x, y) = ex sin y. Par suite, ∂u ∂v = ex cos y = ∂x ∂y et ∂u ∂v = −ex sin y = − . ∂y ∂x Les équations de Cauchy-Riemann sont donc satisfaites. On a le théorème suivant: Théorème. Soit f (z) une fonction complexe définie sur un domaine D et supposons que f 0 (z0 ) existe, pour z0 dans D. On a alors f (z) satisfait les équations de Cauchy-Riemann et f 0 (z0 ) = ux (z0 ) + vx (z0 )i. Ce théorème donne un critère pour vérifier si une fonction est différentiable et une formule pour la dérivée. • Exemple. Considérons f (z) = |z|2 = (x2 + y 2 ) + 0i. Cette fonction ne satisfait pas les équations de Cauchy-Riemann si z 6= 0 + 0i. Le seul point où ces équations sont satisfaites est le point 0 + 0i. La fonction est donc éventuellement différentiable en ce point, mais pas ailleurs. 8MAP110 YC 8/ 12/2015 3. FONCTIONS COMPLEXES 11 On a aussi un théorème qui permet d’obtenir un critère de différentiabilité: Théorème. Soit f (z) = u(z) + iv(z) définie sur un domaine D. Si f satisfait les conditions de Cauchy-Riemann en z0 ∈ D et que les dérivées partielles par rapport à x et y de u et v sont continues en z0 , alors f est différentiable en z0 . En vertu de ce théorème, dans l’exemple précédent f est différentiable en 0 + 0i car u et v sont continues en ce point. Cependant, c’est le seul point où la fonction est différentiable. La fonction ez est différentiable sur C au complet puisqu’on a vu qu’elle satisfait les équations de Cauchy-Riemann sur C. 8MAP111 YC 8/ 12/2015