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idéales en reprenant l’ancienne incision. Le patient se
porte bien avec une fonction rénale normale. Le rein
gauche est normal à l’échographie. Son diabète est
équilibré.
DISCUSSION
La pyélonéphrite emphysémateuse (PE) est rare; 114
cas, la plupart sporadiques, sont rapportés dans la litté-
rature jusqu’en 1995 [9].Le premier cas est décrit par
GILLES et FLOCKS en 1941; il s’agissait d’une pyéloné-
phrite emphysémateuse bilatérale [10]. La PE touche
essentiellement la femme; elle est rare chez l’homme
sauf au Japon [9]. Notons que notre patient est de sexe
masculin. Cette affection survient chez les diabétiques,
l’insulinodépendance n’étant pas un facteur pronos-
tique significatif [3]. La lithiase urinaire avec obstruc-
tion des voies excrétrices est exceptionnelle [9].
La pyélonéphrite emphysémateuse est due à la produc-
tion intraparenchymateuse rénale de gaz et dans l’espa-
ce périrénal [10]. Le gaz intrarénal peut être localisé ou
généralisé.La présence de gaz dans le bassinet et l’ure-
tère n’est pas synonyme d'obstruction urétérale [1, 8,
10]. Les germes anaérobies provoquent la fermentation
du glucose tissulaire en lactate en produisant le dioxy-
de de carbone (CO2) et l’hydrogène (H2) [5]. Selon
AHLERING [1], l’augmentation du métabolisme anaéro-
bie entraîne la diminution de la perfusion du rein et de
la pression partielle d’oxygène dans le rein.C’est la
raison pour laquelle les gaz ne sont pas éliminés immé-
diatement. Le bas débit rénal diminue l’efficacité des
antibiotiques, ce qui explique l’évolution rapide vers le
choc septique, la défaillance multiviscérale et le décès.
La formation de gaz se fait autour de la papille où la
vascularisation est pauvre. Le gaz passe dans le pyélon,
ensuite il fuse le long des pyramides et dans l’espace
périnéphrétique. La présence de gaz dans l’espace péri-
néphrétique n’aggrave pas le pronostic [9, 5].
Une infection significative du tractus urinaire est mise
en évidence dans tous les cas. Les germes les plus fré-
quents sont : Escherichia Coli, Klebsiella pneumonia,
et Proteus mirabilis, Aerobacter aerogenes,
Pseudomonas aeruginosa, Citobacter, Cryptococcus [3,
7]. Notre patient a présenté dans les urines un acinéto-
bacter non décrit auparavant comme responsable de la
pyélonéphrite emphysémateuse. L’obstruction du trac-
tus urinaire et l’immunodépression sont des facteurs
favorisant la pyélonéphrite emphysémateuse [3, 10].
La symptomatologie clinique est faite essentiellement de
douleur et de rougeur du flanc. L’examen physique met
en évidence un empâtement, parfois une crépitation au
niveau du flanc. La pneumaturie est exceptionnelle [1,
9 ] .La tomodensitométrie représente la méthode de
choix pour le diagnostic [3, 9, 10]. Elle met en évidence
les bulles de gaz, leur localisation (dans les voies excré-
trices, le parenchyme rénal ou l’espace périrénal), leur
d i ffusion dans d’autres organes notamment la veine
rénale, les veines hépatiques et la veine porte. Deux cas
de pyélonéphrite emphysémateuse avec gaz dans les
veines hépatiques ont été rapportées dans la littérature
[2, 6]. La TDM permet la surveillance en cas de traite-
ment conservateur. La radiographie d’abdomen sans
préparation et l’échographie peuvent orienter vers le dia-
g n o s t i c .Chez les malades obèses, il est souvent diff i c i l e
de distinguer ces lésions des gaz intestinaux [9]. Il faut
éliminer une obstruction urétérale qui peut prêter à
confusion. L’apparition spontanée de gaz dans le tractus
urinaire supérieur peut cependant avoir d’autres
causes : gaz atmosphérique introduit par manipulation
iatrogénique ou gaz résultant d’une fistule digestive.
L’équilibration de la gycémie en utilisant l’insuline, et
l’antibiothérapie à dose suffisante et à large spectre sont
i m p é r a t i v e s .Le traitement radical comprend le drainage
de l’abcès et/ou la néphrectomie. Le drainage percutané
comme proposé par KO H [7] doit être appliqué dans des
cas exceptionnels : rein intact à la TDM, patients ne pou-
A.Benchekroun et coll., Progrès en Urologie (2000), 10, 89-91
Figure 1. TDM abdominale : bulles de gaz intrarénale droite,
dans l’espace périrénal et dans la paroi abdominale.
Figure 2. TDM abdominale : hydronéphrose droite sur cal -
cul obstruant la jonction pyélo-urétérale droite.