◆ CAS CLINIQUE Progrès en Urologie (2004), 14, 67-69 <Fistule réno-colique compliquant une pyélonéphrite xanthogranulomateuse (un cas traité par laparoscopie) > <Marie-Nadège BACHELIER (1), Michel CARTERON (2), Jacques GAZAIGNE (3), Martine MORNET (4), Jean-Gabriel MOZZICONACCI (5), Urbain NTARUNDENGA (6) > <(1) Service de Biologie, (2) Service d’Anesthésiologie, (3) Service d’Urologie, (4) Service de Gastro-entérologie, (5) Service d’Imagerie, (6) Service de Chirurgie digestive, Bourges, France> <RESUME Les auteurs rapportent une observation de pyélonéphrite xanthogranulomateuse compliquée de fistule rénocolique. Il s’agit d’une complication rare. Le patient a été traité par une chirurgie laparoscopique manuellement assistée qui a permis de réaliser à la fois la néphrectomie droite et la fermeture de la fistule. ><Mots clés : Fistule réno-colique, pyélonéphrite xanthogranulomateuse, laparoscopie. > <OBSERVATION ETHICON ETS TSB35 introduite par le trocart de 12 mm. Comme la dissection séparée de l'artère et de la veine rénale s’avérait difficile et dangereuse, nous avons dans un premier temps sectionné l'ensemble du pédicule rénal pris en masse par une agrafeuse ETHICON ETS TSW35 introduite par le trocart de 12 mm. Dans un second temps, grâce au confort opératoire donné par la libération du rein, nous avons pu disséquer l'artère rénale séparément de la veine et la cliper isolément. La mise en sac de la pièce opératoire nous paraissant impossible, nous avons utilisé les ciseaux et le bistouri électrique pour réduire son volume en séparant de larges fragments du tissu périrénal lardacé. Après cette morcellation sommaire nous avons retiré le rein par l'incision du Handport sans utiliser de sac. La pièce pesait 880 g (Figure 5). La durée de l'opération fut de 6h30 et la perte sanguine de 300 ml. L'histologie a confirmé la pyélonéphrite xanthogranulomateuse. Les suites opératoires ont été simples et le résultat esthétique très satisfaisant. ><Une femme de 52 ans fut admise en avril 2002 à l’hôpital de Bourges pour une douleur du flanc droit associée à une atteinte de l’état général. L'examen clinique découvrait une masse douloureuse du flanc droit. La température oscillait autour de 38°C. Les données biologiques comportaient un taux de leucocytes à 6 300, une anémie microcytaire avec hémoglobine à 8,6 g/l, une C réactive protéine à 206 mg/l, une créatininémie à 74 micromoles/l et un ECBU qui montrait une pyurie sans germe. Les hémocultures étaient négatives. ><L' urographie intraveineuse montrait un calcul coralliforme droit dans un rein muet (Figure 1). La tomodensitométrie objectivait un rein droit très hypertrophié, de 17 cm de haut sur 13 cm de large, de forme irrégulière, non fonctionnel, et contenant de multiples lithiases, en plus du calcul coralliforme. Le rein était très hétérogène et entouré par de l'œdème (Figures 2 et 3). Nous avons retenu le diagnostic de pyélonéphrite xantogranulomateuse et mis en route un traitement antibiotique par Ciprofloxacine et Gentamicine. ><DISCUSSION ><La pyélonéphrite xanthogranulomateuse est une forme rare et ><Pour améliorer le drainage rénal, et faciliter la stérilisation de la lésion, nous avons décidé de poser une sonde JJ. L'UPR, réalisée comme premier temps de ce geste, révéla une fistule entre le calice inférieur et l'angle colique droits. Afin d'améliorer le drainage rénal, nous avons ajouté à la sonde JJ une néphrostomie percutanée qui a permis d'évacuer du pus franc, dont la culture a donné à la fois du streptocoque anginosus et du proteus mirabilis. grave de pyélonéphrite chronique qui survient surtout chez la femme de la cinquantaine ayant de nombreux antécédents d’infection urinaire [3]. La physiopathologie associe une obstruction, en général lithiasique, une infection chronique, le plus souvent à Proteus Mirabilis ou Escherichia Coli et une réponse immunitaire particulière. Le diagnostic repose sur la tétrade suivante : un rein hypertrophié, non fonctionnel, lithiasique et infecté. Le traitement habituel est la néphrectomie. Les signes inflammatoires débordent la capsule rénale pour envahir la graisse périrénale et même, dans les cas sévères, les organes de voisinage, ce qui explique la survenue possible d’une fistule. La fistule réno-colique est une complication très rare de diverses pathologies infectieuses, tumorales ou ><La pyélographie descendante a confirmé la fistule réno-colique (Figure 4). Après quatre semaines d'antibiothérapie et de drainage rénal la patiente était apyrétique et très améliorée sur le plan clinique. Nous avons alors réalisé une néphrectomie droite et la fermeture de la fistule par laparoscopie manuellement assistée. La patiente étant en position de décubitus latéral gauche, l’intervention nécessita cinq voies d’abord : un trocart de 12mm en fosse iliaque droite, un trocart de 10 mm en paraombilical droit, deux trocarts de 5 mm, sur les lignes axillaires antérieure et postérieure et une incision de 7cm dans le flanc droit pour pose d’un Handport (Smith & Nephew Inc.). La main de l’aide introduite dans le Handport permettait d’écarter la masse rénale latéralement et vers le bas. La brèche colique correspondant à la fistule fut fermée par une agrafeuse < Manuscrit reçu : juin 2003, accepté : décembre 2003 Adresse pour correspondance : Dr. J. Gazaigne, Service d’Urologie, Centre Hospitalier de Bourges, 145, avenue François Mitterrand, BP 603, 18016 Bourges. e-mail : [email protected] Ref : BACHELIER M.N., CARTERON M., GAZAIGNE J., MORNET M., MOZZICO- 67 M.N. Bachelier et coll., Progrès en Urologie (2004), 14, 67-69 <Figure 3. Tomodensitométrie : la loge rénale est le siège d’une inflammation intense et diffuse.> <Figure 1. Urographie intraveineuse : rein droit muet avec de nombreux calculs dont un coralliforme.> <Figure 2. Tomodensitométrie : le rein droit contient plusieurs lithiases dont un calcul coralliforme. > <Figure 4. La pyélographie descendante réalisée par le cathéter de néphrostomie confirme la fistule entre le calice inférieur du rein et l’angle colique droit. > traumatiques du rein ou du colon [4, 6, 8]. Nous en avons trouvé 39 cas dans la littérature. La cause essentielle en est la pyélonéphrite xanthogranulomateuse. A notre connaissance, nous rapportons le premier cas traité par laparoscopie. me du rein, constitue une difficulté majeure car non seulement la dissection dans la loge rénale au contact de la capsule n’est pas possible, mais même la dissection en dehors du fascia de Gerota, telle que pratiquée dans la néphrectomie élargie pour cancer, est compliquée par l’inflammation et la fibrose qui dépassent la loge rénale. ><La néphrectomie laparoscopique pour pyélonéphrite xanthogranulomateuse est connue pour être techniquement difficile [1, 2, 5, 7]. L’ inflammation périrénale , associée à l’augmentation de volu- ><La fistule réno-colique siège en général au pôle inférieur du rein, donc dans une zone de dissection relativement facile. C'est pour68 M.N. Bachelier et coll., Progrès en Urologie (2004), 14, 67-69 nécessité une morcellation complète de la lésion et un temps opératoire encore plus long. ><REFERENCES >< 1. 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MERROT T., ORDORICA-FLORES R., STEYARD H., GINIER C., VALLA J.S. : Is diffuse xanthogranulomatous pyelonephritis a contraindication to retroperitoneoscopic nephroureterectomy ? Surgical laparoscopy & endoscopy. 1998 ; 8 : 5 : 366-369. quoi, le facteur limitant pour la réalisation de ce geste sous laparoscopie reste la pyélonéphrite xanthogranulomateuse elle même et non pas la fistule réno-colique, même si celle-ci allonge le temps opératoire. 6. ONO Y., SEKIHARA T., KUROKAWA K. and SARUKI K. : Renocolic fistula caused by xanthogranulomatous pyelonephritis. Int. J. Urol., 1995 ; 2 : 277-278. ><La néphrectomie laparoscopique peut être réalisée par voie trans ou rétro-péritonéale. Le choix est en partie une question d’habitude ou d’école mais la voie trans-péritonéale paraît plus logique en cas de pyélonéphrite xanthogranulomateuse volumineuse. 7. SHEKARRIZ B., MENG M.V., LU, H-F. YAMADA H., DUH Q.Y., STOLLER M.L. Laparoscopic nephrectomy for inflammatory renal conditions. J. Urol., 2001 ; 166 : 2091-2094. ><La laparoscopie manuellement assistée est très controversée pour les néphrectomies en général mais il semble que c’est dans le cas de la pyélonéphrite xanthogranulomateuse qu’elle trouve une de ses meilleures indications. ____________________ 8. TOUITI D., AMEUR A., ZRARA I., BEDDOUCH A., OUKHEIRA H., BENOMAR S. : Les fistules pyélocoliques : A propos d’une observation. Ann. Urol., 2001 ; 35 : 44-46. SUMMARY ><A case of renocolic fistula complicating xanthogranulomatous pyelonephritis treated by laparoscopy. ><CONCLUSION ><The authors report a case of xanthogranulomatous pyelonephritis complicated by renocolic fistula. This is a rare complication. The patient was treated by right nephrectomy and closure of the fistula performed by manually assisted laparoscopic surgery. ><Nous relatons un cas de pyélonéphrite xanthogranulomateuse compliqué de fistule réno-colique et traité par laparoscopie. Nous pensons que dans ce cas, la laparoscopie manuellement assistée est un bon compromis entre la chirurgie ouverte qui aurait nécessité une longue incision pariétale et la laparoscopie pure qui aurait >Key-Words: Renocolic fistula, xanthogranulomatous pyelonephritis, laparoscopy. ____________________ 69 ., Progrès en Urologie (2003), 13 4