Anesthésie locorégionale - Douleur 39
Des études expérimentales et cliniques ont associé cette immunodépression à
une réduction de l’activité NK et de la production de cytokines. Comme rappelé
dans la revue publiée par Weber et al. [12] une des interprétations possibles est
que la nécessité d’une transfusion n’est en fait que le reflet de la gravité de la
maladie cancéreuse et donc d’une évolution plus compromise et non pas un effet
de la transfusion en elle-même. L’importance des facteurs confondants dans la
plupart des études sur le cancer ne permet pas de conclure.
1.4. La douLeur
La douleur par son activation de l’axe hypothalamo-hypophysaire et du
système sympathique, entraîne une immunosuppression [35]. La douleur aiguë
supprime l’activité des cellules NK et favorise le développement de tumeurs chez
l’animal. De plus, l’inflammation étant la composante la plus importante de la
douleur résultant d’un traumatisme tissulaire (par exemple, un acte chirurgical),
le traitement de la douleur diminue la susceptibilité des animaux aux métastases.
L’inflammation est probablement étroitement liée à ces phénomènes car l’admi-
nistration d’un anti-inflammatoire non stéroïdien contribue à la diminution de cette
susceptibilité. Les études cliniques actuellement publiées sont rétrospectives et
ne permettent pas de confirmer ces observations chez les patients.
1.5. L’anesthésie
1.5.1. Hypnotiques intra-veineux et inHalés
Certains médicaments utilisés pour l’anesthésie générale lors de la chirur-
gie carcinologique pourraient favoriser la récidive du cancer. Chez l’animal, la
kétamine, le thiopental, l’halothane et l’isoflurane réduisent l’activité NK et
augmentent l’incidence des métastases [14]. Chez des patients, aux doses
utilisées pour lutter contre l’hyperalgésie, la kétamine préserverait l’activité ces
cellules NK [15]. Le propofol, au contraire des autres hypnotiques, présenterait
des effets protecteurs de l’immunité bénéfiques dans la chirurgie carcinologique
et n’influencerait pas les cellules NK [16]. Il manque encore beaucoup de données
pour conclure à un effet délétère des hypnotiques.
1.5.2. opiacés
Les opiacés, en particulier les agonistes du récepteur mu dont la morphine,
dépriment l’immunité innée et l’immunité adaptative. La morphine est accu-
sée de favoriser le développement de certains cancers par le biais de cette
immunodépression et d’une stimulation de l’angiogenèse [17]. Chez l’animal,
la morphine, le fentanyl, le sufentanil suppriment l’activité des cellules NK de
façon dose-dépendante. Ceci n’a pas été observé chez les animaux déficients en
récepteurs mu. Il existe cependant des résultats contradictoires et très dépen-
dant des modèles étudiés. Chez l’homme, volontaire sain ou patient opéré de
chirurgie carcinologique [18], la morphine induirait une baisse dose-dépendante
de l’activité NK. Cependant, la douleur étant immunosuppressive par elle-même,
toute analgésie est immunoprotectrice. Ainsi les résultats observés résultent
probablement d’interactions complexes entre les phénomènes péri-opératoires
caractéristiques d’une chirurgie carcinologique. Pour les autres opiacés utilisés
en peropératoire (fentanyl, sufentanil) il semble que les effets soient identiques
à ceux de la morphine : dépression de l’activité NK.