le mot du président
Mars 2015 - Revue FNAIR n°141
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le mot du président
Maastricht III, EPO, parcours de
soins : des avancées significatives
Ces derniers mois ont vu le démarrage des premières
expérimentations sur Maastricht III. Cette modalité
de prélèvement (dit aussi "après arrêt cardiaque
contrôlé" c’est-à-dire que le prélèvement est réalisé dans
le cadre d'une interruption des soins de réanimation)
représente un espoir non négligeable de voir augmenter
le nombre de greffons disponibles. En effet, le dispositif,
Maastricht III représentait en 2011 19 % des prélèvements
réalisés sur donneurs décédés en Belgique, 38 % au
Royaume-Uni et 51 % aux Pays-Bas.
Maastricht III représente une opportunité extraordinaire, à
la seule condition que toutes les garanties éthiques soient
prises. Avec cette modalité, nous sommes en effet "sur le
fil de l’éthique" et cette autorisation suscite des craintes
légitimes, notamment celles d’une instrumentalisation du
corps humain, d’une accélération dans l’arrêt des soins,
enfin d’une "euthanasie utilitaire".
Des garde-fous existent, comme la loi Léonetti qui précise
les conditions de collégialité et de transparence de la
décision d’arrêt des traitements dans les cas où le patient
est inconscient. A ces garanties éthiques, formalisées en
2005, s’ajoute un rapport de l’Agence de la biomédecine
qui servira de support aux expérimentations menées en
France. Son objectif prioritaire est de distinguer à tout
prix l’activité de réanimation de celle de prélèvement.
Concrètement, l’équipe de réanimation prend seule, en
accord avec la famille et les proches et indépendamment
des équipes de prélèvement, la décision d’arrêter les
thérapeutiques actives. Ce n’est que lorsque cette décision
est prise que se pose la question du don d’organes. A cette
condition indispensable, s’ajoute pour la gouvernance
de la FNAIR, le besoin d’un accompagnement véritable
de la famille, avant, pendant et après la décision d’arrêt
des soins. Trop souvent, il est recueilli le témoignage de
l’entourage de personnes décédées (à qui il avait été posé
la question de la position du défunt par rapport au don
d’organes) et qui ont vécu cet instant comme expéditif
et psychologiquement violent. Oui, les textes proclament
la possibilité de "l’accord de la famille et des proches"
mais c’est une condition minimale ! Une approche
professionnelle avec un personnel formé à l’écoute,
à la psychologie, à la bienveillance et à une forme de
"diplomatie" dés l’entrée d’un patient dans le service de
réanimation, et non lorsque celui-ci est identifié comme
donneur potentiel devrait permettre de voir diminuer le
taux de refus de don qui est en France, avec 32 %, l’un
des plus hauts en Europe.
EPO : des nouvelles rassurantes
L’intégration de l’EPO – érythropoïétine – dans les forfaits
de dialyse était l’an dernier, vous vous en rappelez, un
sujet d’inquiétude pour bon nombre de patients dialysés,
craignant une dégradation dans la prise en charge de leur
anémie. Rapidement, les associations de patients avaient
obtenu que soit mis en place un dispositif de surveillance
des prescriptions d’EPO. Six mois après la création de ce
dispositif, les premiers résultats nous ont été présentés
lors d’une réunion de suivi et l’on n'observe aucune
diminution de la qualité des traitements de l’anémie, avec
toujours autant de patients dont les taux d’hémoglobine
se trouvent dans les cibles thérapeutiques qui ont été
amenées entre 9 et 12 g/dl lorsque les précédentes étaient
de 10 à 13 g/dl. Ajoutons que l’intégration de l’EPO dans
les forfaits de dialyse a permis de faire baisser les tarifs
d’achat de l’érythropoïétine de l’ordre de 8 %. Même si
nos efforts de vigilance doivent se poursuivre, on peut
être rassuré par ces informations suivant les critères
d’analyse actuels. Lors de la réunion de suivi, il a été
décidé de poursuivre les actions de surveillance de cette
intégration du prix de l’EPO dans les forfaits de dialyse et
de se retrouver dans un an pour une nouvelle réunion de
suivi avec des critères d’analyse élargis.
Parcours de soins :
les associations de patients en première ligne
Suite aux saisines de la HAS – Haute Autorité de Santé
– faites en juillet dernier par la FNAIR et Renaloo, la HAS
vient de confier aux deux associations la charge de rédiger
le socle d’annonce et d’information qui permettra aux
patients de faire un choix libre et éclairé (en concertation
avec son néphrologue) concernant ses modalités de
traitement. Cette demande était une des recommandations
majeures des Etats Généraux du Rein (EGR). Soulignons
que c’est la première fois qu’une telle charge est confiée
à des associations de patients, signe de la confiance qui
est faite quant à notre expertise et notre représentativité.
Dans le monde de la néphrologie, que l’on taxe parfois
d’immobilisme, le document
qui sera dans les prochains
mois rédigé marquera une
avancée significative vers une
amélioration de la qualité de
vie des patients. Une qualité
qui passe en effet à la fois par
des garanties concernant la
qualité des traitements, une
meilleure autonomie et une
augmentation des sources
de greffons disponibles
permettant l’accès à la
transplantation au plus grand
nombre...
Roger Charlier
Président de la FNAIR