statistiques pour statophobes

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Statistiques
pour
statophobes
Une introduction au monde des tests statistiques
à l'intention des étudiants qui n'y entravent que pouic
et qui détestent les maths par dessus le marché
Denis Poinsot
2004
La libre reproduction et la diffusion de ce document sont non seulement autorisées mais les bienvenues du
moment qu'elles sont réalisées dans un but pédagogique et non lucratif.
Pour citer ce document :
D. Poinsot, 2004. Statistiques pour statophobes. [en ligne : http://perso.univ-rennes1.fr/denis.poinsot]
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Ce petit livre est dédié avec reconnaissance à René Merckhoffer,
mon extraordinaire prof de maths de classe de seconde au lycée des
sept mares d'Elancourt en 1982, pour son humour pince sans rire,
mais surtout pour avoir réussi à m'arracher même très
momentanément du fond de l'abîme mathématique dans lequel
j'avais sombré sans espoir de revoir la lumière du jour. S'il n'avait pas
été là au bon moment je n'aurais tout simplement pas pu faire d'études
scientifiques.
DP
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Avant Propos
Je suis biologiste, et non statisticien. Circonstance aggravante, j'ai collectionné les mauvaises
notes en mathématiques sans interruption à partir de la classe de 5ème, litanie interrompue
seulement par l'obtention d'une thèse de doctorat en biologie évolutive1. Je pense donc être
idéalement qualifié pour expliquer les bases des méthodes statistiques aux étudiants en
biologie réfractaires aux maths. Si vous voulez bien mettre de côté une incrédulité très
naturelle à ce stade de votre lecture, vous réaliserez que cela n'est peut être pas si idiot que ça
en a l'air. Bien sûr, les manuels d'introduction aux statistiques pullulent, rédigés par de
véritables bio-mathématiciens et statisticiens infiniment plus doués que moi dans leur
discipline. Et c'est justement le problème. Malgré toute leur science, mes chers collègues
(dont j'envie sincèrement les compétences) ne pourront jamais se mettre complètement à la
place d'un étudiant ne comprenant rien aux maths, parce que, anciens étudiants "matheux", ils
n'ont jamais connu cette humiliante expérience eux-mêmes. Moi, si. J'y suis même
régulièrement confronté chaque fois que je me heurte durement aux étroites limites de mon
savoir dans cette discipline. Je sais tout de la frustration, voire de la rage que l'on peut
ressentir face à l'"explication" d'une méthode dont on a besoin pour analyser ses résultats,
mais que le manuel décrit uniquement dans un langage mathématique pur et dur. Soyons
clairs, je ne blâme évidemment pas les mathématiciens pour l'utilisation d'un langage
symbolique précis et rigoureux, il est indispensable à leur discipline. Je souhaiterais
cependant qu'ils essayent davantage de comprendre que le pékin moyen ne lit pas cette langue
couramment.
Lorsque j’ai eu à enseigner pour la première fois sans bénéficier de la présence rassurante
d’un collègue expérimenté, j’étais un étudiant en fin de thèse très heureux de faire de la
biologie, ma passion depuis aussi longtemps que je me souvienne d’avoir été à l’école. Bien
entendu, je devais utiliser les méthodes d’analyse statistique pour les besoins de ma recherche,
mais mon directeur de thèse, chercheur au CNRS, m’apportait alors tout son soutien et sa
vaste expérience. J’utilisais en fait à l’époque les techniques statistiques avec la foi enfantine
d’un homme des cavernes regardant dans un microscope. Je savais en gros que lorsque mon
test révélait que « P < 0,05 » il y avait un effet significatif dont je pouvais discuter, et que
sinon je devais tristement m’abstenir de conclure. Or donc, j'eus la chance d'obtenir un contrat
d'enseignement de un an pour finir ma thèse. C’est alors qu’on m’annonça que j’allais y
assurer des travaux dirigés de... probabilités et statistiques, à des étudiants de première année.
Je me souviens encore de la sensation que tout mon sang venait de se congeler dans mes
1 Une fois que vous êtes docteur, plus personne n'ose mettre en doute vos compétences en mathématiques en
vous obligeant à passer des examens écrits. C'est un des multiples avantages de notre beau métier.
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veines. Cependant, les prouesses dont l’être humain est capable lorsqu’il ne peut fuir et que le
combat est la seule issue sont ritablement étonnantes. Je parvint en effet à assurer les
séances prévues, en les préparant évidemment frénétiquement, physiquement malade de
terreur avant chaque TD, et totalement épuisé à la fin. Et à ma grande surprise, je me mis à
comprendre des choses qui m’étaient pourtant passées des kilomètres au dessus de la tête
lorsque j’étais étudiant..
Un an plus tard (c'était vers la fin du XXème siècle), recruté à l’université de Rennes comme
maître de conférences (en biologie et non en stats, est il besoin de le préciser ?), j'ai eu a
nouveau l'opportunité d'enseigner les biostatistiques de base, cette fois à des étudiants de
maîtrise de biologie devant les utiliser pour analyser des données de terrain. J’ai alors pris une
folle décision : écrire pour ces étudiants le manuel de stats que j’aurais aiavoir lorsque
j’étais moi même traumatisé par cette matière maudite. Le résultat est entre vos mains.
J’espère que ce petit ouvrage vous sera utile et même qu’il vous plaira, parce que je pense
honnêtement qu’il est différent de beaucoup d’autres livres de stats. J’en ai tant bavé2 pour
comprendre le peu que je sais dans cette discipline, que j’ai soigneusement évité les
"explications" telles que : « soit (
, F, p) un espace probabilisé modélisant une espérance
finie » qui m’ont toujours donné envie de posséder un lance flammes. Ce livre est donc écrit
en français normal. Il contient même nombre de remarques plus ou moins saugrenues, parce
que je suis viscéralement incapable de résister à l’envie de dire (et d'écrire) des bêtises, juste
pour rire. Depuis sa première version, imprimée sous forme de polycopié en octobre 1998, et
profondément remaniée cet été, cet ouvrage a été testé par environ 900 étudiants de maîtrise,
qui l’ont utilisé pour analyser leurs données de terrain. Quelques uns ont eu la gentillesse de
m’en dire du bien. Quasiment tous m’ont fait remarquer que je parlais trop. Ils ont
évidemment raison (au moins sur le second point). Je vous invite donc à tourner la page.
Denis Poinsot,
Rennes le 11 octobre 2004
2 et je suis poli.
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1.
Pourquoi des stats en biologie?
Karl-Heinz vonVölapuk vous êtes directeur de production du groupe Bercedes Mens pour
toute l’Eurasie.
Rigoureusement exact.
Pourriez vous nous dire quel est le poids total de votre dernier modèle décapotable 450 C ?
Le poids total de notre modèle 450 C, réservoirs vides, est de 1251 kg exactement.
Et comment cela se compare t–il avec les caractéristiques de sa principale rivale ?
Je présume que vous faites référence à la WMB 3.0i?
Bien entendu.
Et bien notre voiture pèse précisément 47kg de moins que sa concurrente, qui atteint en
effet 1298kg dans les mêmes conditions.
Peut on en conclure que la Bercedès-Mens 450 C est plus légère que la WBM 3.0i ?
C’est l’évidence même.
Karl-Heinz vonVölapuk, je vous remercie.
Tout le plaisir a été pour moi.
Que de précision, que de rigueur… « Ah ces Allemands tout de même ! » direz vous d’un air
admiratif. Peut être, cependant tout constructeur automobile n’aurait eu aucune peine à faire le
même genre de réponse ferme et définitive. Avant d’analyser pourquoi, voyons d’abord un
dialogue identique au précédent dans sa structure, mais en fait fondamentalement différent…
Robert Lebouvier vous êtes l’expert mondial incontesté de la race bovine charolaise.
C’est ce qu’on dit.
Pourriez vous nous dire combien pèse un taureau Charolais de trois ans ?
Eh bien, disons… entre 800 kg et 1,2 tonnes à peu près, mais certains arrivent même à être
encore plus gros. Ils sont plus légers bien sûr si la pâture n’a pas été bonne, et puis il faut
savoir qui étaient le père et la mère hein, parce que la génétique…
Heu… oui… bien…, et comment ces résultats peuvent ils se comparer avec ceux de la race
Holstein ?
Les taureaux Holstein font plutôt 700kg à 1 tonne mais encore ça dépend du type
d’élevage et de l’alimentation qui…
Certes, mais alors peut on dire que les taureaux Holstein sont plus légers que les taureaux
Charolais ?
Ben… en général peut être… quoique si par exemple vous prenez « Lulu le Tarbais », qui
a été primé au dernier salon de…
Je vois. Le temps qui nous était imparti touche hélas à son terme, merci beaucoup pour
cette intervention, et maintenant une page de publicité.
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