Corrélation radio-chirurgicale des otospongioses M Benbakh1 (mohamedbenbakh at gmail dot com) #, T Oubahmane1, N Moussali2, A Gharbi2, S Rouadi1, R Abada1, M Roubal1, M Mahtar1 1 Service d’ORL et chirurgie cervico-faciale, hôpital 20 août Casablanca, Morocco. 2 Service de radiologie, hôpital 20 août Casablanca, Morocco # : auteur correspondant DOI //dx.doi.org/10.13070/rs.fr.1.1175 Date 2014-11-10 Citer comme Research fr 2014;1:1175 Licence CC-BY Résumé L’otospongiose est une ostéodystrophie primitive de la capsule otique trouvant son origine dans des restes cartilagineux labyrinthiques ; c’est la plus fréquente des dystrophies de l’os temporale. La place de l’exploration radiologique dans la prise en charge de l’otospongiose est devenue déterminante depuis l’avènement de la tomodensitométrie spiralée en coupes fines et de ses perfectionnements. Le but de notre travail est d’étayer l’apport de la TDM dans le diagnostic des otospongioses au cours des surdités de transmission. English Abstract Otosclerosis is a primary osteodystrophy of the otic capsule. It is the most common etiology of transmission deafness with normal tympanum. The place of radiological exploration in the management of otosclerosis has become crucial since the advent of spiral CT in fine sections and its developments. The aim of our study is to support the contribution of CT in the diagnosis of otospongioses. Introduction L’otospongiose est une ostéodystrophie primitive de la capsule otique trouvant son origine dans des restes cartilagineux labyrinthiques ; c’est la plus fréquente des dystrophies de l’os temporale. La place de l’exploration radiologique dans la prise en charge de l’otospongiose est devenue déterminante depuis l’avènement de la tomodensitométrie spiralée en coupes fines et de ses perfectionnements [1]. Elle apporte des éléments aussi bien pour le diagnostic positif que pour le diagnostic différentiel ainsi que des renseignements sur l’environnement anatomique utiles au chirurgien. Le but de notre travail est d’étayer l’apport de la TDM dans le diagnostic des otospongioses au cours des surdités de transmission tout en précisant la classification scannographique de l’otospongiose ainsi que les éléments importants à décrire dans le compte rendu du scanner tout aussi important pour le chirurgien. [agrandir] Figure 1. TDM en coupes axiales : otospongiose stade 1b de Veillon. Patients et méthodes Il s’agissait d’une étude prospective dont l’échantillon est constitué de 40 patients ayant été opérés dans le service d’otorhinolaryngologie et de chirurgie cervico-faciale de l’Hôpital 20 Aout ; CHU Ibn Rochd de Casablanca entre Janvier 2011 et Décembre 2012 pour suspicion d’otospongiose ou une surdité à composante transmissionnelle sans étiologie évidente et pour laquelle ils ont bénéficié d’un examen tomodensitométrique préalable et opérés de première main. [agrandir] Figure 2. TDM en coupes axiales : otospongiose stade 3 de Veillon. Nous avons réalisé une corrélation entre les différents résultats tomodensitométriques et les constatations chirurgicales, en se basant sur le calcul de la sensibilité (Se), de la spécificité (Sp), de la valeur prédictive positive (VPP) et de la valeur prédictive négative (VPN) relative à chacune des structures anatomiques étudiées. Résultats L’âge moyen était de 39 ans avec des extrêmes allant de 17 ans à 61 ans. Le sex ratio était de 3 femmes /2 hommes. L’hypoacousie était le symptôme dominant, présent chez tous les malades, vient ensuite les acouphènes chez 29 patients. L’examen otoscopique du CAE et du tympan était normal chez tous les patients. Parmi les patients hospitalisés pour prise en charge d’une otospongiose, 26 avaient une surdité de transmission tandis que les 14 autres avaient une surdité mixte. La perte auditive moyenne est entre 40 et 60 dB chez plus de la moitié des patients avec un Rinne audiométrique entre 20 et 40 dB pour leur majorité. [agrandir] Figure 3. TDM en coupes axiales : otospongiose stade 4a de Veillon. Tous nos patients ont bénéficiés d’un scanner du rocher, les explorations sont effectuées dans les plans de référence pour l’étude du rocher. Des reconstructions sont éventuellement réalisées à partir de coupes axiales jointives. L’épaisseur des coupes est réduite à une valeur millimétrique avec un intervalle de coupe de 0.6mm. Parmi les 40 scanners réalisés pour cette indication, 31 ont montré des foyers hypo denses évocateurs d’otospongiose (Figures 1,2,3), nous avons reparti les différentes images d’otospongiose en se référant à la classification de Veillon (Figure 4). [agrandir] Figure 4. Répartition des patients selon la classification de Veillon chez les 31 patients dont la TDM a objectivé un foyer otospongieux. L’exploration peropératoire a trouvé des foyers d’otospongiose dans 36 cas, lyse de l’enclum dans 1 cas, tympanosclérose dans 1 cas et absence de tout foyer otospongieux dans 2 cas. La TDM a montré une sensibilité de 86.11% et une spécificité de 100% pour le diagnostic d’otospongiose avec une VPP à 100% et une VPN à 44.4%. Discussion La TDM est l’examen radiologique de choix à demander devant une surdité de transmission à tympan normal. Son apport dans l’otospongiose n’est plus à démontrer ; elle permet en plus de confirmer le diagnostic par la mise en évidence de foyers otospongieux de : • Montrer l’étendue des lésions • Participe au pronostic • Précise les conditions anatomiques de la chirurgie Les aspects tomodensitométriques de l’otospongiose varient en fonction de la phase évolutive [1] [2]. Le foyer otospongieux actif (vacuolisation par résorption osseuse et colonisation vasculaire de la couche moyenne) se caractérise par une hypodensité circonscrite limitée en un ou plusieurs points de la capsule otique. Le siège de prédilection est la fissula antefenestram, reliquat fibro-cartilagineux embryonnaire le plus constant situé sur la berge antérieure de la fenêtre ovale. Les foyers préplatinaires (70 à 90 % des cas) [2] atteignent ou respectent l’insertion de la branche antérieure de l’étrier sur la platine, se développent vers le promontoire, la fosse ovale ou l’endoste vestibulaire ou cochléaire. Plusieurs classifications scannographiques des foyers otospongieux ont été proposées, celle de Veillon étant la plus utilisée : [3] Type I a: Epaississement isolée de la platine, hypodense, irrégulier et sans hypodensité préstapédienne associée Type I b: hypodensité pré-stapédienne inférieure ou égale à 1 mm . Absence d’extension à la couche labyrinthique moyenne antérieure Type II : Hypodensité préstapédienne supérieure à 1 mm sans contact avec la périphérie de la lumière cochléaire. Type III: Hypodensité préstapédienne supérieure à 1 mm au contact de la périphérie de la lumière cochléaire Type IV a: Hypodensité située en avant, au-dessous et en dedans de la lumière cochléaire. C’est à partir de cette forme que l’on peut être certain qu’il y a une atteinte labyrinthique Type IV b: Hypodensité labyrinthique postérieure située autour des canaux semi circulaires ou au contact de la partie médiale du vestibule. Dans notre étude le scanner des rochers est un examen de fiabilité moyenne pour le diagnostic d’otospongiose avec une sensibilité et une spécificité respectives de 86.11% et 100%. LAGLEYRE [4] Sur une série de 209 cas sélectionnés entre Septembre 2004 et Septembre 2006 rapporte une sensibilité du scanner dans l’otospongiose de 95,1%, D’autres auteurs rapportent des résultats similaires [5] [6]. Ainsi, dans notre série la TDM est aussi spécifique mais moins sensible pour diagnostic d’otospongiose par rapport aux données de la littérature puisque la plupart des auteurs rapportent une sensibilité diagnostique proche de 90% et une spécificité d’environ 100%. Cela s’explique par le fait que 5 cas d’otospongiose confirmée lors de la chirurgie n’étaient pas dépistés au scanner, soit 12.5 % de la totalité des otospongioses. Ces faux négatifs du scanner constituent dans la littérature environ 10% des otospongioses chirurgicales [5]. Ils correspondent en partie aux formes infra radiologiques (type 0 de VEILLON). Ce sont des formes débutantes d’otospongiose, plus fréquemment unilatérales, pour lesquelles la technique chirurgicale doit être particulièrement minutieuse en raison d’une plus grande fragilité de la platine [6]. Dans notre étude les erreurs de lecture liés à l’expérience des radiologues ainsi que certains contraintes techniques expliquent vraisemblablement pourquoi la prévalence de faux négatifs (otospongiose infraradiologique) est élevée par rapport aux données de la littérature. Conclusion Le diagnostic positif d'otospongiose en imagerie repose sur la recherche de foyers d'ostéodystrophie et l'analyse de la platine. Le bilan initial recherche des arguments pour le diagnostic positif ou un diagnostic différentiel et réalise un bilan anatomique permettant de prévoir certaines difficultés chirurgicales (fosse ovale, canal du facial). 1. Références Thomassin JM, Collin M, Bailhache A, Dessi P, Rodriguez F, Varoquaux A, Otospongiose. Encycl Med Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS), oto-rhino-laryngologie 20-195-A-10; 2010. 2. 3. 4. 5. 6. Mudry A, Politzer A. Adam Politzer (1835-1920) and the description of otosclerosis. Otol Neurotol. 2006;27:27681 pubmed Veillon F, Stierle J, Dussaix J, Ramos-Taboada L, Riehm S. [Otosclerosis imaging: matching clinical and imaging data]. J Radiol. 2006;87:1756-64 pubmed Lagleyre S. Otospongiose: données actuelles, Université Paul Sabatier (Toulouse). Faculté des sciences médicales Purpan. 2007. Shin Y, Deguine O, Cognard C, Sevely A, Manelfe C, Fraysse B. [Reliability of CT scan in the diagnosis of conductive hearing loss with normal tympanic membrane]. Rev Laryngol Otol Rhinol (Bord). 2001;122:814 pubmed Emile S, Deguine O, Julian E, Bonafe A. Surdités de transmission atypiques a tympans normaux : A propos de 478 cas. Journal français d'oto-rhino-laryngologie. 1996:45(5):341-4.