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Janvier-Février 2016 VOL 80 MCED www.mced.fr
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vant atteindre 30 µg/l (90 mUI/l). Selon
les recommandations d’une Réunion de
Consensus en 2000 [20] et celles de
l’Endocrine Society publiées en 2014
[21], lorsqu’on suspecte une acroméga-
lie, un dosage de GH basal et un dosage
d’IGF-I doivent être pratiqués. Si la
concentration de GH est inférieure à
0,4 µg/l (1,2 mUI/l) et celle d’IGF-I est
normale, l’acromégalie est éliminée. Si
elle est supérieure 0,4 µg/l (1,2 mUI/l)
et/ou que l’IGF-I est augmentée, une
HGPO doit être pratiquée. Si la valeur
la plus basse (nadir) de GH au cours
de l’HGPO est inférieure à 1 µg/l (3
mUI/l), l’acromégalie est éliminée. Si
elle reste supérieure à 1 µg/l (3 mUI/l),
l’acromégalie est confirmée. En fait,
l’utilisation de dosages très sensibles
de la GH devrait conduire dans l’ave-
nir à abaisser encore le seuil diagnos-
tique à 0,9 mUI/l (0,3 µg/l) voire moins
[18]. Rappelons cependant que le plus
souvent, les concentrations de GH, tant
basales que sous HGPO, sont élevées et
que le diagnostic est évident [22].
De manière paradoxale, l’HGPO peut
stimuler la sécrétion de GH (10 % des
acromégales).
Dosage d’IGF-I
Les dosages d’IGF-I doivent main-
tenant être calibrés vis à vis du stan-
dard international IS 02/254 [19 , 23].
La concentration d’IGF-I augmente
de façon parallèle au log de la concen-
tration de GH. Elle doit être appréciée
selon des normes établies en fonction
de l’âge (l’IGF-I diminue avec l’âge).
La grossesse et la puberté ainsi que la
période post-pubertaire s’accompagnent
de concentrations élevées d’IGF-I. La
concentration d’IGFBP3, la principale
protéine porteuse des IGF, est habituel-
lement augmentée chez les acromégales
mais ce dosage apporte peu d’éléments
diagnostiques complémentaires.
Tests de stimulation
Certains patients (jusqu’à 50%) aug-
mentent leur concentration de GH après
TRH et/ou GnRH. Ces tests n’apportent
rien au diagnostic de la maladie. La
réponse à la GHRH n’a pas non plus d’in-
térêt.
Recherche d’un hypercorticisme
Chez certains patients, même si le
mode de découverte est un syndrome
tumoral hypophysaire, le tableau cli-
nique, pourvu qu’on en ait un peu l’habi-
tude, est évident : le patient a clairement
un syndrome de Cushing. En revanche,
chez d’autres, le diagnostic peut être plus
hésitant ou le tableau clinique absent, rien
n’évoquant alors, cliniquement, un hyper-
corticisme. C’est le cas des adénomes cor-
ticotropes dits silencieux [24-34].
Chez certains patients c’est même
l’analyse immunocytochimique de la
tumeur opérée qui permet de faire le dia-
gnostic d’adénome corticotrope sans qu’il
y ait d’évidence de sécrétion périphérique
d’ACTH et de cortisol et d’hypercorticisme
clinique. L’aspect de l'adénome à l'IRM
avec la présence de microkystes multiples
sur la séquence T2 permet parfois, même
en l'absence de tableau clinique franc d'hy-
percorticisme, de suspecter un éventuel
adénome corticotrope silencieux [35].
Mise en évidence de la sécrétion
excessive de cortisol [36-40]
Le dosage plasmatique du cortisol
matinal est peu utile (chevauchement des
valeurs normales et de celles rencontrées
dans le syndrome de Cushing). Une corti-
solémie normale le matin n’élimine pas le
diagnostic.
La mesure du cortisol libre urinaire
(CLU) est l’examen de choix car elle per-
met d’apprécier indirectement la quan-
tité de cortisol produite sur l’ensemble du
nycthémère (mesure réalisée sur plusieurs
jours consécutifs car la sécrétion peut être
fluctuante d’un jour à l’autre). Néanmoins
certains macroadénomes peu sécrétants
peuvent s’accompagner d’une cortisolurie
des 24 heures normale ou encore le pré-
lèvement être insuffisant : une cortisolu-
rie normale n’élimine donc pas non plus le
diagnostic de macroadénome corticotrope.
Le dosage du cortisol à minuit,
moment où la concentration est physiolo-
giquement minimale, est plus discrimina-
tif que le dosage de cortisol le matin, mais
il ne peut être réalisé que dans le cadre
d’une hospitalisation. Une cortisolémie à
minuit < 18 ng/mL (50 nmol/L) élimine un
hypercorticisme ; à l’inverse, une cortiso-
lémie à minuit > 72 ng/mL (200 nmol/L)
l’affirme. De plus en plus de centres pro-
posent la réalisation d’un cortisol salivaire
à minuit, qui a l’avantage de pouvoir être
fait en ambulatoire mais n’est pas actuelle-
ment remboursé par l’Assurance Maladie.
Finalement, le moyen le plus simple de
faire le diagnostic d’hypercorticisme, même
dans le cadre d’un macroadénome peu secré-
tant ou silencieux, est certainement le test de
freinage minute qui peut même être réalisé en
ambulatoire.
La cortisolémie est mesurée le matin
entre 6 et 8 heures après la prise orale de 1 mg
de dexaméthasone la veille à 23 h.
Ce test permet de dépister la très grande
majorité des syndromes de Cushing (grande
sensibilité) mais sa spécificité est moins satis-
faisante, des faux positifs (c’est-à-dire une
absence de freinage) survenant chez 10 à
20 % des sujets indemnes de syndrome de
Cushing.
Le seuil de cortisol au-delà duquel le
test de freinage est considéré comme positif
(en faveur du diagnostic) est 18 ng/mL (50
nmol/L) qui offre une excellente sensibilité,
même si sa spécificité (c’est-à-dire le nombre
de personnes saines considérées comme
malades par le test) est moins bonne, ce qui
se justifie dans la logique du dépistage.
Le test de freinage minute à la dexamé-
thasone est le plus simple des tests de dépis-
tage du syndrome de Cushing et sera proposé
de première intention. Il est particulièrement
utile pour éliminer un syndrome de Cushing
devant des signes non spécifiques.
Chez des patients observants, on peut
envisager de réaliser en première intention
le dosage du CLU. Dans les autres cas, on
réservera cette investigation aux patients non
répondeurs lors du test du freinage minute.
Enfin on doit aussi penser à l’adénome
corticotrope silencieux en cas de persis-
tance d’un cortisol normal alors que les
autres fonctions hypophysaires sont défici-
taires [25, 31].
Rappelons les précautions indispen-
sables à l’interprétation d’un dosage de cor-
tisol plasmatique : le patient ne doit pas être
sous traitement responsable d’une induc-
tion enzymatique, en particulier, estro-
gènes administrés par voie orale (pilule
estroprogestative ou traitement hormonal
de la ménopause), antiépileptiques… qui
majorent artificiellement la cortisolémie.