Les apoplexies hypophysaires - Pituitary apoplexia

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Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (IX), n° 6, novembre/décembre 2005
Urgences
en endocrinologie, diabétologie
et maladies métaboliques
en endocrinologie, diabétologie
et maladies métaboliques
Les apoplexies hypophysaires
Pituitary apoplexia
C. Cortet-Rudelli*
Définition
L’apoplexie hypophysaire est définie
par la survenue d’un remaniement
nécrotico-hémorragique massif au
sein d’un adénome hypophysaire.
Considérée comme une urgence, sa
fréquence reste rare (0,6 à 5 % des
patients opérés pour une pathologie
hypophysaire). Le plus souvent,
l’apoplexie constitue la manifes-
tation inaugurale d’un adénome
méconnu, mais elle peut également
compliquer un adénome connu.
Tous les adénomes peuvent être
concernés par la survenue d’une
apoplexie, avec un risque équi-
valent, qu’ils soient sécrétants
ou non et quel que soit le type de
sécrétion.
Étiologies
De nombreux facteurs favorisants
sont décrits dans la littérature. Il
s’agit :
De l’existence d’une HTA non
traitée ou mal équilibrée. Elle est
retrouvée dans 13 à 25 % des cas.
Du rôle des tests de stimulation
hypophysaire (TRH, GnRH, CRH).
Il a été bien identifié ces dernières
années, et la réalisation des tests de
stimulation hypophysaire est contre-
indiquée dans les macroadénomes
invasifs proches des voies optiques.
Des traitements par analogues de
GnRH ou par citrate de clomiphène,
qui ont également été incriminés.
Du collapsus hémorragique, de
l’utilisation d’anticoagulants ou
d’antiagrégants plaquettaires, de
thrombolytiques ou l’existence de
troubles de la coagulation qui sont
parfois associés à une hémorragie
intra-adénomateuse.
De l’hypertension intracrânienne,
des traumatismes crâniens, de l’injec-
tion de gadolinium ou de produits
de contraste, de la grossesse. Le rôle
potentiel des agonistes dopaminer-
giques est controversé.
Cependant, le plus souvent, l’en-
quête étiologique ne permet pas
d’identifier de facteurs favorisants.
Présentation clinique
Le plus souvent, le tableau est aigu :
Les céphalées retrouvées dans
plus de 90 % des cas sont d’instal-
lation brutale, sévères, peu ou non
calmées par les antalgiques usuels.
Des altérations de la conscience de
sévérité variable (de l’obnubilation
au coma profond) sont associées
dans 10 à 30 % des cas.
Les troubles visuels sont fréquents.
Les altérations du champ visuel,
conséquences d’une compression
du chiasma et/ou des nerfs optiques
par la masse hypophysaire, sont
présentes dans 60 à 70 % des cas.
L’existence d’une diminution de
l’acuité visuelle, présente dans 55
à 65 % des cas, est une urgence
chirurgicale.
Les paralysies oculomotrices,
conséquences d’une compression ou
d’un envahissement d’un ou – plus
rarement – des deux sinus caver-
neux, sont retrouvées dans 30 à
70 % des cas. L’atteinte du IIIenerf
crânien est la plus fréquente, mais
sont également décrites des atteintes
du IVe,du VIe,plus rarement du
Venerf crânien.
L’existence d’une fièvre (20 % des
cas), de nausées, voire de vomisse-
ments, d’une photophobie, d’une rai-
deur méningée peut faire évoquer le
diagnostic de méningite ou d’hémor-
ragie cérébroméningée.
Des troubles généraux (vasoplégie,
troubles du rythme cardiaque, troubles
respiratoires) correspondant à des
lésions hypothalamiques sont décrits
dans les formes les plus sévères.
Plus rarement, le remaniement,
même massif, peut être peu ou non
symptomatique et la lésion révélée
par des troubles visuels d’installa-
tion progressive, par des céphalées
modérées, intermittentes ou d’allure
migraineuse, par des manifestations
cliniques d’une éventuelle sécrétion
par la lésion adénomateuse ou d’un
hypopituitarisme.
Les données biologiques
Examens biologiques standard :
L’existence d’une hyponatrémie
est fréquente au cours de l’apo-
plexie (un tiers des observations
dans notre expérience).
La mise en évidence d’une élé-
vation du taux de CRP ne doit pas
égarer vers un processus infectieux.
L’examen du liquide céphalo-rachi-
dien, lorsqu’un syndrome méningé
clinique conduit à la réalisation d’une
ponction lombaire, peut montrer
l’existence d’une hyperprotéinora-
chie et d’anomalies de la cytologie
sans hypoglycorachie.
* Service d’endocrinologie et maladies méta-
boliques, CHRU de Lille.
Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (IX), n° 6, novembre/décembre 2005
L’existence d’au moins un déficit
antéhypophysaire est quasi constante.
Dans notre expérience, 90 % des
patients présentent un déficit corti-
cotrope (cortisol plasmatique à 8 h
abaissé ou dans les valeurs basses
de la normale dans un contexte de
stress,ACTH plasmatique à 8 h nor-
male ou basse).
Le déficit thyréotrope est fréquent
(75 % des cas). Le diagnostic repose
sur le dosage plasmatique de FT4
réalisé après correction du déficit
corticotrope (diminution de FT4 alors
que le taux de TSH us est normal,
diminué ou très discrètement aug-
menté).
95 % des patients dont l’axe gona-
dotrope est évaluable ont un déficit
gonadotrope.
Une hyperprolactinémie modérée
(< 100 ng/ml) est retrouvée dans un
quart des cas. Elle traduit le plus
souvent une hyperprolactinémie de
déconnexion. Une concentration
plasmatique de PRL supérieure à
250 ng/ml est en faveur d’un macro-
prolactinome remanié.
L’existence d’un diabète insipide
est tout à fait exceptionnelle.
Les données
morphologiques
Un scanner, demandé en urgence
devant les céphalées, montre le plus
souvent l’existence d’une hyper-
densité spontanée au sein de la loge
sellaire et de la citerne optochias-
matique.
Le diagnostic repose sur l’IRM qui
confirme l’existence d’un processus
expansif de la loge sellaire, envahis-
sant la citerne optochiasmatique,
beaucoup plus rarement le sinus
sphénoïdal, avec extension latéro-
sellaire variable.
L’existence d’un hypersignal T1,
prédominant parfois à la périphérie
de la lésion, et/ou d’un hyposignal
T2 est en faveur d’un remaniement
de type hémorragique. Chez certains
patients, un aspect dit “de niveau
liquide” peut être mis en évidence
sur les clichés sagittaux ou axiaux
par visualisation d’une portion supé-
rieure en hypersignal en pondéra-
tion T1 et T2 (surnageant xantho-
chromique) et d’une portion inférieure
en isosignal T1 et en hyposignal T2
franc (sédiment riche en hémosi-
dérine, produit de dégradation de
l’hémoglobine).
La mise en évidence d’un hypo-
signal en T1 et d’un hypersignal T2
est en faveur d’un remaniement de
type nécrotique.
L’association de remaniements de
type nécrotique et hémorragique est
décrite chez certains patients. Les
remaniements peuvent être uni- ou
plurifocaux.
Après injection de gadolinium, il
existe un rehaussement périphé-
rique “en couronne” dans les adé-
nomes remaniés de manière glo-
bale. En cas de remaniement partiel,
une prise de contraste est observée
au niveau des portions charnues de
l’adénome. Un rehaussement de la
dure-mère du jugum et de l’étage
antérieur peut parfois être observé.
Enfin, l’existence au niveau de la
paroi du sinus sphénoïdal d’un
hyposignal T1, d’un hypersignal
T2, régulier, en cadre, rehaussé
après injection de gadolinium, est
fréquente (37 % des patients de
notre série) et correspond à l’exis-
tence de remaniements inflamma-
toires contemporains de la phase
aiguë. Dans les formes les plus
sévères, l’existence d’hématomes
frontaux est rapportée.
Conduite thérapeutique
L’apoplexie est une urgence endo-
crinienne.
Le traitement médical repose sur :
La mise en route, en urgence,
d’un traitement par hémisuccinate
d’hydrocortisone en continu par
voie veineuse à la pompe (posologie
moyenne initiale chez l’adulte de
200 mg/24 h), sans attendre les
résultats d’un dosage de cortiso-
lémie compte tenu de la grande fré-
quence du déficit corticotrope à la
phase aiguë.
L’association de ce traitement
aux antalgiques intraveineux et à la
réanimation hydroélectrolytique peut
permettre d’observer une évolution
clinique rapidement favorable.
La compensation du déficit thy-
réotrope éventuel fait appel à la T4
per os.
L’existence de troubles sévères de
la conscience ou d’une diminution
de l’acuité visuelle conduit à une
intervention chirurgicale en urgence
(décompression par abord transphé-
noïdal).
L’absence d’amélioration rapide
des troubles de conscience ou des
céphalées sous l’effet du traitement
médical, la persistance d’une atteinte
d’un ou de plusieurs nerfs crâniens,
sans aucun élément clinique en faveur
d’une récupération lors de la sur-
veillance réalisée les premiers jours
suivant l’épisode aigu, conduisent
également à réaliser une interven-
tion chirurgicale.
Celle-ci peut enfin être retenue s’il
existe un doute diagnostique (abcès,
métastase nécrosée dans un contexte
néoplasique).
Si un traitement par agoniste dopami-
nergique peut être proposé dans les
macroprolactinomes massivement
remaniés, la décompression chirur-
gicale reste indiquée en l’absence
d’efficacité rapide de ce traitement
sur les troubles cliniques.
Évolution
Une amélioration de la fonction
antéhypophysaire peut être obser-
vée sans que la stratégie thérapeu-
tique choisie (chirurgie ou surveil-
lance) semble jouer un rôle sur
l’évolution. Cependant, la persis-
tance de déficits antéhypophysaires
est fréquente. Dans notre expé-
rience, 55 % des patients gardent un
déficit corticotrope, 61 % un déficit
215
Troisième partie : Hypophyse-Surrénales
“L’annonce d’une maladie est toujours un
traumatisme. Avant, il y avait l’ignorance ou
l’inquiétude, puis les mots tombent et le
temps s’arrête, c’est la sidération.
“Il n’existe pas de ‘bonnes’ façons d’annon-
cer une mauvaise nouvelle, mais certaines
sont moins dévastatrices que d’autres.
La mauvaise nouvelle... Les effets délétères
de l’annonce, immédiats ou retardés, ne
peuvent être quantifiés, codifiés, systémati-
sés, tant celui qui la reçoit et celui qui la
délivre sont uniques. Les diverses tech-
niques de communication se trouvent bien
souvent insuffisantes face à la maladie.
L’auteur de “L’annonce de la maladie” récuse
à juste titre la rédaction de recettes ou
fiches “annonce”. Le Dr Isabelle Moley-
Massol propose cependant un certain
nombre de mots, formules, comportements,
afin de permettre au malade une percep-
tion plus sereine de cette nouvelle vie bou-
leversée qui l’attend.
Une première partie permet d’appréhen-
der les principes fondamentaux de l’an-
nonce d’une mauvaise nouvelle.
La seconde partie de l’ouvrage envisage la
spécificité de l’annonce au sein des spécia-
lités médicales. Cancers, sida, psychoses y
sont particulièrement développés, mais
aussi les maladies chroniques telles que
l’hypertension ou le diabète.
Cet ouvrage a sa fonction auprès des soi-
gnants au même titre qu’un guide théra-
peutique ou un précis de sémiologie cli-
nique. Il a, de plus, le rare privilège de
permettre à ceux qui vont devoir assom-
brir l’avenir du malade de le faire avec les
mots les plus proches de la compassion.
Le Dr Isabelle Moley-Massol pratique
la psychologie médicale et la psycho-oncologie.
Elle a une activité libérale et hospitalière.
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L’annonce de la maladie (29 )
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MHDN Vol. IX - n° 6
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Les éditions vous proposent :
244 pages
thyréotrope et 73 % une atteinte de
l’axe gonadotrope.
Une diminution de la taille, voire
une quasi-disparition de la lésion,
objectivée par une surveillance
morphologique régulière, peut être
observée dans certains cas où l’ab-
sence initiale de signes de gravité
a permis d’éviter l’intervention chi-
rurgicale.
Une récidive de la survenue de
remaniements nécrotico-hémorra-
giques massifs au sein du tissu adéno-
mateux est possible, même si elle
est peu fréquente. Le patient doit
être prévenu de cette éventualité.
Références
Onesti S, Wisniewski T, Post K. Clinical versus
subclinical pituitary apoplexy: presentation, sur-
gical management and outcome in 21 patients.
Neurosurgery 1990;26:980-7.
Randeva H, Schoebel J, Byrne J et al. Classical
pituitary apoplexy: clinical features, management
and outcome. Clinical Endocrinology 1999;51:
181-8.
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