CQFD 26 CQFD 26 (Dossier 8 de l’ECN 2006) Enoncé Mme S. K, née le 15-09-1976, vous est adressée en Août 2002 pour douleurs articulaires touchant les poignets, les interphalangiennes proximales et distales et les métacarpo-phalangiennes. Ces douleurs évoluent depuis un mois environ, sont accentuées la nuit, semblent s'amender dans la journée sans disparaître totalement. Elle présente depuis 4 jours un purpura pétéchial non infiltré des membres inférieurs remontant jusqu'au niveau des genoux, et rapporte une fébricule à 38°C, 38°5C depuis 15 jours. Mlle K n'a pas d'antécédents particuliers hormis une appendicectomie. Question N°1 Devant ce tableau clinique, quelle est l'étiologie probable de ce purpura ? Question N°2 L'examen clinique ne montre pas d'arthrite vraie, mais vous réveillez la douleur à la pression des articulations sus-citées. A l'auscultation cardiaque, vous entendez un souffle systolique 2/6 maximal au foyer mitral. Sur le plan biologique : Leucocytes : 6600/mm3 ; GR : 3,9 x 109/mm3 ; hémoglobine : 10,7 g/dL ; VGM : 86,7 u3 ; TCMH : 27,4 pg ; CCMH : 31,7 %; hématocrite : 33,8 % ; plaquettes : 29 000/mm3 ; TCA : 74 s (Témoin : 29 s) ; fibrinogène : 6 g/L (N : 2-4 g/L) ; TP : 99 % Temps de thrombine :19 s (Témoin 18 s). Devant l'ensemble du tableau clinique et ces résultats biologiques, quelles sont les deux hypothèses diagnostiques que vous suspectez, de principe ? Quels examens complémentaires biologiques réalisez-vous pour le confirmer ? Question N°3 Comment interprétez-vous le bilan de coagulation ? Quels examens biologiques demandez-vous pour confirmer votre suspicion et compléter le bilan? Justifiez votre réponse. Question N°4 Le diagnostic principal retenu n'est pas d'origine infectieuse, et le diagnostic associé suspecté à la question 3 est confirmé. Quelles en sont les principales complications, et comment les rechercher dans le cadre de cette observation ? Question N°5 Un traitement par prednisone à la dose de 1 mg/kg/jour est débuté. Quelle surveillance effectuezvous ? Quels traitements associez-vous à cette corticothérapie et quelles recommandations donnezvous à la patiente ? Question N°6 La patiente évolue favorablement dans un premier temps (ne prend plus que 5 mg de prednisone par jour) et reprend son travail de vente par correspondance sur Internet. Elle revient vous voir en urgence en Décembre 2002 pour asthénie brutale survenue deux jours auparavant, une dyspnée inhabituelle à la montée d'un étage. L'auscultation cardiaque retrouve une tachycardie régulière à 110/mn, l'auscultation pulmonaire est normale, la patiente est apyrétique. Vous retrouvez une pâleur non notée précédemment, ainsi qu'un subictère conjonctival. La numération faite en urgence retrouve : GR : 2,2 x 1012/L, Hb 7,8 g/dL, VGM 105 fl ; Hématocrite 24 % ; réticulocytes 200 000/mm3, leucocytes 3,4 x 109/L ; plaquettes 160 x 109/L. Que suspectez-vous et quels examens réalisez-vous ? Justifiez votre réponse. CQFD 26 Question N°7 Ces examens confirment ce que vous suspectiez. Comment modifiez-vous le traitement ? Quelle surveillance effectuez-vous ? Question N°8 Le traitement effectué a, de nouveau, permis d'améliorer la patiente, qui à nouveau reprend son travail. Vous êtes appelé par le service d'urgence de votre hôpital le 6 février 2003 : Mlle S. K. vient d'y être admise pour une "faiblesse" dans les jambes depuis une quinzaine de jours, ainsi qu'une récidive des douleurs articulaires initiales. Vous retrouvez à l'examen clinique un érythème du visage, prédominant en malaire, bilatéral, légèrement infiltré, non douloureux. La patiente vous signale avoir voulu bronzer, et l'érythème est apparu après deux séances d'UV. Elle est apyrétique. La pression musculaire ne réveille pas de douleur, mais il existe des réflexes très vifs et polycinétiques au niveau des membres inférieurs. Le signe de Babinski est positif de façon bilatérale. Il n'y a pas d'anomalie au niveau des membres supérieurs ou du tronc. Sur le plan neurologique, comment caractérisez-vous le tableau ? Justifiez votre réponse. Quel(s) examen(s) demandez-vous pour établir le diagnostic étiologique de cette atteinte neurologique ? CQFD 26 CORRECTION du CQFD 26 (Dossier 8 de l’ECN 2006) Q1/ Purpura probablement thrombocytopénique auto-immun car : Purpura ecchymotique, déclive Signes généraux et fébricule compatible avec une maladie de système ou une virose Absence d'argument pour un purpura vasculaire (non infiltré) Q2/ Il faut discuter une endocardite infectieuse suraiguë d'Osler de la valve mitrale car : Fébricule depuis 15 j + souffle cardiaque d'insuffisance mitrale + polyarthralgies Urgence thérapeutique à évoquer systématiquement Il faut discuter un lupus érythémateux disséminé en poussée car : Femme jeune + fébricule + polyarthralgies inflammatoires Possible endocardite de Libmann-Sachs responsable du souffle cardiaque Anémie + thrombopénie (fréquentes) : syndrome d’Evans ? Allongement du TCA Examens de confirmation : Bilan de l'endocardite : Bactériologique ; hémocultures aéro-anaérobies multiples avant toute antibiothérapie, en prévenant le laboratoire de la suspicion diagnostique Prélèvement des portes d'entrée: ECBU ; bilan ORL et stomatologique CRP et VS à la recherche d'un syndrome inflammatoire biologique bilan immunitaire non spécifique : facteur rhumatoïde, complément Bilan du lupus : Immunologie : facteurs anti-nucléaires (élevés), AC anti-DNA natifs (élevés), AC anti-antigènes nucléaires solubles (anti-Sm spécifiques) Complément sérique : C3, C4 et CH50 (abaissé en cas de poussée) Q3/ TCA allongé = atteinte de la voie intrinsèque de la coagulation. TP et temps de thrombine normaux = pas d'atteinte de voie commune de la coagulation. (les facteurs X, V, II et le fibrinogène sont hors de cause). Il s'agit d'un anticoagulant circulant acquis de type anticorps antiprothrombinase (anticoagulant lupique) plus probable qu’un déficit en un facteur de la voie intrinsèque (IX, VIII, XII, XI) On demandera : TCA en présence d’un plasma témoin (test de mélange correcteur) Recherche d'anticorps anti-phospholipides ou anti-cardiolipines en ELISA ou d'anticorps anti-bêta-2 GP I Sérologie syphilitique dissociée : TPHA négatif / VDRL positif en faveur d'un SAPL Recherche d'anticorps anti-plaquettes par test au MAIPA (car thrombopénie) Groupe ABO, rhésus, RAI et bilan pré-transfusionnel car risque hémorragique Q4/ Les principales complications de ce lupus avec SAPL sont : Complications rénales (néphropathie glomérulaire lupique) à rechercher par : Protéinurie Hématurie Clairance de la créatinine +/- biopsie après correction des troubles de l'hémostase 6 points 6 20 points 6 6 3 2+2 1 11 points 3+3 3 2 NC NC 18 points 4 2 2 2 CQFD 26 Complications neurologiques centrales : AVC ; convulsions épileptiques ; myélite Complications cardiaques (endocardite, péricardite, myocardite) à rechercher par auscultation, ECG, radio de thorax, échocardiographie +++ Complications thrombotique et/ou emboliques veineuses et artérielles : phlébite (échodoppler veineux) ; embolie pulmonaire (angioscanner et gazométrie) ; accidents vasculaires cérébraux et thrombophlébite cérébrale (scanner cérébral). Complications thrombotiques utéroplacentaires : fausses couches spontanées. Complications pulmonaires : pleurésie, pneumopathie interstitielle (radio thoracique) Complications psychiatriques : entretien avec un psychiatre si besoin Complications dermatologiques : vespertilio, livedo, purpura, aphtes, alopécie Complications hématologiques : splénomégalie ; anémie et thrombopénie (Evans) Complications rhumatologiques : ostéonécrose aseptique de tête fémorale Q5/ Surveillance de la corticothérapie : Efficacité : Etat général, température, arthralgies, purpura complément sérique, NFS - VS, fibrinogène Tolérance : Tension artérielle Poids Douleurs abdominales, œdèmes, infections, troubles psychiatriques Ionogramme avec kaliémie Glycémie veineuse, bandelette urinaire Traitements associés et recommandations : Supplémentation vitamino-calcique ± bisphosphonate en prévention de l'ostéoporose cortico-induite (car dose > 7,5mg/j pendant plus de 3 mois) Régime sans sel Supplémentation en potassium en cas d'hypokaliémie Régime alimentaire pauvre en sucres rapides, en lipides saturés, équilibré Contraception par macroprogestatifs (hors AMM) ou mécanique par préservatifs Repos lors des poussées (arrêt de travail) Arrêt du tabac et exercice physique en prévention du risque athéromateux Eviter l’exposition solaire Pas d’automédication (médicaments lupogènes) Observance du traitement : pas d’arrêt intempestif et réduction progressive de la corticothérapie (risque d'insuffisance surrénalienne) Prophylaxie antituberculeuse si antécédent non ou mal traité Prévention d'une anguillulose par ivermectine (si coproculture positive) Q6/ Il faut suspecter une ANÉMIE HÉMOLYTIQUE AUTO-IMMUNE : Anémie normochrome, normocytaire et régénérative : pâleur, tachycardie ; dyspnée d'effort ; asthénie ; Hb < 12,5g/dl, normocytaire ; taux élevé de réticulocytes. Hémolyse car subictère conjonctival Bilan : Confirmation de l'hémolyse : haptoglobine (effondrée), bilirubine libre (élevée), LDH (élevés) ; frottis sanguin (schizocytes ?) Test de Coombs direct en faveur d'une origine auto-immune puis élution pour identification du type d'agglutinines (anticorps « chauds ») 2 2 2 2 NC NC NC NC NC NC 16 points NC 2 2 2 2 4 4 NC 9 points 4+2 1+1 1 CQFD 26 Q7/ Augmenter la dose de corticoïde (1 mg/kg/J) + précautions usuelles. Eviter les transfusions de culots globulaires sauf en cas de très mauvaise tolérance (car elles ont peu d'effet en cas d'anémie hémolytique). Traitement immunosuppresseur en cas d’échec (cyclophosphamide par exemple). Surveillance : clinique : pouls ; PA ; asthénie, tachycardie, dyspnée, ictère biologique : NFS, réticulocytes, bilirubine, LDH, haptoglobine ; dosage des folates Q8/ SYNDROME MÉDULLAIRE car : Syndrome sous-lésionnel : syndrome pyramidal bilatéral des membres inférieurs avec paraparésie, signe de Babinski bilatéral et réflexes vifs Pas de signes sus-lésionnels au niveau des membres supérieurs et du tronc Hypothèses : MYELITE LUPIQUE, cause la plus probable COMPRESSION MEDULLAIRE peu probable en l’absence de syndrome lésionnel Infarctus médullaire lié au risque thrombotique (SAPL), moins probable Hématome épidural favorisé par la thrombopénie (très improbable) Maladie auto-immune associée au lupus type SEP (myélite démyélinisante) ou anémie de Biermer (sclérose combinée de la moelle) Au vu de ces hypothèses, les examens réalisés en urgence sont : IMAGERIE PAR RÉSONNANCE MAGNÉTIQUE médullaire sans puis avec injection de produit de contraste : recherche de myélite, de signes de démyélinisation, de souffrance médullaire, d’hématome + élimination d’une compression médullaire Bilan biologique : NFS ; hémostase (TP, TCA, fibrinogène) Bilan infectieux : hémocultures si fièvre, bilan de tuberculose. 6 points 4 NC NC 1+1 14 points 2 4 4 4 CQFD 26 ITEM 231 - SYNDROMES MEDULLAIRES Définition Clinique Etiologies Sd de section médullaire complète Interruption totale de la moelle Choc spinal - paraplégie ou tétraplégie flasque - abolition ROT, RCP et végétatifs au-dessous lésion - anesthésie à tous les modes au-dessous lésion Automatisme médullaire - para et tétraplégie spasmodique + hypertonie élastique - ROT vifs, Babinski bilatéral, réflexe de défense, miction et défécation réflexes Côté lésion : - Sd pyramidal - Trouble sensibilité proprioceptive + discriminative Côté opposé : - Trouble sensibilité thermique + douloureuse Traumatismes Compression médullaire non traumatique Poussée SEP Ramollissement ischémique Compression médullaire latérale SEP Sd Brown-Séquard Hémisection de la moelle Sd syringomyélique Interruption des fibres commissurales au niveau de la décussation des fibres spinothalamiques Déficit sensitif dissocié (thermique + douloureuse) Territoire suspendu bilatéral Syringomyélie Tumeurs intramédullaires Sd atteinte corne antérieur Atteinte des motoneurones de la corne antérieure Sd neurogène périphérique moteur pur (déficit, hypotonie, abolition ROT, amyotrophie) + crampes et fasciculations SLA Poliomyélite CQFD 26 Sd cordonal postérieur Sd de sclérose combinée de la moelle Sd cordonal antérolatéral Sd compression médullaire Définition Clinique Lésion de la substance blanche du cordon postérieur Atteinte élective sensibilité proprioceptive + discriminative dans territoire homolatéral - trouble sens position + ataxie majorée par l’occlusion des yeux - trouble de la discrimination tactile entre 2 points - incapacité d’identifier la direction + la vitesse de stimulation de la peau - trouble graphesthésie - astéréognosie Parfois = paresthésies, douleurs; signe Lhermitte Compression médullaire postérieure Tabès (= sd radiculo-cordonal post) Sd pyramidal + Sd cordonal post bilatéraux Carence Vit B12 ( dont Biermer) Compression médullaire postérieur Dégénérescences spino-cérébelleuses (maladie de Friedreich) Lésion substance blanche du Atteinte élective sensibilité thermique + douloureuse du cordon antérolatéral territoire controlatéral ss-jacent (± allodynie, hyperalgésie) (faisceau spinothalamique) + Sd pyramidal homolatéral si atteinte cordon postérolatéral URGENCE +++ Sd lésionnel radiculaire Sd sous-lésionnel médullaire Sd rachidien Etiologies SEP Compression médullaire antérolatérale Ramollissement spinal antérieur