ECS3 Carnot Chapitre 14 2013/2014
Chapitre 14 : Variables aléatoires finies
Dans tout ce chapitre, (Ω,P(Ω)) est un espace probabilisable fini.
1 Motivation
Prenons un exemple : on considère l’expérience aléatoire obtenue par le jet de deux
dés (de couleur différente). On modélise cette expérience par = [[ 1 ; 6 ]]2,A=P(Ω).
Supposons que le résultat qui nous intéresse soit la somme des deux chiffres obtenus et que
l’on s’intéresse plus particulièrement à l’évènement A: « la somme obtenue est 7 ». On
décompose en évènements élémentaires :
A={(1,6),(2,5),(3,4),(4,3),(5,2),(6,1)}
On préfère considérer une fonctions (ici la fonction S: Ω qui à ωassocie la
somme des chiffres obtenus) et dire que l’évènement Aest
A= [S= 7] = {ω, S(ω) = 7}
qui est plus facile à manipuler.
Pour les sceptiques, signalons que si on refuse d’utiliser les variables aléatoires, la situa-
tion devient vite intenable lorsque l’expérience considérée a de nombreux résultat : l’univers
(même fini) peut être très gros et difficile à décrire. Pour se convaincre, on peut essayer de
décrire l’univers de l’expérience suivante : on distribue complètement un jeu de 52 cartes à
4 joueurs (on remarquera que Card Ω = 52
13= 635013559600). L’utilisation de variables
aléatoires permet de faire abstraction du modèle.
2 Définitions
2.1 Variable aléatoire réelle discrète
Définition 2.1.1
Soit (Ω,A)est un espace probabilisable fini. On appelle variable aléatoire réelle sur
(Ω,A)toute application
X:
ω7−X(ω)
On dit que l’ensemble X(Ω) = {X(ω), ω }est l’univers-image de X.
Définition 2.1.2
Soit Xune variable aléatoire réelle sur et x. On note
[X=x] = X1(x) = {ω, X(ω) = x}
[X6x] = X1(] − ∞, x]) = {ω, X(ω)6x}
[X > x] = X1(]x, +[) = {ω, X(ω)> x}
On a en particulier [X6x] = [X > x]et [a6X6b] = X1([a, b]) = [X>a][X6b].
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Plus généralement, si Ion note [XI] = {ω, X(ω)I}. Toutes ces
parties sont des événements.
Lorsqu’on étudie une variable aléatoire il est bon d’essayer de préciser son image X(Ω).
Exemple. On joue à Pile ou Face nfois. L’univers est = {0,1}n1symbolise le Pile
et A=P(Ω). Soit Xla variable aléatoire qui donne le nombre de Piles obtenus.
On a X(Ω) = {0,1,2,3,...,n}.
L’évènement [X= 0] est {(0,...,0)}, l’évenement [X= 1] = {(ε1,...,εn),!i
[[ 1 ; n]] , εi= 1}. On a par exemple [X > n 1] = {(1,...,1)}.
L’évènement « obtenir plus de pile que de face » est l’évènement (X > [n
2]) = (X>
[n
2] + 1).
Exercice. On s’intéresse à l’expérience aléatoire qui consiste ne le jet de deux dés de
couleur différente. Pour chaque jet, on considère la somme des deux chiffres obtenus.
Donner un espace probabilisable qui modélise cette expérience. Définir une variable
aléatoire réelle Xqui traduit le résultat de cette expérience. Vérifier que c’est bien une
variable aléatoire réelle. Décrire X(Ω). Donner sous forme explicite les évènements (X= 1),
(X= 4),(X>5),(26
10 6X < 69
11).
Exercice. On dispose d’une urne contenant Nboules numérotées de 1àN. On tire sans
remise successivement nboules. Décrire . On note Xl’application qui à ωassocie
le plus grand nombre tiré. Décrire X(Ω). Montrer que Xest une variable aléatoire réelle
finie. Que valent les évènements (X6n1) et (X6N+ 1) ? Quel est le cardinal de
(X6n)?
2.2 Exemples de variables aléatoires
1. Une application constante est une variable aléatoire, on l’appelle variable aléatoire
certaine.
2. Une variable aléatoire Xtelle que Card X(Ω) = 2 est appelée variable aléatoire
de Bernoulli.
3. Si on s’interesse à un schéma binomial, répétition de népreuves de Bernoulli indé-
pendantes, la variable Xiqui vaut 1si la iieme étape est un succès et 0 sinon est une
variable de Bernoulli. La variable donnant le nombre de succès au cours du schéma
est une variable aléatoire, d’univers image [[ 0 ; n]], appelée variable de loi binomiale.
4. On jette simultanément deux dés équilibrés. On note Xla somme des résultats ob-
tenus. Alors X(Ω) = [[ 2 ; 12 ]]. On a par exemple [X= 6] = [X > 5] [X > 6] et
[X < 3,2] = [X= 2] [X= 3].
2.3 Système complet d’événements associé à une variable aléatoire
Proposition 2.3.1
Soit (Ω,A)un espace probabilisable fini. Pour toute variable aléatoire réelle finie Xsur
(Ω,A), l’ensemble
{[X=x], x X(Ω)}
est un système complet d’évènements. On l’appelle le système complet d’évène-
ments associés à X.
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Démonstration : On sait que (X=x)∈ A par définition d’une variable aléatoire réelle. Si
x6=yX(Ω), il est clair que (X=x)(X=y) = : les évènements (X=x)et
(X=y)sont incompatibles. De plus SxX(Ω)(X=x) = (XX(Ω)) = Ω. Ce qui montre
le résultat attendu.
Remarque. Les événements du système complet d’événements associé à Xsont en quelque
sorte les événements les « plus petits » que l’on puisse considérer à l’aide de X. C’est la
quintessence de l’information apportée par X. Tout événements que l’on décrit à partir de
ce système complet ne tient compte uniquement de ce que l’on sait de l’expérience aléatoire
considérée par la connaissance de X.
Exemple. On joue deux fois à Pile ou Face. On a Ω = {0,1}2et A=P(Ω). Soit Xla
variable aléatoire qui donne le nombre de Pile obtenus. On a X(Ω) = {0,1,2}et (X=
0) = {(F, F )},(X= 1) = {(P, F ),(F, P )},(X= 2) = {(P, P )}est un système complet
d’évènements.
Exercice. Dans l’expérience consistant au jet consécutif de deux dés, soit Xla variable
aléatoire réelle finie qui donne la somme des chiffres obtenus. Décrire le système complet
d’évènements associé à X.
2.4 Lois de probabilité d’une variable aléatoire
Soit (Ω,A, P )un espace probabilisé fini et Xune variables aléatoire réelle sur (Ω,A). Vu
les remarques faites sur le système complet associé à X, la définition suivante est naturelle.
Définition 2.4.1
Soit (Ω,A, P )un espace probabilisé fini et Xune variables aléatoire réelle sur (Ω,A).
La donnée de la loi de probabilité est équivalente à la donnée de lunivers image
X(Ω) et de l’ensemble des probabilités
{P(X=x), x X(Ω)}
Remarque. Il est possible que deux variables aléatoires Xet Yde même image aient
même loi. On note dans ce cas X ֒Y.
Exemple. 1. Soit X:ω7→ aune variable aléatoire certaine. Sa loi est alors {P(X=
a) = 1}.
2. Soit X: Ω → {0,1}une variable aléatoire de Bernoulli. Sa loi est {P(X= 1) =
p, P (X= 0) = 1 p}.
3. On jette un dé équilibré, on note Xle numéro obtenu. Alors Xest une variable
aléatoire et sa loi est donnée par X(Ω) = [[ 1 ; 6 ]] et k[[ 1 ; 6 ]] , P (X=k) = 1
6.
Proposition 2.4.1
Soit (Ω,A, P )un espace probabilisé fini et Xune variable aléatoire réelle finie.
alors X
xX(Ω)
P(X=x) = 1
et si on numérote les éléments de X(Ω), c’est-à-dire que l’on pose X(Ω) = {xi, i
[[ 1 ; n]]}on a
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n
X
i=1
P(X=xi) = 1
Il faut toujours vérifier ce point lorsque l’on donne une loi de probabilité.
Démonstration : Ceci découle du fait que {(X=x), x X(Ω)}est un système complet
d’évènements (on utilise les deux propriétés : d’abord que est l’union de tous les événe-
ments du système, puis que ces événements sont deux à deux incompatibles). On a donc
1 = P(Ω) = P(SxX(Ω)[X=x]) =
P
P
xX(Ω)
(X=x).
Exercice. On dispose d’une urne contenant Nboules numérotées de 1àN. On tire sans
remise successivement nboules. Préciser l’espace probabilisé de travail. Soit Xla variable
aléatoire réelle finie égale au plus grand numéro des nboules prélevées. Que vaut X(Ω) ?
Donner la loi de X. En déduire que
N
P
k=nk1
n1=N
n.
2.5 Fonction de répartition
Définition 2.5.1
Soit (Ω,A, P )un espace probabilisé fini et Xune variable aléatoire réelle finie. L’ap-
plication
FX:
x7−P(X6x)
est appelée Fonction de répartition de X.
Exemple. DESSINS : remarquer que la loi de chaque variable se lit dans les sauts de FX.
1. Variable aléatoire certaine. Si x < a FX(x) = 0 et si x>a FX(x) = 1.
2. Variable aléatoire de Bernoulli. (Rappel : P(X= 0) = 1 pet P(X= 1) = p). Si
x < 0FX(x) = 0 si x[0,1[ FX(x) = 1 pet si x>1,FX(x) = 1.
3. Variables aléatoires uniformes. X(Ω) = {x1,...,xn}avec x1<···< xn. Si x < x1,
FX(x) = 0. Si x[xi, xi+1[avec i[[ 1 ; n1 ]] Fx(x) = i
net si x>xn,FX(x) = 1.
On remarque que la loi de Xse lit dans les sauts de FX.
Nous allons étudier maintenant les propriétés des fonctions de répartitions de variables
aléatoires réelles finies. Nous utilisons les notions de limite et de continuité, qui seront
rappelées dans un chapitre ultérieur. Attention : le point 4. du théorème ci-dessous dépend
de manière cruciale de l’hypothèse « Xfinie » !
Théorème 2.5.1
La fonction de répartition FXd’une variable aléatoire réelle finie Xest
1. Croissante sur .
2. x,06FX(x)61et lim
x→−∞ FX(x) = 0,lim
x+FX(x) = 1.
3. FXest continue à droite : x,lim
tx
t>x
FX(t) = FX(x).
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4. FXprend un nombre fini de valeurs, elle n’a qu’un nombre fini de discontinuités.
Elle est continue en tout point de rX(Ω).
5. x,lim
tx
t<x
FX(t) = FX(x)P(X=x) = P(X < x)
6. FXest continue en xsi et seulement si P(X=x) = 0, i.e. x /X(Ω).
7. Si X(Ω) = {x1,...,xn}avec x1<···< xn, on a
x, FX(x) = X
i[[ 1 ; n]]
xi6x
P(X=xi)
La preuve de ce théorème est intéressante pour commencer à comprendre comment
manipuler les variables aléatoires.
Démonstration : 1. Soient x, y tels que x6y. On a ]− ∞, x]]− ∞, y]donc
(X6x)(X6y)et P(X6x)6P(X6y). C’est donc que FX(x)6FX(y)et FX
est croissante.
2. FX(x) = P(X6x)[0,1]. Posons X(Ω) = {x1,...,xn}avec x1<··· < xn.
Calculons lim
x→−∞ FX(x). Si x < x1, alors (X6x) = . Donc FX(x) = P(X6x) = 0.
Sur ]− ∞, x1[,FXest la fonction constante nulle, lim
x→−∞ FX(x) = 0.
Montrons que lim
x+FX(x) = 1. Dès que x>xnon a (X6xn)(X6x). Mais
(X6xn) = Sn
k=1(X=xk) = (XX(Ω)) = Ω. Ainsi 1 = P(X6xn)6P(X6
x)61et FX(x) = 1.FXest la fonction constante à 1sue ]xn,+[, sa limite est 1.
3. Si t < x1ou t>xnon a vu que FXétait constante donc continue à droite. De
même, si i[[ 1 ; n1 ]] et t[xi, xi+1[,FX(t) = P(X6t) = P(Sk=1 iP (X=
xk)) =
i
P
k=1
P(X=xk)est contante. Ainsi pour tout x[x1, xn[il existe un unique
i[[ 1 ; n1 ]] tel que x[xi, xi+1[. Alors lim
tx
t>x
FX(t) = FX(x) = FX(xi).
4. C’est une conséquence de la preuve de 3. : si i, x 6=xi,FXest constante sur un
intervalle ouvert centré en x.
5. Si x /X(Ω), on vient de voir au point 4. que FXest continue en x. Comme P(X=
x) = 0 (puisque xn’est pas une valeur de X!), on a bien lim
tx
t<x
FX(t) = FX(x)P(X=
x).
Si xest l’un des xi, avec i6= 1, on a pour t]xi1, xi[,FX(t) = P(X6t) = P(X <
xi). C’est une fonction constante, d’où le résultat sur la limite. Si x=x1, pour tout
t < x on a FX(t) = 0 = P(X < x1), et le résultat suit.
6. et 7. Evident au vu des points précédents.
Théorème 2.5.2 (La fonction de répartition caractérise la Loi)
Si Xet Ysont deux variables aléatoires réelles finies de même fonction de répartition,
alors Xet Yont même loi de probabilité, i.e. X ֒Y.
Démonstration : En effet la loi de Xest la donnée pour tout xX(Ω) de P(X=x).
Soit xquelconque. D’après le théorème précédent, P(X=x) = FX(x)lim
tx
t<x
FX(t).
Mais FX=FYdonc P(X=x) = FY(x)lim
tx
t<x
FY(t) = P(Y=x). Ceci montre que
X(Ω) = Y(Ω) et que Xet Yont même loi.
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