Notions de petitesse, géométrie des espaces de Banach et

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Numéro d’ordre : 3803
Thèse présentée à l’Université de Bordeaux 1
Ecole Doctorale de Mathématiques et Informatique de Bordeaux
par MOREAU Pierre
Pour obtenir le grade de de Docteur de Mathématiques
Notions de petitesse, géométrie des espaces
de Banach et hypercyclicité
Thèse dirigée par ESTERLE Jean et MATHERON Etienne
Soutenue le 15/06/2009
Jury :
DEVILLE Robert, Professeur d’Université, Université de Bordeaux 1
ESTERLE Jean, Professeur d’Université, Université de Bordeaux 1
KUPIN Stanislav, Maı̂tre de Conférences, Université Aix-Marseille 1
LANCIEN Gilles, Professeur d’Université, Université de Franche-Comté
LEFEVRE Pascal, Professeur d’Université, Université d’Artois
MATHERON Etienne, Professeur d’Université, Université d’Artois
Table des matières
1 Notions de petitesse
1.1 Haar-négligeabilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.2 Boréliens non Haar-négligeables et non compactivores
1.3 Gauss-négligeabilité et σ-porosité . . . . . . . . . . .
1.3.1 Gauss-négligeabilité . . . . . . . . . . . . . . .
1.3.2 σ-porosité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.4 Complexité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.4.1 Généralités . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.4.2 Complexité des fermés Gauss-négligeables . .
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7
15
18
18
21
22
22
23
2 Le théorème de Matouskova-Stegall
2.1 Preuve de (2) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2.2 Preuve de (1) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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33
3 Haar-négligeabilité et bases de Schauder
3.1 Rappels sur les Bases de Schauder . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.2 Cône contenant un translaté de tout compact . . . . . . . . . . . . . . .
3.3 Haar-négligeabilité du cône positif associé à une base de Schauder . . . .
3.3.1 Condition suffisante de Haar-négligeabilité . . . . . . . . . . . . .
3.3.2 Conditions nécessaires de non-Haar négligeabilité, application aux
bases symétriques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.3.3 c0 -saturation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.3.4 Un exemple . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.4 Structure des quotients . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
3.5 Mesures gaussiennes et cônes positifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
37
38
42
45
45
4 Notions de petitesse et Hypercyclicité
4.1 Hypercyclicité . . . . . . . . . . . . . . . .
4.2 Shifts à poids non σ-poreux hypercycliques
4.3 Un critère de σ-porosité . . . . . . . . . .
4.4 Haar-négligeabilité . . . . . . . . . . . . .
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2
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62
Introduction
Il existe de nombreuses notions de petitesse en analyse, la plus classique d’entre
elles étant la petitesse au sens de Baire : une partie est petite au sens de Baire si elle est
incluse dans le complémentaire d’un Gδ dense. Cette notion caractérise un comportement
global, elle ne permet pas de quantifier la taille des ensembles. Ceci peut être accompli en
dimension finie grâce à la mesure de Lebesgue et peut s’étendre aux espaces localement
compacts grâce aux mesures de Haar, c’est à dire les mesures boréliennes invariantes
par translation ; “être de mesure de Haar nulle” est donc une autre notion naturelle de
petitesse. Dans un espace qui n’est pas localement compact, l’absence de mesure de Haar
ne permet pas d’utiliser cette notion.
En I972, Christensen a introduit ([C]) la notion de Haar-négligeabilité dans les groupes
abéliens polonais (complètement métrisables et séparables) : une partie borélienne d’un
tel groupe est dite Haar-négligeable s’il existe une mesure de probabilité qui s’annule sur
cette partie et sur tous ses translatés. On dit alors d’une telle mesure qu’elle est une mesure test pour la partie. Cette notion coı̈ncide, quand le groupe est localement compact,
avec celle de ”mesure de Haar nulle”. La Haar-négligeabilité a servi dans l’étude de la
différentiablilité des fonctions lipschitzienne et en classification non-linéaire des espaces de
Banach, on trouvera dans les chapitres 6 et 7 de [BL] beaucoup d’informations à ce sujet.
Il est plus étonnant de voir que la Haar-négligeabilité permet d’obtenir des informations sur la géométrie des espaces de Banach. On doit cette approche à Matouskova et
Stegall qui, dans les articles [MS] et [M3], ont lié la réflexivité d’un espace de Banach à
la Haar-négligeabilité de ses parties convexes, fermées et d’intérieur vide. Les principaux
résultats sur ce sujet peuvent être regroupés dans l’énoncé suivant :
Soit X un espace de Banach séparable.
1. Si X est réflexif alors toute partie convexe, fermée et d’intérieur vide de X est
Haar-négligeable.
2. Si X est non réflexif, il existe une partie convexe, fermée et d’intérieur vide de X
qui contient un translaté de toute partie compacte de X.
3
TABLE DES MATIÈRES
4
En particulier, X est réflexif si et seulement si toute partie convexe, fermée et d’intérieur
vide de X est Haar-négligeable.
Le premier chapitre de cette thèse est consacrée à la présentation générale de certaines notions de petitesse. Dans la section 1.1, on donnera une présentation détaillée
de la Haar-négligeabilité, notamment du fait que contenir un translaté de tout compact
entraı̂ne la non Haar-négligeabilité, et on discutera de la réciproque dans la section 1.2.
Dans la section 1.3, on présentera brièvement deux autres notions de petitesse : la σporosité et la Gauss-négligeabilité. Enfin, nous montrerons dans 1.4 que dans un espace
de Banach séparable X, l’espace des parties fermées Gauss-négligeables (i.e. négligeables
pour toute mesure Gausienne non-dégénérée sur X) est une partie non-borélienne dans
l’espace des parties fermées de X.
Le second chapitre de cette thèse est consacrée à la démonstration du théorème de
Matouskova et Stegall. Il y a dans cette démonstration un type particulier de convexe
fermé et d’intérieur vide qui joue un rôle clef : le cône positif associé à une base de
Schauder. Il est alors naturel de se demander quelles sont les bases de Schauder à cône
Haar-négligeable et ce que cela entraı̂ne pour la structure de l’espace de Banach. Ces
questions seront traitées dans le troisième chapitre.
Avant de commencer à traiter ces questions, nous donnerons dans 3.1 les principales
définitions et propriétés des bases de Schauder, ainsi que la liste des résultats déjà connus
sur la Haar-négligeabilité du cône, notamment que le cône positif de la base canonique
de lp est Haar-négligeable pour p ≥ 1. Tous ces résultats seront généralisés dans 3.2 et
3.3. Il y a deux approches pour tester la Haar-négligeabilité d’une partie : soit montrer qu’elle contient un translaté de tout compact et dans ce cas cette partie n’est pas
Haar-négligeable, soit construire une mesure test, ce qui implique la Haar-négligeabilité
de cette partie ; c’est ce qui sera fait respectivement dans 3.2 et 3.3.
Nous établirons dans 3.2 une condition nécessaire et suffisante pour que le cône
contienne un translaté de tout compact, condition qui implique que la base canonique
de c0 est la seule base de Schauder inconditionnelle et normalisée dont le cône contient
un translaté de tout compact. Il existe néanmoins d’autres bases, non inconditionnelles,
qui vérifient ceci et nous en verrons un exemple. Ce résultat, dans le cas des bases inconditionnelles, ne laisse que deux possibilités pour la Haar-négligeabilité du cône : soit la
base canonique est la seule base de Schauder inconditionnelle et normalisée dont le cône
n’est pas Haar-négligeable, soit il existe une base de Schauder inconditionnelle et normalisée dont le cône n’est pas Haar-négligeable mais qui ne contient pas un translaté de
tout compact. Ces deux possibilités ont leur intérêt : la première parce qu’elle donnerait
une caractérisation surprenante de la base canonique de c0 , ce que les résultats suivants
TABLE DES MATIÈRES
5
laissent espérer, la seconde parce qu’on obtiendrait ainsi un exemple naturel de convexe
fermé et d’intérieur vide qui n’est pas Haar-négligeable et ne contient pas un translaté
de tout compact.
La partie 3.3 traite des bases inconditionnelles et contient deux résultats principaux
qui généralisent les résultats présentés dans 3.1. Le premier est une condition suffisante
pour que le cône soit Haar-négligeable : s’il existe une bloc-base de la base de Schauder
dont le cône est Haar-négligeable dans l’espace qu’elle engendre, alors le cône positif de la
base de Schauder est Haar-négligeable. Cette condition donne une première information
sur la structure de l’espace de Banach sous-jacent. En effet un résultat classique de James
indique qu’il n’y a que deux possibilités pour une base de Schauder inconditionnelle : soit
elle engendre un espace réflexif, soit elle contient la base canonique de l1 et/ou c0 comme
bloc-base. Ceci implique donc que si le cône est n’est pas Haar-négligeable, l’espace de
Banach sous-jacent contient une copie isomorphe de c0 .
Ceci est précisé par le deuxième résultat qui est cette fois une condition nécessaire : si
le cône positif n’est pas Haar-négligeable, on peut extraire de toute bloc-base (et même
“uniformément”) une sous-suite équivalente à la base canonique de c0 ; on en déduit que
la base canonique de c0 est la seule base de Schauder symétrique dont le cône est n’est pas
Haar-négligeable. Ceci peut être vu comme une “sorte” de c0 -saturation, en particulier
l’espace de Banach sous-jacent s’écrit comme une somme topologique de copie isomorphe
de c0 . Nous verrons également que cela entraı̂ne la c0 -saturation de l’espace au sens classique du terme. Néanmoins, cette dernière c0 -saturation uniforme n’est pas suffisante :
nous terminerons la section 3.3 en construisant un espace de Banach muni d’une base de
Schauder vérifiant cette condition mais dont le cône positif est Haar-négligeable.
La section 3.4 est dédiée à l’étude des quotients d’un espace de Banach muni d’une
base de Schauder inconditionnelle dont le cône n’est pas Haar-négligeable. Rappelons
qu’un espace de Banach est dit c0 -saturé si tout sous-espace fermé de dimension infinie
contient une copie isomorphe de c0 . Odell montre dans [O] que tous les quotients de
l’espace de Schreier sont c0 -saturés et pose la question de savoir si c’est encore vrai pour
tout espace de Banach c0 -saturé muni d’une base de Schauder inconditionnelle. Leung
[L], puis de façon plus générale Gasparis [G], y répondent par la négative en construisant
des contre-exemples. Nous verrons que la c0 -saturation uniforme établie dans 3.3 passe au
quotient, le cône positif associés aux bases de Schauder construites par Leung et Gasparis
est donc encore une fois Haar-négligeable. Nous verrons enfin qu’elle est “presque” une
propriété des trois espaces.
Dans la section 3.5, nous étudierons à quelles conditions une mesure gaussienne, i.e.
la loi d’une série presque-sûrement convergente de variables aléatoires de loi normale unidimensionnelles, est une mesure test du cône positif d’une base de Schauder. Le premier
TABLE DES MATIÈRES
6
constat est que le cône positif n’est jamais Gauss-négligeable et nous construirons explicitement une mesure Gaussienne qui ne s’annule pas sur le cône. On obtient le même
résultat de façon encore plus flagrante en regardant les mesures cubiques (voir section
1.3) : une mesure cubique n’est jamais une mesure test pour le cône, ce qui est quelque
peu surprenant puisque la Gauss-négligeabilité est équivalente à la cube-négligeabilité.
Nous établirons ensuite une condition suffisante pour qu’une mesure Gaussienne ne soit
pas une mesure test du cône, qui devient une condition nécessaire et suffisante dans une
certaine classe d’espaces contenant les espaces lp , p ≥ 1, et c0 . Ceci permettra de décrire
entièrement l’ensemble non vide des mesures test Gaussiennes du cône positif de la base
canonique de lp , ainsi qu’un large ensemble de points par lesquels le translaté du cône
n’est pas de mesure nulle quand la mesure n’est pas une mesure test (pour lp et c0 ).
Le chapitre 4 est dédié à l’étude de la taille de l’ensemble des vecteurs non-hypercycliques pour un opérateur hypercyclique défini sur un espace de Fréchet. Dans la section
4.1, on présentera sommairement la notion d’hypercyclicité ainsi que plusieurs résultats
classiques, notamment que l’ensemble des vecteurs hypercycliques est toujours petit au
sens de Baire. Dans la section 4.2, on s’intéressera à un certain type d’opérateurs hypercycliques, les shift à poids, et on montrera qu’il existe toujours de tels opérateurs
dont l’ensemble des vecteurs non-hypercycliques n’est pas σ-poreux. Réciproquement, on
donnera dans 4.3 un critère pour que l’ensemble des vecteurs non-hypercycliques soit
σ-poreux et on l’appliquera aux shifts à poids ainsi qu’aux opérateurs de translation sur
l’espace des fonctions entières H(C) pour une certaine classe de métriques. Enfin dans 4.4
on montrera que pour des poids assez grands, un shift à poids n’est pas “Haar-négligeable
hypercyclique”, et que c’est aussi le cas pour une certaine classe d’opérateurs sur H(C)
commutant avec les translations.
Chapitre 1
Notions de petitesse
1.1
Haar-négligeabilité
Avant de définir la Haar-négligeabilité il faut préciser quelques notations et outils de
théorie de la mesure ([K]). Tous les groupes considérés seront abéliens et Polonais. Rappelons qu’un espace topologique est Polonais s’il est séparable et complétement métrisable.
Si G est un groupe abélien Polonais, alors il existe alors une métrique complète d compatible avec la topologie de G et invariante par translation.
Soit X un espace Polonais ; il existe alors une métrique d compatible avec la topologie
de X telle que le complété de X pour d soit compact([K] page 22) ; l’ensemble Ud (X)
des fonctions uniformément continues de (X, d) dans R est alors un espace de Banach
séparable pour la norme "."∞ . On note P (X) l’ensemble des mesures de probabilité sur
X muni de la topologie de la convergence
! étroite, c’est à dire la topologie la moins fine
rendant continues les applications µ → f dµ où f est une fonction continue et bornée
de X à valeurs réelles. Alors P (X) est un espace polonais et si (fn )∞
n=0 est une suite dense
de Ud (X) ne contenant pas la fonction nulle, alors
#
#!
!
∞
# fn dµ − fn dν #
"
2−n−1
ρ(µ, ν) =
"fn "∞
n=0
est une métrique complète sur P (X), et compatible avec la topologie de P (X).
Si G est un groupe Polonais, la convolution
µ ∗ ν de deux mesures de probabilité µ
!!
et ν sur G est définie par µ ∗ ν(A) =
χA (x + y)d(µ)(x)d(ν)(x) pour tout borélien
A ⊂ G, où χA est la fonction indicatrice de A. On a alors pour toute fonction f bornée
et continue de G à valeurs réelles
$
$ $
f (x)d(µ ∗ ν)(x) =
f (x + y)d(µ)(x)d(ν)(x).
L’opérateur de convolution est continu de P (G) × P (G) dans P (G).
Tous les résultats suivants, sauf indication contraire, peuvent être retrouvés dans [BL].
7
CHAPITRE 1. NOTIONS DE PETITESSE
8
Définition 1.1.1 [C]
Soit G un groupe abélien Polonais. Un borélien A de G est dit Haar-négligeable s’il existe
une mesure de probabilité µ sur G telle que µ(A + x) = 0 pour tout x ∈ G. On dit alors
que µ est une mesure test pour A.
Désormais, G désignera systématiquement un groupe abélien Polonais, d sera une métrique
invariante par translation compatible avec la topologie de G et B(x, r) désignera la boule
ouverte de rayon r centrée en x. La proposition suivante montre que dans le cas où G
est localement compact, la notion de Haar-négligeabilité coı̈ncide avec celle de mesure de
Haar nulle.
Proposition 1.1.1
Si G est localement compact, alors un borélien A de G est-Haar-négligeable si et seulement
si sa mesure de Haar est nulle.
Démonstration
Soit ν la mesure de Haar sur G. Si ν(A) = 0, alors ν(A + x) = 0 pour tout x ∈ G,
et c’est donc le cas pour toute mesure de probabilité µ qui est absolument continue par
rapport à ν (par exemple µ(B) = ν(B∩C)
pour un C tel que ν(C) soit strictement positif
ν(C)
et fini).
Réciproquement, si µ est une mesure de probabilité telle que µ(A + x) = 0 pour tout
x ∈ G, alors grâce au théorème
de Fubini (ν et µ sont σ-finies) et par l’invariance de ν
!!
par translation, on a 0 =
χA (x + y)dµ(x)dν(y) = ν(A). !
Proposition 1.1.2
Une union dénombrable d’ensembles Haar-négligeables est Haar-négligeable.
Démonstration
Ceci est vrai pour une union finie : si µ est une mesure de probabilité qui s’annule
sur tous les translatés de A, et ν est une mesure de probabilité qui s’annule sur tous les
translatés de B, alors la convolée de µ et ν est une mesure de probabilité qui s’annule
sur tous les translatés de A ∪ B.
Si µ est une mesure qui s’annule pour un ensemble A et sur tous ses translatés, alors
c’est aussi vrai pour toute mesure qui est absolument continue par rapport à µ, et en
particulier pour les mesures de la forme µB (A) = µ(A ∩ B)/µ(B) avec µ(B) > 0. Puisque
P (G) est complet pour la métrique ρ définie plus haut, on en déduit que pour tout % > 0,
il existe une mesure ν qui s’annule sur tous les translatés de A et qui vérifie ρ(ν, δ0 ) < %,
δ0 étant la mesure de Dirac en 0.
Soit {An }∞
n=1 une famille d’ensembles Haar-négligeables. Les observations précédentes
permettent de définir par récurrence des mesures de probabilité µn vérifiant µn (An +x) =
0 pour tout x ∈ G et ρ(α ∗ µn , α) < %, où α est le produit de convolution d’une sousfamille quelconque de la famille {µk }1≤k<n .
CHAPITRE 1. NOTIONS DE PETITESSE
9
%n
∞
La
suite
{
vers µ =
k=1 ∗µk }n=1 est donc de Cauchy, et elle converge dans P (G) %
%∞
∗
∗µ
.
Pour
tout
n
∈
N
on
peut
écrire
µ
=
µ
∗
µ
∗
.
.
.
∗
µ
∗
ν
avec
ν
=
k
1
2
n
n
n
k=1
k>n ∗µk ,
n
∗
∞
donc µ (x + ∪k=1 Ak ) = 0 pour tout x ∈ G et pour tout n ∈ N . Donc µ(x + ∪n=1 An ) = 0
pour tout x ∈ G. !
Remarque 1.1.1
On a donc une propriété de σ-additivité comme pour les ensembles de mesure de Haarnulle. Une autre similarité de ces deux notions est immédiate : un ensemble Haarnégligeable est d’intérieur vide. En effet, si cette propriété est mise en défaut pour un
ensemble A, alors la séparabilité de G implique qu’il peut être recouvert par une union
dénombrable de translatés de A et la proposition précédente impliquerait alors que G est
Haar-négligeable, ce qui est trivialement faux.
Le lemme suivant fournit une condition suffisante pour la non Haar-négligeabilité
d’une partie, sa preuve est immédiate par régularité intérieure des mesures. On étudiera
sa réciproque dans la section 1.2.
Lemme 1.1.1
Un borélien A ⊂ G est dit compactivore si pour tout compact K ⊂ G, il existe un ouvert
O ⊂ G et x ∈ G tels que :
– K ∩ O += ∅,
– x + K ∩ O ⊂ A.
Si A est compactivore, alors A n’est pas Haar-négligeable.
Le théorème suivant ([M2]) donne une caractérisation des ensembles Haar-négligeables.
Théorème 1.1.1
Un borélien A de G est Haar-négligeable si et seulement si pour tout δ > 0 et tout r > 0,
il existe une mesure de probabilité µ dont le support est inclus dans B(0, r) vérifiant :
µ(A + x) ≤ δ , pour tout x ∈ G .
Démonstration
Supposons que pour tout n ∈ N∗ , il existe une mesure de probabilité µn dont le
support est inclus dans B(0, 1/n) qui vérifie µn (A + x) < 1/n pour tout x ∈ G. La
suite {µn }n∈N∗ converge vers δ0 . Quitte à extraire une sous-suite, on peut supposer que
ρ(α ∗ µn , α) < 2−n , où α est le produit de convolution d’une sous-famille quelconque de
la famille {µk }1≤k<n .
%∞
%n−1
%
Alors µ = ∞
k=1 ∗µk et βn =
k=n+1 ∗µk pour n > 0, αn =
k=1 ∗µk et γn = αn ∗ βn
pour n > 1, sont bien définis. Alors pour tout z ∈ G et pour tout n ∈ N∗ ,
CHAPITRE 1. NOTIONS DE PETITESSE
10
µ(A + z) = µn ∗ γn (A + z),
$
= µn (A + z − x)dγn (x),
≤ Supx∈G {µn (A + z − x), }
≤ 1/n.
Ceci implique que µ(A + z) = 0 pour tout z ∈ G, donc A est Haar-négligeable.
Réciproquement, soient δ > 0 et r > 0, et soit µ ∈ P (G) telle que µ(A + x) = 0 pour
tout x ∈ G. Par régularité intérieure de µ, il existe un compact K de G tel que µ(K) > 0.
On peut recouvrir K par un nombre fini de boules ouvertes de rayon r/3 et il existe donc
un borélien C inclus dans K et de diamètre strictement inférieur à r avec µ(C) > 0. On
peut de plus supposer que 0 ∈ C.
Alors la mesure ν définie par ν(F ) = µ(F ∩ C)/µ(C) vérifie les conditions du théorème.
!
Dans le cas où G est localement compact, on sait que si un borélien A n’est pas de
mesure de Haar-nulle, alors A − A est un voisinage de 0 (il suffit pour s’en convaincre
d’étudier la fonction continue χA ∗ χ−A en 0). Une fois encore, cette propriété est vérifiée
pour les ensembles Haar-négligeables.
Proposition 1.1.3 [C]
Si A est un borélien de G non Haar-négligeable, alors A-A est un voisinage de 0.
Démonstration
Soit HN(G) l’ensemble des boréliens Haar-négligeables de G, on va démontrer que
l’ensemble K(A) = {x : A ∩ (A + x) ∈
/ HN(G)} est un voisinage de 0. Comme K(A) ⊂
A − A, la conclusion sera immédiate.
Si cela n’est pas le cas, il existe alors une suite {xn }∞
n=1 d’éléments de G telle que d(xn , 0) <
−n
2 et telle que A ∩ (A + xn ) soit Haar-négligeable. L’ensemble ∪∞
n=1 (A ∩ (A + xn )) est
alors Haar-négligeable d’après la proposition 1.1.2, et donc son complémentaire dans A,
& = A \ ∪∞ (A ∩ (A + xn )) n’est pas Haar-négligeable. De plus (A
& ∩ (A
& + xn )) = ∅ pour
A
n=1
tout n ∈ N∗ .
Soit à présent C = {0, 1}N muni de l’addition modulo 2 le groupe de Cantor (rappelons qu’il est Polonais et compact) ; ses éléments seront notés θ = (θn ) avec θn ∈ {0, 1},
ieme
et δn sera l’élément de C dont toutes les coordonnées sauf
valent 0.
'∞ la n
Soit ϕ : C −→ G le morphisme défini par ϕ(θ) =
n=1 θn xn . La complétude de la
métrique d, son invariance par translation et le choix de {xn }∞
n=1 impliquent alors que ϕ
est continue. De plus ϕ(δn ) = xn .
& n’étant pas Haar-négligeable, la mesure image de la mesure de Haar µ sur C par ϕ n’est
A
CHAPITRE 1. NOTIONS DE PETITESSE
11
& Donc il existe y ∈ G tel que µ(ϕ−1 (A
& + y)) > 0.
pas nulle sur tous les translatés de A.
& + y) − ϕ−1(A
& + y) est un voisinage de 0 dans C, et donc contient un δn pour
Donc ϕ−1 (A
& + y)
une valeur suffisament grande de n. Il s’ensuit qu’il existe deux éléments de ϕ−1 (A
ieme
& − A,
& contrequi ne diffèrent que par leur n
coordonnée ce qui implique que xn ∈ A
&
&
disant le fait que (A ∩ (A + xn )) = ∅. !
Cette proposition permet d’établir la Haar-négligeabilité de certains ensembles à partir de leurs propriétés topologiques :
Corollaire 1.1.1
Si G n’est pas localement compact, alors tout compact de G est Haar-négligeable.
Corollaire 1.1.2
Un ensemble faiblement compact dans un Banach séparable et non réflexif est Haarnégligeable.
Plus généralement, Christensen a montré ([C2], page 119) que pour tous boréliens
A, B ⊂ G, l’ensemble F (A, B) := {g ∈ G; (g + A) ∩ B n’est pas Haar-négligeable} est
un ouvert de G. Dans [MZ] (théorème 4), il est prouvé que F (A, B) peut être vide, et
plus précisemment que si G n’est pas localement compact, il existe deux parties fermées
A et B non Haar-négligeables telles que (g + A) ∩ B est compact pour tout g ∈ G.
Jusqu’à présent, nous n’avons présenté que des généralisations de faits bien connus
dans le cas localement compact à un cadre plus large. Néanmoins, toutes les propriétés
découlant de l’existence de la mesure de Haar ne peuvent pas s’étendre. Par exemple,
l’hypothèse de séparabilité implique la σ-finitude de la mesure de Haar dans le cas localement compact. Ceci implique donc que toute collection d’ensembles disjoints de mesure de
Haar strictement positive est au plus dénombrable. Solecki prouve dans [S] que si G n’est
pas localement compact, il existe une famille non dénombrable {Fθ } d’ensembles fermés
et disjoints qui contiennent un translaté de toute partie compacte de G. Le théorème
suivant englobe ce résultat ainsi que le théorème de [MZ] mentionné plus haut.
Théorème 1.1.2
Si G n’est pas localement compact, il existe une famille non-dénombrable F d’ensembles
fermés et disjoints de G qui contiennent un translaté de toute partie compacte de G qui
vérifie :
Pour tout F1 , F2 ∈ F tels que F1 += F2 , (g + F1 ) ∩ F2 est compact pour tout g ∈ G.
Démonstration
On choisit une distance d invariante par translation telle que (G, d) soit complet.
Comme G est séparable, il existe une suite {gk }∞
k=1 d’éléments de G dense dans G. Pour
CHAPITRE 1. NOTIONS DE PETITESSE
12
tout k ≥ 1 on pose Qk := {g1 , . . . , gk }. Pour tout % > 0, B(0, %) n’est pas précompacte,
donc il existe η > 0 tel que B(0, %) n’est contenue dans aucune réunion finie de boules
ouvertes de rayon 3η.
∞
On définit alors deux suites de nombres strictement positifs {%n }∞
n=1 et {ηn }n=1 , ainsi
qu’une suite {yk,n,a}k∈N∗ ,n∈N∗ ,a∈{0,1} de points de G vérifiant :
1. pour tout n ≥ 1, B(0, %n ) n’est contenue dans aucune réunion finie de boules de
rayon 3ηn ,
2. pour tout n ∈ N∗ ,
'
m>n %m
< ηn /2,
3. pour tout k ∈ N∗ , pour tout n ∈ N∗ et pour tout a ∈ {0, 1}, yk,n,a ∈ B(0, %n ),
4. pour tout k ∈ N∗ , pour tout n ∈ N∗ et pour tout a ∈ 0, 1,
d(yk,n,a + Qk , ∪i<k,b∈{0,1} (yi,n,b + Qi )) ≥ 3ηn , et d(yk,n,0 + Qk , yk,n,1 + Qk ) ≥ 3ηn ,
5. pour tout m ≥ 1, pour tout n ∈ N∗ , et pour tout k, l ≥ m,
d(+
− gm + yk,n,0 + Qk , yl,n,1 + Ql ) ≥ 3ηn .
∞
On construit en premier lieu {%n }∞
n=1 et {ηn }n=1 telles que les conditions (1) et (2) soient
vérifiées. On fixe n ≥ 1 et on construit la suite {yk,n,a}k∈N∗ ,a∈{0,1} de la façon suivante :
On pose y1,n,0 = 0, F1 = (y1,n,0 + Q1 ) ∪ (+
− g1 + y1,n,0 + Q1 ) et F2 = Q1 . D’après la
condition (1), on peut choisir y1,n,1 ∈ B(0, %n ) tel que d(F1 , F2 + y1,n,1) ≥ 3ηn .
Supposons la suite construite jusqu’à un certain rang k − 1 ≥ 1. On pose

 .
*
*
(yi,n,b + Qi )) ∪
(+
F1 = 
− gm + yi,n,1 + Qi ) ,
m≤k,i<k
i<k,b∈{0,1}
F2 = Qk .
D’après la condition (1), on peut choisir yk,n,0 ∈ B(0, %n ) tel que d(F1 , F2 + yk,n,0) ≥ 3ηn .
Enfin on pose

 .
*
*
F1 = 
(yi,n,b + Qi )) ∪
(+
∪ (yk,n,0 + Qk ) ,
− gm + yi,n,0 + Qi )
i<k,b∈{0,1}
m≤k,i≤k
F2 = Qk .
CHAPITRE 1. NOTIONS DE PETITESSE
13
D’après la condition (1), on peut choisir yk,n,1 ∈ B(0, %n ) tel que d(F1 , F2 + yk,n,1) ≥ 3ηn .
Les conditions (3), (4) et (5) sont alors vérifiées.
La condition (4) implique qu’à n fixé, les ensembles fermés Fk,n,a := (yk,n,a + Qk +
B(0, ηn )) sont à distance au moins ηn les uns des autres. Alors les deux ensembles Fn0 :=
∪k≥1 Fk,n,0 et Fn1 := ∪k≥1 Fk,n,1 sont fermés (les Fk,n,a étant distants d’au moins ηn , un
point adhérent à Fna est adhérent à un Fk,n,a) et disjoints. Pour θ = (θn ) ∈ {0, 1}N , on
θn
pose Fθ := ∩∞
n=1 Fn . Alors les ensembles Fθ sont fermés et deux à deux disjoints.
Montrons que Fθ contient un translaté de tout compact K de G. Soit θ = (θn ) ∈
{0, 1}N et soit K un compact de G. On construit une suite {zn }∞
n=1 de G par récurrence
de la façon suivante :
(a) on choisit z1 dans G.
'
∞
(b) Si {zi }n−1
est
construite,
alors
puisque
K
+
i<n zi est compact et que {Qk }k=1 est
i=1
une suite '
croissante de parties de G dont la réunion est dense dans G, il existe k ≥ 1 tel
que K + i<n zi ⊂ Qk + B(0, ηn /2). On pose alors zn := yk,n,θn .
'
Les conditions (2) et (3) et la complétude
de G impliquent que z = ∞
n=1 zn est bien
'
∗
défini. De plus, pour tout n ∈ N , d(z, i≤n zi ) ≤ ηn /2. Alors, pour tout n ∈ N∗ ,
K + z ⊂ zn + Qk + B(0, ηn /2) + B(0, ηn /2) ⊂ Fk,n,θn ,
la dernière inclusion provenant de la définition de zn . Ceci implique donc bien que
K + z ⊂ Fnθn pour tout n ∈ N∗ , et que donc K + z ⊂ Fθ .
On introduit maintenant les notations suivantes : soient θ = (θn )n≥1 et γ = (γn )n≥1
deux éléments de {0, 1}N . On écrit θ⊥γ s’il existe un partie infinie I ⊂ N∗ telle que pour
tout i ∈ I, θi += γi .
On choisit une partie non-dénombrable Γ ∈ {0, 1}N telle que pour tout θ, γ ∈ Γ,
θ⊥γ si θ += γ. Montrons que la famille {Fθ }θ∈Γ vérifie les conditions du théorème. Il suffit donc de montrer que tout θ, γ ∈ Γ, (g + Fθ ) ∩Fγ est compact pour tout g ∈ G si θ += γ.
Fixons à présent θ, γ ∈ Γ tels que θ += γ, et soit g ∈ G. L’ensemble (g + Fθ ) ∩ Fγ étant
fermé, il suffit de montrer qu’il est précompact.
Soit η > 0. Puisque θ⊥γ, on peut choisir n ≥ 1 tel que ηn < η et que θn += γn , puis
m ≥ 1 tel que d(g, gm) < ηn /2. Par construction de Fθ on a donc :
. .
*
*
(yk,n,θn + Qk + B(0, 3ηn /2)) ∩
(yk,n,γn + Qk + B(0, ηn )) ,
(g + Fθ ) ∩ Fγ ⊂ gm +
⊂
-
k≥1
*
.
(gm + yk,n,θn + Qk + B(0, 3ηn /2))
k≥1
∩
-
k≥1
*
.
(yk,n,γn + Qk + B(0, ηn )) .
k≥1
CHAPITRE 1. NOTIONS DE PETITESSE
14
Puisque θn += γn , on déduit de la condition (5) que
-m−1
. -m−1
.
*
*
(gm + yk,n,θn + Qk + B(0, 3ηn /2)) ∩
(yk,n,γn + Qk + B(0, ηn )) .
(g+Fθ )∩Fγ ⊂
k≥1
k≥1
L’ensemble fermé (g + Fθ ) ∩ Fγ est donc contenu dans une réunion finie de boules de
rayon au plus 2η, il est donc précompact.!
Terminons cette section par quelques exemples de parties Haar-négligeables. Dans un
espace de Banach séparable X il est facile de construire des parties Haar-négligeables
grâce à la remarque suivante : si E est un sous-espace de dimension finie, m la mesure de
Haar définie sur E, alors tout borélien A vérifiant m(E ∩ (A + x)) = 0 pour tout x ∈ X
est Haar-négligeable. En effet, toute mesure de probabilité sur E absolument continue
par rapport à m est une mesure test. On en déduit immédiatement l’exemple suivant.
Exemple 1.1.1
Si Z est un sous-espace vectoriel borélien strict de X, alors Z est Haar-négligeable.
Démonstration
La preuve est immédiate en posant E = V ect(x), avec x ∈
/ Z, et en utilisant la remarque précédente.!
L’exemple suivant est issu de la géométrie différentielle.
Définition 1.1.2 [HSY]
Si U ⊂ Rn est une variété on notera Tx (U) l’espace tangent à U en x ∈ U. La
différentielle en x ∈ U d’une fonction f de classe C 1 sur U sera notée Dfx .
Soient U ⊂ Rn et V ⊂ Rm deux variétés. Une fonction f : U −→ Rm de classe C 1
est dite transversale à V si, pour tout x ∈ U tel que f (x) ∈ V , Dfx (Tx (U)) ∪ Tf (x) (V )
engendre Rm .
Il s’ensuit que si la codimension de V est strictement supérieure à la dimension de
U, alors f (U) ∩ V = ∅. Grâce à cette remarque, l’exemple suivant est une application
directe du théorème transversal des jets ([HSY]).
Exemple 1.1.2 [HSY]
1. Soit k ∈ N∗ ; alors le complémentaire dans C k (R, R) de l’ensemble des fonctions
telles que pour tout x de R, il existe au plus un entier i, 0 ≤ i ≤ k, tel que f (i) (x) = 0
est Haar-négligeable.
2. De même, le complémentaire dans C ∞ (R, R) de l’ensemble des fonctions telles que
pour tout x de R, il existe au plus un entier i tel que f (i) (x) = 0 est Haar-négligeable.
CHAPITRE 1. NOTIONS DE PETITESSE
1.2
15
Boréliens non Haar-négligeables et non compactivores
Nous allons montrer dans cette section que dans un espace de Banach et dans certains
groupes Polonais, il existe des boréliens qui sont non Haar-négligeables et qui ne sont pas
compactivores. Dans le cas d’un espace de Banach, c’est assez simple.
Proposition 1.2.1
Soit X un espace de Banach séparable, il existe des parties boréliennes de X qui ne sont
ni Haar-négligeables, ni compactivores.
Démonstration
Soit H un hyperplan fermé de X, soit une droite D supplémentaire de H dans X, et
soit Z ⊂ D un ensemble dénombrable et dense dans D. On pose A := ∪z∈Z (z + H), alors
/ ne l’est pas. Si K est un segment
A est Haar-négligeable dons son complémentaire A
/ ne contient aucun translaté d’aucun ouvert non-vide de
fermé non-trivial de D, alors A
/ n’est dons pas compactivore.!
K, A
Pour un groupe abélien Polonais, on a le résulat suivant.
Proposition 1.2.2
Soit G un groupe abélien Polonais et soit H un sous-groupe fermé de G. Si l’une des
conditions suivantes est vérifiée :
1. H est localement compact et non-discret,
2. le quotient M = G/H est localement compact et non-discret,
alors il existe des parties boréliennes de G qui ne sont ni Haar-négligeables, ni compactivores.
Démonstration
Supposons que la première condition est vérifiée. Soit C un borélien de G qui rencontre
chaque classe d’équivalence modulo H en exactement 1 point (un tel borélien existe toujours, voir théorème 12.17 [K]), et soit Q ⊂ H un ensemble dénombrable et dense dans
H. On pose A := ∪q∈Q (z + C), alors C et donc A est Haar-négligeable (toute mesure
continue à support inclus dans H est une mesure test pour C), donc son complémentaire
/ ne l’est pas. Si K est un voisinage compact de 0 dans H, alors A
/ ne contient aucun
A
/ n’est donc pas compactivore.!
translaté d’aucun ouvert non-vide de K, A
Pour démontrer le deuxième cas, on a besoin du lemme suivant.
CHAPITRE 1. NOTIONS DE PETITESSE
16
Lemme 1.2.1
Soit G et H deux espaces Polonais, et soit p : G → H une application continue, ouverte
et surjective.
Alors pour tout compact non-vide L ⊂ H, il existe un compact non-vide K ⊂ G tel
que pour tout ouvert O ⊂ G vérifiant K ∩ O += ∅, il existe un ouvert V ⊂ H vérifiant :
∅ += V ∩ L ⊂ p (K ∩ O) .
Démonstration
On choisit des distances sur G et H, qu’on notera toutes les deux d, telles que (G, d)
et (H, d) soient complets. On utilise les notations suivantes :
– Pour tout n ≥ 1 , pour tout 1 ≤ k ≤ n, et tout s ∈ Nn , on note sk l’élément de
s ∈ Nk vérifiant
sk (i) = s(i), 1 ≤ i ≤ k.
– Soit (s1 , s2 ) ∈ N<N × N<N , on écrit s1 / s2 s’il existe k ≥ 1 tel que s1 = s2k .
– Pour tout s ∈ N<N et pour tout I ⊂ N<N , on pose I(s) := {s( : s( ∈ I, s / s( }.
Soit L un compact non-vide de H. Pour tout n ≥ 1, on construit une partie finie
I n ⊂ Nn , une famille finie (xs )s∈I n de points de G, une famille finie (ys )s∈I n de points de
L et une famille finie (rs )s∈I n de réels strictement positifs telles que :
0
1. pour tout n ≥ 1, L ⊂ s∈I n BH (ys , rs ),
2.
3.
4.
5.
6.
7.
pour
pour
pour
pour
pour
pour
tout
tout
tout
tout
tout
tout
n ≥ 1 et pour tout s ∈ I n , p(xs ) = ys et BH (ys , rs ) ⊂ p (BG (xs , 2−n )),
n ≥ 1, I n+1 = ∪s∈I n I n+1 (s),
n ≥ 1, pour tout s ∈ I n , et pour tout s( ∈ I n+1 (s), xs" ∈ BG (xs , 2−n ),
n ≥ 1, pour tout s ∈ I n , et pour tout s( ∈ I n+1 (s), rs" < r2s ,
n ≥ 1, pour tout s ∈ I n , et pour tout s( ∈ I n+1 (s), ys" ∈ BH (ys , rs ),
0
n ≥ 1, pour tout s ∈ I n , L ∩ BH (ys , rs ) ⊂ s" ∈I n+1 (s) BH (ys" , rs" ).
Pour 0
tout x ∈ p−1 (L), on choisit rx > 0 tel que BH (p(x), rx ) ⊂ p (BG (x, 2−1 )).
Puisque x∈p−1(L) BH (p(x), rx ) est un recouvrement ouvert de L, on peut choisir une
partie
finie I 1 ⊂ N et une famille finie (xs )s∈I 1 de points de p−1 (L) telles que L ⊂
0
s∈I 1 BH (p(xs ), rxs ). On pose alors ys = p(xs ) et rs = rxs ; les points 1 et 2 sont alors
vérifiés.
Si les familles I k ⊂ Nk , (xs )s∈I k ,(ys )s∈I k et (rs )s∈I k sont construites jusqu’à un certain
rang n ≥ 1, on les construit au rang suivant de la façon suivante :
Pour tout s ∈ I n , L∩BH (ys , rs ) est un compact non-vide de H inclus dans p (BG (xs , 2−n )).
Pour tout x ∈ BG (xs , 2−n )∩p−1 (L), on choisit rx > 0 tel que BH (p(x), rx ) ⊂ p (BG (x, 2−n−1 ))
et rx < r2s .
0
Puisque x∈BG (xs ,2−n )∩p−1 (L) BH (p(x), rx ) est un recouvrement ouvert de L∩BH (ys , rs ),
une famille finie (xs )s∈I s de points de
on peut choisir une partie finie I s ⊂ Nn+1 (s) et 0
BG (xs , 2−n ) ∩ p−1 (L) telles que L ∩ BH (ys , rs ) ⊂ s∈I s BH (p(xs ), rxs ).
CHAPITRE 1. NOTIONS DE PETITESSE
17
On pose alors I n+1) = ∪s∈I n I s et on pose pour tout s ∈ I n+1 ys = p(xs ) et rs = rxs .
Les suites ainsi construites vérifient donc les 7 points requis.
Si on fixe à présent k ≥ 1, s ∈ I k et y ∈ L ∩ BH (ys , rs ), on peut construire une suite
(sn )n≥k de N<N telle que :
– pour tout n ≥ k, sn ∈ I n ,
– si n ≤ m, sn / sm ,
– sk = s,
– pour tout n ≥ k, y ∈ BH (ysn , rsn−1 ).
On pose sn = sn . Pour tout n ≥ 1, on choisit sk+n ∈ I k+n tel que y ∈ BH (ysk+n , rsk+n )
k+n
et sk+n−1
= sk+n−1 , un tel choix est possible par construction des familles I n et (ys" )s" ∈I n .
La suite (sn )n≥k vérifie bien les quatres points requis.
Enfin on pose
K :=
1
n≥1
∪s∈I n BG (xs , 2−n+2 ).
L’ensemble K est pré-compact par construction, c’est donc un compact de G. Il vérifie
la propriété suivante :
Soit k ≥ 1 et soit une suite (sn )n≥k de N<N telle que sn ∈ I n pour tout n ≥ k,
et telle que sn / sm si n ≤ m. Alors toute suite (xn )n≥k de points de G vérifiant
(xn ) ∈ BG (xsn , 2−n+1) converge dans G vers un point x et pour tout n ≥ k,
x ∈ BG (xsn , 2−n+2 ). En particulier x ∈ K.
En effet pour tout n ≥ k et pour tout m ≥ 1,
n+m
d(x
n+k
, xsn ) ≤ d(x
, xsn+m ) +
n+m−1
"
d(xsi , xsi+1 ),
i=n
<2
−n−m+1
<2
−n+2
+
n+m−1
"
2−i+1 ,
i=n
.
Donc pour tout n ≥ k et pour tout m ≥ 1, (xn+m ) ∈ BG (xsn , 2−n+2 ). La suite (xn )n≥k
est donc de Cauchy, elle converge alors vers un point x ∈ G, et x ∈ BG (xsn , 2−n+2 ) pour
tout n ≥ 1.
Soit O un ouvert de G tel que K ∩ O += ∅, il existe alors un entier k ≥ 1 et s ∈ I k tel
que
BG (xs , 2−k+2) ⊂ O.
Soit y ∈ L ∩ BH (ys , rs ) += ∅, il existe donc une suite (sn )n≥k de N<N telle que
CHAPITRE 1. NOTIONS DE PETITESSE
18
– pour tout n ≥ k, sn ∈ I n ,
– si n ≤ m, sn / sm ,
– sk = s,
– pour tout n ≥ k + 1, y ∈ BH (ysn , rsn−1 ).
Puisque BH (ysn , rsn−1 ) ⊂ p (BG (xsn , 2−n+1 )), on peut construire une suite (xn )n≥k+1
de points de G vérifiant (xn ) ∈ BG (xsn , 2−n+1) et p(xn ) = y.
Cette suite converge vers x ∈ K ∩ BG (xs , 2−k+2) ⊂ K ∩ O et p(x) = y.
On a donc L ∩ BH (ys , rs ) ⊂ p (K ∩ O). !
On peut à présent terminer la démonstration. Soit Q ⊂ M un ensemble dénombrable
et dense dans M = G/H et soit p : G → M l’application quotient. On pose A := p−1 (Q) ;
A étant la réunion dénombrable de translatés de H, A est Haar-négligeable. Soit L un
voisinage compact de 0 dans M ; p étant continue est ouverte, il existe d’après le lemme
précédent un compact K de G tel que l’image de tout ouvert non-vide de K par p
/ le complémentaire de A dans G,
contienne un ouvert non-vide de L. On en déduit que A,
ne contient le translaté d’aucun ouvert non-vide de K, il n’est donc pas compactivore.
1.3
Gauss-négligeabilité et σ-porosité
On va introduire deux autres notions de petitesse : la Gauss-négligeabilité et la σporosité. La Gauss-négligeabilité interviendra dans la section 1.4 et dans la section 3.5 ;
la σ-porosité jouera un rôle important dans le chapitre 4.
1.3.1
Gauss-négligeabilité
On commence par donner la définition d’une mesure gaussienne sur un espace de
Banach ainsi que quelques résultats sur ces mesures. Pour des informations plus complètes
on pourra consulter [Bo] ou [H]. Puis on donnera la définition de la Gauss-négligeabilité
ainsi que celle de propriétés équivalentes.
Définition 1.3.1
Soit X un espace de Banach et soit B la tribu de ses boréliens.
– Une variable aléatoire réelle f sur (X, B) est une variable aléatoire gaussienne
centrée si c’est une variable aléatoire de loi normale centrée, c’est-à-dire si sa
distribution est égale à
t2
1
√ e− 2σ2 , σ > 0, t ∈ R.
σ 2π
– Pour toute mesure de probabilité µ ∈ P (X), f ∈ X ∗ peut être vue comme une
variable aléatoire réelle sur (X, B, µ). Une mesure de probabilité µ ∈ P (X) est une
CHAPITRE 1. NOTIONS DE PETITESSE
19
mesure Gaussienne centrée si pour tout f ∈ X ∗ , f est soit une variable aléatoire
gaussienne centrée, soit est nulle presque-partout.
Si de plus f = 0 est la seule forme linéaire nulle presque-partout, on dit que µ est
non-dégénérée.
Toutes les mesures Gaussiennes considérées dans ce manuscrit seront centrées même
si ce n’est pas précisé. Il est bien connu qu’une mesure µ est Gaussienne
' si et seulement si elle est la loi d’une série gaussienne presque-sûrement convergente n≥0 gn xn , où
(gn : Ω → R)n≥0 est une suite de variables aléatoires indépendantes de loi normale centrée
réduite et (xn )n≥0 une suite topologiquement libre (i.e. aucun élément de la suite n’appartient à l’espace fermé engendré par les autres) de X. La mesure µ est non-dégénérée
si l’espace engendré par (xn )n≥0 est dense dans X.
Dans les espaces lp , p ≥ 1, on sait '
caractériser les séries Gaussiennes presque-sûrement
convergentes : la série Gaussienne
n≥0 gn xn est presque-sûrement convergente si et
seulement si
. p2
" "
|1e∗n , xi 2|2
< ∞,
n≥0
i≥0
de lp . En particulier si xn est colinéaire à en pour tout
où (en )n≥0 désigne la base canonique
'
n≥
'0, la série Gaussienne n≥0 gn xn est presque-sûrement convergente si et seulement
si n≥0 xn converge dans lp .
Dans un espace de Banach quelconque, on utilise pour caractériser les séries Gaussiennes presque-sûrement convergentes le théorème classique suivant.
Théorème 1.3.1
Si µ est une mesure Gaussienne, on peut définir un opérateur Rµ : X ∗ → X linéaire,
continu, symétrique (1Rµ (f ), g2 = 1Rµ (g), f 2 pour tout f, g ∈ X ∗ ), positif (1Rµ (f ), f 2 ≥ 0
pour tout f ∈ X ∗ ) et tel que pour tout f, g ∈ X ∗ ,
$
1f, x21g, x2dµ(x).
1Rµ (f ), g2 =
X
On appelle Rµ l’ opérateur de covariance de µ, il caractérise entièrement µ. '
Si de plus µ est la loi d’une série gaussienne presque-sûrement convergente n≥0 gn xn ,
alors Rµ est défini par
"
1f, xn 21g, xn 2.
1Rµ (f ), g2 =
n≥0
La proposition élémentaire suivante permet de construire directement des mesures
gaussiennes centrées à partir d’une autre (voir [BL]).
CHAPITRE 1. NOTIONS DE PETITESSE
20
Proposition 1.3.1
Soient Y , X deux espaces de Banach, soit T : Y → X un application linéaire continue,
et soit µ et une mesure gaussienne centrée sur Y . Alors ν, la mesure image de µ par T ,
est une mesure gaussienne centrée sur X. Si de plus µ est non-dégénérée et si T est à
image dense dans X, ν est non-dégénérée.
Définissons à présent la Gauss-négligeabilité.
Définition 1.3.2
Soit X un espace de Banach. On dit qu’un borélien A ⊂ X est Gauss-négligeable si
µ(x + A) = 0 pour toute mesure gaussienne non-dégnérée µ sur X et pour tout x ∈ X.
Par définition, la Gauss-négligeabilité entraı̂ne donc la Haar-négligeabilité, nous verons dans la section 3.5 un exemple de borélien Haar-négligeable non Gauss-négligeable :
le cône positif d’une base de Schauder.
On donne à présent des définitions équivalentes de la Gauss-négligeabilité.
Définition 1.3.3
Soit X un espace de Banach et soit B(X) l’ensemble des parties boréliennes de X.
– Une mesure de probabilité sur X est une mesure cubique si elle est la mesure
N
image de2 la mesure
produit
3
' standard de [0, 1] par une application affine de la
forme T (qi )i≥1 = x + i≥1 qi xi où x ∈ X et où (x'
i )i≥1 est une suite X qui engendre un espace vectoriel dense dans X et telle que i≥1 "xi " < ∞. Cette mesure
est notée µ(xi )i≥1 ,x .
– Un borélien A ⊂ X est cube-négligeable si sa mesure est nulle pour toute mesure
cubique.
– Soit λ0 la mesure de Lebesgue 1-dimensionnelle. Alors pour tout x ∈ X, y ∈ X, et
pour toute suite (xi )i≥1 de X on définit
4
A(x, y) := {B ∈ B(X) : λ0 (B ∩ (y + V ect(x))) = 0} et A(x) := y∈X A(x, y).
On note A((xi )i≥1 ) l’ensemble de tous les boréliens A qui peuvent s’écrire A =
∪i≥1 Ai où Ai ∈ A(xi ) pour tout i ≥ 1.
Un borélien A ⊂ X est Aronszajn-négligeable si pour toute suite (xi )i≥1 de X qui
engendre un espace vectoriel dense dans X on a A ∈ A((xi )i≥1 ).
Remarque 1.3.1
Un sous-espace vectoriel strict et fermé Y ⊂ X est toujours Aronszajn-négligeable. En
effet si (xi )i≥1 est une suite de X engendrant un espace vectoriel dense dans X, il existe
un entier n ≥ 1 tel que xn ∈
/ Y . Alors pour tout x ∈ X, Y ∩ (x + V ect(xn )) est soit vide
soit réduit à un point, et donc de mesure de Lebesgue nulle.
CHAPITRE 1. NOTIONS DE PETITESSE
21
Le résultat suivant est dû à M. Csörnyei ([Cs]), on poura également en trouver une
preuve dans [BL].
Théorème 1.3.2
La Gauss-négligeabilité, la cube-négligeabilité et la Aronszajn-négligeabilité sont des propriétés équivalentes.
1.3.2
σ-porosité
La porosité a été introduite en 1969 par E. P. Dolženko ([D]), et largement étudiée
depuis ; on poura consulter [Z] et [Z2] pour plus d’informations.
Définition 1.3.4
Soit (E, d) un espace métrique et soit A ⊂ E.
– Soit x ∈ E, s’il existe λ > 0 et une suite (rn )n≥0 de réels strictement positifs tendant
vers 0 tels que, pour tout n ≥ 0, il existe y ∈ B(x, rn ) avec B(y, λrn ) ∩ A = ∅ ; on
dit que A est λ-poreux en x.
– Si pour tout a ∈ A il existe λa > 0 tel que A soit λa -poreux en a, on dit que A est
poreux. S’il existe λ > 0 tel que A soit λ-poreux en tout point a ∈ A, on dit que A
est λ-poreux.
– L’ensemble A est dit σ-poreux s’il est contenu dans une réunion dénombrable d’ensembles poreux. Soit λ > 0, L’ensemble A est dit σ-λ-poreux s’il est contenu dans
une réunion dénombrable d’ensembles λ-poreux.
La σ-porosité n’est pas comparable avec la Haar-négligeabilité ou la Gauss-négligeabilité
(voir [BL], pages 166–168). Le lemme suivant, connu sous le nom de lemme de Foran ([Z],
lemme 4.3), est le seul outil pour vérifier qu’un ensemble n’est pas σ-poreux.
Lemme 1.3.1
Soit (E, d) un espace métrique complet, et soit λ > 0. Soit F une famille de parties
fermées et non-vides de E. Si pour tout F ∈ F et toute partie ouverte V ⊂ E tels que
V ∩ F += ∅, il existe F ( ∈ F tel que F ( ⊂ F , F ( ∩ V += ∅ et F n’est λ-poreux en aucun
point de F ( . Alors aucun F ∈ F n’est σ-λ-poreux.
On peut réécrire ce lemme de la façon suivante.
Corollaire 1.3.1
Soit (E, d) un espace métrique complet, et soit λ ∈ (0 , 12 ). Soit F une famille de parties
fermées et non-vides de E. Si pour tout F ∈ F et toute partie ouverte V ⊂ E tels que
V ∩ F += ∅, il existe F ( ∈ F tel que F ( ⊂ F , F ( ∩ V += ∅ et F n’est λ-poreux en aucun
point de F ( . Alors aucun F ∈ F n’est σ-poreux.
CHAPITRE 1. NOTIONS DE PETITESSE
22
Ce corollaire se déduit immédiatement du lemme de Foran et du lemme suivant ([Z2],
proposition 4.4).
Lemme 1.3.2
Soit (E, d) un espace métrique, et soit λ ∈ (0 , 12 ). Si A ⊂ E est σ-poreux, alors A est
σ-λ-poreux.
1.4
Complexité
1.4.1
Généralités
Les notations introduites ici sont usuelles et seront conservées tout au long de ce
chapitre.
Soit X un espace polonais muni d’une métrique complète d et soit (On )n≥1 une base
dénombrable de sa topologie. Alors B(X) désigne l’ensemble des parties boréliennes de X,
F (X) l’ensemble de ses parties fermées muni de la σ-algèbre TF engendrée par la famille
({F ∈ F (X) : F ∩ On += ∅})n≥1 , et K(X) l’ensemble de ses parties compactes muni de la
σ-algèbre TK engendré par ({K ∈ K(X) : K ∩ On += ∅})n≥1 . Alors F (X) (respectivement
K(X)) est standard, c’est-à-dire que l’on peut le munir d’une topologie polonaise pour
laquelle TF (respectivement TK ) est l’ensemble des ses parties boréliennes (voir [K], page
75).
On peut expliciter une telle topologie sur K(X) ([K], page 25) ; il s’agit de la topologie
de Vietoris qui est générée par les ensembles {K ∈ K(X) : K ⊆ U} et les ensembles
{K ∈ K(X) : K ∩ U = ∅}, où U est un ouvert de X. On a alors une métrique compatible
avec cette topologie, la métrique de Hausdorff dH définie par
– dH (K, L) = 0 si K = L = ∅,
– dH (K, L) = 1 si exactement un seul des deux compacts est vide,
– dH (K, L) = max {maxx∈K d(x, L), maxx∈L d(x, K)} si K += ∅ et L += ∅.
On munira systématiquement K(X) de la métrique dH .
'
Une partie A d’un espace standard X est dite analytique, ou 11 , s’il existe un espace
polonais Y et un borélien
B ⊂ Y × X tel que A = π(B) où π désigne la projection
'
canonique sur X ; 11 (X) désigne
%1l’ensemble des parties analytiques de X. Une partie
A⊂
% X est dite co-analytique, ou 1 , si elle est le complémentaire d’une partie analytique,
et 11 (X) désigne l’ensemble
'1 des parties co-analytiques de X. Pour tout n ≥ 1, une partie
A ⊂ X est dite de classe n+1 s’il existe un espace polonais Y et une partie B ⊂ Y × X
'
%
de classe 1n telle que A = π(B) où π désigne la projection canonique sur X ; 1n+1 (X)
'
désigne l’ensemble des parties de classe 1n+1 de X. Une partie A ⊂ X est dite de classe
'
%
%1
d’une partie de classe 1n+1 , et 1n+1 (X) désigne
n+1 si elle est le complémentaire
%
l’ensemble des parties de classe 1n+1 de X.
CHAPITRE 1. NOTIONS DE PETITESSE
23
%
%
Une partie A ⊂ X est dite 11 -hard si elle réduit toute partie B ∈ 11 (Y ) de tout
espace polonais Y , c’est à dire
%1 s’il existe une fonction
%1borélienne f : Y → X telle que
−1
B = f (A). Si de plus A ∈ 1 (X) on dit que A est 1 -complète.
Pour l’espace
K(X)%des parties compactes d’un espace polonais X, on utilisera les
%
notions de 11 -hard et 11 -complète associées
%1à la topologie de Vietoris.
Pour montrer qu’une partie A ⊂ X est 1%
-complète il suffit donc de montrer qu’elle
est co-analytique et qu’elle réduit une partie 11 -hard d’un espace polonais. Le résultat
classique ([K], page 209) suivant fournit une telle partie :
Exemple 1.4.1
Soit C l’espace compact {0, 1}N , et soit N ⊂ C l’ensemble dénombrable formé de tous
%
les éléments (xn )n≥1 de C tels que {n : xn = 1} est fini. Alors K(N) est une partie 11 complète de K(C).
Il existe de nombreux résultats sur la complexité de l’ensemble des parties compactes
(resp. fermées) vérifiant une notion de petitesse dans l’ensemble des parties compactes
(resp. fermées) d’un espace Polonais X. Sur la σ-porosité on a le résultat suivant :
Si X est compact sans points
%1 isolés, alors l’ensemble des parties compactes de X σporeuses de X est une partie 1 -complète de K(X).
On doit ce théorème à G. Debs et à D. Preiss mais leur preuve n’a pas été publiée,
on trouvera une autre preuve dans [ZP]. Enfin ce résultat peut être étendu aux espaces
localement compacts ([ZZ]).
Par définition de la Haar-négligeabilité, il est clair que l’ensemble
'1F H(X) des parties
fermées Haar-négligeables d’un espace Polonais X est de classe 2 dans F (X). Dans
[S2], S. Solecki prouve que F H(X) réduit ND l’ensemble des parties non-dominantes
de NN , une partie A de NN est dite dominante si pour tout s ∈ NN , il existe t ∈ A
tel que s(n) ≤ t(n) pour tout n ∈
/ I où I est une partie finie de N. On sait que ND
n’est ni analytique, ni co-analytique dans NN (voir [SR] pour une %
description
exacte de
'1
'
1
la complexité de ND), la complexité de F H(X) est donc “entre” 1 ∪ 1 et 12 .
1.4.2
Complexité des fermés Gauss-négligeables
Théorème 1.4.1
Soit X un espace de Banach séparable, soit F G(X) (resp. KG(X)) l’ensemble des parties
fermées (resp. compactes) de X Gauss-négligeables.
%
Alors F G(X) (resp. KG(X)) est une partie 11 -complète de F (X) (resp. K(X)).
On doit prouver d’une part qu’il sagit bien de parties co-analytiques, et qu’elles
réduisent l’ensemble K(N) introduit en 1.4.1.
CHAPITRE 1. NOTIONS DE PETITESSE
24
Preuve de la co-analycité
On va montrer la co-analycité de F G(X) (celle de KG(X) s’obtient exactement de
1
la
' séparable des suites de X telles que
' même manière). Soit l (X) l’espace de Banach
i≥1 "xi " < ∞, muni de la norme " (xi )i≥1 " =
i≥1 "xi ".
Soit (On )n≥1 une base dénombrable de la topologie de X. Soit ld1 (X) ⊂ l1 (X) l’ensemble des éléments de l1 (X) qui engendrent un espace vectoriel dense dans X. Alors
ld1 (X) est un borélien de l1 (X).
En effet la suite (xi )i≥1 engendre un espace vectoriel dense dans X si et
'seulement si
m
pour tout n ≥ 1, il existe un entier m ≥ 1 et q := (qi )1≤i≤m ∈ Q tels que 1≤i≤m qi xi ∈
On . De plus, pour tout entier m ≥ 1 et pour tout q = (qi )1≤i≤m ∈ Qm l’application
2
3 '
linéaire Sq,m : l1 (X) → X définie par Sq,m (xi )i≥1 = 1≤i≤m qi xi est continue.
1 * *
−1
Sq,m
(On ) est bien un borélien de l1 (X).
Donc ld1 (X) =
n∈N m∈N∗ q∈Qm
Pour tout x ∈ X et pour tout (xi )i>0 ∈ N(X), on note µ(xi )i≥1 ,x la mesure image de
la mesure
produit standard µ de [0, 1]N par l’application affine continue T : (qi )i≥1 →
'
x + i≥1 qi xi . Une mesure de probabilité sur X est une mesure cubique si et seulement
si elle s’écrit µ(xi )i≥1 ,x avec (xi )i≥1 ∈ ld1 (X).
Posons F NG(X) = F (X) \ F G(X). Alors d’après le théorème 1.3.2, F ∈ F NG(X) si
et seulement si il existe une mesure cubique sur X qui n’est pas nulle sur F , c’est à dire
si et seulement si il existe x ∈ X et (xi )i≥1 ∈ ld1 (X) ⊂ l1 (X) tels que µ(xi )i≥1 ,x (F ) > 0 .
Soit alors π : X × l1 (X) × F (X) → F (X) la projection canonique. Alors
78
562
3
1
F NG(X) = π
x, (xi )i≥1 , F : (xi )i≥1 ∈ ld (X), µ(xi )i≥1 ,x (F ) > 0 .
Pour prouver que F G(X) est analytique, il suffit donc de prouver que
: 1 ;2
3
<
9
x, (xi )i>0 , F : µ(xi )i>0 ,x (F ) > 0
X × ld1 (X) × F (X)
;2
3
<
est un borélien de X × l1 (X) × F (X) et donc que x, (xi )i>0 , F : µ(xi )i>0 ,x (F ) > 0
est un borélien de X × l1 (X) × F (X).
Soit Cb (X) l’ensemble des fonctions continues et bornées sur X à valeurs réelles. Pour
f ∈ Cb (X) et pour n ∈ N∗ ∪ {∞} on définit une fonction à valeurs réelles sur l’espace
produit 22
X × l1 (X)33
par la
! formule :
'
Tf,n x, (xi )i≥1 = (qi ) ∈[0,1]N f (x + ni=1 qi xi ) dµ,
i≥1
et on pose Tf := Tf,∞ .
Puisque µ est une mesure de probabilité et que f ∈ Cb (X), il est clair que Tf,n est
continue pour n ∈ N∗ . Comme (xi )i>0 ∈ l1 (X) et comme f ∈ Cb (X), il résulte du
théorème de convergence dominée que Tf,n converge ponctuellement vers Tf . La fonction
Tf est donc borélienne pour tout f ∈ Cb (X).
CHAPITRE 1. NOTIONS DE PETITESSE
25
1
Soit P (X) l’espace polonais des mesures de probabilités5sur X et soit
8 T : X × l (X) ×
22
33
F (X) → P (X) × F (X) définie par T x, (xi )i≥1 , F = µ(xi )i≥1 ,x , F . On va montrer
que T est borélienne.
>
$
$
1 =
Soit ν0 ∈ P (X) ; les ensembles Vν0 ,f1 ,...,fn =
ν ∈ P (X) : | fi dν0 − fi dν| < % ,
1≤i≤n
où % > 0, où n ≥ 1, et où fi ∈ Cb (X), forment une base des voisinages ouverts de ν0 .
Il suffit donc de prouver que pour tout ensemble Vν0 ,f1 ,...,fn et pour tout borélien B de
1
F (X), T −1 (Vν0 ,f1 ,...,fn × B) est un?@
borélien
de X ×l
(X)×F (X).
AB C’est bien le cas puisque
$
$
1
T −1 (Vν0 ,f1 ,...,fn × B) =
Tf−1
× B et que les fonctions
fi dν0 − %, fi dν0 + %
i
1≤i≤n
Tfi sont boréliennes.
Pour démonter que F NG(X) est analytique, il ne reste plus qu’à montrer que l’ensemble
) > 0} est un borélien
de P (X) × F (X), puisque
62 {(ν, F ) : ν(F
7
3
x, (xi )i≥1 , F : µ(xi )i≥1 ,x (F ) > 0 = T −1 ({(ν, F ) : ν(F ) > 0}).
On va en fait montrer que son complémentaire, c’est-à-dire l’ensemble {(ν, F ) : ν(F ) = 0},
est un borélien de P (X) × F (X).
Soit (Vn )n≥1 la suite des unions finies de (On )n≥1 . Soit (ν, F ) ∈ {(ν, F ) : ν(F ) = 0}
et soit*F/ le complémentaire de F . Alors F/ est ouvert, donc il existe I ⊂ N∗ tel que
F/ =
On et ν(F/) = 1. Donc pour tout n ∈ N∗ il existe un compact Kn ⊂ F/ tel que
n∈I
*
.
Enfin
puisque
On est un recouvrement ouvert de Kn , on en déduit que :
ν(Kn ) > n−1
n
n∈I
(ν, F ) ∈ {(ν, F ) : ν(F ) = 0} si et seulement si pour tout n ∈ N∗ il existe in ∈ N tel
et Vin ⊂ F/. Ce?qui s’écrit finalement : =
que ν(Vin ) > n−1
n
>B
7
1* 6
n−1
/
F ∈ F (X) : Vi ⊂ F × ν ∈ P (X) : ν(Vi ) >
{(ν, F ) : ν(F ) = 0} =
n
n≥1 i≥1
Pour toute partie ouverte O de X,
6
7
F ∈ F (X) : O ⊂ F/ = F (X) \ {F ∈ F (X) : F ∩ O += ∅} .
6
7
Donc l’ensemble F ∈ F (X) : O ⊂ F/ est un borélien de F (X). De plus la fonction indicatrice de O est la limite simple d’une suite de fonctions continues et uniformément
bornées sur X donc pour tout % > 0, l’ensemble {ν : ν(O) > %} est un borélien de P (X).
De ces dernières remarques et de l’égalité ci-dessus on déduit donc que {(ν, F ) : ν(F ) = 0}
est un borélien de P (X) × F (X) ce qui conclut la preuve de l’analycité de F NG(X).
Preuve de la réduction de K(N)
%
On va montrer que KG(X) réduit K(N) et que donc KG(X) est 11 -hard. Puisque
CHAPITRE 1. NOTIONS DE PETITESSE
26
K(X) ⊂ F (X) et%que la tribu borélienne de K(X) est la restriction de celle de F (X),
alors F G(X) est 11 -hard.
Pour cela on va construire une fonction continue f : C → K(X) telle que a ∈ N si et
seulement si f (a) ∈ KG(X). Alors il résulte de la définition de la métrique de Hausdorff
et de la compacité de C que la fonction Φ : K(C) → K(X), définie par Φ(A) = ∪a∈A f (a),
est continue, et K(N) = Φ−1 (KG(X)).
'
Soit (xi )i≥1 ∈ ld1 (X). On pose M =
'n i≥1 "xi ". Pour a := (ai )i≥1 ∈ C et pour
j ≥ 1, on pose R(a)j := min {n ≥ 1 : i=1 ai'
= j}, avec la convention R(a)j := 1 si
'
∞
N(a)j = 0 si ∞
i=1 ai = ∞ ; on pose également
i=1 ai < j, N(a)j = 1 sinon. On définit
2
3 '
N
N (a)i
alors fa : [0, 1] → X par fa (qi )i≥1 = i≥1 qi R(a)i xi .
La convergence normale de la série de terme général (xi )i≥1 implique alors la conti5
8
N
N
nuité de fa et puisque [0, 1] est un espace compact on a fa [0, 1] ∈ K(X). On peut
5
8
donc définir une fonction f : C → K(X) par f (a) = fa [0, 1]N . Il reste à démontrer
que f vérifie bien les conditions ci-dessus.
Si a ∈ N, alors f (a) est contenu dans un sous-espace vectoriel Y de dimension finie,
il est donc Aronszajn-négligeable d’après la remarque 1.3.1 et donc Gauss-négligeable
d’après le théorème 1.3.2.
Si a ∈
/ N, alors N(a)i = 1 pour tout i ≥ 1, et (R(a)i xi )i≥1 ∈ ld1 (X). La mesure cubique µ(R(a)i xi )i≥1 ,0 est donc bien définie et µ(R(a)i xi )i≥1 ,0 (f (a)) = 1. Donc f (a) n’est pas
cube-négligeable et f (a) ∈
/ KG(X).
Pour tout entier n ≥ 1 et pour tout a ∈ C, on note Va,n l’ensemble des éléments
de C qui ont les mêmes n premières coordonnées que a. Alors (Va,n )n≥1 est une base de
voisinages ouverts de a.
'
'
Soit a ∈ C, soit n ≥ 1, et soit b ∈ Va,n . On pose m := ni=1 ai = ni=1 bi . Alors
N (a)i
(b)i
< n1 et N
< n1 pour tout i > m.
R(a)i
R(b)i
'
N ai
Soit x ∈ f (a), il existe alors une suite (qi )i≥1 ∈ [0, 1]N telle que x = m
i=1 qi Rai xi +
'
'
m
N ai
N ai
i>m qi Rai xi . Puisque
i=1 qi Rai xi ∈ f (b) on en déduit que :
d(x, f (b)) ≤
" Nai
1
qi
"xi " ≤ M.
Rai
n
i>m
De la même façon on a d(y, f (a)) ≤ n1 M si y ∈ f (b), ce qui prouve la continuité de la
fonction f et achève la démonstration.!
Chapitre 2
Le théorème de Matouskova-Stegall
Dans les articles [MS] et [M3], Matouskova et Stegall ont établi des résultats liant la
réflexivité d’un espace de Banach à la Haar-négligeabilité de ses parties convexes fermées.
Ces résultats peuvent être regroupés dans l’énoncé suivant :
Théorème 2.0.2
Soit X un espace de Banach séparable.
1. Si X est réflexif alors toute partie convexe, fermée et d’intérieur vide de X est
Haar-négligeable.
2. Si X est non réflexif, il existe une partie convexe, fermée et d’intérieur vide de X
qui contient un translaté de toute partie compacte de X.
En particulier, X est réflexif si et seulement si toute partie convexe, fermée et d’intérieur
vide de X est Haar-négligeable.
Nous donnerons dans ce chapitre une démonstration de ce théorème plus courte et
parfois plus générale que la preuve originale. L’assertion (2) est une version affaiblie
d’un résultat présent dans [MS], la preuve donnée dans 2.1 est beaucoup plus courte que
la preuve originale. L’assertion (1) est quant à elle un résultat de [M3], la plus grande
différence avec la démonstration originale concerne un lemme intermédiaire de la section
2.2, obtenu comme la conséquence d’un résultat plus général.
La définition suivante sera utilisée dans la démonstration.
Définition 2.0.1
Une partie convexe C d’un espace de Banach X sera dite engendrante ( spanning) si elle
contient un segment non-trivial dans chaque direction. On a alors Vect(C)=X.
Le lemme suivant permet de caractériser les parties engendrantes.
Lemme 2.0.1
Une partie convexe C d’un espace de Banach X est engendrante si et seulement si C n’est
contenue dans aucun hyperlan affine.
27
CHAPITRE 2. LE THÉORÈME DE MATOUSKOVA-STEGALL
28
Démonstration
Il est clair que si C est engendrante, C n’est contenue dans aucun hyperlan affine.
Réciproquement, si C n’est contenue dans aucun hyperlan affine, on peut par translation
se ramener au cas 0 ∈ C et C n’est alors contenue dans aucun hyperplan vectoriel. Alors
V ect(C) est l’espace tout entier et tout vecteur de X z += 0 peut donc s’écrire
' comme
une combinaison
linéaire finie de vecteurs de C soit z = u − v avec u =
λi ui et
'
et
les
µ
sont
des
réels
positifs
et
les
u
et
les
v
appartiennent
à
v =
µi vi , où les λ'
i
i
i
' i
1
1
C. Soit α = Max { λi , µi}. Puisque 0 ∈ C, α u et α v appartiennent à C et donc
[ α1 v, α1 (v + z)] ⊂ C. L’ensemble C est donc engendrant.!
2.1
Preuve de (2)
Le résultat suivant généralise un résultat contenu dans [MS]. La preuve qui est donnée
dans [MS] est plus longue que celle présentée ici car elle est construite sur des lemmes
qui ont leur intérêt propre mais qui ne sont pas nécessaires pour obtenir (2).
Proposition 2.1.1
Soit C une partie convexe d’intérieur vide d’un espace Banach X, soit H le plus petit
/ le sous-espace vectoriel associé à H. Soit
sous-espace affine fermé contenant C et soit H
(x, y) ∈ X 2 ; alors C + [x, y] est d’intérieur non vide si et seulement si les trois conditions
suivantes sont
:
5 réalisées
8
/ =1
1. codim H
/
2. y − x ∈
/H
3. C est d’intérieur non vide dans H
Démonstration
Par translation,
5 8 on peut se ramener
5 8aux seuls segments [0, z], z ∈ X et z += 0.
/ > 1, ou si codim H
/ = 1 et z ∈ H,
/ alors C + [0, z] est contenu dans
Si codim H
un espace affine fermé strict de X, il est donc d’intérieur vide.
/ = X alors C est engendrante. Soit D = C +[0, z] ; si D n’est pas d’intérieur vide,
Si H
il existe y ∈ X et r > 0 tels que B(y, r) ⊂ D. Puisque C est engendrante, il existe x ∈ C
et α > 0 tels que [x, x + αz] ⊂ C. Par une nouvelle translation, on peut se ramener à
[0, αz] ⊂ C. Si α ≥ 1, alors [0, z] ⊂ C et donc D ⊂ 2C. Ce qui n’est pas possible puisque
C est d’intérieur vide.
1
n
Si α < 1, soit n la
'npartie entière de α ; alors [0, z] ⊂ ∪i=0 [iαz, (i + 1)αz], et donc
D = C + [0, z] ⊂ C + i=0 [0, αz]. Comme précédemment, [0, αz] ⊂ C implique alors que
D ⊂ 2n+1C ce qui 5
n’est
8 pas possible puisque C est d’intérieur vide.
/ = 1 et y − x ∈
/ alors V ect(z) est un supplémentaire topolo/ H,
Enfin si codim H
/ Ces deux espaces définissent donc des projections continues et ouvertes, ce
gique de H.
CHAPITRE 2. LE THÉORÈME DE MATOUSKOVA-STEGALL
29
qui implique alors que C + [0, z] est d’intérieur non vide dans X si et seulement si C est
/
d’intérieur non-vide dans H.!
En particulier si C est une partie convexe, engendrante et d’intérieur vide d’un espace
Banach X, alors, pour tout (x, y) ∈ X 2 , C + [x, y] est d’intérieur vide. Plus généralement
on a le résultat suivant.
Proposition 2.1.2
Soit C une partie convexe, fermée, engendrante et d’intérieur vide d’un espace de Banach
X. Alors pour tout compact K ⊂ X, C+K est aussi d’intérieur vide.
Pour démontrer ce résultat, on a besoin du lemme suivant qui est contenu dans la
démonstration usuelle du théorème de Banach-Dieudonné (voir [MS]).
Lemme 2.1.1
Soit X un espace de Banach, K un compact de B(0,c), avec c > 0, et E une partie dense
de B(0,2c). Alors il existe une suite {Fn }∞
n=1 de parties finies de E telle que :
K⊂
∞
"
2−n Fn .
n=1
Démonstration
Ceci provient directement du fait qu’il existe une suite {Fn }∞
n=1 de parties finies de E
∞
et une suite {Kn }n=1 de compacts de B(0, c) telles que :
'
(∗) K ⊂ ni=1 2−i Fi + 2−n Kn pour tout n ∈ N∗ .
Ces suites se construisent par récurrence : puisque K est compact et que E est dense,
on peut5 choisir F1 telle que 2−18F1 soit un 2c recouvrement fini de K. On pose alors
K1 = 2 (K − 2−1 F1 ) ∩ B(0, c/2) , et (∗) est bien vérifiée.
Si les suites sont construites jusqu’au rang n, on choisit alors Fn+1 de sorte que
−1
2 Fn+1 soit un 2c recouvrement fini du compact Kn , et on pose
5
8
−1
Kn+1 = 2 (Kn − 2 Fn+1 ) ∩ B(0, c/2) .
Alors (∗) est bien vérifiée, ce qui termine la preuve. !
Démonstration de la proposition 2.1.2
Soit K un compact de X. Si C + K n’est pas d’intérieur vide, on peut supposer, par
translation, qu’il existe r > 0 tel que B(0, r) ⊂ C + K. Soit c > 0 tel que K ⊂ B(0, c).
D’après la proposition précédente, il existe alors une suite {Fn }∞
n=1 de parties finies de
'∞ −n
∗
B(0, 2c) telle que K ⊂ n=1 2 Fn . Soit alors n0 ∈ N tel que :
CHAPITRE 2. LE THÉORÈME DE MATOUSKOVA-STEGALL
(∗)
'∞
i=n0
30
2−i Fi ⊂ B(0, 4r ).
Par des utilisations
fermé
' 0 −i successives de la proposition 2.1.1, on montre que le convexe
C0 = C + ni=0
2 conv(Fi ) est d’intérieur vide. On peut donc choisir y ∈ B(0, 4r ) \ C0 et
x∗ dans la sphère unité de X ∗ tels que :
(∗∗)
r
4
≥ 1x∗ , y2 ≥ 1x∗ , u2 pour tout u ∈ C0 .
. La condition
implique alors que dist(x, C0 ) >
Soit alors x ∈ B(0, r) tel que 1x∗ , x2 > 3r
4
'∞ (∗∗)
r
−i
, ce qui au vu de (∗) donne alors : dist(x, C + i=1 2 Fi ) ≥ 4r .
2
Ceci contredit que B(0, r) ⊂ C + K. !
Le résultat suivant est crucial non seulement pour établir (2), mais aussi pour obtenir
les résultats de la section 3.1.
Proposition 2.1.3 (MS)
Soit X un espace de Banach, alors les propositions suivantes sont équivalentes.
(i) : Il existe un convexe fermé et d’intérieur vide Q ⊂ X qui contient un translaté de
toute partie compacte de X.
(ii) : Il existe un convexe fermé et d’intérieur vide P ⊂ X qui contient un translaté de
toute partie compacte de la boule unité de X.
(iii) : Il existe un convexe fermé, borné et d’intérieur vide C ⊂ X qui contient un translaté
de toute partie compacte de la boule unité de X.
(iv) : Il existe une partie E de X dense dans la boule unité de X ainsi qu’un convexe
fermé, borné et d’intérieur vide D ⊂ X qui contient un translaté de toute partie finie de
E.
Démonstration
L’implication (i) ⇒ (ii) est triviale.
Montrons que (ii) ⇒ (iii). Soit P un convexe fermé d’intérieur vide vérifiant (ii).
Supposons que pour tout n ∈ N∗ , il existe un compact Kn ⊂ B(0, n1 ) tel que x + Kn ⊂
P ⇒ "x" ≥ n. Soit K = ∪∞
n=1 Kn ∪ {0} ; alors K est un compact de la boule unité. En
effet si on considère une suite (xn )n≥1 d’éléments de K, soit on peut extraire de (xn )n≥1
une sous-suite contenue dans un seul Kn et qui donc a une valeur d’adhérence, soit on
peut extraire une sous-suite qui converge vers 0. Soit alors z tel que z + K ⊂ P ; puisque
Kn ⊂ K on en déduit que "z" ≥ n pour tout n ∈ N∗ ce qui est absurde.
Donc il existe r ∈ ]0, 1] et c > 0 tels que pour tout
5 compact K ⊂8B(0, r), il existe
zK ∈ B(0, c) vérifiant K + zK ⊂ P . On pose C := 1r P ∩ B(0, r + c) ; alors C vérifie
(iii).
CHAPITRE 2. LE THÉORÈME DE MATOUSKOVA-STEGALL
31
Si (iii) est vérifiée, alors Q = ∪λ≥0 λC est un convexe contenant un translaté de tout
compact de X. On peut de plus supposer que 0 ∈
/ C.
∞
∗
Soit (xn )n=1 une suite d’éléments de C et (an )∞
n=1 une suite d’éléments de R telles
que limn→∞ an xn = z ∈ X. Comme C est fermé et ne contient pas 0, la suite (xn )∞
n=1 est
minorée en norme par un nombre strictement positif. Il s’ensuit donc que la suite (an )∞
n=1
est bornée et, quitte à extraire une sous-suite, on peut la supposer convergente vers a.
1
Si a = 0, alors z = 0 ∈ Q car C est borné. Sinon, (xn )∞
n=1 converge alors vers a z ∈ C
car C est fermé et donc z ∈ Q. Le convexe Q est donc bien fermé.
& = C + [0, −z]. Comme C
Enfin Q est d’intérieur vide. En effet soit z ∈ C, et soit C
contient un translaté de tout compact de B(0,1), C est nécessairement engendrant. Donc,
& est d’intérieur vide. Soit λ ≥ 0, soit n un entier vérifiant
d’après la proposition 2.1.1, C
n ≤ λ < n + 1 et soit x ∈ C ; alors
?
?
B
?
B B
λ
λ
λ
x+ 1−
λx = (n + 1)
z− 1−
z .
n+1
n+1
n+1
& ; le théorème de
& et donc Q = ∪λ≥0 λC ⊂ ∪n∈N (nC)
On en déduit que λC ⊂ (n + 1)C
Baire implique alors que Q est d’intérieur vide. L’implication (iii) ⇒ (i) est donc vérifiée.
L’implication (iii) ⇒ (iv) étant triviale, il ne reste plus qu’à démontrer que (iv) ⇒
(iii).
Soit K un compact de B(0, 2−1 ). Il suffit de montrer que K peut être translaté dans
D car alors C = 2D vérifiera (iii). Soit (Fn )∞
n=1 la suite d’ensembles donnée par le lemme
2.1.1. Soit alors (zn )∞
une
suite
d’éléments
de X telle que zn +Fn ⊂ D pour '
tout n ∈ N∗ .
n=1
∞
−n
Le convexe D étant borné, il en est de même pour (zn )n=1 . On pose alors z = ∞
zn ,
n=1 2
et donc :
∞
∞
"
"
−n
2 Fn ⊂
(2−n Fn + 2−n zn ) ⊂ D,
z+K ⊂z+
n=1
n=1
la dernière inclusion résultant du fait que D est convexe et fermé. !
Avant de démontrer (2), on a encore besoin du lemme classique suivant dû à James
([J]).
Lemme 2.1.2
Soit X un espace de Banach non réflexif ; il existe alors une famille {xn }∞
n=1 de la boule
unité de X et % > 0 tels que pour tout sous-espace de dimension finie Y il existe n ∈ N∗
vérifiant :
dist(Y, conv({xi }∞
i=n )) > %.
Démonstration
CHAPITRE 2. LE THÉORÈME DE MATOUSKOVA-STEGALL
32
La boule fermée B(0, 1) n’est pas faiblement compacte, il existe donc d’après le
théorème de Gantmacher-Smulyan une suite décroissante {Cn }∞
n=1 de convexes fermés
∞
non vides de B(0, 1) telle que ∩n=1 Cn = ∅. Montrons qu’il existe % > 0 et une suite
décroissante {Dn }∞
n=1 de convexes non vides tels que :
1. pour tout n ∈ N∗ , Dn ⊂ Cn ,
2. pour tout compact K ⊂ X, il existe m ∈ N∗ tel que (K + B(0, %)) ∩ Dm = ∅.
Supposons que cela ne soit pas le cas et construisons alors par récurrence une famille
{Cm,n }m∈N∗ ,n∈N∗ de convexes non vides de B(0, 1) qui soit décroissante en n à m fixé et
décroissante en m à n fixé :
Pour tout n ∈ N∗ , posons C1,n = Cn .
Soit k ∈ N∗ et supposons la famille construite pour tout n ∈ N∗ et tout m ∈ {1, . . . k}.
Notre hypothèse implique alors qu’il existe un compact Kk tel que pour tout n ∈ N∗ ,
(Kk + B(0, 2−k )) ∩ Ck,n += ∅. On pose alors Ck+1,n = (Kk + B(0, 2−k )) ∩ Ck,n . La famille {Cm,n }m∈N∗ ,n∈N∗ est donc bien une famille de convexes non vides de B(0, 1) qui est
décroissante en n à m fixé et décroissante en m à n fixé.
Si nous posons Gn = Cn,n += ∅, la suite {Gn }∞
n=1 est décroissante et vérifie que Gn ⊂ Cn
−n
et que Gn+1 ⊂ (Kn + B(0, 2 )). Cette dernière propriété implique alors que Gn+1 peut
être recouvert par un nombre fini de boules de rayon 2−n+1 .
Construisons une suite {yn }∞
n=1 avec yn ∈ Gn . Pour tout δ > 0, tous les membres de la
suite sont donc contenus dans un nombre fini de boules de rayon δ. On peut donc extraire
∞
∞
de {yn }∞
n=1 une suite qui converge vers y ∈ ∩n=1 Gn ⊂ ∩n=1 Cn = ∅. Cette contradiction
prouve donc l’existence de la suite {Dn }∞
n=1 et de % > 0 tels que 1) et 2).
Il suffit à présent de choisir xn ∈ Dn pour tout n ∈ N∗ . En effet si Y est un sous-espace
de dimension finie de X, {y ∈ Y : d(y, conv({xi }∞
i=1 )) ≤ 2%} est vide ou fermé borné dans
Y donc compact, et donc il existe m ∈ N∗ tel que ({y ∈ Y : d(y, conv({xi }∞
i=1 )) ≤ 2%} +
B(0, %)) ∩ Dm = ∅. De plus,
∞
{y ∈ Y : d(y, conv({xi }∞
i=m )) ≤ 2%} ⊂ {y ∈ Y : d(y, conv({xi }i=1 )) ≤ 2%}
donc ({y ∈ Y : d(y, conv({xi }∞
i=m )) ≤ 2%} + B(0, %)) ∩ Dm = ∅. La décroissance de la suite
∞
{Dn }n=1 et le fait que xn ∈ Dn pour tout n ∈ N∗ implique alors que
dist(Y, conv({xi }∞
i=n )) > %.!
On peut à présent donner une démonstration de (2).
On choisit une suite croissante {Xn }∞
n=1 de sous-espaces de dimension finie de X telle
∞
∞
que X = ∪n=1 Xn . Soit {xn }n=1 une suite de points de la boule unité de X et soit % > 0
comme dans le lemme 2.1.2. Quitte à prendre une sous-suite, on peut supposer que :
CHAPITRE 2. LE THÉORÈME DE MATOUSKOVA-STEGALL
33
∗
(∗) dist(V ect(Xn ∪ {xi }ni=1 ), conv({xi }∞
i=n+1 )) > % , pour tout n ∈ N .
'
On pose Bn = Xn ∩ BZ (0, 1) et D = conv(∪∞
i=1 (xi + ( 4 Bi )). Le convexe fermé et
& = ( 4 )D contient un translaté de toute partie finie de BX (0, 1) ∩ ∪∞ Xi (une
borné D
i=1
'
telle partie est incluse dans un Bn pour n suffisamment grand). Comme BX (0, 1)∩∪∞
i=1 Xi
est dense dans BX (0, 1), il suffit d’après la proposition 2.1.3 de montrer que l’intérieur
& et donc de D, est vide.
de D,
On suppose le contraire. Puisque conv(∪∞
(xi +( 4' Bi )) est dense dans '
D, il existe n ∈
i=1'
N∗ , αi ≥ 0 et ui ∈ 4' Bi pour 1 ≤ i ≤ n tels que ni=1 αi = 1 et tels que z = ni=1 αi (xi +ui )
soit intérieur à D. La propriété (∗) implique alors qu’il existe un x∗ ∈ BX ∗ (0, 1) vérifiant :
1x∗ , x2 = 0 pour x ∈ V ect(Xn ∪ {xi }ni=1 ),
1x∗ , x2 ≤ −%/2 pour x ∈ conv({xi }∞
i=n+1 ).
Soit w ∈ BX (0, 1) que 1x∗ , w2 ≥ 1/2. Comme z est intérieur à D, il existe r > 0 tel que
βi ≥ 0 et vi ∈ ( 4' )Bi pour 1 ≤ i ≤ m tels que
z + rw ∈ D. Il existe donc m ∈ N∗ , m >
'
'n,
m
m
i=1 βi = 1 et tels que si on pose y =
i=1 βi (xi + vi ), alors :
(∗∗) "z + rw − y" < r/2.
Il s’ensuit que :
1x∗ , z + rw − y2 = r 1x∗ , w2 +
≥ r/2 + 0 −
≥ r/2 −
C
x∗ ,
m
"
i=n+1
m
"
n
"
i=1
D
(αi (xi + ui ) − βi (xi + vi ))
−
C
x∗ ,
m
"
βi (xi + vi )
i=n+1
βi (1x∗ , xi 2 + 1x∗ , vi 2)
βi (−%/2 + %/4).
i=n+1
Puisque "vi " ≤ %/4 pour tout i ∈ {1, . . . n}, 1x∗ , z + rw − y2 ≥ r/2. Ceci contredit
(∗∗). !
2.2
Preuve de (1)
Le lemme suivant ne sera pas démontré dans l’immédiat. En effet il est la conséquence
d’un résultat plus général établi dans la section 3.2.
D
CHAPITRE 2. LE THÉORÈME DE MATOUSKOVA-STEGALL
34
Lemme 2.2.1
Soit X un espace de Banach réflexif muni d’une base de Schauder normalisée (ei )i≥0 . Soit
+
Q+ le cône positif associé à cette base et soit Q+
1 l’intersection de Q avec la boule unité
fermée de X. Alors pour tout r > 0 et tout δ > 0, il existe une mesure de probabilité µ
dont le support est fini et inclus dans {−r.ei , i ≥ 0} telle que
µ(x + Q+
1 ) < δ , pour tout x ∈ X.
On remarque que d’après le théorème 1.1.1, ceci implique directement que Q+
1 est
+
+
+
Haar-négligeable, et puisque Q = ∪n>0 nQ1 on en déduit que Q est aussi Haarnégligeable. C’est ce dernier lemme qui va permettre de prouver (1). Néanmoins il
nécessite l’existence d’une base de Schauder ce qui n’est pas le cas en général. Le lemme
suivant ([M]) permet de se ramener à ce cas.
Lemme 2.2.2
Soit X un espace de Banach séparable de dimension infinie et C une partie convexe,
bornée, fermée, d’intérieur vide et engendrante de X. Alors il existe un espace quotient
Y de dimension infinie de X muni d’une base de Schauder et v ∈ X tels que l’image de
v+C par le morphisme quotient soit contenue dans le cône positif de Y.
Démonstration
Soit (xn )∞
n=1 une suite dense de la sphère unité de X. On construit par récurrence une
∞
∗
suite (x∗n )∞
n=1 d’éléments de la sphère unité de X , une suite {vn }n=1 d’éléments de X et
∞
une suite strictement croissante d’entiers (kn )n=0 , avec k0 = 1, vérifiant
1
1. Inf 1x∗n , x2 ≥ − 4n+1
x∈C
<⊥
;
2. x∗n ∈ V ect x1 , x2 · · · , xkn−1
3. kn ≥ kn−1 + 1
4. vn ∈ V ect {x1 , x2 · · · , xkn }
5. "vn " ≤ 3/2
6. "vn " ≤ 3/2 et 1x∗n , vn 2 ≥ 1
<
;
Pour tout n ∈ N∗ on pose Xn = V ect x1 , x2 · · · , xkn−1 et on note Zn un supplémentaire
fermé de Xn . Soit Pn la projection continue de X sur Zn et de noyau Xn . La projection
Pn∗ est donc un isomorphisme bicontinu de Zn∗ sur Xn⊥ . On choisit un réel cn tel que
−1
0 < cn ≤ "Pn∗−1 " ; alors cn "z ∗ " ≤ "Pn∗ (z ∗ )" pour tout z ∗ ∈ Zn∗ . Soit Cn = Pn (C) ; alors
Cn est convexe, fermé et engendrant (Pn est linéaire, ouverte et surjective). De plus Cn est
d’intérieur vide. En effet, si ce n’était pas le cas C +Xn = Pn−1 (Cn ) contiendrait une boule
ouverte U. Or U et C étant bornés il existerait M > 0 tel que U ⊂ C + BXn (0, M), ce qui
est absurde d’après la proposition 2.1.2 puisque BXn (0, M) est compact. L’ensemble Cn
CHAPITRE 2. LE THÉORÈME DE MATOUSKOVA-STEGALL
35
cn
est donc bien d’intérieur vide, on peut donc choisir dans BZn (0, 4n+1
) un point x ∈
/ Cn .
cn
∗
∗
∗
∗
pour tout
Il existe alors zn dans la sphère unité de Zn telle que 1zn , z2 ≥ 1zn , x2 ≥ − 4n+1
z ∈ Cn .
∗ ∗)
n
. Alors x∗n ∈ Xn⊥ et "x∗n " = 1. De plus, pour tout x ∈ C, on a :
On pose x∗n = +PPn∗ (z
(z ∗ )+
n
1x∗n , x2 =
n
1zn∗ , Pn (x)2
cn
1
1Pn∗ (zn∗ ), x2
=
≥ − n+1 ∗ ∗ ≥ − n+1 .
∗
∗
∗
∗
"Pn (zn )"
"Pn (zn )"
4
"Pn (zn )"
4
On choisit alors un entier kn ≥ kn−1 + 1 tel qu’il existe vn ∈ V ect {x1 , x2 · · · , xkn }
vérifiant "vn " ≤ 3/2 et 1x∗n , vn 2 ≥ 1.
'
−n
On pose v = ∞
vn . Alors, Epour'
tout x ∈ C,
1x∗n , x + v2 ≥ 0.E '
n=1 4
F
F
n−1
−i
En effet, 1x∗n , x + v2 = 1x∗n , x2 + x∗n , i=1 4−ivi + 1x∗n , 4−n vn 2 + x∗n , ∞
4
v
i
i=n+1
'
−i
soit 1x∗n , x + v2 ≥ −4−(n+1) + 0 + 4−n − 4−n ∞
i=1 4 "vi " ≥ 0.
∗
La suite (Xn )∞
n=1 étant croissante de de réunion dense dans X et xn s’annulant sur
∗ ∞
Xn , la suite (xn )n=1 converge faiblement ∗ vers 0. Quitte à en extraire une sous-suite, on
peut supposer que (x∗n )∞
n=1 est une suite faible ∗ basique (voir [LT],volume 1, page 11).
⊥
∞
Alors l’espace quotient Y = X/V ect({x∗n }∞
n=1 ) admet une base de Schauder {yn }n=1
avec x∗n = T ∗ (yn∗ ) où T est le morphisme quotient de X sur Y et {yn∗ }∞
n=1 est la base duale
∞
de {yn }n=1 ([LT], volume 1, proposition 1.b.9). Alors,
1yn∗ , T (x + v)2 = 1T ∗ (yn∗ ), x + v2 = 1x∗n , x + v2 ≥ 0, pour tout x ∈ C et tout n ∈ N∗ .
L’image de v + C est donc bien contenue dans le cône positif de Y . !
Enfin, cette dernière proposition permettra de prouver directement (2).
Proposition 2.2.1 [M3]
Soit X un Banach séparable et réflexif, et soit C un convexe borné, fermé et d’intérieur
vide de X. Alors, pour tout > 0 et tout δ > 0, il existe une mesure de probabilité µ dont
le support est fini et inclus dans B(0, r) telle que :
µ(x + C) < δ , pour tout x ∈ X.
Démonstration
S’il existe une droite P , un sous-espace de X de dimension 1, tel que tout translaté
de C n’intersecte P qu’en au plus un point, il suffit de choisir au moins 1δ points de
P ∩ B(0, r), et la mesure de probabilité uniforme sur ces points convient.
Sinon, C est alors engendrant. Il existe alors d’après le lemme précédent un espace
quotient Y de X muni d’une base de Schauder normalisée (yi )i≥0 et v ∈ X tels que
l’image de v + C par le morphisme quotient T soit contenue dans le cône positif Q+ de
Y . Quitte à translater et à contracter C (il est borné), on peut supposer que :
CHAPITRE 2. LE THÉORÈME DE MATOUSKOVA-STEGALL
36
T (C) ⊂ Q+ ∩ BY (0, 1) = Q+
1.
Le théorème de l’application ouverte nous garantit l’existence d’un r ( strictement
positif tel que :
BY (0, r () ⊂ T (BX (0, r)).
Y étant lui aussi réflexif, il vérifie les conditions du lemme 2.2.1 et donc il existe un
ensemble fini I ⊂ N et une suite de réels positif
(λi )i∈I dont la somme vaut 1 telles que
'
la mesure de probabilité ν définie par ν = i∈I λi δ−r" yi vérifie ν(y + Q+
1 ) < δ , pour tout
y ∈Y.
−1
(
Pour tout i ∈ I,
'on choisit xi ∈ T (−r yi ) ∩ BX (0, r). Alors la mesure de probabilité
µ définie par µ = i∈I λi δxi convient.!
Démonstration de (1)
Soit C une partie convexe, fermée et d’intérieur vide d’un espace de Banach séparable
et réflexif X. Si C est borné, la proposition précédente et le théorème 1.1.1 impliquent
immédiatement que C est Haar-négligeable.
Si C n’est pas borné, on pose Cn = C ∩ B(0, n). Alors Cn est convexe, fermé borné
d’intérieur vide, donc Haar-négligeable, et C = ∪n≥1 Cn est Haar-négligeable.!
Chapitre 3
Haar-négligeabilité et bases de
Schauder
Il y a un type particulier de convexes d’intérieur vide qui joue un rôle clé dans la
démonstration du théorème de Matouskva-Stegall : le cône positif associé à une base de
Schauder d’un espace de Banach réel. On va dans cette partie établir des conditions plus
générales pour qu’un tel cône soit Haar-négligeable et étudier les conséquences de cette
propriété sur la géométrie de l’espace de Banach. On ne onsidèrera que des espaces de
Banach réels.
Dans la section 3.1, on présentera les définitions et les outils nécessaires pour établir
les résultats des sections suivantes, puis on indiquera ce qui est déjà connu sur la Haarnégligeabilité des cônes.
Dans la section 3.2, on donnera une condition nécessaire et suffisante sur la norme des
sommes partielles des vecteurs de base pour que le cône positif contienne un translaté de
tout compact. Ce résultat implique alors que la base canonique de c0 est la seule base de
Schauder normalisée et inconditionnelle possédant cette propriété.
Dans la section 3.3, on étudiera la Haar-négligeabilité du cône. On obtiendra dans
3.3.1 une condition suffisante qui sera appliquée aux bases inconditionnelles. Dans 3.3.2
nous donnerons une condition nécessaire qui sera appliquée aux bases symétriques. Cette
condition permettra dans 3.3.3 d’établir une “c0 -saturation”, en un sens qui sera précisé,
qui entraı̂ne la c0 -saturation classique. Enfin dans 3.3.4 nous construirons un exemple
prouvant que cette dernière condition n’est pas suffisante.
Dans la section 3.4 on étudiera les conséquences de la non Haar-négligeabilité du cône
sur les quotients de l’espace de Banach considéré. On montrera que si le cône n’est pas
Haar-négligeable, alors tous les quotient sont c0 -saturé.
Dans tout ce qui suit, X désignera un espace de Banach séparable de dimension infinie
et "." désignera sa norme.
37
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
3.1
38
Rappels sur les Bases de Schauder
Définition 3.1.1
Soit X un espace de Banach.
– Une suite (ei )i≥1 d’éléments de X est une base de Schauder de'
X si pour tout
x ∈ X, il existe une unique suite de réels (xi )i≥1 telle que x = i≥1 xi ei , où la
série converge en norme.
' Elle est dite normalisée si "ei " = 1 pour tout i ≥ 1. Si
de plus chaque série i≥1 xi ei converge inconditionellement, on dit que la base de
Schauder est inconditionnelle.
– Une suite (ei )i≥1 d’éléments de X est une suite basique si c’est une base de Schauder
de V ect (ei , i ≥ 1).
Proposition 3.1.1
Si (ei )i≥1 est une base de Schauder, alors les projections canoniques (Pn )n≥1 , définies
2'
3
'n
par Pn
de plus ini≥1 xi ei =
i=1 xi ei , sont uniformément bornées. Si (ei )i≥1 est
2'
3
=
)
x
e
conditionnelle,
alors
les
projections
canoniques
(P
∗ , définies par PI
I
i
i
I⊂N
i≥1
'
i∈I xi ei , sont uniformément bornées.
Définition 3.1.2
Soit (ei )i≥1 une base de Schauder.
– Sa constante de Schauder K est définie par K = sup {"Pn ", n ≥ 1}.
Alors "|x|" = sup {"Pn (x)", n ≥ 1} est une norme sur X équivalente à "." ; pour
cette nouvelle norme, (ei )i≥1 est normalisée et sa constante de Schauder vaut 1.
– Si (ei )i≥1 est inconditionnelle, sa constante de Schauder inconditionnelle Ku est
définie par Ku = sup {"PI ", I ⊂ N∗ }.
Alors "|x|" = sup {"PI (x)", I ⊂ N∗ } est une norme sur X équivalente à "." ; pour
"|.|", (ei )i≥1 est donc normalisée et sa constante de Schauder inconditionnelle vaut
1.
La Haar-négligeabilité étant une notion invariante par isomorphisme, on ne considèrera
par la suite que des bases de Schauder normalisées dont la constante de Schauder (ou sa
constante de Schauder inconditionnelle) vaut 1.
Le théorème classique suivant est un outil utile pour prouver l’équivalence des suites
basiques dans un espace de Banach. Il est connu sous le nom de théorème des petites
perturbations ou de Krein-Milman-Rutman.
Théorème 3.1.1
Soit (ei )i≥1 une suite basique normalisée d’un espace de Banach X et soit K sa constante
'
1
de Schauder. Soit (xi )i≥1 une suite de X vérifiant ∞
i=1 "ei − xi " < 2K . Alors (xi )i≥1 est
une suite basique équivalente à (ei )i≥1 , et pour toute suite de scalaires (ai )i≥1 telle que
'
∞
i=1 ai xi converge on a :
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
-
1 − 2K
∞
"
i=1
.
"ei − xi " "
∞
"
i=1
ai ei " ≤ "
∞
"
i=1
ai xi " ≤ 2K"
∞
"
i=1
39
ai ei ".
Ceci implique que la constante de Schauder de (xi )i≥1 est majorée par 2K.
Voici quelques notations que nous utiliserons dans ce qui suit. Si (yi )i≥1 est une suite
basique de X, on notera "."(yi ) la restriction de "." au sous-espace fermé Y engendré par
'
(y )
(α )
(yi )i≥1 ; "."∞i sera la norme de Y définie par " i≥1 αi yi "∞i = Sup {|yi|, i ≥ 1}. Si (yi )i≥1
(y )
est normalisée et si K est sa constante de Schauder, on a alors que "."∞i ≤ 2K"."(yi ) .
(e )
Enfin dans le cas d’une base de Schauder (ei )i≥1 , on écrira "."∞ au lieu de "."∞i ; si la
base de Schauder est normalisée et que si sa constante de Schauder vaut 1, on a alors
que "."∞ ≤ 2".".
On a l’important résultat élémentaire suivant ([LT], page 19).
Lemme 3.1.1
Soit (ei )i≥1 une base de Schauder inconditionnelle dont la constante de Schauder inconditionnelle vaut 1.
'
'
Si une série n≥1 xn en converge dans X, alors la série n≥1 λn xn en converge dans
X pour toute suite bornée (λn )n≥1 de scalaires, et on a :
G
G
G
G
G"
G
G
G"
G
G
G
G
λn xn en G ≤ sup {|λn | , n ≥ 1} . G
xn en G .
G
G
G
G
G
n≥1
n≥1
Définition 3.1.3
Soit (ei )i≥1 une base de Schauder. On dit que la suite (yi )i≥1 est une bloc-base de (ei )i≥1
s’il existe une suite
strictement croissante d’entiers (mi )i≥1 et une suite de réels (ai )i≥1
'mi+1
telles que yi = j=mi +1 ai ei pour tout i ≥ 1. Alors (yi)i≥1 est une suite basique est sa
constante de Schauder est inférieure ou égale à celle de (ei )i≥1 .
On déduit immédiatement de cette définition et du lemme précédent les remarques
suivantes :
Remarque 3.1.1
Soit (ei )i≥1 une base de Schauder inconditionnelle.
1. Si (yi)i≥1 est une bloc-base de (ei )i≥1 , c’est une base de Schauder inconditionnelle de
l’espace qu’elle engendre et sa constante de Schauder inconditionnelle est inférieure
ou égale à celle de (ei )i≥1 .
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
2. Pour tout x ∈ {0, 1}N ,
Tx :
"
n≥1
an en →
"
40
(−1)xn an en
n≥1
est un isormorphisme involutif de norme au plus K, où K est la constante de Schauder inconditionnelle de (ei )i≥1 .
La Haar-négligeabilité étant invariante par isomorphisme, la dernière remarque permet
de conclure que pour une base de Schauder inconditionnelle, la Haar-négligeabilité du
cône positif est invariante par tout changement de signes effectué sur la base. De plus, le
théorème des petites perturbations et un argument de bosse glissante entraı̂nent alors la
proposition suivante.
Proposition 3.1.2
Soit X un espace de Banach muni d’une base de Schauder (ei )i≥1 normalisée. Soit (yi )i≥1
une suite normalisée et faiblement convergente vers 0 de X. Alors il existe une sous-suite
basique (zi )i≥1 de (yi)i≥1 qui est équivalente à une bloc-base normalisée (fi )i≥1 de (ei )i≥1 .
Définition 3.1.4
Soit (ei )i≥1 est une base de Schauder.
– Elle est dite shrinking si sa base duale est une
' base de Schauder du dual de X.
– Elle est dite boundedly complete
si
la
série
i≥1 ai ei converge pour toute suite de
'n
réels (ai )i≥1 vérifiant sup {" i=1 ai ei ", n ≥ 1} < ∞.
Le théorème classique suivant est dû à James (cf [LT]).
Théorème 3.1.2
Soit X un espace de Banach muni d’une base de Schauder (ei )∞
i=1 .
1. L’espace X est réflexif si et seulement si cette base est shrinking et boundedly complete.
2. Si la base (ei )∞
i=1 est inconditionnelle alors :
– La base (ei )∞
i=1 est non-shrinking si et seulement si elle possède une bloc-base
équivalente à la base canonique de l1 .
– La base (ei )∞
i=1 est non-boundedly complete si et seulement si elle possède une
bloc-base équivalente à la base canonique de c0 .
Pour terminer cette présentation, nous énonçons maintenant un certain nombre de
résultats connus sur la Haar-négligeabilité du cône positif d’une base de Schauder.
Proposition 3.1.3
Soit Q+ le cône positif associé à une base de Schauder normalisée (ei )∞
i=1 .
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
41
+
1. Si (ei )∞
i=1 est équivalente à la base canonique de c0 , alors Q contient un translaté
de toute partie compacte de c0 . Il n’est donc pas Haar-négligeable.[BL]
+
2. Si (ei )∞
i=1 engendre un espace de Banach réflexif, alors Q est Haar-négligeable.
'∞
'∞
q
3. S’il existe q ∈ [1, +∞[ et M > 0 tels '
que
n=1 |βn | ≤ M"
n=1 βn en " pour
∞
∞
toute suite de scalaires (βn )n=1 telle que n=1 βn en converge, alors Q+ est Haarnégligeable.[BL]
En particulier le cône positif de la base canonique de lp pour p ∈ [1, +∞[ est Haarnégligeable.
'
4. Si (ei )∞
inf " ki=1 eni " = +∞, alors Q+ est
i=1 est inconditionnelle et si lim
k→+∞n1 <···<nk
Haar-négligeable.[M2]
Dans la section 3.2, on démontrera que la base canonique de c0 est en fait la seule base
de Schauder inconditionnelle dont le cône positif contient un translaté de tout compact.
Les trois autres assertions de la proposition 3.1.3 seront obtenus comme des applications
du théorème 3.3.1. On va néanmoins donner une preuve directe de la troisième assertion :
elle a l’avantage de donner explicitement une mesure test pour le cône positif.
Démonstration de (3)
Soit λ la mesure de Lebesgue sur [0, 1], et soit (fn )∞
n=1 une famille de variables
aléatoires indépendantes définies; sur [0, 1] vérifiant
< : 1
n−1
−1/q
λ {t : fn (t) = 0} = n , et λ t : fn (t) = n
= n pour tout n ≥ 1.
'
' −(q+1)/q
Alors
"fn "L1 =
n
< ∞. Donc, d’après le théorème de convergence monotone, F (t) = (fn (t))∞
n=1 appartient à l1 pour presque tout t. On définit une mesure de
probabilité µ sur l1 par la formule µ(B) = λ(F −1 (B)) (c’est la distribution de F ). Alors,
∞
∗
pour toute suite (βn )∞
n=1 ∈ lq on a µ {(αn )n=1 ∈ l1 : αn ≤ βn , ∀n ∈ N } = 0.
' q
En
effet,
c’est
évident
s’il
existe
β
<
0.
Sinon,
βn < ∞ implique
n
'
'
% que
1
1
1
q
q
q (1 −
<
∞.
On
en
déduit
que
=
∞
et
que
donc
) = 0.
−1
−1
n ≤βn n
n >βn n
n−1 >βn
n
Alors
H 2
3
∗
−1
∈
l
:
α
≤
β
,
∀n
∈
N
}
=
λ
f
(]−∞,
β
])
µ {(αn )∞
1
n
n
n
n=1
n
n≥1
≤
H
q
n−1 >βn
2
3
λ fn−1 (]−∞, βn ]) = 0.
'
Soit à présent le morphisme T : l1 −→ X défini par T ((an )) =
an en . La formule
+
τ (B) = µ(T −1(B))
définit
une
mesure
de
probabilité
τ
sur
X.
Soit
Q
le cône positif de
'
X et soit x = βn en ∈ X. On a alors
∗
τ (x − Q+ ) = µ {(αn )∞
n=1 ∈ l1 : αn ≤ βn , ∀n ∈ N } = 0,
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
42
−Q+ est donc Haar-négligeable et donc Q+ l’est aussi. !
Dans toute la suite, (ei )∞
i=1 sera une base de Schauder normalisée dont la constante
de Schauder (ou la constante de Schauder inconditionnelle si (ei )∞
i=1 est inconditionnelle)
vaut 1, de sorte que "."∞ ≤ 2".". On désignera par Q+ son cône positif, et pour tout
+
r > 0, Q+
r désignera l’intersection de Q avec la boule fermée de rayon r centrée en 0,
notée B(0, r).
3.2
Cône contenant un translaté de tout compact
On va étudier ici les cônes qui contiennent un translaté de toute partie compacte de
l’espace considéré. Ces cônes ne sont donc pas Haar-négligeables.
Ce qui suit est une réécriture de la proposition 2.1.3 dans le cas particulier du cône,
’
elle permet de reformuler la condition “Q+ contient un translaté de tout compact”.
Lemme 3.2.1
Soit D une partie dense de B(0, 1). Les assertions suivantes sont équivalentes.
(i) Le cône Q+ contient un translaté de tout compact.
(ii) Il existe R > 0 tel que Q+
R contienne un translaté de tout compact de B(0, 1).
(iii) Il existe M > 0 tel que Q+
M contienne un translaté de toute partie finie de
B(0, 1) ∩ D.
Si ces conditions sont vérifiées, on peut prendre R=2M.
Démonstration
+
La preuve de (ii) ⇒ (i) est immédiate en remarquant que Q+ = ∪∞
n=1 nQR .
Montrons que (i) ⇒ (ii). Si (ii) n’est pas vérifiée, alors pour tout n ≥ 1 on peut
trouver un compact Kn de B(0, 1) tel que Kn + x ⊂ Q+ ⇒ "x" ≥ n2 .
1
Soit K = ∪∞
n=1 n Kn ∪{0}, alors K est un compact de B(0, 1). En effet soit (yn )n>0 une
suite d’éléments de K. Soit il existe une infinité de termes de la suite qui appartiennent
a un même compact m1 Km , et on peut
< une sous-suite convergente ; soit
; donc en extraire
la suite (in )n>0 définie par in = Min i ≥ 1, yn ∈ 1i Ki tend vers l’infini, ce qui implique
que yn tend vers 0.
Donc si (i) était vérifiée il existerait x ∈ X tel que K + x ⊂ Q+ . On obtiendrait
Kn + nx ⊂ Q+ pour tout n ≥ 1, d’où "nx" ≥ n2 , ce qui est impossible dès que n > "x".
L’implication (ii) ⇒ (iii) étant triviale, il reste à montrer que (iii) ⇒ (ii).
Soit K un compact de B(0, 1/2) et soit (Fn ) une suite de parties finies de D telle que
'
−i
K ⊂ ∞
i=1 2 Fi ; une telle suite existe d’après le lemme 2.1.1. Il existe donc pour tout
∗
n ∈ N zn dans X tel que zn + Fn ⊂ Q+
M.
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
43
+
Comme Q'
M est borné, et comme Fn ⊂ B(0, 1) pour tout n, la suite zn est bornée.
−i
On pose z = ∞
i=1 2 zi .
'
'∞ −i
−i
On a alors z + K ⊂ z + ∞
i=1 2 Fi ⊂
i=1 2 (zi + Fi ).
'
+
−i
De plus, pour tout n ≥ 1, zn +Fn ⊂ QM qui est un convexe fermé, donc ∞
i=1 2 (zi + Fi ) ⊂
+
+
QM . L’ensemble QM contient donc un translaté de tout compact de B(0, 1/2), et on obtient alors l’assertion (ii) en posant R = 2M.
!
Le théorème suivant est le résultat principal de cette section.
Théorème 3.2.1
Le cône Q+ contient un translaté de tout compact si et seulement si il existe une suite
de scalaires (λn )n∈N∗ , avec λn ≥ 1 et M > 0, telle que pour tout n ∈ N∗ ,
G
G
n
G
G"
G
G
λi ei G ≤ M.
G
G
G
i=1
Démonstration
D’après (iii), il existe M > 0 tel que toute partie finie de D := B(0, 1) ∩ V ect((ei )∞
i=1 ),
qui est bien une partie dense de la boule unité, admette un translaté inclus dans Q+
M.
∗
Pour tout n ∈ N , on pose Fn := {−ei , 1 ≤ i ≤ n}, de sorte que Fn est une partie
finie de D.
'
+
Il existe donc zn = ∞
i=1 zi,n ei tel que zn + Fn ⊂ QM . Ceci implique donc que "zn " ≤
M + 1, et que |zi,n | ≤ 2(M + 1) d’après la remarque précédente.
De plus, la condition zn + Fn ⊂ Q+
M implique que zi,n ≥ 1 dès que n ≥ i. Donc pour
∗
i ∈ N et n ≥ i, 1 ≤ zi,n ≤ 2(M + 1).
Par le procédé diagonal de Cantor, on peut donc construire une suite strictement
croissante d’entiers (pn )n>0 telle que pour tout i > 0, la suite (zi,pn )n≥1 converge vers un
réel λi ≥ 1 quand n tend vers l’infini. Montrons que la suite (λi )i>0 convient.
On a bien que 1 ≤ λi ≤ 2(M + 1), reste à montrer que les sommes partielles sont
uniformement bornées.
∗
Soit
a
'mm ∈ N ; on'
"'i=1 λi ei " ≤ " m
i=1 (λi − zi,pn )ei " + "Pm (zpn )"
m
"'i=1 λi ei " ≤ m.sup {|(λi − zi,pn )| , 1 ≤ i ≤ m} + "zpn "
" m
i=1 λi ei " ≤ m.sup {|(λi − zi,pn )| , 1 ≤ i ≤ m} + M + 1
'
Or sup {|(λi − zi,pn )| , 1 ≤ i ≤ m} tend vers 0 quand n tend vers l’infini, donc " m
i=1 λi ei " ≤
M + 1.
Pour montrer l’autre implication, on suppose'
qu’il existe M > 0 et une suite de réels
(λn )n≥1 , avec λn ≥ 1 pour tout n ≥ 1, tels que " ni=1 λi ei " ≤ M pour tout n ∈ N∗ .
+
On pose de nouveau D := B(0, 1)∩V ect((ei )∞
i=1 ) ; alors Q1+2M vérifie la propriété (iii)
du lemme 3.2.1. En effet soit F une partie finie de D ; il existe m ≥ 1 tel que |e∗n (x)| = 0
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
44
∗
∗
pour tout
'm x ∈ F et+pour tout n ≥ m. De plus |en (x)| ≤ 2 pour tout n ∈ N . Donc
F + 2 i=1 λi ei ⊂ Q1+2M .!
Si l’on suppose en plus que la base est inconditionnelle, on peut préciser notre
théorème.
Corollaire 3.2.1
+
Si (ei )∞
i=1 est inconditionnelle, alors Q contient un translaté de tout compact si et seule∞
ment si (ei )i=1 est équivalente à la base canonique de c0 .
Démonstration
On a vu que la norme "." domine toujours la norme "."∞ . L’autre domination est en
effet une conséquence de l’inconditionnalité et de l’existence d’une suite (λn )n∈N∗ vérifiant
les hypothèses du théorème précédent.
'
'
Pour tout x ∈ X \ 0 et tout n ∈ N∗ , on a Pn (x) = ni=1 xi ei = "x"∞ ni=1 +x+xi λi λi ei .
∞
Pour tout i ∈ N∗ on pose ai = +x+xi λi ; alors |ai | ≤ 1 et donc, d’après le lemme 3.1.1,
∞
'
"Pn (x)" ≤ "x"∞ " ni=1 λi ei " ≤ 2M "x"∞ . On a alors "x" = limn→∞ "Pn (x)" ≤
M "x"∞ .!
L’exemple suivant montre que l’on ne peut pas s’affranchir de l’hypothèse d’inconditionnalité dans le corollaire précédent.
Exemple 3.2.1
Soit J l’espace de James, c’est à dire l’ensemble des suites de scalaires x = (ai )i≥1 qui
tendent vers 0 et qui
6 vérifient : 6
77
1
"x" = supm∈N∗ Sup0<p1...<pm √12 [(ap1 − ap2 )2 + ... + (apm−1 − apm )2 ] 2
<∞
(Voir [LT] page 25 pour plus de détails sur l’espace de James).
La base
'ncanonique (ei )i∈>0 est une base de Schauder normalisée de J et pour tout
∗
n ∈ N , " i=1 ei " = 1. Ceci, d’après le théorème précédent, implique que le cône positif
de la base canonique de l’espace de James contient un translaté de tout compact.
La base canonique de c0 est donc la seule base inconditionnelle dont le cône positif
contient un translaté de tout compact. L’exemple précédent sur la base canonique de
l’espace de James montre que ce n’est plus le cas lorsqu’on n’impose plus l’inconditionnalité.
On va à présent essayer de déterminer les bases dont le cône est Haar-négligeable. Dans
le cas où la base est symétrique, et même sous-symétrique, on répondra entièrement à
cette question : il n’y a que la base canonique de c0 dont le cône ne soit pas Haarnégligeable. Dans le cas inconditionnel, nous montrerons que pour que le cône ne soit pas
Haar-négligeable, la base doit être très proche de la base canonique de c0 en un sens qui
sera précisé.
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
3.3
3.3.1
45
Haar-négligeabilité du cône positif associé à une
base de Schauder
Condition suffisante de Haar-négligeabilité
Proposition 3.3.1
∞
Si une base de Schauder (ei )∞
i=1 est inconditionnelle et s’il existe une bloc-base (yi )i=1
dont le cône positif est Haar-négligeable, alors Q+ est Haar-négligeable.
Démonstration
+
Soit Y l’espace engendré par (yi )∞
existe une suite strici=1 et QY son cône positif. Il
'pj −1
tement croissante d’entiers (pj )j∈N , avec p0 = 1, telle que yj = i=pj−1 ai ei et on peut
supposer que les ai ≥ 0. Il existe une mesure de probabilité µ sur Y telle que pour tout
y ∈ Y , µ(Q+
Y + y) = 0.
Soit ν la mesure de probabilité sur X définie par ν(A) = µ(A ∩ Y ) pour tout borélien
A. Soit x ∈ X ; on va calculer ν(x + Q+ ). La base étant inconditionnelle, on décompose
x en x = x+ + x− , avec x+ ∈ Q+ et x− ∈ Q− . Donc x + Q+ ⊂ x− + Q+ , soit
ν(x + Q+ ) ≤ ν(x− + Q+ ).
On va donc calculer ν(x + Q+ ) pour x ∈ Q− .
'
'∞
'∞
'pj −1
Soit z ∈ (x+Q+ )∩Y ; z s’écrit z = ∞
i=pj−1 ai ei )
i=1 (xi +λi )ei =
j=1 zj yj =
j=1 zj (
avec λi ≥ 0.
On a donc zj ai − xi = λi ≥ 0, pour tout j ∈ N∗ et pour tout i ∈ [pj−1, pj [. On obtient,
pour tout j ∈ N∗ ,
6
7
xi
wj := sup ai , pj−1 ≤ i < pj , ai += 0 ≤ zj (1)
'
'
Comme xi ≤ 0, la série ∞
|xi | ei converge et ∞
i=1
i=1 |xi | ei = −x. Le lemme 3.1.1
'∞ 'pj −1
'∞
implique donc que
i=pj−1 |wj | ai ei ) =
j=1 (
j=1 |wj | yj converge et donc que w =
'∞
aussi dans Y .
j=1 wj yj converge
'∞
Alors z = w + j=1 (zj − wj )yj ∈ w + Q+
Y d’après (1) et w ne dépend pas de z.
+
On en déduit donc que (x + Q ) ∩ Y ⊂ w + Q+
Y , et donc que
ν(x + Q+ ) = µ((x + Q+ ) ∩ Y ) ≤ µ(w + Q+
Y ) = 0.
Le cône Q+ est donc bien Haar-négligeable. !
On sait que le cône positif de l1 est Haar-négligeable, et que dans un espace de
Banach réflexif, les convexes fermés d’intérieur vide, en particulier le cône positif, sont
Haar-négligeables. On en déduit le corollaire suivant :
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
46
Corollaire 3.3.1
∞
Si la base de Schauder (ei )∞
i=1 est inconditionnelle et s’il existe une bloc-base de (ei )i=1
qui soit boundedly complete ou non-shrinking, alors Q+ est Haar-négligeable.
Ceci combiné au théorème 3.1.2 implique alors que pour que le cône positif d’une
base de Schauder inconditionnelle ne soit pas Haar-négligeable, il faut qu’à partir de
toute bloc-base (yi )∞
i=1 on puisse construire une bloc-base équivalente à la base canonique
de c0 .
On va maintenant montrer que c’est en fait une suite extraite de (yi )∞
i=1 qui vérifiera
cette propriété et que les constantes d’équivalence avec la base canonique de c0 seront
uniformément bornées.
3.3.2
Conditions nécessaires de non-Haar négligeabilité, application aux bases symétriques
Voici maintenant un corollaire du théorème 1.1.1 :
Lemme 3.3.1
Le cône Q+ n’est pas Haar-négligeable si et seulement si il existe deux nombres strictement
positifs, δ et R, tels que la propriété suivante soit vérifiée :
(∗) pour toute mesure de probabilité µ sur X dont le support est contenu dans B(0, 1),
il existe x ∈ X vérifiant µ(x + Q+
R ) ≥ δ.
Un tel x vérifie nécessairement "x" ≤ 1 + R.
Démonstration
Une union dénombrable de parties Haar-négligeables étant Haar-négligeable, Q+ n’est
+
pas Haar-négligeable si et seulement si Q+
1 ne l’est pas non plus. Si Q1 n’est pas Haarnégligeable, il existe d’apres le théorème 1.1.1 deux réels strictement positifs δ et r tels
que pour toute mesure de probabilité µ sur X dont le support est contenu dans B(0, r),
il existe x ∈ X vérifiant :
µ(x + Q+
1 ) ≥ δ.
On a donc le résultat désiré avec R = 1r .
Réciproquement si δ et R existent, alors le théorème 1.1.1 implique que Q+
R n’est pas
+
Haar-négligable et Q n’est donc pas Haar-négligeable.
On a alors "x" ≤ 1 + R d’après l’inégalité triangulaire. !
Dans la suite, on s’intéressera à une version affaiblie de (∗), où on ne considèrera
qu’un certain type de mesures.
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
47
Définition 3.3.1
Soient δ et R deux réels strictements positifs. La base (ei )∞
i=1 sera dite (δ, R)-bornée si
pour toute mesure de probabilité µ dont le support est fini et inclus dans {−ei , i ≥ 1}, il
existe x ∈ X vérifiant µ(x + Q+
R ) ≥ δ. On a alors "x" ≤ 1 + R.
La proposition suivante établit un lien entre cette notion et la non Haar-négligeabilité
du cône positif.
Proposition 3.3.2
– Si Q+ n’est pas Haar-négligeable, il existe deux réels strictements positifs δ et R
tels que (ei )∞
i=1 soit (δ, R)-bornée.
+
– Si (ei )∞
i=1 est inconditionnelle et si Q n’est pas Haar-négligeable, il existe deux réels
strictements positifs δ et R tels que toutes les blocs-bases normalisées de (ei )∞
i=1
soient (δ, R)-bornées.
– Soient δ et R deux réels strictements positifs. Si (ei )∞
il<
i=1 n’est pas (δ, R)-bornée,
;
existe une mesure de probabilité µ dont le support est fini et inclus dans − R1 ei , i ≥ 1
telle que µ(x + Q+
1 ) < δ , pour tout x ∈ X.
Démonstration
C’est une application directe du lemme 3.3.1 et de la définition des bases de Schauder
(δ, R)-bornées. !
Ceci implique, dans le cas où la base est inconditionnelle, une condition sur la norme
des sommes partielles de (ei )∞
i=1 .
Proposition 3.3.3
Soient δ et R deux nombres strictements positifs.
∗
Si (ei )∞
i=1 est inconditionnelle
G' et G(δ, R)-bornée, alors pour tout I ∈ N fini, il existe
J ⊂ I tel que |J| ≥ δ |I| et G i∈J ei G ≤ (1 + R). De plus,
– Si δ = 1, la
base deG Schauder (ei )∞
i=1 est alors équivalente à la base canonique de c0
G'
1+R
G
G
– Si δ < 1,
i∈I ei ≤ − ln(1−δ) ln(|I|) + 2(1 + R)
Démonstration
'
1
. Alors µ = i∈I λi δ−ei est une mesure de probaPour tout i ∈ I, on pose λi = |I|
bilité
2 dont
3 le support est fini et inclus dans {−ei , i ≥ 1}. Il existe donc x ∈ X tel que
+
µ x + QR ≥ δ. On en déduit qu’il existe EJ ⊂ IF tel que |J| ≥ δ |I| et que −ej ∈ x + Q+
R
∞
pour tout j ∈ J. Ceci implique donc que e∗j , x ≤ −1 pour tout j ∈G J. Puisque
(e
)
i
i=1
G
'
est inconditionnelle et que "x" ≤ 1 + R, le lemme 3.1.1 implique que G i∈J ei G ≤ 1 + R.
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
48
G'
G
Si δ = 1, alors pour tout I fini G i∈I ei G ≤ 1 + R, ce qui implique "." ≤ (1 + R) "."∞ .
Si δ < 1, on construit des parties disjointes de I de la façon suivante :
On pose I0 = I et on choisit un J0 ⊂ I0 vérifiant la condition de la proposition 3.3.3.
Puis on pose I1 = I0 − J0 et on choisit J1 ⊂ I1 de la même façon et ainsi
G' de suite.
G
Au rang k, on a donc |Ik | ≤ (1 − δ) |Ik−1 |, soit |Ik | ≤ (1 − δ)k |I| et G i∈Jk ei G ≤ 1 + R
On s’arrête dès que Ik+1 est vide, c’est à dire dès que |Ik | ≤ 1, donc au plus quand
ln(|I|)
ln(|I|)
. On peut donc choisir k ≤ − ln(1−δ)
+ 1. Enfin,
(1 − δ)k |I| ≤ 1, soit k ≥ − ln(1−δ)
G
G
G'
G 'k G'
G
G
ei G ≤
ei G ≤ (k + 1)(1 + R) ≤ − 1+R ln(|I|) + 2(1 + R).!
G
i∈I
j=0
i∈Jj
ln(1−δ)
Notons que la quatrième assertion de la proposition 3.1.3 résulte immédiatement de la
proposition 3.3.3. ll est intéressant de noter que cette condition implique que les sommes
de Césaro de la base de Schauder tendent alors uniformément vers 0 en norme.
Application : l’espace de Shreier
Rappelons brièvement la définition de l’espace de Schreier :
Soit c00 l’espace linéaire des suites réelles à support fini. Pour x = (xi )i≥1 on pose
"x" = Max
I
p
"
i=1
|xki | : p ≥ 1, p ≤ ki < . . . < kp
J
Alors "." définit bien une norme sur c00 et l’espace de Schreier S est sa complétion. De
plus la base canonique (ei )i≥1 de c00 est une base de Schauder normalisée, 1-inconditionnelle
et shrinking de S. Enfin on sait d’après [O] que tout quotient de S est c0 -saturé.
Il est alors facile de démontrer que le cône positif de (ei )i≥1 est Haar-négligeable. En
effet soit n ∈ N∗ et soit I une partie finie de N∗ de cardinal 2n ; il y a donc au moins
n éléments de I qui sont supérieurs ou égaux à n. Par définition de la norme de S on a
immédiatement que :
G
G
G" G
G
G
ei G ≥ n.
G
G
G
i∈I
D’après la proposition 3.3.3, le cône positif de l’espace de Schreier est donc Haarnégligeable.!
La proposition 3.3.3 permet de caractériser les bases de Schauder symétriques dont
le cône est Haar-négligeable.
Définition 3.3.2
– Une base de Schauder (ei )i≥1 est dite étalante s’il existe une constante C > 0 telle
que, pour toute suite strictement croissante d’entiers (mi )i≥1 , pour toute suite de
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
réels (ai )i≥1 et tout n ≥ 1, on ai
1
"
C
'n
i=1 ai emi " ≤ "
'n
i=1 ai ei " ≤ C"
49
'n
i=1
ai emi ".
– Une base de Schauder (ei )i≥1 est dite sous-symétrique si elle est étalante et inconditionnelle.
– Une base de Schauder (ei )i≥1 est dite '
symétrique s’il existe une constante C > 0
telle que pour toute série convergente i≥1 xi ei et pour toute permutation π de N∗
'
'
'
on ai C1 " i≥1 xi eπi " ≤ " i≥1 xi ei " ≤ C" i≥1 xi eπi ". On vérifie que toute base de
Schauder symétrique est inconditionnelle ; la réciproque est fausse comme le montre
l’exemple de la base canonique de l1 ⊕ c0 .
Corollaire 3.3.2
La base canonique de c0 est la seule base de Schauder normalisée et symétrique dont le
cône positif n’est pas Haar-négligeable.
Démonstration
Soit (ei )∞
i=1 une base de Schauder symétrique, normalisée et de constante de Schauder
égale à 1, telle que son cône positif ne soit pas Haar-négligeable. Il existe donc deux réels
strictement positifs δ et R tels que (ei )∞
i=1 soit (δ, R)-bornée. La proposition précédente et
l’inconditionnalité des bases de Schauder symétriques montre
G tout entier p ≥ 1,
G'que pour
G
G
il existe une partie finie Ip de cardinal égal à p telle que G i∈Ip ei G ≤ 1 + R. La base
étant symétrique, il existe une constante
G'
GC > 0 telle que, pour toute partie fine I de
G
G'
G
G
cardinal égal à p, G i∈I ei G ≤ C G i∈Ip ei G. Les sommes partielles finies des vecteurs de
base sont donc uniformément bornées, ce qui implique la domination de la norme de X
par la norme infinie. Les deux normes étant alors équivalentes, (ei )∞
i=1 est équivalente à
la base canonique de c0 .!
Dans la section suivante, on va étudier ce que les résultats déjà obtenus impliquent
pour les sous-suites et les bloc-bases d’une base de Schauder.
3.3.3
c0 -saturation
Définition 3.3.3
Soit M ≥ 1 et soit (ei )∞
i=1 une base de Schauder normalisée.
– La base (ei )∞
est
de type Mc0 si "." ≤ M"."∞ . Alors (ei )∞
i=1
i=1 est équivalente à la
base canonique de c0 .
∞
– La base (ei )∞
i=1 est Mc0 -saturée si de toute sous-suite de (ei )i=1 , on peut extraire
une sous-suite de type Mc0 .
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
50
∞
– La base (ei )∞
i=1 est uniformément Mc0 -saturée si de toute suite (Ii )i=1 de parties
disjointes de N∗ telle qu’il existe N ≥ 1 tel que pour tout i ≥ 1, la suite basique
(ej )j∈Ii soit de type Nc0 , on peut extraire une sous-suite (Ii( )∞
i=1 telle que (ej )j∈∪i≥1 Ii"
soit de type NMc0 .
En prenant |Ii | = 1 pour tout i ≥ 1 on observe qu’une base de Schauder uniformément
Mc0 -saturée est Mc0 -saturée.
Ce qui va suivre repose essentiellement sur le lemme suivant.
Lemme 3.3.2 (Ptak)
Soit W un ensemble infini, et soit Ω un ensemble non vide de parties de W . Soit P (W )
l’ensemble des mesures de probabilité à support fini sur W , identifié à l’ensemble
des fonc'
tions λ : W → [0, +∞[ telles que
'{w : w ∈ W, λ(w) > 0} soit fini et que w∈W λ(w) = 1.
Pour A ⊂ W , on pose λ(A) = a∈A λ(a).
Si infλ∈P (W ) {supV ∈Ω {λ(V )}} = % > 0, alors il existe une suite (Vi )∞
i=1 d’éléments de
∞
Ω, et une suite (wi )i=1 d’éléments distincts de W telles que pour tout n ≥ 1, {w1 , ..., wn } ⊂
Vn .
Démonstration
Soit (ew )w∈W la base canonique de c0 (W ) définie par la formule ew (z) = δw,z , δw,z
désignant
le symbole de Kroneker ; on pose :
<
;'
/=
Ω
w∈U %w ew , %w ∈ {−1, 1} , U ⊂ V ∈ Ω, Uf ini .
/ l’enveloppe convexe fermée de Ω
/ dans c0 (W ). Alors
On pose alors C = Conv(Ω),
w
/ , l’enveloppe convexe faibled’après le théorème de Mazur on a aussi que C = Conv(Ω)
/ dans c0 (W ). Soit a = (aw )
ment fermée de Ω
w∈W un élément de la sphère unité S1 de
l1 (W ) et soit b ∈ S1 à support fini tel que "a − b"1 ≤ 2' . On pose λ(w) = |bw | pour tout
/ il existe alors g ∈ Ω
/⊂C
w ∈ W ; il existe V ∈ Ω tel que λ(V ) ≥ 34 %. Par définition de Ω,
3
tel que 1b, g2 ≥ 4 %. On a donc :
1a, g2 ≥ 1b, g2 − | 1a − b, g2 |
1a, g2 ≥ 34 % − "a − b"1 "g"0
1a, g2 ≥ 4' .
Le théorème de séparation de Hahn-Banach implique alors que Bc0 (0, 4' ) ⊂ C.
/ n’est pas
Puisque c0 (W ) n’est pas réflexif, C n’est pas faiblement compact et donc Ω
faiblement compact d’après le théorème de Krein.
/ est borné dans c0 (W ), la topologie faible sur Ω
/ coı̈ncide avec la topologie de
Puisque Ω
la convergence ponctuelle, c’est-à-dire avec la topologie induite sur c0 (W ) par la topologie
/ n’est pas fermé dans {−1, 0, 1}W .
produit sur {−1, 0, 1}W qui est compact. Donc Ω
/ et n’appartenant pas
Soit alors z = (zw )w∈W un élément de {−1, 0, 1}W adhérent à Ω
/ et soit Az = {w ∈ W, zw += 0}. Si Az était fini, il existerait alors par définition de la
à Ω
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
51
/ ; Az est donc
topologie produit V ∈ Ω tel que Az ⊂ V ce qui impliquerait que z ∈ Ω
infini.
Soit (wn )n≥1 une suite d’éléments distincts de Az ; on pose Anz = Az ∩ {w1 , . . . , wn }.
Alors pour tout n ≥ 1 il existe Vn ∈ Ω tel que Anz ⊂ Vn , ce qui conclut la preuve. !
Grâce à ce lemme, nous allons maintenant établir le résultat principal de cette section.
Théorème 3.3.1
Soient δ et R deux nombres strictements positifs. Si la base de Schauder (ei )∞
i=1 est (δ, R)bornée, alors il existe une suite strictement croissante (mn )n≥1 d’entiers, et une suite
(xn )n≥1 d’éléments de B(0, 1 + R) telles que pour tout n ≥ 1 et tout i ≤ n, on ait
E ∗
F
emi , xn ≥ 1.
Démonstration
6
7
Soit W = {−ei , i ∈ N∗ } et Ω = V ⊂ W : ∃x ∈ B(0, 1 + R), x + V ⊂ Q+
R . L’ensemble W est infini.
Soit
λ(−ei ) > 0}. Alors Iλ est fini et
' λ ∈ P (W ) ; on définit Iλ = {i,
∞
i∈Iλ λ(−ei ) = 1. La base (ei )i=1 étant (δ, R)-bornée, il existe Jλ ⊂ Iλ et x ∈
'
B(0, 1 + R) tels que i∈Jλ λ(−ei ) ≥ δ > 0 et x + J ⊂ Q+
R où J = {−ei , i ∈ Jλ }. Donc
J ∈ Ω, ce qui prouve que Ω n’est pas vide, et λ(J) ≥ δ.
D’après le lemme de Ptak, il existe donc une une suite d’entiers strictement croissante
(mn )n≥1 et une suite (Vn )n≥1 d’éléments de Ω telles que pout tout n ≥ 1,
{−em1 , ..., −emn } ⊂ Vn . Il existe donc une suite (xn )n≥1 d’éléments de B(0, 1 + R)
+
telle que pour tout n ≥ 0,
E ∗xn + {−e
F m1 , ..., −emn } ⊂ QR . On en déduit donc que pour
tout n ≥ 1 et tout i ≤ n, emi , xn ≥ 1. !
Ce théorème permet de prouver immédiatement le lemme 2.2.1. En effet soit X un
+
espace de Banach réflexif muni d’une base de Schauder normalisée (en )∞
n=1 . Soit Q le
+
cône positif associé à cette base et soit Q+
1 l’intersection de Q avec la boule unité fermée
de X. Si (en )∞
par le
n=1 était (δ, R)-bornée, on pourrait extraire de la suite (xn )n≥1 donnée
F
E ∗
théorème 3.3.1 une sous-suite faiblement convergente vers x. On aurait alors emi , x ≥ 1
pour tout i ≥ 1, ce qui est impossible. Une base de Schauder normalisée d’un espace de
Banach réflexif n’est donc jamais (δ, R)-bornée, ce qui prouve le lemme 2.2.1.
On retrouve aussi la troisième assertion de la proposition 3.1.3. En effet soit X un
∞
espace de Banach séparable muni d’une
base de Schauder
'∞
'∞normalisée (en )n=1 telle qu’il
q
existe q ∈ [1, +∞[ et M >'0 tels que n=1 |βn | ≤ M" n=1 βn en " pour toute suite de
∞
scalaires (βn )∞
(en )∞
n=1 telle que
n=1 βn en converge. Si la base de Schauder'
n=1 était (δ, R)bornée, alors la suite (xn )n≥1 donnée par le théorème 3.3.1 vérifierait i≥1 | 1e∗i , xn 2 |q ≥ n
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
52
pour tout n ≥ 1, ce qui contredirait le fait que la suite (xn )n≥1 est bornée. La base de
Schauder (en )∞
n=1 n’est donc pas (δ, R)-bornée et son cône positif est Haar-négligeable.
On a également le corollaire suivant.
Corollaire 3.3.3
Soient δ et R deux nombres strictements positifs. Si la base de Schauder (ei )∞
i=1 est inconditionnelle et si toutes ses bloc-bases normalisées sont (δ, R)-bornées, alors (ei )∞
i=1 est
(1 + R)c0 -saturée.
Démonstration
Si (ei )∞
i=1 est (δ, R)-bornée, il existe alors une suite d’entiers strictement croissante
(mn )n≥1 et une suite d’éléments de B(0, 1 + R) (xn )n≥1 telles que pour tout n ≥ 1 et
F
E
tout i ≤ n, e∗mi , xn ≥ 1.
∞
La base de Schauder (ei )∞
i=1 étant inconditionnelle, toute sous-suite de (ei )i=1 est
inconditionnelle et (δ, R)-bornée. Il suffit donc de montrer que l’on peut extraire de
(ei )∞
i=1 une sous-suite de type (1 + R)c0 . Le lemme 3.1.1 implique que pour tout n ≥ 1,
'n
(e m )
"
e " ≤ "x " ≤ 1 + R ce qui implique alors que "."(emi ) ≤ (1 + R)"."∞ i . La
i=1 mi
n
suite (emi )∞
i=1 est donc de type (1 + R)c0 . !
On retrouve grâce à ce corollaire les résultats suivants : le cône positif de la base
canonique de lp ainsi que le cône positif d’une base de Schauder inconditionnelle engendrant un espace réflexif sont Haar-négligeables. On ne peut en effet extraire c0 de la base
canonique de lp ni d’une base engendrant un espace réflexif. De plus, on peut à présent
étendre le corollaire 3.3.2 aux bases sous-symétriques.
Corollaire 3.3.4
La base canonique de c0 est la seule base de Schauder normalisée et sous-symétrique dont
le cône positif n’est pas Haar-négligeable.
Démonstration
Il est clair que la base canonique de c0 est sous-symétrique. Réciproquement, si le cône
positif d’une base de Schauder normalisée et sous-symétrique n’est pas Haar-négligeable,
le corollaire 3.3.3 entraı̂ne qu’une sous-suite de la base est équivalente à la base canonique de c0 . La base étant étalante, elle est alors équivalente à la base canonique de c0 . !
Lorsqu’on applique le corollaire 3.3.3 inductivement sur une base de Schauder (ei )∞
i=1
inconditionnelle et (δ, R)-bornée (on extrait une sous-suite de type (1 + R)c0 , puis on
recommence sur les termes restants et ainsi de suite), on voit qu’il n’y a que deux possibilités :
– Soit on peut s’arrêter en un temps fini n. Alors (ei )∞
i=1 est de type n(1 + R)c0 et est
donc équivalente à la base canonique de c0 .
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
53
– Soit on ne peut pas s’arrêter en un temps fini. X s’écrit alors comme une somme
directe topologique dénombrable d’espace engendrés par des sous-suites disjointes
de (ei )∞
i=1 de type (1 + R)c0 .
Cette construction implique l’utilisation d’une récurrence transfinie. En effet la base de
Schauder étant dénombrable, le procédé d’extraction s’arrête au bout d’α étapes, α étant
un ordinal dénombrable, une renumérotation permet alors de conclure. Il est possible
toutefois d’éviter ceci : si on rajoute à chaque sous-suite extraite le premier terme de la
sous-suite de (ei )∞
i=1 restante, une récurrence classique montre que X s’écrit alors comme
une somme directe topologique dénombrable d’espace engendrés par des sous-suites disjointes de (ei )∞
i=1 de type (2 + R)c0 .
On obtient donc le corollaire suivant.
Corollaire 3.3.5
Soient δ et R deux nombres strictements positifs. Si (ei )∞
i=1 est inconditionnelle et si
toutes ses bloc-bases normalisées sont (δ, R)-bornées, alors il existe une partition (Ii )∞
i=1
de N∗ vérifiant :
– Un seul au plus des Ii peut être fini et non vide.
– Si Ii est infini, (ej )j∈Ii est de type (1 + R)c0 .
– X = ⊕i∈N∗ Xi , avec Xi := V ect {ej , j ∈ Ii }, où ⊕ désigne la somme directe topologique.
Enfin, on peut généraliser ces derniers résultats à des suites de c0 et à des bloc-bases
de (ei )∞
i=1 . La proposition suivante est un outil essentiel pour y parvenir.
Proposition 3.3.4
Si une base de Schauder (ei )∞
i=1 est inconditionnelle et si toutes ses bloc-bases normalisées
sont (δ, R)-bornées, alors,
– pour toute bloc-base normalisée (yi )∞
i=1 ,
– pour tout n ∈ N∗ ,
'
– pour toute suite (λi )ni=1 de nombres positifs vérifiant 1≤i≤n λi = 1,
– pour tout N ≥ 1 et toute suite (Ii )ni=1 de parties disjointes de N∗ telles que (yj )j∈Ii
soit de type N-c0 ,
il existe
J ⊂ {1, . . . , n} tel que
'
–
λ
i∈J i ≥ δ,
– (yj )j∈∪i∈J Ii est de type N(1 + R)c0 .
Démonstration
premiers entiers de Ii (si Ii est
Soit m ≥ 1, et pour 1 ≤ i ≤ n soit Iim l’ensemble des m '
zm,i
m
fini et que m ≥ Card(Ii) alors Ii := Ii ) . On pose zm,i = j∈I m yj ∈ Yi et zK
m,i = +zm,i + ,
i
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
54
de sorte que "zm,i " ≤ N.
Les parties Iim et Ijm sont disjointes si i += j. Donc pour tout m ≥ 1, (K
zm,i )1≤i≤n
∞
∞
est une bloc-base (finie) de (yi )i=1 , c’est donc aussi une bloc-base de (ei )i=1 et elle est
L+ son cône positif
normalisée. Elle est donc (δ, R)-bornée et inconditionnelle ; on note Q
dans Z := V ect {K
zm,i , 1 ≤ i ≤ n}.
Pour tout i ∈ {1, . . . , n}, on note ∆i la mesure de Dirac sur le point −K
zm,i . Alors
µ = Σni=1 λi ∆i est une mesure de probabilité
à
support
fini
inclus
dans
{−K
z
,
1
≤ i ≤ n}.
m,i
8
5
+
L ≥ δ, et il existe alors J m ⊂ {1, . . . , n} tel
Il existe donc z ∈ Z tel que µ z + Q
R
'
∗
que 1K
zm,i , z2 ≤ −1 et
(K
z )
est inconditionnelle et que
j∈J m λj ≥ δ. Puisque
G' m,i 1≤i≤nG
G
G
"z" ≤ 1 + R, on déduit du lemme 3.1.1 que G j∈J m zK
m,j G ≤ 1 + R, ce qui implique
G'
G
G
G
toujours d’après le lemme 3.1.1 que G j∈J m zm,j G ≤ N(1 + R).
De plus, il n’y a qu’un nombre fini d’ensembles K ⊂ {1, . . . , n} tels que
Il existe donc J ⊂ {1, . . . , n} tel que J = J m pour une infinité de m.
'
j∈K
λj ≥ δ.
Enfin, la constante
de la base étant
égale à 1, on a, pour tout m ∈ N∗ et
G G'
G
G' de Schauder
G
G G
G
pour tout p ∈ N∗ , G j∈J zm,j G ≤ G j∈J zm+p,j G.
G'
G
G
G
Donc G j∈J zm,j G ≤ N(1 + R) pour tout m ≥ 1, les sommes partielles de (yj )j∈∪i∈J Ii
sont donc uniformément bornées par N(1 + R) ce qui implique bien que (yj )j∈∪i∈J Ii est
de type N(1 + R)c0 .!
On peut finalement énoncer le théorème suivant.
Théorème 3.3.2
Si une base de Schauder (ei )∞
i=1 est inconditionnelle et si toutes ses bloc-bases normalisées
sont (δ, R)-bornées, alors toute bloc-base normalisée de (ei )∞
i=1 est uniformément (1 +
R)c0 -saturée.
Démonstration
Si (ei )∞
i=1 est inconditionnelle et si toutes ses bloc-bases normalisées sont (δ, R)bornées, c’est aussi le cas pour toutes ses bloc-bases normalisées ; il suffit donc de montrer
que (ei )∞
i=1 est uniformément (1 + R)c0 -saturée.
∗
Soit (Ii )∞
i=1 une suite de parties disjointes de N telle que la suite basique (ej )j∈Ii soit
de type Nc0 pour tout i ≥ 1, avec N ≥ 1.
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
55
Soit Ω l’ensemble des parties V de N∗ telles que la suite basique (ei )i∈∪j∈V Ij est de
type N(1 + R)c0 . La proposition précédente garantit que Ω est non vide et que
infλ∈P (N∗ ) {supV ∈Ω {λ(V )}} = δ > 0.
Il existe alors d’après le lemme de Ptak une suite (Vi )∞
i=1 d’éléments de Ω, et une suite
∞
(wi )i=1 d’entiers positifs distincts telles que pour tout n ≥ 1, {w1 , ..., wn } ⊂ Vn . Alors
(ej )j∈∪i≥1 Iw est de type N(1 + R)c0 .!
i
Un espace de Banach X est dit c0 -saturé si tout sous-espace fermé de dimension
infinie de X contient une copie isomorphe de c0 . On va montrer que la c0 -saturation des
bloc-bases entraı̂ne la c0 -saturation de l’espace. Pour cela, on utilise le fait suivant.
Fait 3.3.1
Soit X un espace de Banach à dual séparable. Alors la sphère unité de tout sous-espace
de dimension infinie de X contient une suite faiblement convergente vers 0.
Démonstration
infinie
Soit (fn )n≥1 un suite dense dans X ∗ . Soit Y un sous-espace fermé de dimension
4
de X, et soit SY La sphère unité de Y . Pour tout n ≥ 1, on pose Xn = 1≤i≤n Ker(fi ).
Puisque Y est de dimension infinie, SY ∩ Xn est non vide on peut pour tout n ≥ 1
choisir un élément yn ∈ SY ∩ Xn . La suite (yn )n≥1 est donc bien normalisée et faiblement
convergente vers 0.!
On a alors le lemme suivant.
Lemme 3.3.3
Soit X un espace de Banach muni d’une base de Schauder (en )n≥1 normalisée et inconditionnelle dont toute les bloc-bases normalisées sont c0 -saturées. Alors X est c0 -saturé.
Démonstration
D’après le théorème 3.1.2, la base (en )n≥1 est shrinking, le dual de X est donc
séparable. Soit Y un sous-espace fermé de dimension infinie de X, il contient donc d’après
le fait précédent une suite (yn )n≥1 normalisée et faiblement convergente vers 0. D’après
la proposition 3.1.2, (yn )n≥1 admet donc une sous-suite équivalente à une bloc-base de
(en )n≥1 .!
On a donc montré que pour une base de Schauder inconditionnelle (ei )∞
i=1 on a les
implications suivantes :
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
56
Q+ non Haar-négligeable =⇒ il existe deux réels strictements positifs δ et R tels que
(ei )∞
i=1 toutes ses bloc-bases normalisées soient (δ, R)-bornées =⇒ toute bloc-base normalisée de (ei )∞
i=1 est uniformément (1 + R)c0 -saturée =⇒ l’espace est c0 -saturé.
Pour que le cône d’une base de Schauder inconditionnelle ne soit pas Haar-négligeable,
celle-ci doit donc être “proche” de la base canonique de c0 . On est ainsi amené à conjecturer que la base canonique de c0 est la seule base de Schauder inconditionnelle dont le
cône positif n’est pas Haar-négligeable. La première question à se poser est celle de l’existence de bases de Schauder inconditionnelles ayant toutes leurs bloc-bases normalisées
uniformément (1 + R)c0 -saturées, qui ne soient pas équivalentes à la base canonique de
c0 . La base donnée dans la section suivante en est une. Néanmoins, il n’existe pas de
réels strictement positifs δ et R tels que la base soit (δ, R)-bornée, son cône est donc
Haar-négligeable, ce qui laisse la conjecture ouverte.
3.3.4
Un exemple
On pose Xn = lpn (n) pour n ≥ 1, avec 1 ≤ pn < ∞, limn→∞ (pn ) = ∞, avec (pn )n≥1
à définir ultérieurement ; chaque espace Xn sera muni de sa base canonique (eni )ni=1 .
On définit l’espace X comme la somme directe c0 de ces espaces Xn , soit
X = ⊕c0 {Xn , n ∈ N∗ } .
l(i)+1
On pose e1 = e11 , e2 = e21 , e3 = e22 , e4 = e31 , e5 = e32 ... ; soit pour tout i ≥ 1, ei = e l(i)(l(i)+1)
i−
2
6
7
∞
n(n+1)
avec l(i) = Max n ≥ 0, 2 < i . Alors (ei )i=1 est une base de Schauder de X. Elle
est normalisée, inconditionnelle et sa constante d’inconditionnalité vaut 1. On veut que
(ei )∞
de'c0 , i.e queG<ses sommes partielles ne
i=1 ne soit pas équivalente à la base canonique;G
soient pas uniformément bornées, c’est à dire que G 1≤i≤n eni G n∈N∗ ne soit pas bornée.
On choisit donc les pn tels que
5 18
limn→∞ n pn = ∞.
Pour n ≥ 1, soit Pn : X → Xn la projection canonique ; on remarque alors que pour
tout x ∈ X, "x" = sup {"Pn (x)" , n ∈ N∗ }.
On va montrer que toute bloc-base normalisée de (ei )∞
i=1 est uniformément Rc0 -saturée
pour tout R ≥ 1.
∞
Soient (yi )∞
i=1 une bloc-base normalisée, N ≥ 1 et (Ii )i=1 une suite de parties disjointes
de N∗ tels que la suite basique (yj )j∈Ii soit de type Nc0 .
Pour tout k ≥ 1, il existe un entier nk tel que pour tout n ≥ nk et pour toute famille
6
7k
'
d’éléments de Xn ∩ B(0, N) à supports disjoints sur (eni )ni=1 , on
xi = 1≤q≤n xi,q enq
i=1
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
57
G
G'
G
G
ait G ki=1 xi G ≤ NR.
En effet soit Ji le support de xi ; on a alors
G
G
k
k "
k
G"
G
"
"
1
1
1
G
G
pn
p
n
xi G = ( (
|xi,q |)) ≤ (
N pn ) pn ≤ N.k pn
G
G
G
i=1
i=1 q∈Ji
i=1
1
Ceci est donc vérifié dès que k pn ≤ R, ce qui est bien vrai à partir d’un certain
rang puisque pn tend vers l’infini. On remarque aussi que la condition d’être à supports
disjoints dans Xn est vérifiée par les projetés sur Xn des yi et donc aussi pour les projetés
sur Xn de sommes partielles de yi à support disjoints.
Puisque (yi )∞
i=1 est une bloc-base, il existe pour tout k > 0 un entier jk tel que pour
tout i ≥ jk , Pn (yi ) = 0 si n < nk . Ceci implique donc pour tout k > 0 l’existence d’un
entier ik tel que pour tout j ∈ Iik , Pn (yj ) = 0 si n < nk .
Il reste à montrer que (yj )j∈∪k≥1 Ii est de type NRc0 .
k
'
Toute somme partielle de (yj )j∈∪k≥1 Ii s’écrit
1≤k≤m wk avec m entier et wk une
k
somme partielle de (yj )j∈Ii . Par définition de X on a donc que
G'
G
G
<
;Gk '
G
G ∈ N∗ .
G
GPn (
1≤k≤m wk = sup
1≤k≤m wk ) , n G
G
'
Pour n ≥ nm on a par définition de nm que GPn ( 1≤k≤m wk )G ≤ NR.
Pour
'ni−1 ≤ n < ni avec
' 1 ≤ i ≤ m, on a par définition de ik que
P
1≤k≤m wk ) =
G Pn ( 1≤k≤i−1 wk ) et donc par définition de ni−1 que
G n( '
G
G Pn (
1≤k≤m wk ) ≤ NR. Les sommes partielles sont donc bien majorées par NR
donc (yj )j∈∪k≥1 Ii est bien de type NRc0 , ce qui implique que (yi )∞
i=1 est uniformément
k
Rc0 -saturée.
Néanmoins, il n’existe pas de réels strictement positifs δ et r tels que cette base soit
(δ, r)-bornée. En effet pour tout δ positif, si on prend une partie I de cardinalité au moins
G'
G
1
δn dans {1, . . . , n} on a que G i∈I eni G ≥ (δn) pn , ce qui tend vers l’infini d’après le choix
des pn . D’après la proposition 3.3.3 et quels que soient δ et r, la base (ei )∞
i=1 n’est pas
(δ, r)-bornée, et donc son cône positif est Haar-négligeable.
3.4
Structure des quotients
Dans [O] Odell montre que tout quotient de l’espace de Schreier est c0 -saturé, et pose
la question de savoir si cela s’étend à tout espace de Banach c0 -saturé muni d’une base
de Schauder inconditionnelle et shrinking.
C’est tout d’abord Leung qui y répond par la négative dans [L] en construisant un
tel espace dont un quotient est isomorphe à l2 , avant que Gasparis dans [G] ne donne la
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
58
construction pour tout p > 1 d’une famille d’espace de Banach Ep c0 -saturés et munis
d’une base de Schauder inconditionnelle et shrinking avec un quotient isomorphe à Ep .
On a vu que la non Haar-négligabilité du cône positif d’une base de Schauder inconditionnelle d’un espace de Banach X implique la c0 -saturation de X. On va dans cette
section établir le théorème suivant.
Théorème 3.4.1
Soit X un espace de Banach muni d’une base de Schauder (ei )i≥1 inconditionnelle telle
que son cône positif soit non Haar-négligeable. Alors tout quotient de dimension infininie
de X est c0 -saturé.
On en déduit les immédiatement les remarques suivantes : la c0 -saturation des quotients est une propriété moins forte qu’être à cône positif négligeable comme l’illustre
l’exemple de l’espace de Schreier ; les cônes positifs des bases de Schauder construites par
Leung et Gasparis sont Haar-négligeables.
Pour démontrer ce théorème, on doit introduire la propriété suivante.
Définition 3.4.1
On dira qu’un espace de Banach X a la propriété (P) si de toute suite normalisée faiblement convergente vers 0 on peut extraire une sous-suite équivalente à la base canonique
de c0 .
Un application directe de la proposition 3.1.2 permet d’établir le lemme suivant.
Lemme 3.4.1
Soit X un espace de Banach muni d’une base Schauder normalisée (ei )i≥1 . Alors X a la
propriété (P) si et seulement si on peut extraire de toute bloc-base normalisée de (ei )i≥1
une sous-suite équivalente à la base canonique de c0 .
D’après le fait 3.3.1, on obtient immédiatement le lemme suivant.
Lemme 3.4.2
Soit X un espace de Banach à dual séparable. Alors si X a la propriété (P), X est
c0 -saturé.
On va établir le théorème suivant qui contient le théorème 3.4.1.
Théorème 3.4.2
Soit X un espace de Banach muni d’une base de Schauder (ei )i≥1 shrinking, normalisée
et inconditionnelle. Si X a la propriété (P) alors tout quotient de dimension infinie de
X a la propriété (P). En particulier tous les quotients de dimension infinie de X sont
c0 -saturés.
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
59
Le dernier point du théorème vient du fait que X est à dual séparable, qu’un quotient
d’un espace à dual séparable est à dual séparable et du lemme 3.4.2. Pour démontrer le
théorème 3.4.2, on utilise la proposition suivante dûe à Odell [O] :
Proposition 3.4.1
Soit X un espace de Banach muni d’une base de Schauder (ei )i≥1 shrinking, normalisée
et 1-inconditionnelle. Soient T une application linéaire continue5et surjective
8 de X dans
un espace de Banach Y , et soit C > 0 telle que BY (0, 1) ⊆ C.T BX (0, 1) .
Alors si (%i )i≥1 est une suite décroissante tendant vers 0 de réels positifs, et si (yi )i≥1
est une suite normalisée faiblement convergente vers 0 de Y , il existe une sous-suite
(yi( )i≥1 de (yi)i≥1 et une suite strictement croissante d’entiers (pi )i≥0 , avec p0 = 0, qui
vérifient la condition suivante :
'
(
Pour toute suite de scalaires (ai )i>0 telle que " ∞
i=1 ai yi " ≤ 2, il existe une suite
strictement croissante d’entiers (ri )i≥0 et une suite (xi )i≥1 d’éléments de X qui vérifient :
1. r0 = 0,
2. pour tout i ≥ 1 on a pi < ri < pi+1 ,
2
3
3. pour tout i ≥ 1 on a xi ∈ V ect eri−1 . . . eri ,
4. pour tout i ≥ 1 on a "T (xi ) − ai yi( " ≤ %i ,
'
5. x = ∞
i=1 xi converge dans X et "x" ≤ 2C.
Démonstration du théorème 3.4.2
Soit Y un quotient de X et soit T : X → Y l’application quotient ; T est donc linéaire,
continue, et surjective. Soit (yi )i≥1 une suite normalisée faiblement convergente vers 0 de
Y . On peut alors, quitte à extraire une sous-suite, supposer que (yi )i≥1 est une suite
basique de constante de Schauder K ≥ 1. 5
8
Soit C > 0 telle que BY (0, 1) ⊆ C.T BX (0, 1) . Soit (%i )i≥1 la suite définie par
1
(
%i = 2K×2
i pour tout i ≥ 1. Il existe une sous-suite (yi )i≥1 de (yi )i≥1 et une suite strictement croissante d’entiers (pi )i≥0 avec p1 > 0 qui vérifient la condition de la proposition
3.4.1.
'∞ Pour ( tout i, j ≥ 1, soit δi,j le symbole de Kronecker. Alors pour tout n ≥ 1,
" i=1 δi,n yi " = 1 ≤ 2. Donc pour tout n ≥ 1, il existe une bloc-base (xi,n )i≥1 de (ei )i≥1
vérifiant pour tout n ≥ 1 :
3
2
1. xn,n ∈ V ect epn−1 +1 . . . epn+1 −1 ,
'
2. " ∞
i=1 xi,n " ≤ 2C, et en particulier "xn,n " ≤ 2C,
3. "T (xn,n ) − yn( " ≤ %n .
On pose alors xn := xn,n .
3
n
Cette dernière condition implique alors que "xn " ≥ 1−'
≥ 4+T
.
+T +
+
(
Posons à présent (ui )i≥1 := (x2i )i≥1 et (vi )i≥1 := (y2i )i≥1 ; (ui )i≥1 est donc une blocbase de (ei )i≥1 .
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
60
'
'∞
Par construction de ces sous-suites on a alors que ∞
"T
(u
)
−
v
"
≤
i
i
i=1
i=1 %2i =
1
1
<
.
Puisque
(v
)
1
est
une
suite
basique
normalisée,
le
théorème
de
Krein-Milmani i≥
4K
2K
Rutman entraı̂ne que (T (ui))i≥1 est une'
suite basique équivalente à (vi )i≥1 et que pour
toute suite de scalaires (ai )i≥1 telle que ∞
i=1 ai vi converge on a :
-
1 − 2K
∞
"
i=1
.
"vi − T (ui)" "
∞
"
i=1
ai vi " ≤ "
∞
"
i=1
ai T (ui)" ≤ 2K"
∞
"
i=1
ai vi ".
Il existe donc a > 0 tel que
a"
∞
"
i=1
ai vi " ≤ "
∞
"
i=1
ai T (ui)" ≤ 2K"
∞
"
i=1
ai vi ".
Enfin puisque (ui )i≥1 est une bloc-base bornée en norme par 2C de la base de Schauder
1-inconditionnelle (ei )i≥1 , on a, d’après le lemme 3.1.1, pour tout M ≥ 1 :
La suite
5
ui
+ui +
G
G
G
G
G
G
M
M
M
G"
G"
G"
G 1
G 2
ui G
G
G
G
G
G
G
ai vi G ≤ "T " × G
ai ui G ≤ C"T " × G
ai
G
G.
G
G
G
G a
G a
"ui " G
i=1
i=1
i=1
8
i≥1
est une bloc-base normalisée de la base shrinking (ei )i≥1 , elle est donc
faiblement convergente vers 0. On peut donc en extraire une sous-suite équivalente à la
base canonique de c0 . L’inégalité ci-dessus indique alors que la suite extraite correspondante de (vi )i≥1 est alors équivalente à la base canonique de c0 .!
Nous allons maintenant montrer que la propriété (P) est presque une propriété des
trois espaces.
Proposition 3.4.2
Soit X un espace de Banach muni d’une base de Schauder (ei )i≥1 shrinking, normalisée
et inconditionnelle, et soit N un sous-espace vectoriel fermé de X. Si N et X/N ont la
propriété (P), alors X a la propriété (P).
Démonstration
Posons Y = 5X/N et soit
8 T : X → Y l’application quotient. Soit C > 0 telle que
BY (0, 1) ⊆ C.T BX (0, 1) , et soit (xi )i≥1 une suite normalisée faiblement convergente
vers 0 de X. Distinguons deux cas :
Si lim infi→∞ "T (xi )" = 0, on peut supposer sans perte de généralité que
limi→∞ "T (xi )" = 0 ; il existe alors une suite (yi )i≥1 de N telle que "xi − yi " → 0,
ce qui implique puisque (xi )i≥1 est normalisée que "xi − +yyii + " → 0. En passant deux
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
fois à des sous-suites on peut supposer que
5
yi
+yi +
8
i≥1
61
est équivalente à (xi )i≥1 d’après le
théorème de Krein-Milman-Rutman, puis que (xi )i≥1 est équivalente à la base canonique
de c0 ce qui permet de conclure.
5
8
i)
Sinon, on peut supposer que "T (xi )" ≥ a > 0 pour tout i ≥ 1, et +TT (x
est une
(xi )+
i≥1
suite normalisée et faiblement convergente vers 0 de Y . On peut donc la supposer sans
perte de généralité équivalente à la base canonique de c0 , ce
qui signifie qu’il
G'
G existe une
1 T (xi ) G
∗ G
constante M > 0 telle que pour toute partie finie I de N , G i∈I M +T (xi )+ G ≤ 2.
5
8
T (xi )
1
Soit (%i )i≥1 la suite définie par %i = 2i . Il existe une sous-suite (wi )i≥1 de +T (xi )+
i≥1
et une suite strictement croissante d’entiers (pi )i≥0 avec p1 > 0 qui vérifient les conditions
8
5
T (x"i )
(
de la proposition 3.4.1 ; soit (xi )i≥1 la sous-suite de (xi )i≥1 telle que (wi )i≥1 = +T (x" )+
.
i
1
δ
M i,j
i≥1
Pour i, j ≥ 1 on
où δi,j désigne le symbole de Kronecker. Alors pour
' pose ai,j :=
tout n ≥ 1, " ∞
a
w
"
≤
2.
Pour
tout n ≥ 1, il existe donc une bloc-base (xi,n )i≥1
i=1 i,n
2 i
3
'
telle que xi,n ∈ V ect ep2i−1 +1 . . . ep2i+1 −1', "T (xi,n ) − M1 wi " ≤ %i et " ∞
i=1 xi,n " ≤ 2C ;
∗
cette dernière inégalité implique que " i∈I xi,n " ≤ 2C pour tout
partie finie I de
3 N.
2
A i fixé, la suite (xi,n )n≥1 est donc une suite bornée de V ect ep2i−1 +1 . . . ep2i+1 −1 ; par
un procédé diagonal on peut supposer que pour tout i ≥ 1, (xi,n )n≥1 converge vers xi ,
2
3
ce qui implique que pour tout i ≥ 1, "T (xi ) − M1 wi" ≤ %i , soit "xi " ≥ +T1 + M1 − %i . Il
existe alors i0 ∈ N∗ tel que 2C ≥ "xi " ≥ b > 0 pour tout i ≥ i0 , et on peut sans perte de
généralité supposer que i0 = 1.
5
8
On pose à présent (ui )i≥1 := +xx2i
; la suite (ui )i≥1 est une bloc-base normalisée
2i +
i≥1 '
'
de (ei )i≥1 . Pour toute partie finie I ⊂ N∗ , " i∈I xi " = limn→∞ " i∈I xi,n " ≤ 2C ; on en
'
pour toute partie finie I ⊂ N∗ . La suite
déduit d’après le lemme 3.1.1 que " i∈I ui " ≤ 2C
b
(ui )i≥1 est donc équivalente à la base canonique de c0 . Les inégalités "T " ≥ "T (x(i )" ≥ a >
0 et 2C ≥ "xi " ≥ b > 0 impliquent alors que la suite (yi)i≥1 := (M."x2i "."T (x(2i )".ui )i≥1
est elle aussi équivalente à la base canonique de c0 .
On pose (vi )i≥1 := (x(2i )i≥1 ; l’inégalité "T (xi )− M1 wi " ≤ %i implique que limi→∞ T (vi −
yi ) = 0.
On pose zi = vi − yi . S’il existe une sous-suite de (zi )i≥1 qui tend vers 0, on peut
supposer d’après le théorème de Krein-Milman-Rutman qu’une sous-suite de (vi )i≥1 , et
donc de (xi )i≥1 , est équivalente à une sous-suite de (yi)i≥1 ce qui permet de conclure.
Sinon on se retrouve dans le premier cas et il existe une sous-suite de (zi )i≥1 équivalente
à la base canonique de c0 . C’est donc aussi le cas pour (xi )i≥1 .!
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
3.5
62
Mesures gaussiennes et cônes positifs
Nous avons établi précédemment la Haar-négligeabilité du cône positif de très nombreuses bases de Schauder. On se propose ici de construire explicitement des mesures
test pour le cône. Plus précisément, on va construire des mesures gaussiennes qui sont
des mesures test.
La proposition suivante illustre que la Gauss-négligeabilité est une notion plus forte
que la Haar-négligeabilité.
Proposition 3.5.1
Le cône positif d’une base de Schauder n’est jamais Gauss-négligeable.
Démonstration
Soit X un espace de Banach muni d’une base de Schauder normalisée (fn )n≥1 , soit Q+
son cône positif, et soit (en )n≥1 la base canonique
(an )n≥1 de
% de l2 . On choisit une suite '
réels strictement compris entre 0 et 1 telle que n≥1 (1−an ) > 0, ainsi que x = n≥1 xn en
appartenant à l2 tel que xn += 0 pour tout n.
On choisit à présent une suite de réels strictement
positifs
'
' (αn )n≥1 telle que l’application linéaire T de l2 dans X définie par T ( n≥1 yn en ) = n≥1 αn |xxnn | yn fn soit continue
(par exemple αn = 2−n convient). Alors T a une image dense dans X.
√
λn
Enfin on choisit une suite de réels non
' nuls (λn )n≥1 telle que 0 < xn ≤ an .
Ce dernier choix implique alors que n≥1 λn en converge dans l2 et donc que la loi µ
'
de n≥1 λn gn en est une mesure gaussienne centrée non-dégénérée de l2 . Donc la mesure
image ν de µ par T est une mesure gaussienne
centrée non-dégénérée
de X.
6
7
'
yn
Soit H la partie de l2 définie par H = y = n≥1 yn en , λn ≥ 0 ; alors par indépendance
des gn on a :
H
xn
P (gn ≥ − )
µ(−x + H) =
λn
n≥1
H
xn
≥
P (|gn| ≤
)
λn
n≥1
H
xn
(1 − P (|gn | >
))
≥
λ
n
n≥1
De plus, l’inégalité de Bienaymé-Chebishev appliquée aux variables aléatoires gn
2
donne P (|gn | > λxnn ) ≤ λxn2 . Ce qui donne finalement :
n
µ(−x + P ) ≥
H
(1 −
n≥1
H
λ2n
)
≥
(1 − an ) > 0.
x2n
n≥1
Enfin puisque T (H) ⊂ Q+ et que T est injective :
ν(T (−x) + Q+ ) ≥ µ(−x + H) > 0.
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
63
Donc Q+ n’est pas Gauss-négligeable.!
D’après le théorème 1.3.2 et la proposition 3.5.1, le cône positif associé à une base de
Schauder n’est jamais cube-négligeable. En fait, on a même un résultat plus fort : une
mesure cubique n’est jamais une mesure test pour le cône positif d’une base de Schauder
inconditionnelle.
Proposition 3.5.2
Soit X un espace de Banach séparable muni d’une base de Schauder inconditionnelle et
normalisée (en )n≥1 , soit Q+ son cône positif, et soit ν une mesure cubique sur X.
Alors il existe z ∈ X tel que ν(z + Q+ ) = 1.
Démonstration
Soit µ la mesure produit standard de [0, 1]N ; alors il existe x ∈ X et une suite (xi )i≥1
normalement convergente de X qui engendre un espace vectoriel dense dans 2X tels 3que
N
ν soit
' la mesure image de µ par l’aplication T : [0, 1] → X définie par T (qi )i≥1 =
x + i>0 qi xi .'
'
Pour y = i≥1 αi ei appartenant à X on pose y/ = i≥1 |αi |ei , de sorte que "/
y" ≤
K"y" où K est'la constante de Schauder inconditionnelle
de la base.
'
On a alors i≥1 "x/i " < ∞ et donc z = i≥1 x/i est bien défini. Finalement on obtient
ν (x − z + Q+ ) = 1.!
Dans cette section, X désignera un espace de Banach muni d’une base de Schauder
(en )n≥1 , Q− désignera son
' cône négatif, et µ désignera
' la loi de la série gaussienne presquesûrement convergente n≥1 gn λn en . Enfin x = n≥1 xn en désignera un élément de X.
Le but de cette section va être d’établir pour quelles valeurs de x et de (λn )n≥1 on a
µ(x + Q− ) > 0. Commençons par quelques remarques préliminaires.
Remarque 3.5.1
– Les variables aléatoires gn étant symétriques et indépendantes, on peut sans perte
de généralité supposer que les λn sont tous positifs. De plus, quitte à travailler sur
une sous-suite de (en )n≥1 , on peut les choisir strictement positifs.
– On s’est restreint au cas où µ s’écrit comme la loi d’une somme de variables
aléatoires gaussiennes unidimensionnelles ”colinéaires” aux vecteurs de base ce qui
n’est pas le cas pour une mesure gaussienne dans le cas général. Cette restriction se
justifie par la facilité que l’on a alors à calculer la mesure d’un translaté du cône.
En effet, par indépendance des variables aléatoires gn on a :
B
H ?
xn
−
.
P gn ≤
µ(x + Q ) =
λ
n
n≥1
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
64
Il n’est à priori pas clair que l’existence d’une mesure gaussienne test pour le cône
positif implique l’existence d’une mesure gaussienne “diagonale” test.
'
'
– S’il existe x = n≥1 xn en vérifiant µ(x + Q− ) > 0, il existe y = n≥1 yn en avec
yn > 0 pour tout n ≥ 1 vérifiant
µ(y + Q− ) > 0. On ne considèrera donc par la
'
suite que des vecteurs x = n≥1 xn en avec xn > 0 pour tout n ≥ 1.
En effet posons Ix− = {n ∈ N∗ , xn ≤ 0} et Ix+ = {n ∈ N∗ , xn > 0} ; alors
B H ?
B
H ?
xn
xn
−
P gn ≤
P gn ≤
µ(x + Q ) =
.
λn
λn
−
+
n∈Ix
−
µ(x + Q ) ≤
n∈Ix
H
P
n∈Ix−
?
xn
gn ≤
λn
B
−
≤ 2−Card(Ix )
Donc Ix− est fini.
'
Soit % > 0 ; on pose yn = % si n ∈ Ix− , yn = xn si n ∈ Ix+ . Alors y = n≥1 yn en est
bien un élément de X et µ(x + Q− ) ≤ µ(y + Q− ).
5
8
%
– Pour que µ(x + Q− ) = n≥1 P gn ≤ λxnn > 0, il faut que
5 5
88
5 8
xn
= 1 ce qui implique que limn→∞ λxnn = 0.
limn→∞ P gn ≤ λn
Nous énonçons comme un lemme des résultats élémentaires qui seront utiles par la
suite (cf [D], pages 95-96).
Lemme 3.5.1
Soit g : R∗+ −→ R∗+ une fonction de classe C 1 et soit a > 0.
! +∞
" (x)
∼ µx avec µ < −1, alors a g(t)dt est convergente.
– Si gg(x)
! +∞
" (x)
– Si gg(x)
∼ µx avec µ > −1 et µ += 0, alors a g(t)dt est divergente.
– Si g ( (x) < 0 au voisinage de +∞, si h(x) =
g(x)
g " (x)
est bien définie, continûment
! +∞
dérivable au voisinage de +∞, et si h (x) ∈ o(1), alors a g(t)dt est convergente
! +∞
2
et a g(t)dt ∼ |gg(a)
" (a)| .
(
On obtient le résultat suivant.
Proposition 3.5.3
Soit x ∈ Q+ , alors µ(x + Q− ) > 0 si et seulement si la série
Démonstration
'
n≥1
e
xn 2
−1
2 ( λn )
xn
λn
converge.
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
5
P
gn ≤
n≥1
5
5
88
xn
≥
1
−
P
g
. Cette quantité
n
n≥1
λn
88
5
5
'
xn
converge.
est donc strictement positive si et seulement si n≥1 ln 1 − P gn ≥ λn
5 5
88
Puisque limn→∞ P gn ≥ λxnn
= 0, ceci est donc équivalent à la convergence de la
5
8
'
série n≥1 P gn ≥ xλnn .
5
8
5 8
2
!∞
− t2
e√
xn
Posons G(a) = a g(t)dt avec g(t) = 2π ; alors P gn ≥ λn = G λxnn . La fonction
g(t) est de classe C ∞ , strictement positive, et g ( (t) = −tg(t) < 0 pour t > 0.
1
∞
pour t > 0
Posons maintenant h(t) = gg(t)
" (t) = − t . Cette fonction est de classe C
a2
2 (
3
2
2
e−
√
au
et limn→∞ h (t) = t12 = 0. Donc d’après le lemme précédent, G(a) ∼ |gg(a)
" (a)| =
a 2π
8
5
'
voisinage de l’infini. Donc la série n≥1 P gn ≥ λxnn converge si et seulement si la série
x
− 1 ( n )2
'
e 2 λn
converge.!
x
n
n≥1
On a µ(x + Q− ) =
%
xn
λn
8
65
=
%
λn
Cette dernière proposition permet à présent d’énoncer le critère de comparaison suivant.
Proposition 3.5.4
Soit x ∈ Q+ . S’il existe une permutation
π : N∗ → N∗ telle que :
√
−1
xπ(n)
– lim sup λπ(n) ln(n) 2 < 2, alors µ(x + Q− ) = 0.
√
−1
x
2 >
– lim inf λπ(n)
ln(n)
2, alors µ(x + Q− ) > 0.
π(n)
Avant de passer à la démonstration, on va commenter ce résultat. Cette proposition
dit que si les coordonnées de x sont suffisamment grandes par rapport aux λn alors la
mesure du cône translaté par x est strictement positive. Dans le cas où le cône est Haarnégligeable ceci nous indique qu’il existe beaucoup de mesure gaussiennes qui ne sont
pas des mesures
test pour le cône : toutes celles qui s’écrivent avec des λn assez petits
'
1
pour que n≥1 ln(n) 2 λn en converge dans X. Pour espérer trouver des mesures test gaussiennes, il faudra donc choisir des λn grands.
'
Démonstration
Posons bn = λxnn et an =
1
e− 2 (bn )
bn
xπ(n)
λπ(n)
; alors µ(x + Q− ) > 0 si et seulement si la série
2
converge. Puisqu’il s’agit d’une série à termes positifs, sa convergence est
2
'
− 1 (an )2
−t
donc équivalente à celle de la série n≥1 e 2an
. Soit M > 0 ; posons g(t) = e t 2 et
1
∞
2 ). La fonction h
hM (t) = g(M.ln(t)
et strictement décroissante sur
M (t) est de classe C
!
'
+∞
∗
R+ , donc n≥1 hM (n) a le même comportement que 1 hM (t).
8
5 2
2
h" (t)
1
soit hM
En dérivant on trouve h(M (t) = −hM (t) M2t + 2t.ln(t)
∼ − M2t .
M (t)
n≥1
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
66
! +∞
De plus hM (t) > 0 sur R∗+ donc d’après le lemme précédent on a que 1 hM (t) , et
√
√
'
donc n≥1 hM (n), converge si M > 2 et diverge si M < 2.
2√
3
1
x
S’il existe % > 0 tel que
2 + % ln(n) 2 ≤ λπ(n)
pour n assez grand, posons M =
π(n)
√
1
2 + %. Alors il existe nM ∈ N tel que pour tout n ≥ nM , an ≥ M.ln(n) 2 . La décroissance
de g(t) implique que
5
8 '
2
1
'
'
'
1
e− 2 (an )
2
=
g(a
)
≤
g
M.ln(n)
= n≥nM hM (n)
n
n≥nM
n≥nM
n≥nM
an
La convergence de cette dernière série permet donc de conclure.
√
S’il existe % > 0 tel que
2√
3
1
2 − % ln(n) 2 ≥
xπ(n)
λπ(n)
pour n assez grand, posons M =
1
2−%. Alors il existe nM ∈ N tel que pour tout n ≥ nM , an ≤ M.ln(n) 2 . Par décroissance
de g(t), ceci implique que
8 '
5
2
1
'
'
'
1
e− 2 (an )
2
= n≥nM hM (n)
=
g(a
)
≥
g
M.ln(n)
n
n≥nM
n≥nM
n≥nM
an
La divergence de cette dernière série permet donc de conclure.!
On en déduit le résultat suivant.
Corollaire 3.5.1
'
1
S’il existe une permutation π de N∗ telle que la série n≥1 ln(n) 2 λπ(n) eπ(n) converge dans
X, posons pour % > 0
8
" 5√
1
x' =
2 + % ln(n) 2 λπ(n) eπ(n) .
n≥1
Alors µ(x' + Q− ) > 0, donc µ n’est pas une mesure test pour Q− .
On va établir la réciproque pour une grande classe de mesures gaussiennes qui contient,
comme on le verra plus loin, toutes les mesures gaussiennes des espaces lp . Pour cela, on
va utiliser la propostion suivante.
Proposition 3.5.5
Supposons que la base de Schauder (en )n≥1 soit K-inconditionnelle.
Si µ n’est pas une mesure test pour Q− , il existe deux constantes M1 > 0 et M2 > 0
telles que pour toute permutation π de N∗ et pour tout a > 0, il existe un ensemble
Iπ,a ⊂'
N∗ vérifiant :
√
1
–
2a
1 ≤ M1
n∈Iπ,a a
n ln(n) 2
'
1
K√2 M2
2
– " n∈I
/ π,a ln(n) λπ(n) eπ(n) " ≤
2a
Démonstration
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
67
'
Si µ n’est pas une mesure test pour Q− , il existe x = n≥1 an λn en ∈ X , avec an > 0
'
− 1 (an )2
pour tout n, tel que µ(x + Q− ) > 0. La série n≥1 e 2an
est donc convergente. On pose
2
'
−1
(a
)
n
M2 = "x" et M1 = n≥1 e 2an . Soit a > 0 et soit π une permutation de N∗ .
7
6
√
1
On pose Iπ,a = n ≥ 1 : aπ(n) ≤ 2aln(n) 2 .
La base (en )n≥1 étant K-inconditionnelle on a :
" √
"
1
"
2aln(n) 2 λπ(n) eπ(n) " ≤ K"
aπ(n) λπ(n) eπ(n) " ≤ K 2 M2
n∈I
/ π,a
n∈I
/ π,a
De plus,
" e− 12 (aπ(n) )2
" e−aln(n)
1
1 "
√
≥
=
M1 ≥
√
1
1 !
aπ(n)
2a n∈Iπ,a na ln(n) 2
2aln(n) 2
n∈Iπ,a
n∈Iπ,a
On peut à présent énoncer, pour une certaine classe de mesures gaussiennes, un critère
pour être une mesure test pour le cône négatif.
Corollaire 3.5.2
Soit (en )n≥1 une base de Schauder inconditionnelle. S’il existe une permutation π0 de N∗
5
8
1
et une constante a > 0 telles que |λπ0 (n) | ∈ O na ln(n)
, alors µ est une mesure test pour
'
1
Q− si et seulement si la série n≥1 ln(n) 2 λπ0 (n) eπ0 (n) diverge.
Démonstration
D’après le'corollaire 3.5.1, il suffit de montrer que si µ n’est pas une mesure test pour
1
Q− , la série n≥1 ln(n) 2 λπ0 (n) eπ0 (n) converge.
Puisque µ n’est pas une mesure test de Q− et puisque (en )n>0 est inconditionnelle, il existe d’après la proposition 3.5.5 un ensemble Iπ0 ,a ⊂ N∗ tel que les séries
'
'
1
1
2
1 et
n∈Iπ ,a a
n∈I
/ π ,a ln(n) λπ0 (n) eπ0 (n) convergent.
0
n ln(n) 2
0
Il existe C > 0 tel que |λπ0 (n) | ≤
"
n∈Iπ0 ,a
Donc
'
n≥1
1
C
na ln(n)
"ln(n) 2 λπ0 (n) eπ0 (n) " =
"
pour tout n ≥ 1. On a
n∈Iπ0 ,a
1
ln(n) 2 |λπ0(n) | ≤ C
"
n∈Iπ0 ,a
1
1
na ln(n) 2
.
1
ln(n) 2 λπ0 (n) eπ0 (n) converge.!
On va à présent construire explicitement des mesures gaussiennes centrées qui sont
des mesures test pour le cône négatif de la base canonique des espaces lp , 1 ≤ p < +∞,
et mettre en évidence pourquoi cette technique ne peut aboutir dans c0 .
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
68
'
On sait qu’une
série
Gaussienne
n≥1 λn gn en de lp converge presque-sûrement si et
'
seulement si n≥1 λpn converge (λn ≥ 0). Un résultat classique d’analyse nous indique
5 8
2 3
que λn ∈ o 11 , où λn n≥1 désigne le réarrangement décroissant de la suite (λn )n≥1 .
np
On déduit immédiatement du corollaire 3.5.2 la proposition suivante.
Proposition 3.5.6
'
Soit µ la loi d’une série gaussienne n≥1 λn gn en supposée presque-sûrement convergente
'
p
p
dans lp . Alors µ est une mesure test pour Q− si et seulement si la série n≥1 ln(n) 2 λn
diverge.
On peut ainsi construire facilement des mesures test gaussiennes.
Exemple 3.5.1
Pour tout p ∈ [1, ∞[ et pour tout % ∈ ]Max (0, 1/p − 1/2) , 1/p], la série gaussienne
"
n≥1
1
1
p
1
n ln(n) 2 +'
gn en
est presque-sûrement convergente dans lp et sa loi est une mesure test pour le cône négatif.
On sait déja que le cône négatif Q− de la base canonique (en )n≥1 de c0 n’est pas
Haar-négligeable. Il est néanmoins intéressant de constater que le critère de comparaison
donné dans la partie 1 s’applique dans ce cas. On va utiliser la caractérisation suivante
des opérateurs de covariance d’une mesure gaussienne de c0 ([H], proposition 5.8 p. 335).
Proposition 3.5.7
Soit (en )n≥1 la base canonique de c0 et soit (e∗n )n≥1 la base canonique de l1 . Soit Rµ :
λ
'
−
l1 → c0 un opérateur symétrique et positif ; si n≥1 e 0Rµ (e∗n ),e∗n 1 converge pour tout λ > 0
alors Rµ est l’opérateur de covariance d’une mesure gaussienne de c0 .
Cette dernière condition est de plus nécessaire si Rµ est diagonal.
Ceci entraı̂ne immédiatement le corollaire suivant :
Corollaire 3.5.3
'
Soit µ la loi d’une série gaussienne n≥1 gn λn en presque-sûrement convergente dans c0 .
5
8
1
– Il existe une permutation π de N∗ telle que λπ(n) ∈ o ln(n)− 2 .
√
'
1
– Pour tout M > 2, µ(xM + Q− ) > 0 où xM = n≥1 Mln(n) 2 λπ(n) eπ(n) ∈ c0 pour
tout M > 0.
CHAPITRE 3. HAAR-NÉGLIGEABILITÉ ET BASES DE SCHAUDER
69
Démonstration
'
− λ
On déduit de la proposition précédente que n≥1 e λ2n converge pour tout λ > 0.
5
8
−1/λ2π(n)
∗
Soit π une pemutation de N telle que la suite e
soit décroissante, donc
n≥1
8
5
2
est décroissante pour tout λ > 0. D’après un résultat classique on a que
e−λ/λπ(n)
n≥1
5
8
−1
−λ/λ2π(n)
2
limn→∞ ne
= 0 ce qui implique que λπ(n) ∈ o ln(n)
.
√
On déduit alors de la proposition 3.5.4 que µ(xM + Q− ) > 0 pour tout M > 2.!
Chapitre 4
Notions de petitesse et
Hypercyclicité
On sait que l’ensemble des vecteurs non-hypercycliques d’un opérateur hypercyclique
est petit au sens de Baire, on étudiera dans ce chapitre s’il vérifie les conditions de
petitesse introduites dans le chapitre 1. Dans la section 4.1, on présentera brièvement
l’hypercyclicité en se limitant au cadre des espaces de Fréchet ; pour des informations
plus complètes sur le sujet, on pourra consulter [GE] ou le livre à paraitre [BM2]. Dans
la section 4.2, on montrera que si un shift à poids T admet au moins une orbite dont la
fermeture ne contient pas 0, alors l’ensemble des vecteurs non-hypercycliques pour T n’est
pas σ-poreux. Dans la section 4.3, on donnera un critère pour qu’un opérateur soit “σporeux hypercyclique”, et on l’appliquera à un shift construit par D. Preiss (non-publié),
ainsi qu’aux opérateurs de translation sur H(C) pour une certaine classe de métriques.
Dans 4.4 on montrera que pour des poids assez grands, un shift à poids n’est pas “Haarnégligeable hypercyclique”, et que c’est aussi le cas pour une certaine classe d’opérateurs
sur H(C) commutant avec les translations. On pourra retrouver les différents résultats
de ce chapitre dans [BMM].
4.1
Hypercyclicité
Définition 4.1.1
Soit X un espace de Fréchet séparable et soit T = (Tn )n∈N une suite d’applications
continues de X dans X.
– On dit que la suite T est universelle s’il existe x ∈ X tel que l’ensemble {Tn (x); n ∈
N} est dense dans X. Un tel vecteur x est dit universel pour T et on note Univ(T)
l’ensemble des vecteurs universels pour T.
– Si T : X → X est une application linéaire continue, on dit que T est hypercyclique
si la suite T = (T n )n∈N est universelle. On dit d’un vecteur x qu’il est hypercy70
CHAPITRE 4. NOTIONS DE PETITESSE ET HYPERCYCLICITÉ
71
clique pour T s’il est universel pour T, et on note HC(T ) l’ensemble des vecteurs
hypercycliques pour T .
– Un opérateur hypercyclique T : X → X est dit σ-poreux hypercyclique si X \
HC(T ) est σ-poreux, Haar-négligeable hypercyclique si X\HC(T ) est Haar-négligeable.
– On dit que la suite T est topologiquement transitive si pour toute paire (U, V )
d’ouverts non vides de X, il existe n ∈ N tel que Tn (U) ∩ V += ∅.
Le théorème suivant ([GS]), connu sous le nom de théorème de transitivité de Birkhoff,
prouve que l’universalité et la transitivité topologique sont des notions équivalentes dans
un espace de Fréchet séparable, et que l’ensemble des vecteurs universels est un Gδ dense
dans X.
Théorème 4.1.1
Soit X un espace de Fréchet séparable et soit T = (Tn )n∈N une suite d’applications continues de X dans X. La suite T est universelle si et seulement si elle est topologiquement
transitive ; si c’est le cas, Univ(T) est un Gδ dense dans X.
Démonstration
Soit (On )n≥0 une base dénombrable de la topologie de X. Pour tout m ≥ 0 on pose
Gm = ∪n≥0 Tn−1 (Om ) .
Les ensembles Gm sont ouverts et on a
Univ(T) = ∩m≥0 Gm ,
L’ensemble Univ(T) est donc un Gδ de X.
Si T est universelle, alors Univ(T) est dense dans X. Alors Gm est dense dans X
pour tout m ≥ 0 ce qui entraı̂ne que T est topologiquement transitive. Réciproquement,
si T est topologiquement transitive alors Gm est dense dans X pour tout m ≥ 0. Le
théorème de Baire entraı̂ne alors que Univ(T) est dense dans X et T est universelle.!
Pour un opérateur hypercyclique T , l’ensemble X \ HC(T ) est donc toujours petit au
sens de Baire. Il est alors naturel de se demander si X \ HC(T ) reste petit pour d’autres
notions de petitesse. On étudiera dans ce chapitre deux types d’opérateurs : les shifts à
poids sur c0 ou lp (1 ≤ p < ∞), et les opérateurs qui commutent avec les opérateurs de
translation sur l’espace des fonctions entières H(C).
Soit X = c0 ou lp (1 ≤ p < ∞), et soit (ei )i∈N sa base canonique. Pour toute suite
bornée w = (wi )i≥1 de réels positifs, le shift à poids sur X associé à w est l’opérateur
Bw : X → X défini par Bw (e0 ) = 0 et Bw (ei ) = wi ei−1 , i ≥ 1. D’après un résultat de H.
Salas ([Sa]), Bw est hypercyclique si et seulement si
lim sup
n→∞
n
H
i=1
wi = ∞ .
CHAPITRE 4. NOTIONS DE PETITESSE ET HYPERCYCLICITÉ
72
On peut ainsi retrouver un résultat classique de S.Rolewicz : si wi = 1 pour tout i ≥ 1,
l’opérateur 2Bw est hypercyclique.
Soit λ ∈ C, l’opérateur de translation par λ sur H(C) est l’opérateur τλ définit par
τλ f (z) = f (z + λ). D’après un résultat classique de G. D. Birkhoff, τλ est hypercyclique
dès que λ += 0. Plus généralement, G. Godefroy et J. H. Shapiro ont montré dans ([GS])
que si un opérateur T ∈ L(H(C)) n’est pas un multiple de l’identité, et s’il commute
avec tous les opérateurs de translation, alors T est hypercyclique. On retrouve ainsi un
résultat classique de S. McLane : l’opérateur de dérivation D est hypercyclique.
Le théorème suivant ([GE2]), connu sous le nom de critère d’hypercyclicité, donne
une condition suffisante d’hypercyclicité.
Théorème 4.1.2
Soit X un espace de Fréchet séparable et soit T : X → X une application linéaire continue. S’il existe deux parties denses Y et Z de X ainsi qu’une suite croissante d’entiers
(nk )k≥0 tels que :
– pour tout y ∈ Y , limk→∞ T nk (y) = 0,
– pour tout z ∈ Z, il existe une suite (xk )k≥0 d’éléments de X telle que ,
limk→∞ T nk (xk ) = z, limk→∞ xk = 0.
Alors T est hypercyclique.
Récemment, M. De La Rosa et C. Read ([RR]) ont prouvé que la réciproque était
fausse en construisant un contre-exemple. Ce résultat a été généralisé par F. Bayart et
E. Matheron ([BM]) qui ont prouvés l’existence de tels opérateurs dans de nombreux
espaces de Banach, notamment c0 et lp .
4.2
Shifts à poids non σ-poreux hypercycliques
Nous allons dans un premier temps construire des parties d’un espace de Banach
non σ-poreuses, ce qui nous permettra dans un deuxième temps de montrer qu’il existe
beaucoup de shifts à poids non σ-poreux hypercycliques sur c0 ou lp .
Dans ce qui suit, X désignera un espace de Banach sur K = R ou C, muni d’une
base de Schauder inconditionnelle (ei )i∈N ; (e∗i ) est alors sa base duale. On considère des
parties de X de la forme
A
F[L]
= {x ∈ X; ∀n ∈ N Ln (x) ∈ A} ,
où A ⊂ KN et [L] = (Ln ) est une suite d’applications linéaires continues de X dans KN .
On représente une suite [L] = (Ln ) ⊂ L(X, KN ) par une matrice infinie (Lnj ) d’éléments
de X ∗ , et on note L l’ensemble de toutes ces matrices.
CHAPITRE 4. NOTIONS DE PETITESSE ET HYPERCYCLICITÉ
73
On dit qu’une matrice [L]( = (L(n ) ∈ L est une modification admissible d’une matrice
[L] si L(nj = αnj Lnj pour tout (n, j) ∈ N2 , où (αnj ) est une suite bornée de scalaires.
On dit qu’un ensemble A ⊂ KN est monotone si, pour tout (uj ) ∈ A, |vj | ≥ |uj | pour
tout j ∈ N entraı̂ne que (vj ) ∈ A.
Théorème 4.2.1
A
Soit A une partie monotone de KN , et soit [L] ∈ L. Si F[L]
+= ∅, et si les propriétés
suivantes sont
0 vérifiées :
• Lnj ∈ i Ke∗i pour tout (n, j) ∈ N2 ;
A
(
• F[L]
" est une partie fermée de X pour toute modification admissible [L] de [L].
A
Alors F[L]
n’est pas σ-poreux.
On en déduit le corollaire suivant qui améliore le théorème 1 de [B].
Corollaire 4.2.1
Soit T un shift à poids sur X = c0 ou lp , 1 ≤ p < ∞. S’il existe x ∈ X tel que
inf n ||T n (x)|| > 0, Alors T n’est pas σ-poreux hypercyclique.
Démonstration
Il suffit de prouver que l’ensemble
F = {x ∈ X; ∀n ∈ N "T n (x)" ≥ 1}
A
, avec Lnj (x) = 1e∗j , T n (x)2
n’est pas σ-poreux. L’ensemble F est non-vide et s’écrit F[L]
6
7
'
'
et A = (uj ) ∈ KN ; " j uj ej " ≥ 1 , où on pose " j uj ej " = ∞ si (uj ) ne définit pas
un élément de X.
Puisque Lnj = T ∗n (e∗j ) et que T est un shift, on a Lnj ∈ Ke∗n+j pour tout (n, j) ∈ N2 .
De plus, si [L]( = (L(n ) est une modification admissible de [L], c’est-à-dire L(nj = αnj Lnj
où (αnj ) est une suite bornée de scalaires, alors chaque
L(n : X '
→ KN définit un
'
(
(
n
opérateur linéaire continue Tn : X → X, soit Tn ( j xj ej ) = T ( j αnj xj ej ). L’enA
semble F[L]
"Tn( (x)" ≥ 1} est donc fermé dans X et F n’est pas
" = {x ∈ X; ∀n ∈ N
σ-poreux d’après le théorème 4.2.1.!
Démonstration du théorème 4.2.1
Soit [L]0 une matrice vérifiant les hypothèses du théorème 4.2.1, et soit L0 la famille
de toutes les matrices [L] ∈ L qui sont des modifications admissibls de [L]0 et qui vérifient
A
A
F[L]
+= ∅. Afin de simplifier l’écriture, on écrira désormais F[L] au lieu de F[L]
.
2
Soit L ∈ L0 , on choisit une application (n, j) :→ 1n, j2 de N dans N telle que Lnj ∈
∗
Ke0n,j1 .
CHAPITRE 4. NOTIONS DE PETITESSE ET HYPERCYCLICITÉ
74
Enfin, pour tout J ⊂ N, on note πJ la projection canonique de X sur span {ei ; i ∈ J}.
L’inconditionnalité de la base (ei ) implique que ces projections sont bien définies.
Soit L ∈ L0 . Pour tout triplé p = (ε, K, I), où ε > 0, K > 1 et I est une partie finie
de N, on définit une nouvelle matrice [Lp ]da la façon suivante :
=
(1 + ε)−1Lnj if 1n, j2 ∈ I ;
p
Lnj =
if 1n, j2 +∈ I .
K −1 Lnj
Alors [Lp ] est une modification admissible de [L], et donc une modification admissible
de [L]0 . De plus, si x ∈ F[L] , alors y := (1 + ε)πI (x) + KπN\I (x) vérifie Lpnj (y) = Lnj (x)
pour tout (n, j) ∈ N2 , soit y ∈ F[Lp ] . Alors [F p ] += ∅, ce qui implique que [Lp ] ∈ L0 .
Enfin, la monotonie de A entraı̂ne queF[Lp ] ⊂ F[L] .
Fait 4.2.1
Soit [L] ∈ L0 , et soit K > 1. Si V ⊂ X est une partie ouverte vérifiant F[L] ∩ V += ∅,
alors il existe ε > 0 et une partie finie I ⊂ N tels que F[Lp ] ∩ V += ∅, où p = (ε, K, I).
Démonstration
Soit x ∈ V ∩ F[L] et soit r > 0 tels que B(x, r) ⊂ V . Puisque (ei ) est une base de
Schauder de X, on peut choisir une partie finie I ⊂ N de sorte que ||πN\I (x)|| soit aussi
petit que l’on veut, on peut alors choisir ε > 0 tel que y := (1 + ε)πI (x) + KπN\I (x)
vérifie ||y − x|| < r. Alors y ∈ F[Lp ] ∩ V += ∅.!
Fait 4.2.2
Soit [L] ∈ L0 et soit λ ∈ (0 , 1). Si K > 1 est assez grand alors, pour tout p = (ε, K, I),
l’ensemble F[L] n’est λ-poreux en aucun point de F[Lp ] .
Démonstration
Soit α ∈ (0 , 1). Soit x ∈ X, soit ε > 0 et soit une partie finie I ⊂ N, il existe alors
δ = δ(x, ε, I) > 0 tel que pour tout y ∈ X, ||y − x|| < δ entraı̂ne que
|1e∗i , y2| ≥ (1 + ε)−1 |1e∗i , x2| pour tout i ∈ I .
La base (ei ) étant inconditionnelle, on peut définir à partir d’un tel point y un nouveau
point ỹ ∈ X tel que
= ∗
1ei , y2 si i ∈ I ou |1e∗i , y2| > α2 |1e∗i , x2| ;
∗
1ei , ỹ2 =
α1e∗i , x2 + (1 − α)1e∗i , y2 sinon .
Alors |1e∗i , ỹ2| ≥ (1 + ε)−1|1e∗i , x2| si i ∈ I, et |1e∗i , ỹ2| ≥ α2 |1e∗i , x2| si i +∈ I. Si K ≥ 2α−1 ,
on en déduit l’implication suivante pour tout p = (ε, K, I) et pour tout y ∈ B(x, δ) :
x ∈ F[Lp ] ⇒ ỹ ∈ F[L] .
CHAPITRE 4. NOTIONS DE PETITESSE ET HYPERCYCLICITÉ
75
De plus |1e∗i , ỹ − y2| ≤ α |1e∗i , x − y2| pour tout i ∈ I, on en déduit que
||ỹ − y|| ≤ Cα||x − y|| ,
où C est la constante de Schauder inconditionnelle de la base (ei ). On choisit alors
α <C −1 λ, alors si K ≥ 2α−1 , l’ensemble F[L] n’est λ-poreux en aucun point x ∈ F[Lp ]
quand p est de la forme (ε, K, I).!
Les deux faits ci-dessus entraı̂nent donc que (F[L] )L∈L0 vérifie les conditions du corollaire 1.3.1. Aucun ensemble F[L] , [L] ∈ L0 , n’est donc σ-poreux, ce qui achève la preuve
du théorème 4.2.1.!
4.3
Un critère de σ-porosité
Nous allons montrer dans cette section que si un opérateur est “topologiquement
transitif avec estimation”, alors il est σ-poreux hypercyclique.
Lemme 4.3.1
Soit (E, d) un espace métrique, et soit A ⊂ E. S’il existe δ0 > 0, un ensemble dense
D ⊂ E et c > 0 tels que : pour tout u ∈ D et pour tout δ ∈ ]0 , δ0 ], il existe x ∈ E tel que
d(x, u) < δ et B(x, cδ) ∩ A = ∅. Alors A est poreux.
Démonstration
Soit a ∈ E. Pour tout δ ∈ ]0 , δ0 ], il existe u ∈ D tel que d(u, a) < 2δ , il existe
alors x ∈ E tel que d(x, u) < 2δ et que B(x, c 2δ ) ∩ A = ∅. On a donc x ∈ B(a, δ) et
B(x, 2c δ) ∩ A = ∅, ce qui montre que A est 2c -poreux en a ∈ E.!
Soit (E, d) un espace métrique et soit T : (E, d) → (E, d) une application continue.
Pour tout r > 0, on note ω −1 (T, r) le plus grand nombre δ ∈ [0 , 1] tel que d(x, y) < δ ⇒
d(T (x), T (y)) < r.
Théorème 4.3.1
Soit (E, d) un espace métrique séparable, et soit T = (Tn ) une suite de fonctions continues, Tn : E → E. S’il existe un ensemble dense D ⊂ E, et si pour tout (v, r) ∈ D ×(0 , 1)
il existe un ensemble dense Dv,r ⊂ E et des constantes réelles posives δv,r , cv,r vérifiant :
pour tout u ∈ Dv,r et tout δ ∈ (0 , δv,r ), il existe x ∈ E et n ∈ N tels que
(a) d(x, u) < δ et d(Tn (x), v) < r ;
(b) ω −1 (Tn , r) ≥ cv,r δ.
Alors X \ Univ(T) est σ-poreux.
CHAPITRE 4. NOTIONS DE PETITESSE ET HYPERCYCLICITÉ
76
Démonstration
Il suffit de montrer que pour tout (v, r) ∈ D × (0 , 1), l’ensemble
Av,r := {x ∈ E; ∀n ∈ N d(T n (x), v) ≥ 2r}
est poreux. En effet, la séparabilité de E implique que E \ Univ(T) est une réunion
dénombrable de tels ensembles Av,r . On déduit de l’inégalité triangulaire que pour tout
u ∈ Dv,r et pour tout δ ∈ (0 , δv,r ), il existe x ∈ B(u, δ) et n ∈ N tels que d(Tn (y), v) < 2r
pour tout y ∈ B(x, cr,v δ), soit B(x, cv,r δ) ∩ Av,r = ∅. Puisque Dv,r est dense dans X, Av,r
est poreux d’après le lemme 4.3.1.!
Dans le cas linéaire, ce dernier théorème peut s’écrire sous une forme proche du critère
d’hypercyclicité.
Corollaire 4.3.1
Soit X un espace de Banach séparable, et soit T = (Tn ) une suite d’opérateurs linéaires
continus sur X. S’il existe un ensemble dense D ⊂ X, et si pour tout (v, r) ∈ D ×(0 , 1) il
∗
∗
⊂ X et des constantes réelles positives δv,r
, Cv,r vérifiant :
existe un ensemble dense Dv,r
∗
∗
pour tout u ∈ Dv,r , et pour tout δ ∈ (0 , δv,r ), il existe n ∈ N et z ∈ X tels que
(a1) "Tn (u)" < r ;
(a2) "z" < δ et "Tn (z) − v" < r ;
(b) "Tn " ≤ Cv,r
.
δ
Alors X \ Univ(T) est σ-poreux.
Démonstration
r
∗
∗
, δv,r := δv,r/2
et cv,r := Cv,r/2
. Pour
Pour tout (v, r) ∈ D ×(0 , 1), on pose Dv,r := Dv,r/2
tout u ∈ Dv,r et tout δ ∈ (0 , δv,r ), on choisit n ∈ N et z ∈ X qui vérifient les conditions
du corollaire précédent. On pose alors x := u + z et les conditions du théorème 4.3.1 sont
vérifiées.!
On donne à présent deux exemples d’application du théorème 4.3.1. Le premier est
un résultat récent et non-publié de D. Preiss, le second est la généralisation du théorème
2 de [B].
Exemple 4.3.1 (Preiss)
Soit X = c0 ou lp (1 ≤ p < ∞), il existe sur X des shifts à poids σ-poreux hypercycliques.
Démonstration
Nous allons appliquer le corollaire 4.3.1. On pose D ∗ := c00 , l’espace des x ∈ X à
∗
support fini, et Dv,r
:= D ∗ pour tout (v, r) ∈ D ∗ × (0 , 1). Soit Tw le shift à poids défini
CHAPITRE 4. NOTIONS DE PETITESSE ET HYPERCYCLICITÉ
77
sur X associé à%la suite bornée de nombres positifs w = (wk )k≥1 . Pour tout p ≤ q ∈ N,
= p≤k≤q wk et on note (ei )i∈N la base canonique de X.
on pose wp,q '
Soit v = i v(i)ei ∈ c00 , son support est inclus dans [0 , p[ pour un certain p ≥ 0. Soit
n ≥ 0, alors le vecteur
p
"
v(i)
zn :=
ei
w
1+i,n+i
i=0
vérifie T n (zn ) = v, et on a "zn " ≤ "v" max{(w1+i,n+i )−1 ; 0 ≤ i < p}. De plus, si
u ∈ c00 , on a Twn (u) = 0 si n est assez grand. Enfin on a pour tout n ≥ 1, "Twn " =
sup{w1+i,n+i; i ∈ N}. On déduit alors du corollaire 4.3.1 que s’il existe pour tout entier
positif p deux constantes Mp et Cp telles que pour tout M ≥ Mp , il existe une infinité
d’entiers n vérifiant
(a) w1+i,n+i > M pour tout i ∈ {0; . . . ; p − 1} ;
(b) w1+i,n+i ≤ Cp M pour tout i ∈ N.
Alors Tw est σ-poreux hypercyclique.
Une telle suite de poids w peut être obtenue de la façon suivante. Soit (pj , rj ) une
suite de N∗ × (0 , ∞) à définir ultérieurement. On peut alors construire une suite w =
(wk )k≥1 ⊂ (0 , 2) et une suite croissante d’entiers positif (nj )j≥1 telles que pour tout
j≥1:
(i) w1,k = rj pour tout k ∈ [nj , nj + pj ) ;
(ii) w1+i,nj +i ≤ 2 pour tout i ≥ pj .
On choisit n1 de sorte que l’on puisse choisir w1 , . . . , wn1 ∈ (0 , 2) avec w1,n1 = r1 . On
pose wk = 1 pour k ∈ (n1 , n1 + p1 ) de sorte que (i) est vérifiée pour j = 1. On choisit
alors wn1 +p1 , . . . , w2n1 −1+p1 ∈ (0 , 1) suffisamment petits pour que w1+i,n1 +i ≤ 2 pour tout
i ∈ [p1 , n1 + p1 ). Soit ε1 > 0 tel que (1 + ε1 )n1 ≤ 2, on choisit n2 suffisamment grand
pour que l’on puisse construire w2n1 +p1 , . . . , wn2 ∈ (0 , 1 + ε1 ) avec w1,n2 = r2 . Alors (ii)
est vérifiée pour j = 1 et pour tout i ∈ [p1 , n2 − n1 ]. En répétant cette construction, on
obtient donc bien les suites (nj ) et (wk ).
Supposons maintenant que la suite (pj , rj ) énumère N∗ × Q+ . Pour tout p ≥ 1 on pose
Np := {nj ; pj = p}, alors il existe des constantes Mp and Cp telles que (a) and (b) soient
rj
vérifiées pour une infinité de n ∈ Np . Si n = nj ∈ Np , en remarquant que w1+i,n+i = w1,i
si i < p, on obtient d’après (i) et (ii)
=
ap rj ≤ w1+i,n+i ≤ bp rj pour tout i ∈ {0; . . . ; p − 1} ,
w1+i,n+i ≤ 2 pour tout i ≥ p ,
où ap et bp dépendent uniquement de p. Les propriétés (a) et (b) sont donc vérifiées pour
M si M
< rj ≤ CbppM et Cp M ≥ 2. On choisit Cp > abpp , et c’est donc vrai pour une infinité
ap
de j dès que M ≥ Mp := C2p .!
CHAPITRE 4. NOTIONS DE PETITESSE ET HYPERCYCLICITÉ
78
Le deuxième exemple concerne les opérateurs de translation dans H(C). Puisque la
porosité n’est définie que dans un espace métrique, on doit tout d’abord choisir une
distance compatible sur H(C). On travaillera avec des métriques
'∞définies de la façon
suivante. Pour chaque suite de nombres positifs ε = (εn ) telle que 0 εn < ∞, on définit
la métrique dε par
∞
"
εn min(1, "f − g"Kn ) ,
dε (f, g) =
0
où Kn est le disque fermé D(0, n) et "f "K = sup{|f (z)|; z ∈ K}.
Exemple 4.3.2
'
Soit ε = (εn ) une suite sommable de nombres positifs. S’il existe c > 0 tel que k>n εk ≥
c εn pour tout n ∈ N. Alors tout opérateur de translation non trivial T sur H(C) est
σ-poreux hypercyclique pour la métrique dε .
Démonstration
L’opérateur T est défini par T f (s) = f (s + α), où α ∈ C \ {0}. On va montrer que
les conditions du théorème 4.3.1 sont vérifiées avec D = H(C) et Dv,r = H(C), δv,r = 1
pour tout (v, r) ∈ H(C) × (0 , 1). Soit (v, r) ∈ H(C) × (0 , 1) et soit u ∈ H(C).
Pour alléger les notations, on écrira d au lieu de dε , et " . "n au lieu de " . "Kn . On
fixe un entier p ≥ |α| et un entier η > 0 tels que
"f − g"p < η ⇒ d(f, g) < r .
'∞
Enfin, on peut supposer sans perte;de généralité
' que δ0< εn = 1.
Soit δ ∈ (0 , 1), on pose N := min n ∈ N;
k>n εk < 2 . Pour vérifier la condition
(a) du théorème 4.3.1, il suffit de trouver x ∈ H(C) et un entier n tels que "x − u"N < 2δ
et "Tn (x) − v"p < η, c’est à dire |x(s) − u(s)| < δ2 sur KN et |x(s) − v(s − nα)| < η sur
nα + Kp . Dès que n|α| > N + p, les deux disques fermés KN et nα + Kp sont disjoints ; le
théorème de Runge garantit alors l’existence d’un tel x ∈ H(C). Soit n le plus petit entier
vérifiant n|α| > N + p. La condition (a) est vérifiée pour n et pour un certain x ∈ H(C),
Il reste donc plus qu’à prouver que (b) est vérifiée pour une certaine constante cv,r .
D’après le choix de n, et puisque p ≥ |α|, on a n|α| ≤ N +2p, soit "T n (f )−T n (g)"p ≤
"f − g"N +3p pour tout f, g ∈ H(C). D’après le choix de p et de η, il est donc suffisant de
trouver une constante c, qui peut dépendre de v, r, p, et η mais qui doit être indépendante
de δ (et donc deN) telle que
d(f, g) < cδ ⇒ "f − g"N +3p < η .
Les hypothèses sur ε, entraı̂nent l’existence d’une constante cp telle que
"
k≥N +3p
ε k ≥ cp
"
δ
ε k ≥ cp ,
2
k≥N
(4.1)
CHAPITRE 4. NOTIONS DE PETITESSE ET HYPERCYCLICITÉ
79
où la seconde inégalité provient du choix de N. Par définition de la métrique d, on a pour
tout f, g ∈ H(C)
cp
δ min(1, "f − g"N +3p ) ≤ d(f, g) .
2
L’implication (4.1) est donc vérifiée dès que c < c2p min(1, η), ce qui conclut la preuve.!
Remarque 4.3.1
On ne sait pas si l’opérateur reste σ-poreux hypercyclique si la suite(εn ) tend rapidement
vers 0. On ne sait pas non plus si l’opérateur de dérivation D, un autre exemple classique
d’opérateur hypercyclique sur H(C), est σ-poreux hypercyclique. Néanmoins, puisque D
est un shift à poids croissants, le théorème 4.2.1 laisse penser que, au moins pour une
certaine classe de métrique dε , l’opérateur D n’est pas σ-poreux hypercyclique.
Remarque 4.3.2
Soit X un espace de Fréchet séparable dont la topologie est générée par une suite croissante de semi-normes (ρn )n∈N ; on définit la métrique d sur X par
d(x, y) =
∞
"
0
εn min(1, ρn (x − y)) ,
où la suite (εn ) vérifie les conditions de l’exemple précédent. On peut alors prouver de
la même façon qu’un opérateur T ∈ L(X) est σ-poreux hypercyclique s’il vérifie les
conditions suivantes : Soit (u, v) ∈ X × X et soit (N, p) ∈ N × N ; pour tout ε ∈ (0 , 1) il
existe x ∈ X et un entier n tel que
• ρN (x − u) < ε et ρp (T n (x) − v) < ε ;
• ρp (T n (z)) ≤ Ap ρN +Bp (z) pour tout z ∈ X, où Ap > 0 et Bp ∈ N ne dépend que de
p.
Une propriété similaire, la transitivité de Runge, est introduite dans [BoGE].
4.4
Haar-négligeabilité
On va dans cette section donner des exemples d’opérateurs hypercycliques qui ne sont
pas Haar-négligeables hypercycliques.
Soit C ≥ 1, on dira qu’une suite (fi )i∈N dans un espace de Banach X est C-semibasique si pour toute suite de scalaires à support fini (λi )i∈N et pour tout p ∈ N, on
a
"
λi fi " .
|λp | "fp " ≤ C "
i
CHAPITRE 4. NOTIONS DE PETITESSE ET HYPERCYCLICITÉ
80
Proposition 4.4.1
Soit X un espace de Banach muni d’une base de Schauder (ei )i∈N , et soit T ∈ L(X). Pour
n
tout n ≥ 1, on pose θn := lim supi→∞ +T+e(ei +i )+ . Si les conditions suivantes sont vérifiées :
(a) Il existe C ≥ 1 tel que toutes les suites (T n (ei ))i∈N soient
' 1C-semi-basiques.
(b) Pour toute suite croissante d’entiers (pn )n≥1 , la série
e est convergente.
θn p n
Alors X \ HC(T ) n’est pas Haar-négligeable.
Démonstration
On peut sans perte de généralité supposer que la base de Schauder (ei ) est normalisée,
la base duale (e∗i ) converge alors ponctuellement vers 0. On pose xi := 1e∗i , x2 pour tout
x ∈ X. Il suffit de montrer que l’ensemble
1
}
2C
n’est pas Haar-négligeable. On va montrer que F contient un translaté de toute partie
compacte de X.
Soit un compact K ⊂ X, alors (e∗i ) converge uniformément vers 0 sur K. Il existe alors
une suite croissante d’entiers (pn )n≥1 telle que

1

 ∀x ∈ K |xpn | ≤
θn
1

 "T n (epn )" ≥ θn
2
'∞ 2
On pose z = 1 θn epn . Pour tout x ∈ K et tout n ≥ 1, on a
G∞
G
G"
G
G
G
n
n
||T (x + z)|| = G (zi + xi ) T (ei )G
G
G
F = {x; ∀n ∈ N ||T n (x)|| ≥
i=0
≥ C −1 |zpn + xpn | "T n (epn )"
B
?
1
θn
1
2
.
−
=
≥
2C θn θn
2C
Donc K + z ⊂ F , ce qui termine la preuve.!
On déduit immédiatement de la propositon 4.4.1 qu’un shift avec des poids “assez
grands” n’est pas Haar-négligeable hypercyclique.
Corollaire 4.4.1
Soit T un shift à poids sur X = c0 ou lp (1 ≤ p < ∞), associé
% à la suite de poids
(w
)
.
Pour
tout
n
≥
1,
on
pose
θ
:=
lim
sup
θ
,
où
θ
=
n
ni
i→∞ ni
i−n<j≤i wj . Si la série
'n n≥1
n≥0 1/θn+1 en converge dans X, alors T n’est pas Haar-négligeable hypercyclique. Ceci
est vérifié en particulier si inf n wn > 1.
CHAPITRE 4. NOTIONS DE PETITESSE ET HYPERCYCLICITÉ
81
Remarque 4.4.1
Les conditions du corollaire 4.4.1 sont plus fortes que celles du corollaire 4.2.1. En effet,
1
soit (i'
n )n≥1 une suite croissante d’entiers telle que θnin ≥ 2 θn pour tout n ≥ 1 et posons
∞ 1
n
x := 1 θni ein . On a alors "T (x)" ≥ 1 pour tout n ≥ 1.
n
Dans [GS], Godefroy et Shapiro prouvent qu’un opérateur T sur H(C) commute
avec tous les opérateurs de translations si et seulement si il peut s’écrire sous la forme
T = Φ(D), où D est l’opérateur de dérivation et où Φ est une fonction entière de type
exponentiel, c’est-à-dire qu’il existe A > 0 et B > 0 tels que |Φ(z)| ≤ AeB|z| pour tout
z ∈ C. Ils prouvent aussi que si un tel opérateur n’est pas un multiple de l’identité, il est
alors hypercyclique. Nous allons montrer que sous certaines conditions sur Φ, l’opérateur
T = Φ(D) n’est pas Haar-négligeable hypercyclique.
On notera ck (f ), k ∈ N, les coefficients de Taylor d’une fonction f ∈ H(C). Soit E
l’ensemble des fonctions Φ : C → C vérifiant :
– Φ est une fonction entière de type exponentiel ;
– Pour tout k, n ∈ N, on peut écrire ck (Φn ) = ak bn pnk , où pnk ≥ 0.
L’ensemble E contient toutes les fonctions de type exponentiel Φ telles que ck (Φ) ∈
αk R+ , pour tout k ∈ N avec α ∈ C. En particulier toutes les fonctions entières de type
exponentiel à coefficients non-négatifs, et toutes les fonctions exponentielles eα z , α ∈ C.
Proposition 4.4.2
Soit T un opérateur sur X = H(C) de la forme T = Φ(D), où D est l’opérateur de
dérivation et où Φ ∈ E. S’il existe une T -orbite dont la fermeture ne contient pas 0, alors
X \ HC(T ) n’est pas Haar-négligeable.
En particulier on a
Corollaire 4.4.2
Si T est l’opérateur de dérivation ou un opérateur de translation sur H(C), alors T n’est
pas Haar-négligeable hypercyclique.
Démonstration
Dans les deux cas, l’opérateur T a la forme souhaitée et il existe une fonction f ∈ H(C)
dont l’orbite fermée par T ne contient pas 0 : si T est l’opérateur de dérivation, f (z) = ez
convient, et si T est un opérateur de translation, f = 1 convient.!
Pour prouver la proposition 4.4.2, on utilise le lemme suivant.
Lemme 4.4.1
Soit T un opérateur vérifiant les conditions de la proposition 4.4.2. Il existe une suite
(an ) ⊂ C vérifiant les propriétés suivantes : pour tout compact K ⊂ X, il existe une
fonction ϕ ∈ X telle que
CHAPITRE 4. NOTIONS DE PETITESSE ET HYPERCYCLICITÉ
82
(i) ∀n ∈ N T n ϕ(0) ∈ R+ an ;
(ii) ∀f ∈ K ∀n ∈ N |T n f (0)| ≤| T n ϕ(0)| .
Démonstration
On a ck (Φn ) = an bk pnk , avec pnk ≥ 0. Montrons que (an ) convient. Soit K une partie
compacte H(C) ; pour tout k ∈ N, on a
ck = sup{|ck (f )|; f ∈ K} .
1/k
Les inégalités de Cauchy entraı̂nent que limk→∞ ck = 0. Il existe alors une fonction
n
n
entière
' ϕ telle que bk ck (ϕ) = |bk | ck pour tout k ∈ N. Puisque T f (0) = [Φ (D)f ](0) =
an k pnk k! bk ck (f ) pour tout n ∈ N et pour tout f ∈ X, cette fonction ϕ convient.
Démonstration de 4.4.2
Soit (an ) une suite vérifiant les conclusions du lemme précédent. Par hypothèse, il
existe une fonction f0 ∈ X et un voisinage U de 0 dans X tels que T n f0 +∈ U pour
tout n ∈ N. On peut supposer que U s’écrit {u ∈ X; supK0 |u(z)| < ε0 } pour un
certain compact K0 ⊂ C et un certain ε0 > 0 ; quitte à remplacer f0 par f0 /ε0 , on
peut imposer ε0 = 1. On a donc un ensemble compact K0 ⊂ C et une fonction f0 ∈ X
tels que sup{|T n f0 (z)|; z ∈ K0 } ≥ 1 pour tout n ∈ N. Puisque T commute avec tous
les opérateurs de translation, on a sup{|T n f (0)|; f ∈ K0 } ≥ 1 pour tout n, où K0 =
{τz f0 ; z ∈ K0 }. Puisque K0 est une partie compacte de X, Il existe d’après le lemme
4.4.1 une fonction ϕ ∈ X telle que
∀n ∈ N T n ϕ(0) ∈ R+ an et |T n ϕ(0)| ≥ 1 .
Soit à présent K une partie compacte de X. Il existe d’après le lemme 4.4.1 une fonction
ψ ∈ X telle que T n ψ(0) ∈ R+ an et |T n f (0)| ≤| T n ψ(0)|, pour tout f ∈ K et pour tout
n ∈ N. On pose h = ϕ + ψ, on a |T n (h)(0)| = |T n ϕ(0)| + |T n ψ(0)| ≥ 1 + |T n ψ(0)| pour
tout n ∈ N, soit |T n (f + h)(0)| ≥ 1 pour tout f ∈ K et pour tout n ∈ N. En particulier,
ceci prouve que K + h ⊂ X \ HC(T ). Donc X \ HC(T ) contient un translaté de toute
partie compacte de X.!
Quelques questions
En guise de conclusion, voici quelques questions qui se posent naturellement au vu de
ce qui a été dit.
1. La question qui vient tout de suite à l’esprit et qui est au coeur du chapitre 3 est
bien entendu de savoir si la base canonique de c0 est la seule base de Schauder
inconditionnelle dont le cône positif n’est pas Haar-négligeable, et si ce n’est pas
le cas d’obtenir une caractérisation de ces bases. Un élément de réponse pourrait
être de montrer qu’un espace muni d’une base de Schauder inconditionnelle dont
le cône positif n’est pas Haar-négligeable est isomorphe à un sous-espace fermé
de c0 ; énoncé qui semble raisonable au vu du théorème 2.4 de [GKL] et de sa
démonstration.
2. Il est tout aussi naturel de se demander dans quelle mesure les résultats du chapitre
3 peuvent s’étendre à un cadre plus général : au bases de Schauder quelconques ou
aux treillis de Banach.
3. Existe-t-il dans tout groupe abélien Polonais un borélien non Haar-négligeable et
non compactivore ? Question qui au vu de la proposition 1.2.2 pourait se ramener
à celle de l’existence de groupe abélien Polonais ne possédant ni sous-groupe fermé
localement compact non-discret, ni quotient localement compact non-discret. Dans
un espace de Banach, on peut se poser la même question pour une partie convexe
fermée ; la construction d’un contre-exemple à la question 1 donnerait une réponse
partielle.
'
4. L’ensemble F H(X) est-il une partie 12 -complète de F (X) ? Question motivée par
l’encadrement “assez fin” de sa complexité réelle (cf section 1.4.1).
5. La similarité entre le corollaire 4.3.1 et le critère d’hypercyclicité suggère la question suivante : est-ce-qu’un opérateur linéaire, continu, et σ-poreux hypercyclique
sur un espace de Banach séparable vérifie toujours le corollaire 4.3.1 ? La première
chose à faire serait sans doute de vérifier ceci sur les opérateurs construit dans [BM],
83
CHAPITRE 4. NOTIONS DE PETITESSE ET HYPERCYCLICITÉ
84
ce qui semble difficile au vu de la complexité de ces opérateurs.
6. Enfin les résultats de la section 4.4 conduisent naturellement aux questions suivantes :
– Existe-t-il des shifts à poids Haar-négligeables hypercycliques définis sur l2 ?
Récemment, S. Grivaux et M. Roginskaya ont construit sur l2 des opérateurs
dont l’ensemble des vecteurs non hypercycliques est contenu dans une réunion
dénombrable d’hyperplans (cf [GR]). Mais ces opérateurs ne sont pas des shifts.
– Existe-t-il un opérateur non-trivial défini sur H(C) qui commute avec tous les
opérateurs de translations et qui est Haar-négligeable hypercyclique ?
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