du point de vue thérapeutique (type de chirurgie plus ou moins
étendue, durée du suivi). Ceci explique également que les taux
de rechute locale varient de 3 à 63 %.
Plusieurs auteurs ont donc essayé d’améliorer ces résultats par
l’adjonction, comme pour les cancers infiltrants, d’une irradia-
tion mammaire complémentaire (17). Ici aussi, les résultats
sont assez hétérogènes, avec des taux de récidive locale variant
de 2,7 % à 16,6 % (18-21). Ceci s’explique par les importantes
différences dans les critères d’inclusion, les modalités théra-
peutiques (étendue de l’exérèse, dose totale d’irradiation déli-
vrée) et surtout les durées du suivi.
Depuis ces dernières années, grâce à la diffusion progressive
du dépistage organisé et individuel, les CCIS sont découverts
dans plus de 90 % des cas à la mammographie. Le plus sou-
vent, il s’agit de lésions de petite taille. Toutefois, il y a parfois
des discordances entre l’étendue des microcalcifications et
celle des lésions (surtout de bas grade) retrouvées par le patho-
logiste. De plus, pour ces lésions, l’examen anatomopatholo-
gique extemporané n’est, en règle générale, pas utilisé, de
sorte qu’il est fréquemment nécessaire de procéder à une chi-
rurgie en deux temps.
Depuis peu, deux essais randomisés ont confirmé un bénéfice
très significatif en termes de réduction du risque de rechute
locale avec l’adjonction de l’irradiation mammaire après tumo-
rectomie.
L’essai américain B-17 du NSABP, qui a inclus environ
800 patientes, a été publié pour la première fois en 1993 (22).
Dans cette étude, les patientes étaient randomisées entre chi-
rurgie conservatrice seule et chirurgie conservatrice suivie
d’une irradiation complémentaire de la glande mammaire à
50 Gy. Dans la première analyse, avec 43 mois de suivi
médian, les taux de récidive locale étaient respectivement de
16,4 % et de 7 % pour les bras sans et avec radiothérapie
(p = 0,001). Fait important, la différence était surtout notable
pour les récidives locales de type invasif, c’est-à-dire celles
pouvant affecter le pronostic vital à long terme. Les résultats
de cet essai ont été actualisés en 1998 (23). Avec un recul
médian de 90 mois, les taux de récidives locales sont respecti-
vement de 26,8 % et 13,1 % sans et avec radiothérapie. Les
taux sont de 13,4 % et 8,2 % pour les récidives non invasives
(p = 0,007) et de 13,4 % et seulement 3,9 % pour les récidives
invasives (p < 0,0001).
Il y a six mois, les résultats ont été confirmés (avec 102 mois
de recul moyen) pour 623 des 814 cas (77 %) qui ont bénéficié
d’une relecture centralisée des prélèvements histologiques
(24). Les taux de récidives locales sont respectivement de
31 % et 13 % sans et avec radiothérapie (p = 0,0001).
Dans cette étude, de multiples paramètres histologiques ont été
analysés en vue de retrouver des critères prédictifs de la réci-
dive locale.
Le seul facteur qui ressort en analyse multivariée est l’impor-
tance de la nécrose présente à l’intérieur du CCIS. L’état des
marges a aussi une influence, mais sa valeur discriminante est
plus faible, peut-être à cause du nombre important de cas où
elle n’est pas précisée.
L’essai 10853 de l’EORTC comparait également une chirurgie
conservatrice exclusive à une chirurgie conservatrice suivie
d’une irradiation complémentaire de la glande mammaire à la
dose de 50 Gy. Il est à noter que les lésions incluses pouvaient
mesurer jusqu’à 5 cm. Des résultats détaillés viennent d’être
publiés (25).
Mille dix patientes ont été incluses et, avec un recul de
51 mois, les taux de récidives locales sont de 16 % et 9 % sans
et avec radiothérapie (p = 0,005), ce qui représente un taux de
38 % de réduction. Les récidives invasives représentent dans
ces deux groupes respectivement 8 % et 4 % (p = 0,04), et les
taux de métastases sont de 2 % et 1 % (p = NS).
Une méta-analyse des résultats des différents traitements utili-
sés pour le CCIS a également été proposée par une équipe aus-
tralienne (26). Les auteurs ont repris les articles en langue
anglaise publiés sur Medline en recherchant les facteurs de
risque de récidive locale. Les reculs moyens étaient de 80, 68
et 62 mois respectivement pour les groupes mastectomie, chi-
rurgie conservatrice seule et chirurgie conservatrice avec
radiothérapie. Pour ces trois catégories, les taux de récidives
sont respectivement de 1,4 %, 22,5 % et 8,9 %.
Une nouvelle approche montrant l’intérêt d’un traitement sys-
témique est apparue avec la publication des résultats de l’essai
B-24 du NSABP (27). Dans cette étude, 1 798 patientes ont été
randomisées, 899 pour chaque bras, entre tumorectomie +
radiothérapie et tumorectomie + radiothérapie et adjonction de
tamoxifène (20 mg/j pendant 5 ans). Avec un recul médian de
74 mois, on observe une réduction des récidives locales dans le
bras tamoxifène, avec un taux cumulé à 5 ans de 9,3 % versus
6%. De même, on retrouve une réduction des cancers contro-
latéraux de 3,4 % à 2 %.
De façon assez paradoxale, le diagnostic et le traitement des
CCIS sont donc souvent plus complexes que ceux des cancers
infiltrants.
Cette notion doit toujours être présente à l’esprit et nécessite
une information très précise des patientes, avec une approche
diagnostique qui exige souvent une chirurgie en deux, voire
trois temps. Il faut également indiquer clairement à la patiente
les risques de récidive inhérents à chaque traitement. Il faut lui
rappeler que la mastectomie offre un taux de contrôle local de
presque 100 % et qu’elle peut être associée à une reconstruc-
tion ou en être suivie.
Dans tous les cas, une décision multidisciplinaire est indispen-
sable, avec une confrontation précise entre éléments radiolo-
giques et histologiques, ceci afin de proposer la meilleure atti-
tude thérapeutique. Il ne faut jamais perdre de vue que,
théoriquement, ces patientes devraient toutes être guéries par
un traitement optimal (28). ■
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
1. Lagios M. Duct carcinoma in situ. Pathology and treatment. Surg Clin N Am
1990 ; 70 : 853-71.
2. Cady B. Duct carcinoma in situ. Surg Oncol Clin N Am 1993 ; (2) : 75-91.
3. Haffty BC, Kornguth P, Fischer D et al. Mammographically detected breast
cancer. Results with conservative surgery and radiation therapy. Cancer 1991 ;
67 : 2801-4.
4. Barchielli A, Paci E, Giorgi D. Recent trends of in situ carcinoma of the
breast and mammographic screening in the Florence area, Italy. Cancer Causes
Control 1999 ; 10 : 413-7.
5. Stomper PC, Connoly JL. Ductal carcinoma in situ of the breast : correlation
7
La Lettre du Sénologue - n° 8 - mai 2000