© Berger/Phanie et Airelle-Joubert/Phanie Sommaire • Maladies rhumatismales : des coûts conséquents • Douleur : un symptôme toujours présent • Lombalgies : la plainte la plus fréquente • Arthrose : un problème de santé publique croissant • Ostéoporose : gare aux conséquences d’un mauvais dépistage • Maladie de Paget : empêcher les complications • Polyarthrite rhumatoïde : des traitements qui changent tout Rhumatologie Une discipline en pleine évolution Ces dernières années, on peut observer une attention particulière portée aux maladies rhumatismales. Devenues une priorité de santé publique en raison de leur retentissement fonctionnel et du handicap qu’elles peuvent engendrer, ces affections ont un impact majeur, tant humain que financier. La mobilisation est générale et la recherche particulièrement vive. Aujourd’hui, si la prise en charge se donne des objectifs plus exigeants, c’est que, au travers des nouveaux traitements, les résultats sont au rendez-vous. Interview du Pr Bernard Combe, du CHU de Montpellier. Dans la maladie rhumatismale, la douleur est un signe d’appel constant. Elle génère l’automédication, au mieux le recours à un médecin. On dit que c’est normal avec l’âge. Quand faut-il consulter un spécialiste ? Pr Bernard Combe : Quel que soit l’âge, quand la douleur perdure, il est important d’en repérer la cause. Car aujourd’hui, la précocité et la finesse du diagnostic permettent de ralentir, voire de stopper l’évolution de la maladie. Les douleurs rhumatismales ne sont pas uniquement réservées aux personnes âgées. Ainsi, la pathologie inflammatoire ne peut attendre d’être soulagée sans prendre le risque d’abîmer précocement l’articulation chez un sujet jeune et de précipiter un handicap fonctionnel. Le gonflement d’une articulation est une urgence médicale. En ce qui concerne les douleurs osseuses, elles sont du champ de la discipline. En effet, des douleurs inhabituelles dans la colonne vertébrale, par exemple, doivent être prises en charge très tôt. Car la douleur osseuse peut être un symptôme qui révèle un cancer des os. Il est d’autant plus dommage d’attendre que le temps joue contre la maladie. Les rhumatologues ont une bonne connaissance des affections et des nouveaux traitements qui sont à leur disposition. Une mauvaise orientation clinique au départ entraîne des errements thérapeutiques regrettables. Quelles sont les affections le plus souvent rencontrées par le rhumatologue ? Pr B.C. Il y a deux familles de pathologies : les affections inflammatoires des articulations et celles des os. La polyarthrite rhumatoïde (PR), qui atteint plutôt les femmes, et les spondylarthrites, qui touchent plutôt les hommes, concernent chacune 0,5 à 1 % de la population. Elles bénéficient de nouveaux traitements. L’arthrose est importante de par sa fréquence. Neuf à 10 millions de personnes sont atteintes en France, plus particulièrement après 40 ans et au niveau des genoux, des hanches et des mains. Bien sûr, l’arthrose est un phénomène normal inhérent au vieillissement. Mais, comme il y a de plus en plus de personnes âgées, le phénomène est amplifié. Le mal de dos est très courant. C’est une conséquence de l’arthrose, du vieillissement mais, il atteint également des personnes en activité, dont certaines sont soumises à des travaux pénibles. Quant à l’ostéoporose, elle concerne 40 % des personnes de plus de 50 ans. Ses conséquences sont graves, car les nombreuses fractures, notamment celles du col du fémur et des vertèbres, sont sources d’alitement, avec toutes les conséProfessions Santé Infirmier Infirmière - No 51 - décembre 2003 Dossier réalisé avec la collaboration de 19 Rhumatologie ●●● quences délétères qui en découlent. Malheureusement, le dépistage n’est pas encore suffisamment pratiqué, alors que l’examen existe et que des médicaments peuvent enrayer le processus. Les maladies rhumatismales deviennent une priorité de santé publique et sont la première cause de perte de qualité de vie. Est-ce une fatalité ayant pour origine la génétique ? Y a-t-il une place pour la prévention ? Pr B.C. Ce ne sont pas des maladies héréditaires, mais le facteur génétique joue son rôle. La maladie rhumatismale, notamment inflammatoire, est polygénique. Les douleurs et la réduction de motricité contribuent à amoindrir la qualité de vie. La maladie rhumatismale détient d’ailleurs le triste record de première place en matière d’atteinte à la qualité de vie. Il ne peut exister de prévention au sens où on l’entend. En revanche, ce qui est évitable désormais, ce sont les complications. Par exemple, certains médicaments préviennent les fractures dues à l’ostéoporose. La prévention peut s’exercer au niveau alimentaire, grâce à un régime équilibré riche en calcium et en vitamine D. Dans la PR, un diagnostic précoce et un traitement approprié permettent de limiter la destruction de l’os et de prévenir les facteurs d’atteinte mécanique. Le patient souffrant de mal de dos peut être éduqué en lui faisant réviser la façon d’exécuter certains gestes, surtout quand ceux-ci sont répétitifs. L’exercice physique est reconnu comme bénéfique. Le sport, s’il n’est pas violent, est vivement recommandé. Il entretient les ligaments et renforce les contraintes mécaniques. Quelle est la place de la morphine pour soulager la douleur ? Quels sont, en bref, les nouveaux traitements ? Pr B.C. Je suis réservé, personnellement, quant à cette trop grande médiatisation de la morphine. Dire que celle-ci peut tout soulager n’est pas vrai. Il ne faut pas l’utiliser en amont sans que les soignants se posent les vraies questions. Après un diagnostic précis, il faut toujours chercher la cause de la douleur et adapter le traitement très précisément à la personne. La morphine n’est pas toujours bien tolérée, et il existe des cas de iatrogénie, notamment chez les personnes âgées, auxquelles on a tendance à en donner de façon ni raisonnable ni raisonnée. Il ne faut pas non plus occulter certains phénomènes psychosomatiques, qui peuvent induire des prescriptions mal adaptées. Aujourd’hui, en ce qui concerne les maladies articulaires, il existe des traitements dont les études les concer- 20 Professions Santé Infirmier Infirmière - No 51 - décembre 2003 nant reconnaissent unanimement l’efficacité. Ils soulagent la douleur mais agissent également sur l’évolution de la maladie. Pour l’instant, on ne peut parler de guérison, sinon à longue échéance. Pour les maladies osseuses, l’objectif du soin est, d’une part, de limiter la destruction de l’os (c’est le rôle des biphosphonates), d’autre part de reconstruire l’os par des agents anabolisants. L’os étant en perpétuel renouvellement, le but d’un tel traitement est d’améliorer ce couple destruction/reconstruction. De plus, ces médicaments sont en général bien tolérés. Bientôt, on aura à disposition ce type de traitement dans lequel on peut moduler l’effet en fonction de l’évolution. Les SERMS (agonistes-antagonistes des estrogènes de type raloxifène) qui préviennent la perte osseuse postménopausique entraînent quelquefois des risques de nausées. Mais le bénéfice est pratiquement toujours supérieur aux inconvénients. Pour les maladies inflammatoires, l’arrivée des coxibs a inauguré une nouvelle classe d’AINS. Ces médicaments font preuve d’un excellent rapport bénéfice/risque, notamment grâce à leur bonne tolérance digestive. Il ne faut pas oublier que les douleurs digestives sont également une source d’angoisse pour le patient, ce qui s’ajoute à la douleur initiale. Et, bien sûr, on ne peut parler de PR sans citer le développement des biothérapies, avec les agents anti-TNFa qui ont été la révélation de ces dernières années. Ils ralentissent de façon significative les lésions structurales ostéoarticulaires. La qualité de vie des patients se trouve transformée, car ces médicaments améliorent les manifestations cliniques inflammatoires et les capacités fonctionnelles. Quel est le rôle de l’infirmière ? Pr B.C. Comme dans toutes les pathologies chroniques générant douleur et handicap, le rôle infirmier se trouve d’abord dans l’écoute et aussi dans le suivi de l’observance. On l’a vu dans la transcription de la douleur, qui n’est pas toujours facile. Ensuite, il faut distinguer les médicaments administrés à l’hôpital de ceux prescrits en ville. Dans le traitement de la PR à l’hôpital, on emploie des médicaments par voie injectable, qui nécessitent une surveillance de deux heures à cause des répercussions allergiques. A domicile, les injections sous-cutanées doivent être administrées selon un certain mode. Elles peuvent entraîner des intolérances locales et, surtout, un risque infectieux. Pour cela, il faut bien éduquer le patient qui souhaite effectuer seul son injection sur le bon geste et sur les précautions à prendre. Propos recueillis par Andrée-Lucie Pissondes Maladies rhumatismales Des coûts conséquents L’exercice de la rhumatologie s’est profondément modifié depuis ces dix dernières années. Un nombre croissant des motifs de consultation ou d’hospitalisation apparaît comme étant d’ordre rhumatologique. Pourtant, l’incidence des maladies rhumatismales est encore sous-évaluée en France. Une faible létalité, loin derrière les maladies cardiovasculaires, les infections, le sida, en est peut-être l’une des causes. tissus conjonctifs qui lui sont associés, de même que les affections touchant les régions périarticulaires. Ainsi, cette spécialité implique un savoir multidisciplinaire. Des notions de pronostic et de prophylaxie, une expérience des indications chirurgicales font partie de ce savoir. Mais la dimension médicosociale de ces affections particulièrement douloureuses et invalidantes, mettant en jeu la qualité de vie, ne peut pas être occultée. C’est souvent à la fin d’une consultation pour hypertension artérielle, pour hyperlipémie ou autre que le patient signale des douleurs articulaires. Cela participe à la méconnaissance de l’incidence des maladies rhumatismales, qui sont souvent associées à plusieurs pathologies. Elles ne sont pas toujours en première ligne et ne présentent donc pas une importance évolutive dans la durée, pas plus qu’une urgence de l’instant. Douleur et handicap La rhumatologie est au deuxième rang des pathologies les plus coûteuses. Cependant, calculer, en termes d’économie de santé, son coût réel n’est pas simple. Or, les rhumatismes sont cause d’un handicap majeur du fait de l’importance des douleurs et de l’invalidité motrice pour certaines affections, d’autant plus croissantes que la population vieillit. En tête de liste des diagnostics lésionnels, existent deux maladies chroniques que sont l’arthrose du genou (12,9 % des motifs de consultation) et la polyarthrite rhumatoïde (11,8 %) suivies par les deux maladies aiguës que sont la tendinobursite du membre supérieur (1,8 %) et la sciatique commune (9,8 %). Viennent ensuite l’ostéoporose (7 %) et la spondylarthropathie (6,1 %). Ces six diagnostics, relatifs à des pathologies fortement invalidantes, représentent près de 60 % des diagnostics principaux en rhumatologie*. © Demri-Sellem-Voisin/Phanie a rhumatologie est une discipline prenant en charge les maladies, les douleurs et les dysLfonctionnements de l’appareil locomoteur et des A cela s’ajoutent les prises en charge d’autres pathologies liées à l’appareil locomoteur : arthrose de la hanche, arthrite infectieuse, fibromyalgie, maladie de Paget, etc. Pour tenter d’évaluer l’importance des coûts liés à la pathologie, il faut tenir compte de plusieurs facteurs. Ceux liés aux coûts directs concernent l’argent dépensé en consultations médicales, en examens de laboratoires, en explorations radiologiques, en achats de médicaments. A côté de ces coûts directs, les coûts indirects consistent en indemnités journalières pour incapacité de travail liée à l’affection, ceux résultant de la perte de productivité (plus difficilement chiffrables dans une population active en partie seulement). Enfin, les coûts intangibles sont liés à l’évaluation de la douleur, de la souffrance physique et morale, du vécu au quotidien du handicap. Leur calcul est encore plus complexe, leur interprétation bien délicate. La pathologie rhumatismale, deuxième source de dépenses de santé du pays par ses coûts directs (après les maladies cardiovasculaires), se place en tête quand les coûts indirects sont indifférenciés. Jacques Bidart * Source : Société française de rhumatologie. Professions Santé Infirmier Infirmière - No 51 - décembre 2003 21 Rhumatologie Douleur Un symptôme toujours présent Dans les maladies rhumatismales, on distingue classiquement les traitements symptomatiques et les traitements de fond. Les premiers n’ont aucun effet sur la maladie. Ils visent surtout à soulager les douleurs toujours présentes, à un moment ou l’autre de l’évolution de la maladie, et qui peuvent être intenses, voire invalidantes. a maladie rhumatoïde est très souvent douloureuse, douleur qui peut aller jusqu’à être Lla cause d’un syndrome dépressif. C’est pourquoi l’écoute prend de l’importance, d’autant que les patients veulent en savoir plus sur leur maladie, sur les traitements et les effets indésirables de ces derniers. Entre autres exemples, il faut savoir que le méthotrexate peut être responsable de troubles digestifs (nausées, vomissements), sanguins (baisse du nombre des globules blancs et des plaquettes), hépatiques ou respiratoires, avec une traduction clinique. Ces troubles doivent être dépistés le plus tôt possible. De même, la prescription de plus en plus fréquente des traitements biologiques comme les médicaments anti-TNFa, administrés par voie injectable, demande un dépistage précoce des signes infectieux qui justifieront l’arrêt momentané de ces médicaments et une consultation médicale rapide. Les infirmiers sont bien placés pour relayer l’information au médecin généraliste et au rhumatologue, mais en s’informant aussi auprès des kinésithérapeutes et des ergothérapeutes. Les traitements Dans les maladies rhumatismales chroniques, on distingue les médicaments qui traitent des symptômes et ceux qui agissent sur la progression de l’affection. Dans tous les cas, il s’agit de soulager la douleur, pratiquement toujours présente et plus ou moins intense à un moment de l’évolution de la maladie. Les traitements contre la douleur s’administrent en tenant compte des paliers douloureux qui peuvent se mesurer à l’aide d’échelles visuelles analogiques (EVA). Les antalgiques utilisés en premier lieu sont le paracétamol, antalgique pur utilisé soit seul, soit associé à la codéine ou aux opiacés. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), malgré leurs effets secondaires possibles, sont préférables à l’aspirine, qui nécessiterait des doses trop importantes. La nouvelle classe des anti-inflammatoires que constituent les cox-2 semble mieux tolérée sur le plan digestif. Les anti-inflammatoires stéroïdiens ou les corticoïdes 24 Professions Santé Infirmier Infirmière - No 51 - décembre 2003 peuvent s’imposer devant des formes sévères de polyarthrite rhumatoïde (PR), soit face à des formes résistantes aux autres antalgiques, soit en cas de contre-indication absolue aux AINS. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a défini trois paliers de douleur, eux-mêmes divisés en phases, auxquels elle associe certaines familles de médicaments. Les médicaments de palier I Les médicaments de palier I sont à utiliser pour traiter les douleurs faibles à modérées, d’origines nociceptives, et en l’absence de contre-indication. • Le paracétamol est un analgésique d’une durée d’action de 4 à 6 heures. Par voie orale ou rectale, il fait preuve d’une bonne tolérance (rares cas d’allergie). L’insuffisance hépatique sévère est une contre-indication. • Le proparacétamol est utilisé par voie parentérale. Son utilisation ne se conçoit que si la voie orale est impossible, car son efficacité est identique à celle du paracétamol par voie orale. Le port de gants est nécessaire (risque d’eczéma de contact). • L’acide acétylsalicylique (aspirine) est antalgique, antipyrétique, anti-inflammatoire, mais aussi antiagrégant plaquettaire à partir de 50 mg par heure. Les présentations existantes sont disponibles à divers dosages par voie orale ou injectable. Les effets secondaires sont : une toxicité digestive, des saignements aggravés par l’effet antiagrégant plaquettaire, des réactions d’hypersensibilité, des bourdonnements d’oreille. L’ulcère gastroduodénal en évolution, les maladies hémorragiques constitutionnelles ou acquises, l’allergie avérée aux salicylés, une grossesse à partir du sixième mois sont des contre-indications. • La floctafénine, à la dose de 400 à 800 mg par jour, présente l’avantage d’une absence d’effet ulcérogène et d’interférence avec les anticoagulants mais de possibles réactions allergiques interdisent les prises uniques itératives. Les médicaments de palier II Les opioïdes faibles de palier II sont à utiliser pour les douleurs modérées à intenses. • Le dextropropoxyphène est un dérivé morphinique qui peut être administré en association avec le paracétamol, par voie orale ou rectale. Il existe des risques de : nausées, vomissements, douleurs abdominales, constipation, céphalées, vertiges, somnolence, désorientation, euphorie, hypoglycémie chez le sujet âgé et/ou diabétique, hépatite cholestatique. Les contre-indications sont l’insuffisance rénale ou hépatique sévère, l’allergie au produit ou au paracétamol associé, la prescription à l’enfant de moins de 15 ans et en cas d’allaitement, de même que la prise concomitante de dérivés agonistes/antagonistes de carbamazépine et d’inhibiteurs de la mono-amineoxydase (IMAO). • La codéine est un analgésique central de type morphinique pris en association avec le paracétamol et/ou l’aspirine, par voies orale et rectale. On peut craindre la constipation et un risque de dépendance si la prise est prolongée. La prudence est de mise en cas d’hypothyroïdie, d’insuffisance rénale ou de traitement associé par dépresseurs du système nerveux central, en cas de grossesse ou d’allaitement, et chez les moins de 15 ans (sauf le sirop pédiatrique). Parmi les contre-indications : l’insuffisance respiratoire, l’asthme, l’insuffisance hépatique ou rénale sévère, l’enfant âgé de moins d’un an, l’hypersensibilité à la codéine (croisée avec la dihydrocodéine) ou aux produits associés. • La dihydrocodéine est un antalgique central dont les précautions d’emploi sont proches de celles de la codéine et de la morphine. • Le tramadol est un analgésique central de type morphinique qui se présente par voie orale, à libération immédiate ou prolongée, et par voie injectable. Sa tolérance est de type morphinique. Il faut prendre garde aux précautions d’emploi chez des malades dépendants des opioïdes et chez ceux présentant un traumatisme crânien, un état de choc, une altération de la conscience, une hypertension intracrânienne, une insuffisance respiratoire, des risques de convulsions. Le tramadol est à éviter en cas d’hypersensibilité, de sevrage aux opiacés, d’épilepsie non contrôlée, d’allaitement, et chez l’enfant de moins de 15 ans. • La buprénorphine est un agoniste-antagoniste morphinique qui se présente en solution injectable ou en comprimé à placer sous la langue sans le croquer ni l’avaler. • Le néfopam est un analgésique central non morphinique ne provoquant ni accoutumance, ni dépendance, sans action antipyrétique ou anti-inflammatoire. Il ne faut pas l’associer aux atropiniques. Il ne faut pas arrêter les morphiniques brutalement chez un malade dépendant à cause d’un risque de sevrage. L’épilepsie, l’adénome prostatique, le glaucome sont des contre-indications. Les médicaments de palier III Les opioïdes forts de palier III sont à utiliser pour les douleurs intenses. • La morphine sulfate est un agoniste morphinique actif sur les récepteurs “mu”, “delta” et “kappa”. La morphine bloque les synapses dans le cheminement central de la douleur. Elle inhibe notamment les relais thalamiques et les projections corticales. La dose initiale doit être faible puis augmentée progressivement, jusqu’à l’obtention du meilleur compromis efficacité/tolérance. Elle génère de nombreux effets secondaires qu’il faut savoir anticiper (surtout la constipation). Le myosis serré aréactif est un signe de surdosage. La dose maximale est atteinte lorsque les effets indésirables ne sont plus contrôlés et que la douleur n’est pas soulagée. Les contre-indications absolues sont l’hypersensibilisation à la morphine et l’association aux agonistes-antagonistes, aux agonistes partiels, et aux I MAO . Toute douleur intense, quel que soit le stade de la maladie, soit après échec des traitements antalgiques antérieurs, soit, d’emblée, en cas de douleur intense, doit la faire prescrire. La voie orale est à privilégier, car elle est efficace chez 80 % des malades. • La morphine chlorhydrate est à réserver aux difficultés de la déglutition, aux vomissements et nausées non contrôlés, à la malabsorption digestive, aux troubles de la conscience. • L’hydromorphone chlorhydrate est un agoniste morphinique spécifique des récepteurs “mu”. • Le fentanyl chlorhydrate est un analgésique morphinomimétique et agoniste pur prescrit chez les patients naïfs et les patients déjà traités par les morphiniques, en faisant la conversion des doses morphiniques en équivalent fentanyl. Il s’administre en cas de douleur chronique stable intense ou rebelle aux autres antalgiques, la douleur aiguë étant une des contreindications. • La péthidine est un analgésique morphinomimétique dont la prescription est actuellement limitée aux douleurs intenses et/ou rebelles. D’autres médicaments sont des coanalgésiques. Ce sont : les antidépresseurs tricycliques ; les antidépresseurs antisérotoninergiques dominants qui agissent par inhibition du recaptage de la noradrénaline et/ou de la sérotonine ; les Professions Santé Infirmier Infirmière - No 51 - décembre 2003 ●●● 25 Rhumatologie ●●● antiépileptiques dont l’action s’exerce sur le blocage des canaux sodiques. Les AINS Tous les AINS présentent des propriétés antalgiques, antipyrétiques et anti-inflammatoires par inhibition de la cyclo-oxygénase (cox), qui est une prostaglantine-synthétase. La découverte de la cox de type 2 a permis de distinguer les AINS classiques, inhibiteurs de la cox-1 et de la cox-2, et les coxibs, qui n’inhibent que la cox 2. Les propriétés de ces produits sont fonction des propriétés des deux types de cox, et donc du type de la cox qui est inhibée. Les AINS sont nombreux, se présentent sous diverses formes galéniques, ont une durée d’action variable et, de ce fait, permettent le changement de médicaments en fonction de leur tolérance et de leur efficacité. Ils appartiennent à diverses familles : salicylés, pyrazolés, indoliques, propioniques, arylcarboxyliques, fénamates, oxicams, et coxibs, plus récemment. Le risque majeur des AINS est leur toxicité digestive, avec le risque d’ulcère gastroduodénal, d’hémorragies et/ou de perforations, d’anémie. Ces risques sont moindres avec les coxibs. Actuellement, seuls deux coxibs sont commercialisés en France (célécoxib et rofécoxib), avec, pour chacun, deux indications : la PR et l’arthrose. Toutes les études confirment leur supériorité d’action par rapport à celle du placebo et leur action comparable à celle des AINS classiques de référence. De plus, l’efficacité est globalement superposable aux AINS de référence : le diclofénac et le naproxène. Les nouveaux coxibs, l’étoricoxib et le valdécoxib se sont également montrés efficaces dans le traitement de l’arthrose et de la PR. Les coxibs ont pour avantage la réduction du risque digestif et du risque pseudo-allergique. En revanche, les troubles fonctionnels (dyspepsies, nausées, gastralgie) restent courants et presque aussi fréquents qu’avec les AINS dans les essais cliniques. La toxicité rénale des coxibs est comparable à celle des AINS classiques et se développe surtout chez les sujets à risque. La rétention sodée peut être à l’origine d’un œdème périphérique et d’une hypertension artérielle. Récemment, une étude américaine, l’étude VIGOR, est venue semer le trouble sur l’intérêt des coxibs en mettant en évidence une augmentation des infarctus du myocarde dans un groupe de malades traités par le rofécoxib comparativement au naproxène. Comme il est impossible, aujourd’hui, de conclure quant à l’origine 26 Professions Santé Infirmier Infirmière - No 51 - décembre 2003 de l’augmentation de ces accidents coronariens, il existe un consensus sur la nécessité d’une prescription concomitante d’aspirine à faibles doses s’il y a une indication cardiovasculaire lors d’une prescription de coxibs. Cependant, compte tenu de leur coût, les coxibs se limitent aux malades présentant un risque au niveau digestif. Les glucocorticoïdes Les glucocorticoïdes ont une action antiinflammatoire qui s’exerce par induction de la synthèse de lipocortines. Ceux-ci bloquent l’action de la phospholipase A2, enzyme clé de la production des eicosanoïdes et, en particulier, des prostaglandines E2 et des leucotriènes B4 pro-inflammatoires. L’effet immunomodulateur est dû à une inhibition de la sécrétion des cytokines impliqués dans la réponse immunitaire, à la modulation des récepteurs membranaires des cellules immunocompétentes et à un effet toxique direct sur les lymphocytes activés. Les produits sont divers mais le corticoïde de référence reste la prednisone, dont le métabolite actif est la prednisolone. La posologie varie selon les indications, et les effets secondaires sont nombreux : métaboliques, cutanés, ostéoarticulaires, infectieux, oculaires, digestifs. L’insuffisance surrénale constitue un risque en cas de corticothérapie prolongée à fortes doses et le syndrome de sevrage est parfois difficile à distinguer d’une poussée de la maladie traitée. Certaines précautions sont à prendre : régimes hyposodés, pauvres en graisses et en glucides, riches en protides et en potassium. Une mobilisation est recommandée ainsi qu’une prescription de calcium et de vitamine D. Il en est de même pour une protection gastrique en cas de gastralgie ou d’antécédent ulcéreux ou hémorragique digestif. • La corticothérapie locale connaît des complications (arthrite septique, atrophie locale avec dépigmentation, ostéonécrose, hypercorticisme). Ses indications sont nombreuses en pathologie articulaire (rhumatismes inflammatoires). Les contre-indications absolues sont l’infection locale ou générale, la présence de prothèse, l’allergie vraie et un état d’hypocoagulabilité sévère ; plus relativement : le diabète de type 1, l’ulcère gastroduodénal évolutif, l’immunosupression et autres contre-indications de la corticothérapie générale. A.-L.P. D’après les communications lors du Congrès de la SFR. Lombalgies La plainte la plus fréquente Les lombalgies représentent en France le deuxième motif de consultation médicale. Elles sont à l’origine de 25 à 35 pour 1 000 des consultations en médecine générale, 8 % des actes radiologiques, 30 % des actes de kinésithérapie. Si l’on interroge la population française, 70 % des personnes ont souffert ou souffrent du dos. affection est aiguë, mais elle devient vite récurrente puisque le taux de rechute se situe L’ en moyenne entre 60 et 85 %. Cette prise en charge dans son ensemble représente un coût conséquent, car elle est responsable de 12 millions de jours d’arrêt de travail (13 % de l’ensemble) avec, pour 20 % de personnes atteintes, l’obtention d’une rente au titre de l’invalidité. Conduite à tenir Le diagnostic d’une lombalgie est facile dès l’interrogatoire, sinon à l’examen clinique montrant la limitation douloureuse des mouvements rachidiens. La conduite à tenir est codifiée par une recommandation de juin 1990 de l’ANAES : “en dehors d’une urgence, il n’y a pas lieu de demander d’examen d’imagerie dans les 7 premières semaines d’évolution, sauf quand les modalités du traitement choisi (manipulation et infiltration) exigent d’éliminer formellement toute lombalgie spécifique. Dans la lombalgie aiguë, comme dans la lombosciatique, les traitements médicaux visant à contrôler la douleur sont indiqués. Ce sont les antalgiques, les antiinflammatoires non stéroïdiens, et les décontracturants musculaires.” Le traitement est donc essentiellement médical au début. Les antalgiques de niveau 1 sont utilisés à ce stade, avec une escalade thérapeutique qui est fonction de l’évolution des symptômes. Le repos au lit n’est plus de mise, il peut même être facteur de risque de passage à la chronicité. A ce stade, l’efficacité des massages est nulle, l’intérêt des manipulations non négligeable. Ce n’est qu’au bout de 7 semaines, si la douleur persiste, que l’imagerie médicale est appelée à la rescousse, soit 7 % des lombalgies. La radiographie standard n’est pas utilisée à titre diagnostique mais essentiellement pour éliminer une pathologie telle qu’une spondylodiscite infectieuse, un tassement vertébral bénin ou métastatique. Les clichés doivent comprendre une incidence de profil et un grand cliché lombaire en position debout. Selon les références médicales opposables de 1993 : “il n’y a pas lieu de pratiquer un scanner et/ou une IRM lombaire devant une lombalgie aiguë ou un lumbago d’effort en dehors des cas où les données cliniques et/ou paracliniques font craindre une lombalgie symptomatique (infectieuse, tumorale, inflammatoire)”. Lorsque le traitement médical s’avère insuffisant, la crainte est d’avoir affaire à une protrusion discale ou hernie (cf. encadré). Un geste technique peut alors être engagé : une infiltration sous contrôle scopique par le spécialiste, voire une intervention chirurgicale curative. Les signes de hernie discale Chez un patient aux antécédents de lumbago, la survenue est brutale, souvent déclenchée par un effort violent. On retrouve l’existence d’une attitude antalgique et la coexistence d’anomalies des réflexes et de troubles sensitivomoteurs à l’examen. Infiltrations rachidiennes Effectuées dans le cadre de lombalgies communes chroniques, les infiltrations sont de pratique courante en rhumatologie. Elles nécessitent un certain nombre de précautions pour atteindre, sans risque, leur efficacité thérapeutique. Devant une lombalgie chronique résistant aux traitements anti-inflammatoires et antalgiques classiques, l’indication d’infiltrer peut être portée par le praticien. Il peut s’agir également d’une lombalgie commune, d’une sciatique, liée ou non à un conflit discoradiculaire, à une arthrose postérieure, à un canal médullaire étroit. Avant de pratiquer une infiltration, il faut d’abord s’assurer de l’absence de contre-indications, à savoir l’existence d’une métastase osseuse ou d’une infection locale ou générale. Il faut aussi s’assurer de l’absence de troubles de la coagulation, qui peuvent être liés à la prise d’anticoagulants per os. Le cas échéant, un relais doit être pratiqué au moyen des HBPM (héparines de bas poids moléProfessions Santé Infirmier Infirmière - No 51 - décembre 2003 ●●● 27 Rhumatologie ●●● culaire). Les précautions d’emploi sont liées à l’existence de pathologies sous-jacentes pouvant mal supporter l’injection, tels une hypertension artérielle, un diabète mal équilibré, un ulcère gastroduodénal. Un bilan radiologique est nécessaire et suffisant avant d’infiltrer. La pratique d’examens biologiques est utile pour vérifier l’état du patient. Le plateau technique comprend le matériel à usage unique, c’est-à-dire gants stériles, compresses, masque et casaque, selon le lieu d’infiltration. Les seringues seront de 5 ml, les aiguilles à ponction de 7/10 à 9/10 mm et de 75 à 90 mm de long, voire des aiguilles intramusculaires. Les médicaments injectés sont en général des dérivés cortisoniques. Réalisation Le patient, idéalement au repos depuis 24 à 48 heures, peut être prémédiqué per os ou par injection d’anxiolytiques s’il est particulièrement anxieux. Il est communément placé assis ou en décubitus latéral et cyphose lombaire. L’asepsie doit être soigneuse (port de gants, désinfection cutanée par antiseptique iodé et alcool à 70o). L’injection est pratiquée en s’assurant de l’absence d’effraction vasculaire par aspiration préalable. Selon la pathologie visée, la voie d’abord est différente. La plus courante est la voie interépineuse. Elle cible directement la zone pathologique et permet un soulagement quasi immédiat. Elle se pratique le plus souvent à l’aide d’aiguilles intramusculaires. L’infiltration épidu- rale s’effectue par le premier trou sacré, le patient étant en décubitus ventral. Son indication préférentielle est la sciatique S1. Les infiltrations articulaires postérieures, intradurale et périradiculaire ne sont effectuées qu’en milieu hospitalier et sous repérage scopique. Quant à la nucléolyse à la papaïne, elle ne peut plus se pratiquer depuis l’arrêt de commercialisation de la papaïne. Résultats Souvent, dès la première infiltration, la douleur cesse et le soulagement est immédiat. Cependant, il peut être nécessaire, si le résultat est insuffisant, d’en pratiquer une deuxième, avec, en général, un délai d’une semaine entre deux injections. Le plus souvent pratiqué sans inconvénient, le geste lui-même peut provoquer des complications. L’infection cutanée est due essentiellement à un défaut d’asepsie locale et se déclenche entre 24 et 48 heures après le geste technique. Rare, elle est quasi exceptionnelle. Plus fréquente en revanche, la douleur survenant immédiatement après l’injection est due à des réactions microcristallines articulaires. En général, elle cède en 24 à 48 heures. L’hématome au point d’injection est, lui, anodin et cesse sous pansement alcoolisé ou grâce à l’application d’une pommade hémostatique. D’autres manifestations de type général sont possibles avec des bouffées de chaleur, des céphalées. Elles cèdent spontanément en 48 heures et sont sans conséquence. J.B. Arthrose Un problème de santé publique croissant Vingt à 40 % de la population souffrent d’arthrose, soit entre 4 et 5,5 millions de personnes. Son importance croissante est liée en grande partie au vieillissement de la population. Le handicap qui en résulte va donc devenir un problème de santé publique majeur dans les années à venir. arthrose est une maladie du cartilage dont l’origine est double : une atteinte directe, et L’ c’est l’arthrose primaire ; une atteinte provenant d’une lésion voisine tendineuse, par exemple, et c’est l’arthrose secondaire. Ce n’est donc pas, à proprement parler, une lésion liée à l’usure. Le cartilage, en effet, comme tout tissu vivant, se renouvelle en permanence. Il est composé de deux constituants principaux. • La matrice cartilagineuse, qui assure les fonctions d’articulation entre les os, doit être lisse 28 Professions Santé Infirmier Infirmière - No 51 - décembre 2003 pour assurer le glissement, élastique pour s’adapter aux pressions subies, résistante pour supporter les chocs reçus. Elle est formée de réseaux de fibres de collagène qui emprisonnent des sucres, les protéoglycanes, très riches en eau. • Parallèlement, existent des cellules qui assurent, après sa destruction, le renouvellement de cette matrice. Ainsi, la membrane synoviale débarrasse l’articulation des déchets de matrice cartilagineuse, les transforme en molécules suffisamment petites pour être relarguées dans les urines. L’autre fonction de la membrane est de fabriquer l’acide hyaluronique, sorte de lubrifiant articulaire, et de synthétiser les enzymes chargés de la destruction cartilagineuse en collaboration avec les chondrocytes. Comment se produit l’arthrose ? Des facteurs prédisposants ou déclenchants existent. Il sont d’abord génétiques. Ainsi, une fille est plus susceptible de souffrir d’arthrose si sa mère ou sa tante en sont atteintes. Mais ce ne sont pas les seuls facteurs. En fait, toute anomalie tendineuse, ligamentaire (ligaments croisés pour le genou), osseuse (maladie de Paget), voisine d’une articulation, est potentiellement apte à provoquer une arthrose secondaire. Tout traumatisme répété, toute dépense physique traumatisante trop souvent reproduite, tout surpoids sont des facteurs de risque d’arthrose. Au début, chez un patient jeune, l’atteinte est limitée, voire réversible. Avec le vieillissement, si la cause demeure, les lésions s’accroissent, leur réparation devient alors plus aléatoire. Vont se succéder des phases successives de destruction rapide et d’autres de stabilisation de l’état antérieur. Chaque aggravation de la chondrolyse est accompagnée d’une aggravation des signes cliniques. En plusieurs décennies, le cartilage peut ainsi totalement disparaître. Chaque poussée inflammatoire douloureuse doit donc être combattue en tant que signe majeur d’une atteinte évolutive cartilagineuse. Diagnostic Le premier signe révélateur de l’arthrose est la douleur, une douleur mécanique survenant à l’effort ou déclenchée par celui-ci. Le repos, en revanche, la fait disparaître, ce qui permet au patient de passer des nuits correctes sans la recrudescence douloureuse du petit matin observée dans les arthrites. Au réveil, une certaine raideur articulaire nécessite un dérouillage matinal. L’atteinte peut concerner plusieurs articulations. Par ordre de fréquence : les doigts (articulations interphalangiennes distales, contrairement à la PR), les genoux, les hanches. L’atteinte est aussi possible sur la colonne vertébrale (spécialement les régions cervicales et lombaires), les pieds ; en fait, toute articulation est concernée. L’examen retrouve une certaine perte de mobilité articulaire, avec, éventuellement, un épanchement. Cette impression clinique est confortée par la radiologie. Les radiographies, de préférence effectuées en charge, révèlent un pincement articulaire, la présence d’ostéophytes, d’une condensation de l’os et de géodes sous-chondrales. Facteurs de risque d’arthrose En premier lieu vient l’obésité, puis le vieillissement, le sexe (les femmes sont plus souvent atteintes que les hommes, pour les doigts et les genoux surtout), la ménopause (la disparition des sécrétions hormonales vulnérabilise la femme), l’ostéoporose (facteur favorisant). En second lieu : une charge prolongée sur l’articulation, qu’elle soit d’origine professionnelle (carreleurs) ou sportive ; un trouble de la statique des membres (raccourcissement) ou de la colonne vertébrale (déformation des courbures) ; des traumatismes ou problèmes tendineux à répétition. Traitement Le traitement contre l’arthrose présente deux objectifs : assurer l’antalgie et éviter, ou au moins limiter, l’ankylose articulaire. Les antalgiques de niveau I, II, voire III, sont utilisés en traitement général en fonction du tableau clinique, des antécédents du patient. Pour lutter contre les poussées inflammatoires, on prescrit les anti-inflammatoires. Ils agissent en inhibant la production enzymatique de cyclo-oxygénases 1 ou 2. D’abord, sont utilisés les AINS généraux, qui bloquent les deux cyclo-oxygénases. Les sélectifs, eux, n’agissent que sur l’une ou l’autre des enzymes. En traitement de fond protecteur contre la chondrolyse, des médications telles que le sulfate de chondroïtine ou la diacéréine sont prescrits. Ils semblent avoir un effet ralentisseur sur l’évolution de la maladie. Les traitements locaux sont utilisés comme adjuvants des traitements généraux ou lorsque ces derniers ont échoué. Il s’agit d’infiltrations de glucocorticoïdes précédées ou non d’un lavage articulaire. ●●● Quand envisager le recours à la prothèse ? Quatre éléments doivent être pris en compte pour décider d’une intervention chirurgicale. 1/ La douleur et la gêne fonctionnelle sont importantes et résistent aux divers traitements employés. 2/ La radiographie articulaire montre une arthrose qui s’aggrave. 3/ Aucune maladie sousjacente pouvant interdire la pose d’une prothèse ne doit exister. 4/ Le patient, qui doit connaître les risques opératoires, décide de la date de son intervention en fonction de son propre vécu douloureux. Professions Santé Infirmier Infirmière - No 51 - décembre 2003 29 Rhumatologie ●●● Comment choisir et régler sa canne Il existe plusieurs modèles de cannes. • La canne simple est munie d’une poignée qui peut être de formes diverses. Certains modèles existent en version pliante ou téléscopique. • La canne anglaise est munie d’une poignée avec contre-appui au niveau de la partie postérieure de l’avant-bras. Elle présente une zone d’appui supérieure à celle de la canne simple. • Lorsque l’équilibre est difficile, d’autres types d’appui sont souhaitables, comme ceux de la canne tripode, utile en cas de polyarthrite. • Plus stables encore, les déambulateurs pliants ou non permettent de mieux passer les obstacles. Une fois choisis, tous ces modèles doivent être réglés en fonction de la morphologie du patient. Le coude fléchi à 30o, la poignée bien en main doit se situer à peu près au niveau de l’entrecuisse. Ces repères sont valables pour la canne simple comme pour les dé- Plus récemment, sont apparues des préparations à base d’acide hyaluronique. C’est un lubrifiant articulaire naturel qui, souvent, fait défaut, d’où l’idée d’en ajouter. Leur effet articulaire est moins antalgique à court terme que protecteur des atteintes cartilagineuses à long terme. Les cures thermales, voire la thalassothérapie, permettent parfois de noter une amélioration articulaire, avec un retour à des amplitudes fonctionnelles correctes. ambulateurs, qui disposent de plusieurs niveaux de réglage. Bien réglée, comment utiliser la canne ? Elle doit être placée du côté sain et le patient doit la faire se mouvoir en même temps que la jambe malade. Lorsque deux cannes sont en jeu, la technique employée doit être celle du pas simulé. En effet, il ne faut pas sauter le pas mais appuyer successivement, sans forcer, sur les deux pieds, sans insister sur le côté malade. On pose d’abord le pied sain, on avance ensuite les deux cannes simultanément à la jambe malade. Le talon malade est posé au sol, sans appui ferme pour le ménager. Tout le poids est alors supporté par les cannes. Il faut faire en sorte que la jambe malade n’avance pas tendue mais souple, avec un mouvement de flexion-extension, comme pour un pas normal, d’où le nom du pas dit “simulé”. Lorsque rien n’a marché, que la gêne fonctionnelle et/ou que la douleur sont devenues trop importantes, il reste la chirurgie. Elle peut être réparatrice, en remplaçant les pièces malades par des prothèses, mais aussi antalgique, en bloquant l’articulation douloureuse, réalisant ainsi une arthrodèse. J.B. Pour en savoir plus : AFLAR (Association française de lutte antirhumatismale), 83, boulevard de l’Hôpital, 75013 Paris. Tél. : 01 45 83 56 26. Fax 01 45 83 30 08. Sites : wwwarthrolink.com, www.Rhumapolis.com. Ostéoporose Gare aux conséquences d’un mauvais dépistage Quatre femmes sur 10 mais également deux hommes sur 10 après 50 ans sont atteints d’ostéoporose, ce qui entraîne nécessairement un coût humain et financier non négligeable. Les conséquences sont, au premier plan, la fracture du col du fémur mais aussi les tassements vertébraux, tous deux générateurs de handicaps parfois définitifs. e nombreuses organisations internationales (O , O ), en cette décennie des os et des Darticulations, ont fait de l’ostéoporose leur prinNU MS cipal cheval de bataille. Leur but : faire diminuer de 20 % les fractures liées à une décalcification. Les traitements sont multiples, mais leur maniement n’est pas toujours très aisé. Avant de commencer à traiter, il convient de pratiquer un véritable “état des lieux”. Celui-ci commence par une 30 Professions Santé Infirmier Infirmière - No 51 - décembre 2003 meilleure connaissance du contexte dans lequel vit le patient, notamment ses habitudes alimentaires. Une enquête nutritionnelle, questionnaire à l’appui, permet de connaître rapidement les apports calciques, donc d’évaluer les besoins en supplémentation. Dans ce cas, une simple augmentation de la consommation d’eau, accompagnée d’un changement de marque (choix d’une eau fortement calcique), peut suffire à combler ce L’ostéodensitométrie © Voisin/Phanie • Indications manque. La deuxième mesure, simple mais efficace, est l’arrêt de la consommation d’alcool et de tabac. Une autre mesure prend également tout son intérêt, c’est la reprise ou le développement de l’exercice physique. Toutes les enquêtes effectuées en institutions de retraite montrent ainsi que les résidents, dans leur ensemble, sont carencés en calcium, principalement à la suite d’une insuffisance d’exercice physique. Poursuivre longtemps une activité est certainement le meilleur moyen préventif simple de l’ostéoporose. A côté d’une carence en calcium, peut exister une carence en vitamine D. L’étude SUVIMAX a montré que 30 % des participants à l’étude âgés de plus de 40 ans et vivant dans le Nord de la France présentaient cette carence. A 65 ans, 65 % des femmes ménopausées ont une insuffisance en vitamine D. Au moment de la ménopause, et surtout chez les femmes présentant une symptomatologie clinique riche et/ou des antécédents familiaux ostéoporotiques, il convient d’envisager un traitement hormonal substitutif (THS). Administré sous surveillance régulière, celui-ci sera reconduit pendant 5 à 7 ans. En cas de doute, dans le cadre d’un bilan, il est utile de pratiquer une ostéodensitométrie, qui permet de faire le point sur l’état de l’os. Le THS demeure en effet le traitement préventif par excellence de l’ostéoporose. Mais, depuis l’étude américaine qui a évoqué les risques potentiels de cancer du sein, beaucoup ont fait marche arrière. Pourtant, ce traitement reste utile chez les femmes symptomatiques, c’est-à-dire souffrant de bouffées de chaleur et de troubles climatériques. En ce qui concerne l’ostéoporose, La densitométrie est essentielle pour déterminer la charge minérale osseuse quand la radiographie standard n’est pas assez performante. D’où les indications de l’ostéodensitométrie : – ostéoporose suspectée devant l’existence de facteurs de risque personnels ou familiaux (si la mère ou une parente proche a ainsi eu une fracture du poignet ou du col du fémur) ; – surveillance d’un traitement hormonal substitutif ; – surveillance de l’état osseux au cours d’une corticothérapie prolongée ou d’une insuffisance rénale sous dialyse ; – en cas d’hyperthyroïdie ou d’hyperparathyroïdie. • Contre-indications Ne peuvent pas subir une densitométrie les porteurs de prothèses ou de tout objet métallique (clip vasculaire ou utérin). Il n’y a pas de problème, en revanche, pour les porteurs de pacemaker. Par ailleurs, il ne faut pas avoir subi récemment un lavement baryté ou une scintigraphie. • Principe La densité osseuse est calculée grâce à une émission de photons émise sur trois sites osseux, analysée par un ordinateur. Un faisceau de photons est émis par une source radioactive non nocive. Ces rayons frappent perpendiculairement l’os ; sont alors mesurées les variations du rayonnement à sa traversée de l’os. L’examen dure au plus une vingtaine de minutes. • Résultats La BMD (Bone Mineral Density) est déterminée par un calculateur informatique. La courbe obtenue est alors comparée à la valeur moyenne correspondant à la classe d’âge de la patiente et à celle de ses 20 ans. Est ainsi déterminé l’écart-type entre courbe théorique calculée et courbe réelle observée : si cet écart est supérieur à 2 déviations standard, l’ostéoporose est jugée sévère, avec risque fracturaire réel ; inférieur, son résultat est à confronter aux données historiques familiales, cliniques et biologiques personnelles pour guider le diagnostic et la thérapie. En cas d’arthrose, l’interprétation est rendue plus délicate par la densification osseuse qui en résulte. On doit en tenir compte dans l’analyse des résultats. Il est inutile de répéter cet examen à moins de 24 mois d’intervalle, la variation n’est en effet pas suffisamment significative. • Coût D’un coût moyen de 100 euros, l’examen, non encore référencé, n’est pas pris en charge par la Sécurité sociale, sauf s’il y a déjà eu fracture. Mais on parle d’un prochain remboursement. ●●● Professions Santé Infirmier Infirmière - No 51 - décembre 2003 31 Rhumatologie ●●● le THS diminue le risque de fracture vertébrale clinique et celui de fracture de l’extrémité supérieure du fémur. Toutefois, cette indication nécessite de peser soigneusement, à l’échelle individuelle, la balance bénéfice/risque. Si on doit interrompre le THS, si la masse osseuse retrouvée à l’examen densitométrique présente des risques de dégradation (ostéopénie inférieure à –2,5 ou comprise entre – 2,5 et – 1,5), un traitement comprenant des biphosphonates ou un SERMS doit prendre le relais. S’il existe un déficit en calcium, on essaiera d’abord d’apporter des compléments alimentaires en conseillant sur les nouvelles habitudes à prendre et les règles à respecter. Au besoin, on s’aidera de médicaments pour le calcium et on fera de même pour la vitamine D, les deux médicaments étant souvent associés dans la prise, le tout sous stricte surveillance clinique et biologique. En l’absence de facteurs de risque et de déficit, on se contentera d’une surveillance régulière ; une nouvelle densitométrie ne sera en effet pas pratiquée avant trois ans. Pour éviter au maximum le risque fracturaire, notamment chez les femmes ménopausées, il s’agit de sensibiliser les médecins afin de motiver les patientes à se faire dépister, ce qui devrait permettre, dans un avenir proche, de faire rapidement remonter le taux catastrophiquement bas, à savoir que seuls 25 % des femmes ostéoporotiques présentant un risque fracturaire sont traitées. J.B. Maladie de Paget Empêcher les complications Rare avant 40 ans, la maladie de Paget touche deux fois plus les hommes que les femmes. Inapparente à son début et incidemment de découverte radiologique, elle peut ne se révéler que lors de complications osseuses, articulaires ou neurologiques. Des complications notablement retardées grâce à des traitements désormais très efficaces. a maladie de Paget est l’affection osseuse la plus répandue après l’ostéoporose. Elle touche préLférentiellement les hommes âgés de plus de 40 ans. Rare en Afrique, elle est fréquente chez les sujets blancs, en Europe notamment. Elle se manifeste par une atteinte osseuse entraînant sa déformation et qui, dans un quart des cas en moyenne, touche un seul os. Lorsque les lésions sont multiples, elles concernent essentiellement le bassin (75 %), le rachis lombaire (50 %), les fémurs et tibias (50 %), le crâne (40 %). Au niveau de l’os, le tissu normal est remplacé progressivement par un tissu fortement vascularisé, perdant son architecture usuelle pour une structure grossière, dématérialisée, molle, se déformant et se renouvelant de façon anarchique. Tous ces remaniements aboutissent à une densification et une hypertrophie de l’os. Ces anomalies sont d’origine encore inconnue. Cependant, un virus de type paramyxovirus pourrait être responsable. C’est peutêtre pourquoi cette affection fréquente voit son taux diminuer depuis la généralisation du vaccin ROR antirougeole empêchant le paramyxovirus de s’exprimer. Si la maladie n’est pas transmissible, une origine génétique est fortement suspectée. 32 Professions Santé Infirmier Infirmière - No 51 - décembre 2003 Diagnostic La découverte de l’affection peut être totalement fortuite, souvent au décours d’un examen radiologique. C’est le cas dans plus de 90 % des observations. Sinon, les signes d’appel sont représentés par des douleurs mécaniques provoquées ou augmentées par la pression locale. Ces douleurs touchent plutôt les os longs, mais aussi le bassin ou le rachis. Elles sont accompagnées, mais tardivement, de déformations osseuses. Les troubles vasomoteurs à type d’aug- Surveillance de la maladie de Paget L’examen clinique se fera tous les trois mois, à la recherche de signes de compressions nerveuses, plus généralement de complications osseuses, articulaires, cardiaques. Les examens biologiques tous les trois mois surveilleront les phosphatases alcalines, baromètres de la maladie. L’examen radiologique sera annuel avec, si nécessaire une scintigraphie. déformations surviennent surtout sur le genou ou la hanche. A distance de l’os, l’insuffisance cardiaque, encore possible, peut être responsable d’un décès. Complication ultime mais grave, la dégénérescence sarcomateuse est retrouvée à la biopsie et elle est de mauvais pronostic. Ces complications surviennent rarement d’emblée, plus souvent au cours d’évolutions par poussées de la maladie. mentation de la chaleur locale se retrouvent dans le même territoire. Tous ces signes caractéristiques demandent parfois une exploration supplémentaire pour établir le diagnostic. Les examens complémentaires débutent par une étude radiologique qui retrouve les anomalies osseuses décrites anatomopathologiquement. L’étude signale également l’augmentation de la densité osseuse qui évolue en trois stades : une phase lytique avec augmentation de la radiotransparence osseuse, puis mixte, avec lyse et reconstruction anormale, et, enfin, sclérotique caractéristique du nouvel aspect mou et non fonctionnel de l’architecture de l’os. Il est parfois nécessaire de compléter les images par une scintigraphie qui précise le tableau, diagnostique les petits foyers et mesure leur extension. L’augmentation de l’activité des ostéoclastes se retrouve dans l’augmentation du taux sanguin des phosphatases alcalines et urinaires de l’hydroxyprolinurie. Les autres constantes (calcémie, phosphorémie, VS) sont normales, en l’absence de pathologie rajoutée. Traitement Le principe du traitement de la maladie de Paget est de diminuer l’hypertrophie osseuse en ralentissant son évolution. Ainsi, il doit réduire ou empêcher l’apparition des complications. En premier lieu, ce sont les calcitonines, hormones thyroïdiennes, qui font baisser l’hydroxyprolinurie et diminuent la résorption osseuse. Elles sont injectées en sous-cutané, avec un repas préliminaire, un repos au lit ensuite. Ces précautions visent à éviter ou minimiser les bouffées vasomotrices, les nausées qui, sans cela, sont très fréquemment observées. Il est même parfois nécessaire de pratiquer, conjointement aux hormones, une injection d’antiémétique afin de prévenir tous ces effets secondaires. Ces calcitonines sont à base de produits humains ou de saumons. Médicaments de synthèse, les biphosphonates ont aussi une action antirésorption de la masse osseuse. Ils sont plus efficaces que les calcitonines, et leur effet démontré dans la maladie de Paget a causé leur essor prescriptif dans l’ostéoporose. Ils se prescrivent en cures plus ou moins longues de 2 à 6 mois, répétées au besoin. Complications Si l’évolution de la maladie de Paget se poursuit, des complications de plusieurs ordres peuvent apparaître. Ainsi l’atteinte nerveuse est due à la compression in situ des nerfs par hypertrophie osseuse. Des atteintes du nerf sciatique, du nerf crural sont parfois réalisées. Si la maladie touche le rocher, une surdité est possible. Lorsque la compression est médullaire, c’est le syndrome de la queue de cheval. L’augmentation de l’ostéolyse fragilise l’os, qui peut alors être le siège de fractures, le plus souvent diaphysaires. Si l’atteinte est articulaire, les J.B. Pour en savoir plus : www.rhumapolis.com, www.med.univ-tours.fr Polyarthrite rhumatoïde Des traitements qui changent tout Touchant un pour cent de la population, la polyarthrite rhumatoïde se présente comme une atteinte polyarticulaire dont le diagnostic précoce n’est pas toujours facile à poser. Souvent, seule l’évolution sur plusieurs mois permet d’affirmer l’atteinte. Le diagnostic fait, encore faut-il apprécier l’évolutivité de la maladie qui permettra de guider le traitement. ouchant en France environ 300 000 personnes (30 000 à 50 000 formes graves) selon le Pr Dougados de l’hôpital Cochin, la maladie est d’apparition relativement récente. Sa pre- T mière description remonte en effet au XIXe siècle. Sa prévalence est essentiellement féminine, avec trois femmes touchées sur quatre personnes atteintes. Elle débute vers 30 ans le plus souvent, Professions Santé Infirmier Infirmière - No 51 - décembre 2003 ●●● 33 Rhumatologie ●●● mais peut apparaître plus tardivement. La fréquence des cas familiaux témoignerait d’une certaine prédisposition génétique pour la maladie. L’existence de certains antigènes HLA de types DR1 et 4 est un argument en sa faveur mais l’explication ne suffit pas. La PR est en effet une maladie d’origine multifactorielle : en dehors des facteurs génétiques, semblent exister des causes environnementales, physiques (liées à l’alimentation) ou psychiques (faisant suite à un choc, à un deuil, un stress mal géré). Son mécanisme d’apparition et destructeur est lié à une prolifération de la membrane synoviale sous forme de synovite hyperplasique. A cette lésion primaire s’ajoutent des atteintes tendineuses responsables des ankyloses articulaires constatées. Toutes ces anomalies sont la conséquence d’une production exagérée d’enzymes protéolytiques et de radicaux libres. Deux cytokines jouent ici un rôle essentiel : l’interleukine 1 et la TNFa. Leur contrôle est une voie thérapeutique en développement. L’implication dans les mécanismes de la maladie de la production d’auto-anticorps fait classer la PR dans les maladies auto-immunes. Diagnostic L’existence de douleurs articulaires de prédominance distale chez une femme âgée de 30 à 40 ans doit faire évoquer le diagnostic de PR. Les douleurs sont inflammatoires, non liées à l’effort, pouvant déclencher des réveils nocturnes et nécessitant un dérouillage matinal. Ces douleurs, en général symétriques, touchent les mains, les poignets. Les articulations atteintes sont essentiellement, en ce qui concerne la main, les métacarpophalangiennes et interphalangiennes proximales. A l’examen, les articulations sont chaudes, œdématiées, éventuellement le siège d’un épanchement. Cette atteinte peut aussi toucher les tendons fléchisseurs des doigts. En plus de l’atteinte articulaire, peuvent être observés à distance des nodules rhumatoïdes, des adénopathies, voire une atteinte cardiaque (péricardite) ou pulmonaire (fibrose interstitielle diffuse). Les signes cutanés comme l’apparition d’un purpura constituent en fait des manifestations d’aggravation de l’affection. Dans ce tableau complet, le diagnostic est relativement aisé, mais il est plus compliqué lorsque l’atteinte est monoarticulaire. Dans ce dernier cas, la suspicion sera confortée par les examens complémentaires, mais aussi et surtout, par l’évolution de l’affection. Les examens biologiques retrouvent le syndrome inflammatoire, avec une accélération de la vitesse de sédimentation, une augmentation 34 Professions Santé Infirmier Infirmière - No 51 - décembre 2003 du taux de protéine C réactive et du taux de fibrinogène. Dans 70 à 80 % des PR est ainsi retrouvé un anticorps IgM anti-IgG, ou facteur rhumatoïde, détecté par la réaction de Waaler-Rose. La présence de ce facteur n’est pas spécifique mais significative. D’autres anticorps peuvent être retrouvés ; ils sont, eux, plus spécifiques, tels que l’antikératine ou l’antifillagrine. Parallèlement, des signes dus à la prolifération synoviale, avec un pincement articulaire diffus et une érosion des berges osseuses, sont radiologiquement retrouvés. Le tout évolue vers une destruction articulaire avec déformation sous forme de luxations et subluxations. Évolution et traitement La PR évolue par poussées qui peuvent s’étaler sur plusieurs années. Le handicap est plus grand à chaque crise, la rémission intercrises moins longue. Les traitements sont symptomatiques : mises au repos au moyen d’orthèse, infiltrations ou encore interventions chirurgicales de type arthrodèse. En revanche, certains traitements sont censés traiter la PR sur le fond. Ont ainsi été employés successivement les sels d’or, la D-pénicillamine, les antipaludéens. Ensuite, la sulfasalazine, le méthotrexate. Tous ces traitements ont une utilisation limitée du fait de leur mauvaise tolérance et d’une baisse d’efficacité. Une meilleure connaissance de la physiopathologie de l’affection a permis de faire avancer sa prise en charge thérapeutique. Le TNF étant responsable de l’inflammation articulaire, il a semblé logique d’utiliser un anticorps antimonoclonal TNFa, l’infliximab, pour contrer ses effets. Autre médication sur une autre cible : un bloqueur des lymphocytes T. On a vu le rôle des lymphocytes T dans le déclenchement de la maladie. Le léflunomide, en inhibant une enzyme mitochondriale, bloque le cycle des lymphocytes T activés. La biothérapie est une méthode de traitement utilisant des cultures vivantes ou des produits organiques (ce sont des agents biologiques). On l’oppose à la chimiothérapie qui emploie des molécules de synthèse. En perspective : d’autres anti-TNF, qui sont en cours d’expérimentation, comme la thérapie génique, comme des traitements combinés utilisant en association plusieurs thérapies. L’emploi de ces médications se fait en fonction du profil du patient et du profil évolutif de sa maladie, du degré d’évolution de celle-ci au moment du diagnostic. J.B.