Chirurgie vasculaire majeure : faut-il explorer les patients e

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Chirurgie vasculaire majeure : faut-il explorer les patients
à risque intermédiaire ?
RéFéRENCE
Should major vascular surgery be delayed
because of preoperative cardiac testing in intermediate-risk patients receiving beta-­blocker
therapy with tight heart rate control?
Poldermans D, Bax JJ, Schouten O et al.,
for the Dutch Echocardiographic Cardiac
Risk Evaluation Applying Stress Echo Study
Group. J Am Coll Cardiol 2006;48:964-9.
LE FOND
De 2000 à 2005, 1 476 patients devant subir
une intervention vasculaire (aorte abdominale ou artères des membres inférieurs) ont
été inclus dans l’étude DECREASE-II. Ils ont
tous été traités par bêtabloquants et ils ont été
répartis en trois groupes selon le nombre de
leurs facteurs de risque (âge > 70 ans, angor,
antécédent d’infarctus du myocarde [IDM],
insuffisance cardiaque ancienne ou compensée, diabète, créatinine sérique > 160 µmol/l,
antécédent d’accident cérébral ischémique).
Le groupe à risque intermédiaire (1 à
2 facteurs de risque) qui fait l’objet de
cette publication représentait 52 % de la
population globale (770 patients).
Ces 770 patients ont été randomisés entre
deux stratégies : pour 386 d’entre eux, un
test de provocation d’ischémie a été réalisé
avant l’intervention, contrairement aux
384 autres patients, opérés d’emblée. Pour
les patients évalués en termes d’ischémie,
74 % avaient un examen négatif, 17 % une
ischémie limitée, 8,8 % une ischémie étendue (≥ 5 segments ou 3 parois ventriculaires
gauches), qui a habituellement conduit à
une coronarographie. En définitive, 12 des
34 patients ayant une ischémie étendue ont
eu une revascularisation myocardique avant
la chirurgie vasculaire (pour 10 patients par
angioplasties, pour 2 patients par pontages
aorto-coronaires, avec une revascularisation
complète dans 50 % des cas). Le critère de
jugement comprenait la mortalité cardiaque et les IDM au cours des 30 jours
suivant l’intervention vasculaire.
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L’incidence de ces complications est identique pour les deux groupes de patients :
1,8 % en l’absence de test d’ischémie, 2,3 %
pour les patients explorés (voire revascularisés) avant chirurgie vasculaire (p = 0,62).
La stratégie consistant à opérer les patients
sans test préalable a permis de réaliser l’intervention 19 jours plus tôt en moyenne ;
un patient est décédé après une revascularisation coronaire d’une rupture d’anévrysme
aortique avant l’opération prévue.
Pour la totalité des patients à risque intermédiaire, un bon contrôle de la fréquence
cardiaque (FC) sous bêtabloquant diminue
significativement l’incidence des complications : en cas de FC < 65/mn, 1,3 %, contre
5,2 % pour les autres patients (p = 0,003).
COMMENTAIRES
Les recommandations américaines (2002)
nous proposent d’explorer les patients à risque intermédiaire avant une chirurgie non
cardiaque à haut risque pour détecter les sujets
menacés par une ischémie myocardique. Cette
attitude peut différer le geste chirurgical, et le
bénéfice d’une éventuelle revascularisation
myocardique précédant la chirurgie non cardiaque reste discuté (étude CARP 2004).
Les résultats de DECREASE-II sont à ce point
de vue intéressants : aucune différence significative concernant la mortalité cardiaque et
la constitution d’IDM postopératoires n’est
démontrée entre le groupe des patients explorés – et éventuellement revascularisés (12 patients
sur 386 patients ayant eu un test de provocation
d’ischémie) – et le groupe des patients confiés
au chirurgien sans test préalable. En revanche, pour les sujets de l’étude, tous sous bêtabloquants, l’incidence des complications est
réduite significativement pour les patients les
mieux “bêtabloqués” (FC < 65/mn).
Enfin, l’attitude consistant à explorer les
patients avant la chirurgie vasculaire retarde
le geste opératoire (le problème spécifique
du traitement antiagrégant aspirine + clopidogrel en cas de revascularisation par stent
n’étant pas abordé ici).
Sans doute est-il raisonnable de réserver
les tests de provocation d’ischémie aux
patients présentant au moins trois facteurs de risque (on retrouve les données
de la première étude DECREASE [2001],
dans laquelle seul un petit sous-groupe de
patients à haut risque – 2 % de la population
étudiée – n’était pas protégé par les bêtabloquants) et d’insister sur la réalité du
contrôle de la FC par les bêtabloquants,
qui autorise ici une réduction significative
des complications péri-opératoires.
BIBLIOGRAPHIE
Les 12 références comprennent les recommandations américaines (Circulation 2002;
105:1257-67), l’étude DECREASE 2001
(JAMA 2001;285:1865-73) et l’étude CARP
(N Engl J Med 2004;351:2795-804).
L’éditorial associé de K.A. Eagle (premier
auteur des recommandations américaines)
et W.C. Lau tempère les conclusions de
DECREASE-II : Any need for preoperative
cardiac testing in intermediate-risk patients
with tight beta-adrenergic blockade?” J Am
Coll Cardiol 2006; 48:970-2.
À lire les récentes recommandations sur les
bêtabloquants en préopératoire (J Am Coll
Cardiol 2006;47:2343-55).
MOTS-CLéS
Chirurgie vasculaire - Risque chirurgical Bêtabloquants - Tests de provocation d’ischémie - Revascularisation myocardique.
TIRéS À PART
Dr D. Poldermans, Room H921, Department
of Anesthesiology, Erasmus Medical Center,
3015 GD Rotterdam, the Netherlands.
E-mail : [email protected]
C. Adams,
service de cardiologie, CH Argenteuil
La Lettre du Cardiologue - n° 402 - février 2007
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