ACTUALITÉS ASCO 2008 Les antiangiogéniques V. Boige*, G. El Maalouf** L’ existence d’une hypervascularisation au sein des tumeurs est connue depuis plus d’un siècle, et celle de facteurs stimulant la croissance vasculaire et permettant la mise en place d’une néovascularisation au sein d’une tumeur l’est depuis plus de soixante ans. Le premier à soulever l’hypothèse que l’angiogenèse pourrait être un processus indispensable au développement des tumeurs a été Judah Folkman, en 1971. La deuxième étape importante a été la découverte puis le clonage du vascular endothelial growth factor (VEGF), facteur clé de l’angio­genèse, au début des années 1990. Depuis, la recherche sur l’angiogenèse et les antiangiogéniques s’est accélérée et a permis la mise au point récente de molécules appartenant à une nouvelle classe de traitements, celle des antiangiogéniques. Actuellement, plus de 60 molécules antiangiogéniques sont en cours d’expérimentation, dans la grande majorité des cas dans le cadre de thérapies antitumorales. Certaines molécules ciblant le VEGF ou ses récepteurs sont déjà utilisées en pratique clinique dans le cadre d’une AMM (bévacizumab, sunitinib, sorafénib), d’autres sont en cours de développement dans le cadre d’essais cliniques. Depuis plusieurs années, les thérapies moléculaires ciblées, notamment les antiangiogéniques, font l’objet d’une recherche clinique et translationnelle très riche. Cette revue a pour but de synthétiser les principaux résultats cliniques présentés à l’ASCO 2008 sur les différents antiangiogéniques, et, plus particulièrement, le sunitinib et l’axitinib. Rappel sur les principaux antiangiogéniques et leurs mécanismes d’action Plusieurs mécanismes d’action des médicaments antiangiogéniques permettent d’aboutir à une diminution de l’angiogenèse tumorale, associée ou non à un effet antiprolifératif direct sur les cellules tumorales dans le cas des inhibiteurs multicibles. Les principaux inhibiteurs de l’angiogenèse ciblent le VEGF ou son récepteur (VEGFR) [figure]. ➤➤ Le bévacizumab (Avastin®) est un anticorps anti-VEGF obtenu par l’humanisation de l’anticorps (Ac) Mab A.4.6.1 qui avait montré des propriétés d’inhi­bition sur des lignées cellulaires tumorales humaines introduites chez des souris nude. Cet Ac fixe et neutralise toutes les isoformes du VEGF-A et ses fragments protéolytiques actifs, mais ne reconnaît pas les VEGF-B et C. Sa demi-vie est de 17 à 21 jours. Le bévacizumab inhibe la croissance de cellules tumorales chez la souris in vivo, avec un effet maximal à la dose de 1-2 mg/­kg x 2/­sem. Les indications faisant l’objet d’une AMM sont le cancer colorectal, le cancer du poumon non à petites cellules (CPNPC), le cancer du sein métastatique en première ligne en association avec la chimiothérapie, et le cancer du rein en association avec l’interféron. * Département de médecine, institut Gustave-Roussy, Villejuif. ** Service interhospitalier de cancé­ rologie Bichat-Beaujon, Clichy. Récepteurs du VEGF EGF, PDGF, bFGF, IGF-1, VHL, IL-6, IL-8, H2O2, COX-2 Hypoxie, NO, oncogènes VEGFR-1 soluble VEGF-B VEGF-C VEGF-A VEGF-D Cellule endothéliale sanguine VEGFR-1 Leurre : détourne le VEGF-A du VEGFR-2 Induction de MMP9 et facteurs de croissance VEGFR-2 Angiogenèse Prolifération Migration Survie Perméabilité VEGFR-3 VEGF TRAP Ac anti-VEGF (bévacizumab) Ac anti-VEGFR2 Inhibiteur de tyrosine kinase Cellule endothéliale lymphatique Lymphoangiogenèse Prolifération Migration Survie Figure. Principaux mécanismes d’action des antiangiogéniques. La Lettre du Cancérologue • Supplément 5 au n° 7 - Vol. XVII - septembre 2008 | 3 ACTUALITÉS ASCO 2008 Les antiangiogéniques ➤➤ Le sunitinib malate (Sutent®) ou SU11248 est un inhibiteur multicible inhibant à la fois VEGFR-1, VEGFR-2, VEGFR-3, FLT3, Kit, PDGFR-β et PDGFR-α. Il s’administre per os. In vivo, le sunitinib provoque une diminution de la densité microvasculaire, une prévention de la néo-vascularisation et une diminution de la formation de métastases pulmonaires dans un modèle de cancer du poumon chez la souris. Il a obtenu en 2006 l’AMM dans le cancer du rein avancé et/ou métastatique et dans les gastrointestinal stromal tumors (GIST) résistantes ou intolérantes à l’imatinib. ➤➤ Le sorafénib (Nexavar®) ou BAY 43-9006 inhibe également plusieurs kinases pro-angiogéniques, mais aussi la voie de signalisation Raf/­Ras/­Erk. Il a en effet été démontré un effet inhibiteur de Raf-1 associé à un effet antiprolifératif sur des lignées de cellules tumorales in vitro et in vivo dans des modèles de xénogreffes de tumeurs humaines. Il a également été montré que cette molécule pouvait inhiber VEGFR-2, PDGFR-β ou VEGFR-3. Cet inhibiteur de tyrosines kinases multicible, comme le sunitinib, s’administre per os. L’AMM du sorafénib a été accordée dans le cancer du rein métastatique en deuxième ligne et, plus récemment, dans le carcinome hépatocellulaire (CHC) en première ligne de traitement systémique. ➤➤ L’axitinib ou AG-013736 inhibe tous les sous-types de VEGFR, PDGFR-β et c-kit. In vitro, l’AG-013736 bloque de façon sélective l’autophosphorylation des récepteurs activés par le VEGF, ce qui aboutit à une inhibition de la prolifération des cellules endothéliales et de la survie de ces cellules. Cela est associé à une diminution de la densité tumorale en microvaisseaux et à une augmentation de la nécrose tumorale dans des modèles de xénogreffes de tumeurs humaines chez la souris. L’axitinib est actuellement en essai clinique dans plusieurs types de tumeurs solides, comme le cancer du rein, du pancréas et le mélanome. Principaux résultats des antiangiogéniques à l’ASCO 2008 Les résultats de plusieurs grands essais de phase III très attendus testant l’efficacité des principaux antiangiogéniques déjà disponibles dans plusieurs pathologies, en association ou non à une chimiothérapie cytotoxique, ont été rapportés. En ce qui concerne le bévacizumab, les résultats de l’essai AVADO testant l’association docétaxel/­ 4 | La Lettre du Cancérologue • Supplément 5 au n° 7 - Vol. XVII - septembre 2008 bévacizumab versus docétaxel/­placebo en première ligne métastatique dans le cancer du sein montrent un bénéfice statistiquement significatif de ce traitement par rapport au docétaxel seul, à la fois en termes de taux de réponse objective (RO), et de survie sans progression (SSP). Les résultats en termes de survie globale (SG) ne sont toutefois pas encore disponibles (1). La mise à jour de l’essai AVOREN comparant un traitement combiné par interféron/bévacizumab versus interféron seul en première ligne métastatique dans le cancer du rein confirme le bénéfice apporté par le bévacizumab en termes de SSP, quel que soit le sous-type histologique de la tumeur, et ce indépendamment du taux sérique de base du VEGF, de la fonction rénale, de l’apparition ou non d’une HTA ou d’une protéinurie (2). Notons que l’asso­c iation du bévacizumab au sorafénib, moyennant une réduction de posologie de ce dernier compte tenu d’une surtoxicité, notamment cutanée, a des résultats encourageants en termes de taux de réponse et de SSP dans cette même pathologie (3). Les résultats d’une deuxième étude de phase III, CAIRO 2, confirment l’effet délétère de la combinaison de deux classes d’anticorps, le bévacizumab et le cétuximab et, plus généralement, des anticorps dirigés contre le récepteur à l’EGF, en association à une chimiothérapie dans le traitement de première ligne du cancer colorectal métastatique, comme l’avait précédemment montré l’essai PACCE avec le panitumumab (4). Cet effet délétère sur la SSP n’est pas le résultat d’un arrêt prématuré du traitement pour surtoxicité, et demeure actuellement non élucidé. La grande déception vient une fois de plus du cancer du pancréas, avec les résultats négatifs de l’étude de phase III AVITA comparant une trithérapie par bévacizumab/gemcitabine/erlotinib à une bithérapie par gemcitabine/erlotinib/placebo en première ligne métastatique (5). En effet, en dépit d’une meilleure SSP en faveur du traitement par bévacizumab (4,6 mois versus 3,6 mois), la SG n’était pas significativement différente entre les deux bras (7,1 mois versus 6 mois). Enfin, l’effet bénéfique du sorafénib sur la SSP et la SG chez les patients atteints d’un CHC inopérable est confirmé par une seconde étude de phase III asiatique comparant sorafénib et placebo et ayant inclus 226 patients avec CHC et cirrhose compensée (score Child-Pugh A) : les résultats sont très proches de ceux rapportés dans la première étude présentée à l’ASCO 2007 en séance plénière (6). ACTUALITÉS ASCO 2008 Principaux résultats cliniques du sunitinib et de l’axitinib Sunitinib ◆◆ Données de survie globale dans le cancer du rein Une mise à jour des données relatives à la survie dans l’essai de phase III comparant le sunitinib à l’inter­ féron-α (IFNα) en première ligne de traitement du cancer du rein métastatique a été communiquée (7). L’analyse des 750 patients inclus a confirmé la supériorité du sunitinib en termes de taux de RO (47 % versus 12 % ; p < 0,000001) et de SSP (11 mois versus 5 mois ; p < 0,000001). Les principales toxicités sévères du sunitinib étaient l’HTA (12 %), la fatigue (11 %), la diarrhée (8 %) et le syndrome mains-pieds (8 %). La médiane de SG était supérieure à 2 ans dans le bras sunitinib (26,4 mois), versus 21,8 mois dans le bras IFN (p = 0,051), et 20 mois si l’on exclut du bras IFN les patients ayant bénéficié d’un ­cross­over (p = 0,0362). Dans le sous-groupe des patients n’ayant reçu que le traitement protocolaire, la survie médiane était de 28,1 mois dans le bras sunitinib, versus 14,1 mois dans le bras IFN (p = 0,0033). ◆◆ Tolérance du sunitinib chez les patients ayant des métastases cérébrales Une étude internationale a été menée spécifiquement chez des malades inéligibles pour un essai thérapeutique en raison de l’existence de métastases cérébrales asymptomatiques et qui ont été traités par sunitinib à dose normale (50 mg/­j 4 semaines sur 6) [8]. Il s’agissait de 298 patients, dont 77 % étaient prétraités par cytokines. Avec une durée médiane de traitement de 4,3 mois, le profil de tolérance n’était pas différent de celui constaté chez les patients sans métastases cérébrales. Un seul patient a présenté un épisode d’hémorragie cérébrale de grade 1/­2. Une réponse partielle (RP) et une stabilisation des métastases cérébrales supérieure à 3 mois ont été observées chez 11 % et 51 % des patients, respectivement. La médiane de SSP était de 5,6 mois et 5,3 mois chez les patients ayant ou n’ayant pas reçu de traitement antérieur par cytokine, respectivement. Cette étude, bien que non randomisée, apporte donc des arguments plutôt en faveur d’une certaine efficacité du sunitinib dans cette population de mauvais pronostic, sans surtoxicité évidente. ◆◆ Données relatives à la tolérance à long terme du sunitinib Les données de tolérance d’un traitement par sunitinib à long terme (> 6 mois) ont été rapportées chez 2 084 des 4 616 patients traités en première et deuxième lignes thérapeutiques pour un cancer rénal métastatique (9). Un événement indésirable sévère lié au traitement a été observé chez 39 % des patients traités à long terme versus 12 % des 1 913 patients traités moins de 6 mois, mais seuls 8 % ont dû interrompre le traitement pour toxicité, versus 13 % dans le groupe traité à court terme, ce qui suggère l’absence de toxicité cumulative sévère, en particulier cardiovasculaire, présente chez moins de 1 % des patients dans les 2 groupes. ◆◆ Données d’efficacité chez les patients ayant une GIST prétraitée par imatinib Les résultats d’efficacité et de tolérance du sunitinib administré à la dose de 50 mg/­j 4 semaines sur 6 à une cohorte de 1 091 patients atteints d’une GIST après échec d’un premier traitement par imatinib ont été rapportés (10). La médiane de temps jusqu’à progression (TTP) était de 37 semaines, et la médiane de SG de 73 semaines. Cette dernière différait en fonction des doses d’imatinib précédemment administrées en première ligne (93 semaines en cas de dose < 400 mg/­j versus 34 semaines en cas de dose > 800 mg/­j) et de la cause de l’arrêt du traitement par imatinib (122 semaines en cas d’arrêt pour intolérance, 60 semaines en cas de progression tumorale après moins de 6 mois d’imatinib, versus 73 semaines en cas de progression tumorale après plus de 6 mois d’imatinib). Les principales toxicités de grade 3/­4 étaient une asthénie (10 %), des douleurs abdominales (10 %), un syndrome mains-pieds (9 %), une anémie (8 %), une neutropénie (8 %), et une thrombopénie (5 %). Une hypothyroïdie, tous grades confondus, a été rapportée chez 7 % des patients, et une HTA chez 23 % d’entre eux (dont 6 % de grade 3/­4). Une insuffisance cardiaque a été observée dans moins de 0,5 % des cas. Au total, ces données sont comparables à celles obtenues chez les patients inclus dans les essais thérapeutiques. ◆◆ Données d’efficacité en cas de sarcomes des tissus mous non GIST Une étude de phase II a évalué l’efficacité du sunitinib en administration continue de 37,5 mg/­j chez des patients atteints de sarcomes des tissus mous non GIST répartis en 2 groupes histologiques en fonction du caractère sensible connu (groupe A, n = 20) ou non (groupe B, n = 21) aux inhibiteurs de thyrosine kinases (11). Sur un total de 39 patients évaluables, 3 patients du groupe A et 4 patients du groupe B ont eu une maladie stabilisée plus de 16 semaines, et un patient du groupe B porteur La Lettre du Cancérologue • Supplément 5 au n° 7 - Vol. XVII - septembre 2008 | 5 ACTUALITÉS ASCO 2008 Les antiangiogéniques d’une tumeur desmoplastique à petites cellules rondes a présenté une RP confirmée et durable. D’autres études devront bien sûr confirmer ces données encourageantes. ◆◆ Pharmacocinétique et marqueurs prédictifs clinico-biologiques Une grande étude pharmacocinétique portant sur le sunitinib, réalisée à partir de 12 études occidentales et de 2 études japonaises, et incluant des volontaires sains, des patients atteints de GIST, de cancer du rein, d’autres tumeurs solides ou de leucémies myéloïdes chroniques (LMC), montre une demi-vie de la molécule et de son métabolite, le SU012662, de 69 et 80 heures, respectivement (12). Contrairement à l’état général, au poids, et à la clairance rénale, la présence d’une tumeur solide était le principal facteur de variation de la clairance, celle-ci pouvant être diminuée de 26 % à 29 %, quel que soit le type de tumeur. La clairance est diminuée de 12 % et 13 % chez les Asiatiques, et de 9 % et 26 % chez les femmes occidentales et asiatiques pour le sunitinib et son métabolite, respectivement, ce dont résultent de faibles changements en termes d’ASC et de Cmax. Aucun de ces facteurs ne doit donc faire adapter la posologie. Des anomalies biologiques de la fonction thyroïdienne sont fréquemment observées sous sunitinib, sans que les mécanismes physiopathologiques en soient élucidés. Après l’évaluation prospective de la biologie thyroïdienne de 40 patients traités à la dose de 50 mg/­j pour un cancer du rein métastatique, des anomalies ont été constatées chez 28 d’entre eux (70 %), dont 13 (32,5 %) présentaient une hypothyroïdie symptomatique nécessitant un traitement substitutif (13). Les médianes de SSP et de SG des 12 patients sans anomalies du bilan thyroïdien étaient de 3,6 mois et 6,6 mois, versus 10,3 mois et 18,2 mois chez les 28 autres (p = 0,047 et p = 0,13, respectivement). L’apparition d’une hypothyroïdie biologique pourrait donc être un facteur prédictif de l’efficacité du traitement, mais cela mérite d’être confirmé de manière prospective chez un plus grand nombre de patients. Des biomarqueurs prédictifs de l’efficacité du sunitinib ont été identifiés chez des patients atteints de CHC traités dans le cadre d’un essai de phase II (14). À l’issue du premier cycle, une augmentation du taux de VEGF-A (3 fois le taux de base en moyenne) et une diminution du taux de VEGFR-2, -3 et de KIT solubles de 50 %, 70 % et 30 % respectivement étaient observés. Un taux préthérapeutique élevé de VEGF-C (> 822 pg/­ml) était corrélé à un TTP et 6 | La Lettre du Cancérologue • Supplément 5 au n° 7 - Vol. XVII - septembre 2008 à une SG plus longs (TTP, p = 0,004 ; SG, p = 0,05). La baisse de KIT soluble à J14 était aussi prédictive d’un TTP plus long (p = 0,018), d’une réponse évaluée selon les critères de Choi (p = 0,012), et d’un volume de nécrose plus important (p = 0,02). La baisse du VEGFR-3 soluble était également prédictive de la réponse (p = 0,005). L’augmentation du VEGF-A (p = 0,03) et la baisse du VEGFR-2 soluble (p = 0,036) étaient aussi prédictives de la nécrose tumorale. Si elles se voient confirmées sur d’autres populations et d’autres types tumoraux, ces données biologiques pronostiques et prédictives permettront probablement d’identifier, à terme, les patients qui bénéficient le plus d’un traitement par sunitinib. Axitinib L’axitinib est actuellement développé dans le cancer du rein, du pancréas, de la thyroïde, le cancer bronchique et le mélanome. ◆◆ Données d’efficacité en cas de cancer du rein après échec d’une première ligne de traitement antiangiogénique Une étude de phase II a testé cette molécule à la dose de 5 mg x 2/­j, augmentée jusqu’à 10 mg x 2/­j en fonction de la tolérance, sur des patients atteints de cancer du rein métastatique après échec d’un traitement par sorafénib et sunitinib (n = 14), par sorafénib et cytokines (n = 29), ou par sorafénib seul (n = 15) [15]. Pour chacun des groupes, le taux de RO était de 7 %, 28 % et 27 %, et la SSP de 7,1 mois, 9 mois et 7,7 mois, respectivement. Les principaux effets indésirables sévères étaient l’asthénie (13 %), l’HTA (11 %), le syndrome mains-pieds (11 %), la diarrhée (5 %) et la dyspnée (5 %). La posologie a pu être augmentée de 5 à 10 mg x 2/­j pour 57 % des patients et a dû être diminuée pour 15,5 % d’entre eux. Ces résultats sont en faveur de l’absence de résistance croisée entre l’axitinib, d’une part, et le sorafénib ou le sunitinib, d’autre part. Une étude de phase III est prévue pour les patients réfractaires aux traitements de première ligne dans le cancer du rein métastatique. ◆◆ Données d’efficacité dans le mélanome métastatique Une étude de phase II a également été menée dans le mélanome métastatique sur 32 patients non prétraités ou n’ayant reçu qu’une seule ligne de traitement à la dose de 5 mg x 2/­j (16). Le même ACTUALITÉS ASCO 2008 profil de tolérance que celui de l’étude précitée a été observé, avec comme principales toxicités une asthénie (62,5 %), une HTA (43,8 %), une dysphonie (34,4 %) et une diarrhée (31,3 %). Un cas de décès toxique à la suite d’une perforation digestive a été rapporté. Le taux de réponse évaluée par les critères RECIST était de 15,6 %, avec une durée de réponse allant de 2,3 mois à 10,2 mois. La médiane de SSP était de 2,3 mois, et la SG de 6,8 mois. Un facteur pronostique simple permettait dans cette étude de séparer deux groupes de patients en fonction de la tension artérielle (TA) diastolique sous traitement : la SG des patients avec au moins une mesure de la TA diastolique supérieure ou égale à 90 mmHg était de 13 mois, alors qu’elle n’était que de 6,2 mois chez les patients avec TA diastolique inférieure à 90 mmHg. Sur un plan plus biologique, une diminution du VEGFR-2 et du VEGFR-3 solubles ainsi qu’une augmentation du VEGF sérique étaient observées sous traitement. Les études ultérieures devront confirmer le bénéfice de cette molécule en fonction de ces éléments. ◆◆ Facteurs prédictifs de réponse au traitement La valeur pronostique et prédictive de la TA diastolique a fait l’objet d’une étude spécifique transversale rétrospective réalisée à partir des résultats de 6 études de phase II évaluant l’efficacité antitumorale de l’axitinib à la dose de 5 mg x 2/­j sur 307 patients traités pour un mélanome (n = 32), un cancer du pancréas (n = 69), du rein (n = 52), de la thyroïde (n = 60) ou du poumon non à petites cellules (n = 32) [17]. Une mesure de la TA était effectuée au moins toutes les 4 semaines. Cent cinquante-huit des 298 patients évaluables (51,5 %) ont eu au moins une fois une TA diastolique ≥ 90 mmHg. La SG était augmentée dans les 6 études chez les patients avec une valeur de TA diastolique ≥ 90 mmHg constatée au moins une fois, comparée à celle des patients dont la TA diastolique était constamment inférieure à 90 mmHg (globalement 22,2 mois versus 9,1 mois) ; la survie était plus que double dans le cas du cancer du pancréas (13 mois versus 5,6 mois) et du mélanome (13 mois versus 6,4 mois). L’analyse poolée des 6 études selon un modèle de Cox montre un hazard-ratio (HR) de 0,493 (p < 0,001), et l’analyse séparée de chacune des études montre une différence de survie significative uniquement dans la population de patients atteints du cancer du rein, mais les effectifs étaient faibles. En termes de taux de RO, la différence était également globalement significative, en faveur des patients avec HTA diastolique (36,1 % versus 7,9 % ; p < 0,001), surtout en cas de cancer du rein. Au total, l’évolution de la TA diastolique sous traitement par axitinib semble être un facteur prédictif et pronostique pertinent, qui mérite toutefois d’être confirmé comme tel dans de futures études de phase III. Conclusion L’ASCO 2008 confirme l’intérêt et l’importance des antiangiogéniques dans la stratégie thérapeutique de plusieurs types de pathologies cancéreuses. Plusieurs nouvelles molécules sont en cours d’évaluation et semblent prometteuses en raison de l’absence de résistance croisée avec les antiangiogéniques de première génération. De gros efforts restent à faire pour notamment : ➤➤ augmenter la pertinence des critères d’efficacité de ces molécules, puisque les critères RECIST sont généralement peu adaptés aux traitements antiangiogéniques, qui peuvent provoquer une nécrose tumorale sans que le volume tumoral à l’imagerie soit diminué de façon significative. Des méthodes d’imagerie fonctionnelle sont à l’étude pour permettre d’évaluer plus finement les effets précoces des antiangiogéniques sur la vascularisation des tumeurs ; ➤➤ mettre en évidence des facteurs prédictifs clinicobiologiques d’efficacité de ces molécules adaptés aux mécanismes d’action et au comportement biologique de la tumeur ; ➤➤ approfondir les connaissances sur la physiopathologie des effets indésirables spécifiques de ces traitements pour mieux les soigner et les prévenir ; ➤➤ connaître les mécanismes de résistance grâce notamment à la réalisation systématique de prélèvements biopsiques séquentiels de la tumeur. La Lettre du Cancérologue • Supplément 5 au n° 7 - Vol. XVII - septembre 2008 | 7 ACTUALITÉS ASCO 2008 Les antiangiogéniques Références bibliographiques 1. Miles D, Chan A, Romieu G et al. 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