Figure 1. Étude ATAC (suivi de 47 mois). Probabilité de premier évé-
nement dans la population RE+.
L
e dernier congrès de San Antonio, en décembre 2002,
a sans doute constitué un tournant dans les concepts,
qui devrait alimenter les débats de la prochaine réunion
de Saint-Gall sur les traitements adjuvants ; notamment en ce qui
concerne, l’hormonothérapie en postménopause, avec les résul-
tats actualisés de l’étude ATAC, mais aussi en préménopause
avec ceux de l’étude ZEBRA, ou encore avec l’accumulation des
données en faveur de la résistance au tamoxifène, ou tout au
moins d’une efficacité supérieure des anti-aromatases dans les
formes RO positives surexprimant HER2. Les associations hor-
monothérapie-chimiothérapie dans les formes sans atteinte gan-
glionnaire et, au plan de la chimiothérapie, la démonstration de
l’intérêt des schémas dose-dense, la nécessité pour les formes sur-
exprimant HER2 de limiter les doses cumulatives d’anthracy-
clines afin de diminuer les risques d’insuffisance cardiaque lors
d’une utilisation ultérieure éventuelle de trastuzumab (en adju-
vant ou en métastatique) seront également à l’ordre du jour.
HORMONOTHÉRAPIE
Le thème récurrent fort a été celui des progrès
dans la compréhension des mécanismes
de l’hormonorésistance et de l’implication des récepteurs
des facteurs de croissance membranaires
Pour améliorer les traitements, il est absolument nécessaire de
progresser dans la connaissance des différentes voies de signali-
sation des messages de prolifération. Il apparaît maintenant
absurde de considérer la signalisation par la voie des récepteurs
hormonaux comme étant isolée de la complexité biologique de
la cellule cancéreuse. Robert Nicholson, lors de la première ses-
sion plénière, a démontré, grâce aux modèles précliniques, que
la voie de signalisation dépendant des facteurs de croissance
(hérégulines, EGF, IGF) est un mécanisme essentiel de l’échec
des traitements hormonaux. Dans les phénomènes d’hormono-
résistance primaire ou acquise, ces voies de signalisation sem-
blent jouer un rôle majeur par des mécanismes de cross-talks
(dépendant de phosphorylations parallèles). Cela devrait modi-
fier radicalement certains concepts thérapeutiques et ouvrir le
champ d’application du ciblage combiné de différents récepteurs
membranaires (et hormonaux ?), véritable révolution de cette
première décennie du XXIesiècle.
Actualisation de l’étude ATAC
A. Buzdar a présenté les données actualisées avec une médiane
de 47 mois de l’essai international ATAC, qui a inclus
9366 patientes postménopausées présentant un cancer du sein
invasif traité par chirurgie, radiothérapie ou chimiothérapie et
randomisées en trois bras : anastrozole + placebo tamoxifène,
tamoxifène + placebo anastrozole, anastrozole + tamoxifène. La
plus grande efficacité de l’anastrozole par rapport au tamoxifène
se maintient par rapport aux données publiées dans The Lancet
l’année dernière (1), avec une augmentation des différences
absolues avec le temps (tableau I et figure 1).
MISE AU POINT
De San Antonio à Saint-Gall
P. Beuzeboc*, J. Gligorov**
5
La Lettre du Cancérologue - Volume XII - no1 - janvier-février 2003
* Service d’oncologie, Institut Curie, 26, rue d’Ulm, 75231 Paris Cedex 5.
** Service d’oncologie, hôpital Tenon, 4, rue de la Chine, 75020 Paris.
01224
Tamoxifène
36 48 54 Mois
0
5
10
15
20
Anastrozole
Différence
absolue : 2,9 %
Différence
absolue : 1,7 %
Probabilité de 1
er
événement
Tableau I. Données de l’essai ATAC avec une médiane de 47 mois.
Anastrozole Tamoxifène Anastrozole
Traitement + tamoxifène
(n = 3 125) (n = 3 116) (n = 3 125)
1er événement 413 472 488
Locorégional 84 101 107
Métastatique 195 222 246
Controlatéral invasif 20 35 30
Controlatéral /CIS 5 5 5
Par rapport au tamoxifène, l’anastrozole élimine le risque de
cancer utérin et entraîne moins de bouffées de chaleur et de
risques thromboemboliques. En revanche, il est responsable
de modifications des lipides, d’arthralgies et, surtout, d’une
ostéopénie plus marquée. Celle-ci peut être prévenue par une
injection tous les 6 mois de 4 mg de zolédronate, comme l’a
bien montré l’étude de Gnant (2) chez des patientes prémé-
nopausées traitées par goséréline plus tamoxifène ou létro-
zole.
Le létrozole est supérieur au tamoxifène
en première ligne d’hormonothérapie après ajustement
à la masse tumorale et à l’oncoprotéine circulante
HER2/neu
C’est une des premières conclusions rapportées par Leitzel
et al. (3), qui ont comparé les marqueurs sériques (ACE, CA
15.3, HER2/neu) et les classiques variables cliniques prédic-
tives d’un bénéfice clinique dans une étude de 907 patientes
en première ligne métastatique. Le létrozole à la dose de
2,5 mg/jour entraîne un taux de réponse et un bénéfice clinique
significativement plus élevés, ainsi qu’un allongement du
temps jusqu’à progression par rapport au tamoxifène
(20 mg/jour).
Lipton et al. ont rapporté l’année dernière, dans le Journal of
Clinical Oncology (4), que des taux sériques élevés d’HER2
étaient prédictifs d’une diminution des réponses à l’hormo-
nothérapie dans le cancer du sein métastatique dans une étude
de 719 patientes postménopausées ayant participé à trois
essais de deuxième ligne d’hormonothérapie (deux compa-
raient une anti-aromatase à de l’acétate de mégestrol). Leurs
données corroboraient les conclusions de plusieurs études
rétrospectives où l’absence d’hormonosensibilité clinique
était corrélée à la surexpression d’HER2 (5-8). Berry (9) a en
revanche retrouvé, dans une analyse rétrospective de l’essai
CALGB 8541 comparant trois schémas de dose de FAC adju-
vant dans des cancers du sein N+, le même bénéfice du
tamoxifène pour les populations RO+ que la tumeur présente
ou non une surexpresion d’HER2. Cette étude rétrospective
était criticable, car non randomisée quant au choix d’une hor-
monothérapie adjuvante par tamoxifène, qui avait été laissée
à l’appréciation des investigateurs, variant dans le temps et
dans son introduction.
Les travaux d’Ellis (10) ont montré, en néoadjuvant, la supério-
rité du létrozole sur le tamoxifène pour les tumeurs surexprimant
HER1 ou HER2.
Tous ces résultats sont en concordance avec les données précli-
niques, en particulier celles rapportées par l’équipe du MD Ander-
son (voir Massarweh, p. 10) montrant l’inefficacité du tamoxi-
fène quand la voie d’HER2 est activée par des phénomènes de
cross-talks.
En faut-il plus pour prendre la décision de ne plus utiliser le
tamoxifène pour les populations RO+ HER2+ et de privilégier
une anti-aromatase chez les patientes postménopausées, alors
que s’accumulent les preuves d’une inefficacité relative dans
cette situation, ou tout au moins d’une efficacité inférieure à celle
des anti-aromatases ?
COMPARAISON CHIMIOTHÉRAPIE VERSUS
HORMONOTHÉRAPIE
Actualisation de l’étude ZEBRA
(Zoladex Early Breast Cancer Research Association study)
Jonat et al. (11) viennent de publier, dans le Journal of Clinical
Oncology, les données de l’étude ZEBRA comparant, chez les
patientes préménopausées N+, goséréline 3,6 mg/28 jours pen-
dant 2 ans (817 patientes) à 6 mois de CMF (823 patientes). Pour
la population RO + (représentant 74 % des patientes de l’essai),
la goséréline s’est révélée équivalente au CMF en ce qui concerne
à la fois la survie sans récidive (HR : 1,01, IC 95 % : 0,4-1,20)
et la survie globale (figure 2). Il faut relever qu’une aménorrhée
définitive a été rapportée chez 70 % des patientes traitées par
CMF.
Dans le même numéro du Journal of Clinical Oncology,
Jakesz et al. (12) ont publié les résultats d’une étude contrôlée
(1 034 patientes RO+ ou RP+) comparant goséréline 3 ans et
tamoxifène 5 ans à 6 cycles de CMF. Celle-ci montre la supé-
riorité du traitement hormonal, avec un suivi médian de 60 mois,
en termes de survie sans récidive (p = 0,037) et de survie sans
récidive locale (p = 0,015), sans bénéfice significatif en termes
de survie globale (p = 0,195).
ASSOCIATION CHIMIOTHÉRAPIE ET HORMONOTHÉRAPIE
ADJUVANTE POUR DES TUMEURS SANS ATTEINTE GAN-
GLIONNAIRE
Les résultats de deux études de l’International Breast Cancer
Study Group (IBCSG) ont été présentés (13). Dans l’IBCSG
VIII, 1 063 patientes en pré- ou périménopause ont été randomi-
sées entre goséréline 24 mois, 6 CMF “classiques” ou 6 CMF sui-
vis de 18 mois de goséréline.
Dans l’IBCSG IX, 1669 patientes postménopausées ont été incluses
et traitées soit par tamoxifène seul 5 ans, soit par 6 CMF suivis de
57 mois de tamoxifène. Avec un recul médian de 5,7 ans pour le
premier groupe et de 6 ans pour le second, pour les populations
RO+, il n’a pas été retrouvé de bénéfice significatif de l’addition
MISE AU POINT
6
La Lettre du Cancérologue - Volume XII - no1 - janvier-février 2003
Figure 2. Étude ZEBRA. Analyse (Kaplan-Meier) de la survie sans
récidive des patientes N+.
0123
Survie sans récidive (années)
45678910
0
0,1
0,2
0,3
0,4
0,5
0,6
0,7
0,8
0,9
1
Goséréline
CMF
d’une chimiothérapie à l’hormonothérapie, comme le montrent les
courbes de survie sans récidive ci-jointes (figures 3 et 4).
En actualisant les résultats de l’étude NSABP 20, Fisher (14) a
montré qu’une chimiothérapie à base de CMF associé au tamoxi-
fène n’apportait pas de bénéfice par rapport au tamoxifène seul
chez les patientes âgées de plus de 60 ans ou ménopausées pré-
sentant des récepteurs hormonaux positifs (figure 5).
LA CHIMIOTHÉRAPIE
Place des anthracyclines
Évidemment, l’une des principales critiques adressées à tous ces
essais concerne le fait qu’une chimiothérapie sans anthracycline
comme le CMF n’est pas optimale. Levine et al. (15) ont bien
montré le bénéfice conservé à 10 ans en termes de survie globale
(p = 0,047) d’un schéma CEF (cyclophosphamide 75 mg/m2J1
à J14, épirubicine 60 mg/m2J1 et J8, 5-fluoro-uracile 500 mg/m2
J1 et J8) par rapport au CMF classique (cyclophosphamide
100 mg/m2J1 à J14, méthotrexate 40 mg/m2J1 et J8, 5-fluoro-
uracile 600 mg/m2J1 et J8) dans l’étude MA.5 du NCI Canada,
qui concernait une population de femmes préménopausées avec
atteinte ganglionnaire axillaire, comme le montre la figure 6.
Mais, d’une part, il n’est pas certain que ce bénéfice existe pour
des patientes postménopausées, ou du moins de plus de 60 ans,
sans atteinte ganglionnaire, avec une tumeur hormonodépendante
exprimant des RH. Par ailleurs, l’association classiquement uti-
lisée en France d’une hormonothérapie par tamoxifène et d’une
chimiothérapie par FEC est-elle supérieure à l’utilisation d’une
anti-aromatase seule ? Avons-nous les moyens de résoudre cette
équation ? Faudra-t-il associer une chimiothérapie à une anti-aro-
matase ? Une réponse rapide se révèle nécessaire dans la pratique,
les morbidités, les coûts ainsi que les conséquences sociales étant
très différents. Nos méthodologies actuelles sont-elles bien adap-
tées ? Il paraît difficile d’envisager de grands essais randomisés
avec des réponses reportées à une dizaine d’années, avec le risque
que celles-ci soient totalement obsolètes étant donné le rythme
auquel évoluent actuellement les connaissances biologiques. De
plus, est-il encore éthique de soumettre autant de patientes à des
traitements dont nous savons qu’ils ne seront utiles, au mieux,
que pour un très faible pourcentage d’entre elles ?
Facteurs prédictifs de chimiosensibilité
L’avenir s’oriente a priori plutôt vers un meilleur ciblage des
populations bénéficiant d’une chimiothérapie. Avant de pouvoir
7
La Lettre du Cancérologue - Volume XII - no1 - janvier-février 2003
Figure 3. Survie sans récidive en fonction des RO de l’étude VIII de
l’International. Breast Cancer Study Group (IBCSG) comparant gosé-
réline seule, CMF ou l’association goséréline et CMF chez les patientes
préménopausées N– (n = 1 063).
02 4 67
Années
Pourcentage
* p = 0,04
40
60
80
100
02 4 67
Années
Pourcentage
* p = 0,39
40
60
80
100
Figure 5. Survie sans récidive de l’étude NSABP 20 comparant, en fonction
de l’âge, tamoxifène seul à CMF plus tamoxifène chez les patientes RH+ N–.
04812
Années
Pourcentage
60
80
70
90
100
60
80
70
90
100
Figure 4. Survie sans récidive de l’étude IX de l’International Breast
Cancer Study Group (IBCSG) comparant CMF suivi de tamoxifène au
tamoxifène seul chez les patientes postménopausées N– avec une tumeur
RO+ (n = 1 217).
02 4 67
Années
Pourcentage
p = 0,05
0
50
100
Survie sans récidive
CMF –> TAM
TAM
02 4 67
Années
Pourcentage
p = 0,07
0
50
100
Survie globale
CMF –> TAM
TAM
49 ans
p = 0,001
CMFT
TAM
Pts
345
354
Evts
102
67
04812
50-59 ans
p = 0,01
CMFT
TAM
Pts
215
208
Evts
65
40
04812
60 ans
p = ,04
CMFT
TAM
Pts
210
204
Evts
63
68
Figure 6. Survie globale. Étude canadienne NCIC CTG MA.5 compa-
rant CMF et CEF chez les patientes préménopausées N+ (n = 710).
05
CEF
10
Années
0
0,4
0,2
0,6
0,8
1
CMF
Pourcentage
p = 0,047
utiliser les progrès de la génomique et de la protéomique (16, 17)
pour nous aider dans cette tâche, disposons-nous de critères de
sélection potentiels ? Jusqu’à présent, il a été impossible de vali-
der des critères prédictifs de chimiosensibilité pouvant être réel-
lement consensuels et utilisables en pratique. Les critères biolo-
giques axés sur la prolifération apparaissaient comme les plus
cohérents et logiques, mais ils ont toujours manqué de sensibi-
lité et de spécificité.
C’est dire toute l’importance de la présentation de N. Harbeck (18)
sur les données regroupées de l’université de Munich et de la
Daniel den Hoed Kliniek de Rotterdam concernant uPA et PAI-
1 comme moyen de décision thérapeutique concernant l’intérêt
d’une chimiothérapie. Ces deux facteurs apparaissent comme les
premiers marqueurs biologiques ayant un intérêt clinique évident
au plus haut niveau d’évidence. Plusieurs essais conduits en
Europe ont confirmé leur intérêt, et il existe des standards de qua-
lité contrôlés pour les tests de mesure de l’uPA/PAI-1 (Elisa) au
niveau de la tumeur primaire. Ils représentent des paramètres
pronostiques pour les patientes n’ayant pas reçu de chimiothéra-
pie adjuvante. À la suite de ses travaux publiés cette année (sur
3 424 patientes), N. Harbeck (19, 20) a rapporté que les patientes
à risque présentant des taux élevés d’uPA/PAI-1 bénéficiaient
plus d’une chimiothérapie que les patientes avec de faibles taux
(ce n’était pas le cas pour une hormonothérapie). Elle a conclu
que les patientes N– avec de faibles taux à la fois d’uPA et de
PAI-1 avaient une probabilité élevée de curabilité par les traite-
ments locorégionaux, avec un taux de survie sans récidive de plus
de 90 %, et qu’il n’y avait que peu ou pas de bénéfice à attendre
d’une chimiothérapie adjuvante dans ces cas (figure7). Ce groupe
à faible risque identifié par uPA et PAI-1 est plus important que
celui caractérisé par les critères de Saint-Gall (21)et cerne mieux
les 70 % de tumeurs N– guérissant par le traitement locorégio-
nal seul. L’application de cette recherche permettrait d’éviter
bon nombre de chimiothérapies adjuvantes inutiles, sans perte de
chance pour les patientes...
MISE AU POINT
8
La Lettre du Cancérologue - Volume XII - no1 - janvier-février 2003
Figure 7. Impact pronostique des 4 différentes combinaisons d’uPA et
de PAI-1 sur la SSR des cancers du sein N– sans traitement systémique
adjuvant.
1,0
0,9
0,8
0,7
0,6
0,5
0,4
0,3
0,2
0,1
0,0
0
Années
uPA et PAI bas
uPA élevé, PAI bas
uPA bas, PAI élevé
uPA et PAI élevés
Survie sans récidive
p < 0,001
12345678910111213
Figure 8. Schéma de l’étude dose-densité CALGB 9741 INT C9741
d’une chimiothérapie adjuvante séquentielle ou concomitante chez
des patientes N+. A : adriamycine 60 mg/m
2
; C : cyclophosphamide
600 mg/m
2
; T : Taxol
®
175 mg/m
2
.
Supériorité des schémas dose-denses
sur les schémas conventionnels
Le concept de dose-intensité en matière de traitement adjuvant
n’a pas fait la preuve de son efficacité quand les doses utilisées
correspondent aux doses recommandées (c’est-à-dire, en ce qui
concerne les anthracyclines : adriamycine 60 mg/m2pour les
Américains, FEC 100 pour les Français). Le concept de dose-den-
sité, développé par Larry Norton, devait être vérifié.
Citron (22) a présenté les premiers résultats de l’étude de phase III
C9741, comparant, chez des patientes avec une atteinte gan-
glionnaire (stades II/IIIa), une chimiothérapie séquentielle utili-
sant de la doxorubicine, du paclitaxel et du cyclophosphamide à
une association de doxorubicine et de cyclophosphamide suivie
de paclitaxel à des intervalles de 14 ou de 21 jours. Cet essai per-
met la comparaison d’un schéma dose-dense à un schéma conven-
tionnel, mais aussi celle d’une chimiothérapie séquentielle à une
chimiothérapie combinée.
La survie sans récidive, qui constituait le critère de jugement
principal, tout comme la survie globale se sont révélées signifi-
cativement meilleures pour la chimiothérapie dose-dense. En
revanche, il n’a pas été retrouvé de différence entre les schémas
séquentiels et combinés. Il faut noter l’absence de décès toxique
et un peu plus de neutropénies de grade 4 dans les bras dose-
dense (les patients recevaient systématiquement du filgrastime)
(figures 8 et 9).
Encore faut-il que le traitement soit suffisamment prolongé !
Dans l’essai multicentrique allemand néoadjuvant GEPAR-
DUO (23) ayant inclus 913 patientes, le taux de réponse com-
plète histologique mammaire et axillaire avec une chimiothé-
rapie dose-dense courte (8 semaines) de type ADOC (4 cycles
d’adriamycine : 60 mg/m2et de docétaxel : 75 mg/m2, tous les
14 jours avec G-CSF) n’a été que de 7,1 % alors qu’un schéma
séquentiel de 24 semaines AC-DOC identique à celui du
NSABP B-27 (4 cycles d’AC : adriamycine 60 mg/m2et cyclo-
phosphamide 600 mg/m2tous les 21 jours suivis de 4 cycles de
docétaxel : 100 mg/m2tous les 21 jours) permettait d’obtenir
un taux de réponse complète histologique de 14,1 %. Il faut noter
que les patientes avec une tumeur RO+ recevaient de façon
concomitante du tamoxifène.
LE TRASTUZUMAB
En ce qui concerne Herceptin®,
nous relèverons 5 messages forts
Le taux initial de la fraction soluble dosable dans le sérum
n’est pas prédictif de la réponse, comme l’a rapporté une méta-
analyse (24).
Le dosage de la fraction soluble aide au monitoring sous
traitement (importance de la rapidité de la régression initiale
et réascension prédictive de la rechute avant confirmation
clinique) (25-27).
Le risque de cardiotoxicité est corrélé à la dose d’anthracy-
cline délivrée antérieurement, comme l’a montré une enquête
française (28). Il apparaît dès une dose cumulée équivalente à
300 mg/m2de doxorubicine. Cela devrait avoir des implications
pratiques en ce qui concerne les doses d’anthracyclines délivrées
en adjuvant aux populations HER2 N+, afin de prévenir les
risques d’insuffisance cardiaque liés à l’utilisation ultérieure de
trastuzumab. Il faut noter, à ce propos, que les protocoles pros-
pectifs actuellement développés aux États-Unis par le NSABP,
l’Intergroup ou le BCIRG ne prévoient que 4 cycles d’AC, sui-
vis de différentes combinaisons de taxanes et de trastuzumab,
exposant à un moindre risque de cardiotoxicité que le protocole
PACS 04 actuellement en cours en France, qui compare 6 FEC
100 à 6 AT avant l’introduction du trastuzumab.
L’association paclitaxel-carboplatine-trastuzumab est supé-
rieure au schéma de référence paclitaxel-trastuzumab dans une
population de cancers du sein métastatiques surexprimant
HER2.
Actuellement, seule l’association du paclitaxel au trastuzumab
fait l’objet d’une AMM. Pourtant, d’autres cytotoxiques (notam-
ment le docétaxel, la vinorelbine, le cisplatine) ont montré des
taux de réponse élevés avec une tolérance correcte en associa-
tion avec le trastuzumab. Robert et al. (29) ont rapporté que la
combinaison, toutes les 3 semaines, de carboplatine (AUC 6)
et de paclitaxel (175 mg/m2en 3 heures) était supérieure au
paclitaxel seul dans une étude de phase III internationale, avec,
respectivement, un taux de réponse de 52 % versus 36 % et une
survie sans progression de 11,2 mois versus 6,9 mois
(tableauII). Les données préliminaires en survie montrent aussi
une tendance en faveur de l’association. Il a été constaté, comme
prévu, plus de neutropénies et de thrombopénies, mais aucune
augmentation d’autres effets indésirables.
Des essais en phase néoadjuvante ont débuté avec le trastuzu-
mab (30, 31).
S. Limentani et al. (30)ont rapporté les résultats d’un essai néoad-
juvant avec du docétaxel (60 mg/m2) et de la vinorelbine
(45 mg/m2) toutes les 2 semaines associés à du G-CSF et à une
quinolone, avec ou sans trastuzumab hebdomadaire pour une
durée de 12 semaines chez des patientes avec une surexpression
d’HER2. Le diamètre moyen des tumeurs était de 6,5 cm. Ils ont
obtenu un taux de réponse complète histologique selon les cri-
tères du NSABP de 36 %. Cela ouvre des perspectives impor-
tantes de combinaisons sans anthracycline avec le trastuzumab
en néoadjuvant.
Les études d’associations vinorelbine-trastuzumab en phase méta-
statique ayant rapporté des taux de réponse élevés (68 % à 78 %)
dans les 5 études de phase II (tableau III), une étude en néo-
adjuvant d’une combinaison de vinorelbine (25 mg/m2/semaine)
et de trastuzumab (2 mg/kg) pendant 12 semaines avant chirur-
9
La Lettre du Cancérologue - Volume XII - no1 - janvier-février 2003
01234 Années
à 2 semaines n = 988 évts = 75
à 3 semaines n = 985 évts = 107
0
0,2
0,4
0,6
0,8
1
Probabilité
3 semaines
2 semaines
p = 0,01
Tableau III. Essai de phase II d’association de vinorelbine et de
trastuzumab dans le cancer du sein métastatique.
Ligne Réponse
Auteur N (patients) de chimio- objective
thérapie (%)
Burstein 40 1re/2e/3e75
Johanzeeb 37 1re 78
Burstein 55 1re 68
Chan 40 1re 70
Bernardo 35 1re 77
Tableau II. Étude de phase III comparant trastuzumab (T) +
paclitaxel (P) ± carboplatine (C).
Traitement TPC TP
Réponses
objectives 52 % (48/92) 36 % (34/94) p = 0,04
(global)
Réponses
objectives 57 % (35/61) 37 % (23/63) p = 0,03
(IHC 3+)
Survie
sans progression 11,2 mois 6,9 mois p = 0,007
(global)
Survie
sans progression 13,5 mois 7,2 mois
(IHC 3+)
Survivants
(recul de 36 mois) 62 % 47 %
Figure 9. Survie globale. Étude dose-densité CALGB 9741 INT C9741
d’une chimiothérapie adjuvante séquentielle ou concomitante de
patientes N+.
1 / 8 100%