Responsabilité professionnelle Quelques bonnes nouvelles Circulaire ou droit ? La production des circulaires, de plus en plus nombreuses, illustre ce phénomène. Une circulaire est une consigne générale, qu’il convient naturellement de respecter. Mais elle n’a que très rarement force juridique dans la mesure où sa seule légitimité est d’expliciter l’état du droit. Regrettable confusion, les circulaires sont souvent utilisées comme s’il s’agissait d’articles du Code pénal ! Plainte, réclamation ou recours en indemnisation ? Les réclamations des patients sont incontestablement en augmentation. La plainte, juridiquement entendue, ne concerne que la plainte pénale, action qui est effectivement d’une réelle gravité. Cette plainte pénale doit être distinguée, d’une part, des simples réclamations adressées à la direction de l’établissement qui, passé un échange de courriers, ne donneront pas lieu à procédure et, d’autre part, des recours en indemnisation, dirigés contre l’établissement et gérés en réalité par l’assureur de l’établissement. Mais il est faux de dire que le recours en responsabilité indemnitaire pèse directement sur les acteurs de soins dès lors que ceux-ci sont salariés ou agents de la fonction publique. La Cour de cassation vient de rappeler que les professions paramédicales au premier rang desquelles la profession infirmière, n’est pas concernée par le régime particulier de responsabilité. Le partage reste inchangé : l’infirmière engage sa responsabilité personnelle en cas de faute pénale, mais les plaintes pénales restent statistiquement rares ; l’infirmière engage la responsabilité de l’éta- Dans le phénomène général qu’est la montée en puissance du droit, phénomène non contestable, il convient de distinguer ce qui met réellement en cause les infirmiers et infirmières, et tout ce qui est l’environnement, qui donne le sentiment de la responsabilité mais ne conduit pas à des sanctions effectives. blissement lorsque le patient se contente d’une action en indemnisation, ce qui correspond à plus de 90 % du contentieux ; et la condamnation au pénal ne remet en cause le principe de l’indemnisation par l’employeur que si l’infirmière avait la volonté de causer le dommage. Faute civile ou faute pénale Sur le plan pénal, l’année a été marquée par l’adoption de la très importante loi du 10 juillet 2000. Cette loi modifie le Code pénal sur l’un de ses points les plus essentiels, à savoir la faute pénale involontaire. Or, c’est ce texte qui est la clé de la responsabilité pénale des acteurs de santé. La loi distingue désormais de manière très claire la faute civile et la faute pénale. Un tribunal peut désormais estimer que les conditions de la faute pénale ne sont pas réunies, de telle sorte que le médecin ou l’infirmière est relaxée, mais qu’il existe une faute civile, dont le résultat est que le patient victime est indemnisé par l’assureur de l’employeur. Les victimes sont clairement encouragées à agir sur le plan de l’indemnisation. Lorsqu’elles agiront au pénal, les victimes rencontreront en revanche des obstacles nouveaux institués par cette loi du 10 juillet 2000. Pour caractériser la faute pénale, le juge doit désormais apprécier le comportement en tenant compte “des compétences, des fonctions, mais aussi des pouvoirs et des moyens dont on dispose”. Le juge doit ainsi procéder à une étude très concrète de la situation vécue, et l’absence ou l’insuffisance de moyens est une possibilité efficace de défense ouverte aux infirmiers et infirmières. Pour les cadres, la loi est encore plus favorable. Le législateur a très nettement pris l’option de venir en aide aux décideurs. Leur responsabilité pénale ne peut être retenue que s’il existe des éléments réels de gravité, soit par méconnaissance délibérée d’un texte instituant une obligation de prudence et de sécurité, soit par l’exposition d’une personne à un danger immédiat pour sa vie ou sa sécurité. Le régime antérieur avait pour seule référence la maladresse ou la négligence : on mesure le chemin parcouru... Cette loi crée un partage entre le régime de la responsabilité civile ou administrative, orientée vers la réparation des victimes, gérée en fait par les assureurs, et la responsabilité-sanction du droit pénal, qui suppose que soient réunies les conditions d’une faute réelle. L’évolution de la jurisprudence permettra seule de connaître la portée exacte qui sera donnée à ce texte, mais il est certain que les repères anciens sont tous à revoir. Gilles Devers D’après les propos tenus aux RSTI en présence de Christophe Radé, professeur agrégé des universités, Bordeaux-IV, et de Mme Marie-France Callu, maître de conférences à l’université Lyon-III. Professions Santé Infirmier Infirmière - No 24 - mars 2001 47