É
mission involontaire et inconsciente d’urine,
l’énurésie touche en moyenne un enfant de
5 à 10 ans sur 10, parmi lesquels 15 % guéris-
sent spontanément chaque année. La maladie
ne se produit pas par hasard. L’origine génétique
de l’affection ne fait plus aucun doute. Les
gènes responsables de l’énurésie se situent sur
les bras longs des chromosomes 13, 12 et 8.
Si, comme on l’a déjà vu, l’énurésie touche 10 %
des enfants de plus de 5 ans, ce chiffre monte à
20 % pour les moins de 5 ans. Phénomène plus
inquiétant : 1 % des adolescents de 16 ans sont
énurétiques. Ceux-ci n’ont pas tous le même pro-
fil : 22 % d’entre eux mouillent leur lit toutes les
nuits, 15 % plusieurs fois par semaine, 66 % une
à deux fois par mois. L’énurésie semble avoir
existé de tout temps, comme l’atteste le papyrus
d’Ebers en Égypte. Au cours des temps, les théra-
pies, surtout empiriques, ont varié pour compen-
ser ce qui n’était pas encore scientifiquement situé
au niveau du cerveau.
Une dysmaturité cérébrale
Les centres de commande se situent au niveau des
zones cérébrales corticales. Après un relais médul-
laire mictionnel, les nerfs aboutissent au sphincter
vésical. Lorsque, tel un robinet, le sphincter
s’ouvre, c’est que la pression intravésicale est trop
forte et c’est la miction. Pour fonctionner correcte-
ment et contrôler la miction, la commande a be-
soin de l’acquisition d’une maturité au niveau des
centres cérébraux : c’est l’apprentissage de la pro-
preté. Que celui-ci soit tardif, et l’énurésie s’ins-
talle. Ainsi, à la naissance, le cerveau ne peut com-
mander la miction, qui ne se déclenche que
lorsque la vessie est pleine : c’est la miction réflexe.
Entre 1 et 2 ans, le cerveau va progressivement
prendre la commande sphinctérienne. Le dévelop-
pement est progressif et commence à être efficace
vers l’âge de 18 mois. La propreté nocturne est en
moyenne acquise vers 3 ans, parfois elle ne l’est
pas avant 5 ans. Avant cet âge on ne peut parler vé-
ritablement d’énurésie. Après 5 ans, en revanche,
l’enfant ne doit plus mouiller son lit plus d’une fois
par semaine. Selon l’historique de son apparition,
deux types d’énurésie existent. Le premier, qui
touche plus de 80 % des enfants, est dit “pri-
maire” : l’enfant n’est pas propre la nuit et ne l’a ja-
mais été, en tout cas sur des périodes supérieures à
plusieurs mois. Pour les 20 % restants, le petit pa-
tient a acquis la propreté dans les temps mais, à
l’occasion de telle ou telle circonstance, il est rede-
venu énurétique. Cette circonstance peut être un
événement familial, comme l’arrivée d’un petit
frère ou d’une petite sœur, ou la disparition d’un
des parents ou d’un proche.
Quelle est la bonne attitude ?
La meilleure solution n’est pas de gronder, de
culpabiliser, de risquer, en traumatisant l’enfant,
de fixer le symptôme. Après un examen clinique
recherchant des signes d’appel anormaux, en
l’absence de doute, le médecin remettra à l’enfant
un calendrier météorologique sur lequel ce der-
nier décrira, à l’aide de pictogrammes, le climat
de la nuit : ensoleillé si le lit est resté sec, plu-
vieux si le lit s’est mouillé... Si les mesures
simples et pratiques, comme le fait d’uriner avant
d’aller se coucher, n’ont pas d’efficacité et que les
examens complémentaires ne signalent aucune
anomalie, un traitement médical peut aider à dé-
clencher un réflexe. Les anticholinergiques sont
ainsi prescrits en cas d’immaturité vésicale.
N’agissant que deux heures, ils nécessitent sou-
vent une deuxième prise nocturne. Les antidé-
presseurs ont été largement prescrits dans cette
indication, mais trop. Ils agissent sur la phase de
sommeil paradoxal et diminuent la sensibilité du
détrusor, augmentent la capacité de la vessie et
sont responsables d’effets secondaires et d’accou-
tumance. Ils ne doivent être donnés qu’après
6 ans, avec un risque de reprise des troubles à
l’arrêt du traitement. Efficace en spray nasal, en
comprimés, la desmopressine prescrite après
6 ans et pendant 6 mois donne de bons résultats
dans 80 % des cas d’énurésie. Sa durée d’action
de 8 heures couvre la nuit. Jacques Bidart
Pour en savoir plus, lire Énurésie et troubles mictionnels de l’enfant,
de Pierre Cochet, aux éditions Elsevier.
Simple gêne, l‘énurésie devient progressivement un véritable han-
dicap physique et psychologique si parents et soignants n’y pren-
nent garde. Des traitements efficaces existent désormais, à condi-
tion de les mettre en route à bon escient et suffisamment tôt.
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Énurésie de l’enfant
Des traitements efficaces
Libérale
Professions Santé Infirmier Infirmière - No50 - novembre 2003