DOSSIER THÉMATIQUE Les complications tardives de la chimiothérapie Sequels after chemotherapy for breast cancer L. Zelek*, P. Escure* Complications cardiaques Jusqu’à récemment, elles étaient essentiellement représentées par l’insuffisance cardiaque liée aux anthracyclines, dont l’utilisation se réduit, notamment du fait de l’arrivée des taxanes ce qui fait émerger d’autres interrogations (toxicité du trastuzumab et des antiaromatases). Certains marqueurs ont été proposés dans le but d’identifier au décours de la chimiothérapie une population à plus fort risque de dysfonction myocardique, et ce avant la survenue de modifications de la fraction d’éjection échographique ou isotopique. Dans l’étude de Cardinale, 30 % des 703 patients inclus et ayant reçu en moyenne 490 mg/m2 d’anthracyclines ont une troponine I positive en fin de traitement et 30 % d’entre eux gardent un dosage positif à 1 mois. Dans cette sous-population, le risque de dysfonction myocardique semble accru après un suivi médian de 20 mois, mais la spécificité du test est imparfaite et le moment idéal du dosage est arbitraire (1). Dans une étude randomisée monocentrique, la même équipe montre qu’un inhibiteur de l’enzyme de conversion pourrait prévenir la baisse de la fraction d’éjection chez les patientes élevant leur troponine en fin de traitement (2). Ces résultats demandent sans doute à être confirmés, ils ont le mérite d’introduire le concept d’individualisation du sous-groupe à risque de toxicité cardiaque tardive, évitant peut-être ainsi la réalisation d’examens coûteux et répétitifs non validés et permettant la mise en route de traitements préventifs peu risqués. En tout état de cause, le risque de dysfonction myocardique tardive après anthracyclines impose un suivi régulier au long cours. En l’absence de facteurs de risque associés, on propose un avis cardiologique 6 mois après la fin du traitement puis à un rythme régulier tous les 1 à 2 ans (3). En pratique, ces recommandations demeurent toutefois rarement mises en œuvre. Hémopathies secondaires Dans les cancers du sein, le risque est notamment augmenté après traitement utilisant des alkylants, avec une incidence de l’ordre de 5 pour 10 000, mais également les anthracyclines et anthracènediones (mitoxantrone qui n’est plus guère utilisée dans cette indication pour cette raison) ainsi que l’étoposide, qui n’a pas d’indication dans le cancer du sein en adjuvant. Les leucémies aiguës myéloblastiques (LA) et les syndromes myélodysplasiques (SMD) sont les plus décrits, avec notamment des anomalies du caryotype de mauvais pronostic impliquant principalement les chromosomes 5 et 7. Les SMD apparaissent avec un délai de latence de 3 à 5 ans et précèdent de 6 à 11 mois une transformation en LA (4). Plus récemment, le rôle du G-CSF a été évoqué, mais celui-ci a souvent été utilisé dans des essais utilisant des fortes doses d’alkylants. Il a même été observé dans une seule étude un doublement du risque de LA ou SMD chez les patientes de plus de 65 ans recevant du G-CSF dans le cadre d’une chimiothérapie adjuvante de cancer du sein (5). Cette étude réalisée à partir des registres du Medicare et du SEER ne donne pas d’indications sur le type de chimiothérapie reçue ni sur les doses et l’indication précise du G-CSF. Quoi qu’il en soit, compte tenu du risque de mortalité liée aux neutropénies fébriles d’une part et de la faible incidence des LA/SMD secondaires d’autre part, le rapport bénéfice/risque du G-CSF demeure largement favorable. La surveillance hématologique après cancer du sein n’est pas codifiée. Les complications tardives liées à la chimiothérapie peuvent mettre en jeu le pronostic vital : tel est le cas des dysfonctions cardiaques liées aux anthracyclines dont l’incidence est évaluée à 1 % des patientes après une dose cumulée de 600 mg/m 2 d’épirubicine et des hémopathies secondaires, heureusement rares. Ces complications classiques devraient voir leur incidence diminuer dans l’avenir compte tenu de l’évolution des traitements adjuvants. En revanche, les effets tardifs des chimiothérapies, la prise de poids, la fatigue chronique et la dysfonction cognitive concernent une large proportion de patientes et ont été très largement méconnus jusqu’à ces dernières années. * Service d’oncologie médicale, hôpital Avicenne, Bobigny. La Lettre du Sénologue • n° 44 - avril-mai-juin 2009 | 27 Mots-clés Cancer du sein Chimiothérapie Séquelles Effets secondaires et séquelles des traitements après cancer du sein Prise de poids liée à la chimiothérapie Incidence et facteurs de risque Keywords Breast carcinoma Chemotherapy Sequels L’incidence de la prise de poids en cours de traitement adjuvant est mal évaluée par les grands essais randomisés d’hormonothérapie ou de chimiothérapie. La majorité des données provient donc des études de cohorte incluant des patientes en rémission prolongée après traitement local. Ces études sont pour l’essentiel américaines (9), mais des données européennes commencent à être disponibles (10). Il est difficile d’avoir une idée précise de la prise de poids moyenne, car les chiffres diffèrent d’une étude à l’autre, qui plus est le gain est souvent exprimé en pourcentage du poids initial. Néanmoins, on peut considérer que la prise de poids moyenne après traitement est de l’ordre de 3 kg (pouvant atteindre une dizaine de kilos dans certains cas, notamment chez les femmes jeunes) et qu’elle concerne près de la moitié des patientes (10). Les données de la littérature ne permettent pas de mettre en évidence de façon indiscutable des facteurs de risque de prise de poids. Cependant, les données disponibles montrent que la chimiothérapie est le facteur le plus souvent retrouvé dans la littérature avec un odds-ratio (OR) de 1,65 dans l’essai WHEL (11, 13). Les femmes jeunes semblent avoir un risque accru, mais ce point demeure débattu, de même que le rôle de l’aménorrhée induite par le traitement. Nous manquons de données fiables sur le risque en fonction du type de chimiothérapie, notamment avec les schémas les plus modernes contenant des taxanes. Le risque lié aux traitements associés, en particulier aux corticoïdes, n’est pas connu avec précision faute d’études, mais il est concevable que ceux-ci majorent la prise de poids. Le fait qu’un traitement prolongé ou une polychimiothérapie soient des facteurs de risque supplémentaires est un argument indirect en ce sens (12). Au total, les données actuellement disponibles ne permettent pas d’individualiser une sous-population de femmes atteintes de cancer du sein dont le risque de prise de poids serait clairement majoré. Cependant, le risque semble plus important en cas de chimiothérapie, peut-être notamment dans le cas des femmes jeunes subissant une aménorrhée chimio-induite. Enfin, les mécanismes de la prise de poids sous traitement demeurent mal connus. La prise de poids sous traitement ne semble pas résulter d’une hyperphagie chez ces patientes dans certains travaux américains, 28 | La Lettre du Sénologue • n° 44 - avril-mai-juin 2009 mais cela est plus discutable en France où le mode de vie n’est pas comparable. En revanche, on observe de façon incontestable une diminution de la dépense énergétique, du fait de la réduction de la masse maigre et de l’activité physique et cette diminution n’est pas compensée par une réduction de la prise alimentaire (12). Une association entre une obésité, des manifestations dépressives ou des perturbations du comportement alimentaire chez les patientes à risque de récidive reste à confirmer. Conséquences à terme et tentatives d’intervention Les données demeurent contradictoires : la majorité des études concerne en effet des séries rétrospectives dont la qualité est hétérogène. Il faut souligner que seule une minorité de patientes retrouve son poids initial (13). L’obésité et le gain de poids en cas de cancer du sein sont probablement des facteurs de moindre qualité de vie (7, 8), mais les données cliniques manquent pour étayer ce point. L’obésité et le surpoids pourraient aussi être associés à une sévérité plus marquée des bouffées de chaleur chez les femmes récemment traitées pour cancer du sein, et majorent le risque de lymphœdème postchirurgical (7). L’impact de la prise de poids sur le risque de récidive est suggéré par certaines études (9), mais dans d’autres séries, la surmortalité est essentiellement non spécifique (8). Quoi qu’il en soit, l’effet délétère du surpoids post-traitement s’observe au moins en termes de qualité de vie et de risque cardio-vasculaire. Rappelons enfin que le surpoids initial est, quant à lui, non seulement un facteur de risque de cancer du sein mais également un probable facteur de mauvais pronostic et de résistance au traitement (14). Dans l’étude prospective randomisée WINS, réalisée à partir d’une cohorte de 2 437 patientes traitées pour un cancer du sein de stade précoce, les patientes incluses dans le bras expérimental ont bénéficié d’un régime appauvri en lipides de 33 g par jour en moyenne sur 12 mois versus 51,3 g pour le bras témoin. La réduction significative du risque de récidive observée pour le groupe d’intervention en comparaison avec le groupe contrôle (HR = 0,76 ; IC95 : 0,60-0,98) lors de l’analyse intermédiaire à 5 ans n’a pas été retrouvée dans l’analyse suivante (4). D’après les résultats communiqués plus récemment et non encore publiés, le gain persiste uniquement chez les femmes dont les tumeurs sont dépourvues de récepteurs hormonaux. La question DOSSIER THÉMATIQUE du bénéfice de lutte contre le surpoids demeure donc ouverte. La fatigue chronique postchimiothérapie Malgré la recherche de plus en plus abondante qui lui est consacrée, la fatigue liée au cancer reste difficile à définir. Une définition pratique est donnée par le National Comprehensive Cancer Network (NCCN) : la fatigue liée au cancer est persistante, avec une sensation subjective de lassitude en rapport avec un antécédent de cancer ou de son traitement et qui interfère avec le bon déroulement de la vie quotidienne (NCCN Cancer related fatigue and anemia: treatment guidelines for patients). La fatigue liée au cancer est différente de celle due à l’exercice parce qu’elle est plus profonde, persistante et qu’elle ne s’améliore pas avec du repos. Elle peut également être définie comme une fatigue plus importante que celle qui devrait normalement résulter d’un exercice physique ou d’un effort mental. Puisque son origine précise est inconnue, la fatigue liée au cancer rejoint la catégorie des fatigues d’origine inconnue qui regroupe celles rencontrées dans de nombreuses autres maladies immunologiques ou neurologiques. Bien qu’il existe beaucoup d’éléments incertains, il est généralement admis que la fatigue liée au cancer a une origine multifactorielle où interviennent aussi bien des éléments d’ordre physiologique que psychologique. Par ailleurs, nous ne savons pas si la fatigue constatée est une conséquence du cancer et de son traitement ou si elle fait cause commune avec la maladie. Cette spécificité pourrait expliquer les différences constatées dans la littérature. Par exemple, si plus de 60 % des patients traités par radiothérapie ou chimiothérapie pour divers cancers présentent une fatigue après les traitements, le degré pourrait être dépendant des modalités du traitement, par exemple les doses reçues. D’un point de vue pragmatique, la persistance de la fatigue plusieurs mois à un an après la fin du traitement adjuvant des cancers du sein concerne près d’une femme sur deux. Une minorité d’entre elles conservera des symptômes de fatigue chronique plusieurs années après la fin des traitements spécifiques. La physiopathologie demeurant largement inconnue, il est difficile de proposer des traitements préventifs, cependant, le maintien d’une activité physique en cours de traitement adjuvant semble bénéfique. Il importe également d’éliminer les causes curables de fatigue chronique et, en premier lieu, les anémies et les endo- crinopathies (dysthyroïdies). Les patientes doivent être prévenues de ce type d’effet secondaire (19). Les troubles cognitifs La question des troubles cognitifs chez des patients traités par chimiothérapie a été évoquée pour la première fois dans les années 1980 par Silberfarb (20). On reproche généralement à cette étude, comme à la plupart de celles publiées dans les années suivantes, un manque de rigueur méthodologique tel que la comparaisons avec des données publiées, ou une confusion entre toxicité des traitements et retentissements cognitifs inhérents aux réactions psychologiques d’ordre dépressif accompagnant la prise en charge initiale d’une maladie cancéreuse. Depuis, nous disposons d’études randomisées et effectuées dans le but de différencier la toxicité des traitements, des effets cognitifs de l’anxiété, de la fatigue, de la dépression ou de la ménopause. En 1995, Wieneke et Dienst (21) retrouvent une atteinte significative dans les scores d’évaluation chez 28 femmes traitées pour cancer du sein par les protocoles standard de CAF (cyclophosphamide, adriamycine, 5 FU) ou du CMF (cyclophosphamide, méthotrexate, 5 FU). Dans cette étude, l’atteinte cognitive était indépendante de la dépression, du protocole de chimiothérapie et de la date du traitement. Van Dam et al. (22) ont également effectué une évaluation en moyenne 2 ans après un traitement pour cancer du sein chez des femmes qui étaient randomisées entre chimiothérapie haute dose plus tamoxifène, et traitement standard par FEC et tamoxifène. Les patientes traitées par des hautes doses étaient plus à risque de présenter une dysfonction cognitive. Dans la même étude, les auteurs ont pu constater un risque relatif de 3,5 chez les patientes traitées par une chimiothérapie standard comparée au traitement local seul. Cette étude suggère donc un effet dose-dépendant de la toxicité de la chimiothérapie sur les fonctions cognitives. Schagen et al. (23) ont rapporté 39 cas de cancer du sein traités par CMF plus ou moins tamoxifène qu’ils ont comparé à 34 patients n’ayant pas nécessité de traitement systémique. Les résultats démontrent un effet toxique neuropsychologique avec 36 % versus 6 % d’atteinte au niveau de la concentration et 21 % versus 3 % sur la mémoire. La comparaison entre les patientes recevant ou non le tamoxifène ne retrouve pas de différence. En 2002, Alhes et al. (24) ont examiné les performances cognitives des survivants Références bibliographiques 1. Cardinale D, Sandri MT, Colombo A et al. Prognostic value of troponin I in cardiac risk stratification of cancer patients undergoing highdose chemotherapy. Circulation 2004;109:2749-54. 2. Cardinale D, Sandri MT, Colombo A et al. Prevention of high-dose chemotherapy induced cardiotoxicity in high-risk patients by angiotensin converting enzyme inhibition. Circulation 2006;114: 2474-81. 3. Ferrari E, Lokiec F, Facchini T, Marsiglia H. Toxicité cardio-vasculaire des traitements anti-tumoraux. In: Aider à vivre après un cancer. Zelek L et Zernik N. Springer, à paraître en 2009. 4. Madelaine I. Seconds Cancers. In Dossier du CNIMH, 2008, XXIX, 146. 5. Hershman D, Neugut Ai, Jacobson JS et al. 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Effets secondaires et séquelles des traitements après cancer du sein après 5 ans de cancer du sein et de lymphome en comparant le traitement systémique au traitement local. Une analyse détaillée multivariée retrouve une différence significative dans la mémoire verbale et la vitesse des processus psychomoteurs, une tendance à la différence dans la mémoire visuelle et la visualisation spatiale. Si on utilise une échelle d’évaluation neuropsychologique similaire aux études précédentes, une atteinte est retrouvée dans 39 % des cas du groupe systémique contre 14 % avec un traitement local (p < 0,002). L’ensemble des données publiées est donc en faveur d’un effet délétère de la chimiothérapie sur les fonctions cognitives chez une certaine catégorie de patients. Les domaines fonctionnels affectés le plus souvent seraient la mémoire verbale et la vitesse de réalisation psychomotrice. Néanmoins, les résultats publiés dégagent deux problématiques différentes : – d’une part, tous les patients ne sont pas affectés de façon équivalente, ce qui va dans le sens d’un rôle potentiel d’une susceptibilité génétique individuelle ou d’une atteinte neurologique préexistante, le rôle d’un QI initialement bas étant également évoqué (25) ; – d’autre part, la plupart des patients qui se plaignent de troubles de mémoire ont des scores normaux mesurés sur des échelles objectives ; il est possible que ces patients aient des capacités supérieures à la moyenne avant le traitement, ce qui expliquerait qu’une altération due à la chimiothérapie n’aboutisse pas à une baisse significative de leur score. Il n’existe pas actuellement de données publiées comparant les performances avant et après traitement qui permettraient de répondre à cette question. Le programme d’entraînement de la mémoire et de l’attention (Memory and Attention Adaptation Training [MAAT]), met l ‘accent sur des programmes d’apprentissage pour compenser les problèmes de mémoire pouvant interférer avec la vie quotidienne. Il s’agit d’insister sur l’adaptation et l’efficacité lors de la vie quotidienne plutôt que sur la restauration des fonctions cognitives par rapport à leur altération mesurée sur des échelles de performance. Les techniques de MAAT dérivent des thérapies cognitivo-com- 30 | La Lettre du Sénologue • n° 44 - avril-mai-juin 2009 portementales et les résultats ont été publiés dans des domaines divers tels que la réhabilitation après accident vasculaire cérébral. Le MAAT est constitué de quatre composants : ➤➤ L’éducation : une sensibilisation sur les possibles problèmes cognitifs pouvant survenir après la chimiothérapie. ➤➤ Un auto-entraînement : pour identifier les situations à risque de défaillance cognitive. ➤➤ Un entraînement : pour développer des méthodes naturelles de compensation de ces déficits cognitifs. ➤➤ Des techniques de relaxation. Des méthodes similaires ont déjà montré leur efficacité dans des accidents vasculaires et des cancers du système nerveux central. La méthode MAAT peut être considérée comme un auto-traitement sous la surveillance du clinicien, les données dans le cancer du sein adjuvant demeurent néanmoins limitées. Pour l’instant, nous demeurons donc démunis en ce qui concerne la prise en charge de ces troubles. Il semble pourtant que le fait de prévenir les patientes, en insistant notamment sur leur caractère transitoire et réversible, améliore leur vécu. Conclusion La prise en charge actuelle des cancers a permis une amélioration notable de l’index thérapeutique des chimiothérapies adjuvantes. L’incidence des complications redoutables que sont l’insuffisance cardiaque et les hémopathies secondaires a de ce fait notablement diminué. En revanche, l’incidence des problèmes de prise de poids, de fatigue chronique et de dysfonction cognitive demeure largement sous-évaluée. On considère que près d’une femme sur deux est concernée à des degrés divers après le traitement adjuvant. Par ailleurs, les mécanismes de ces troubles sont largement méconnus ce qui est un frein évident à la mise en œuvre de traitements préventifs. Cela nécessite de favoriser la réflexion sur la prévention tertiaire dans le cancer du sein. ■