La Lettre du Sénologue • n° 44 - avril-mai-juin 2009 | 29
DOSSIER THÉMATIQUE
du bénéfice de lutte contre le surpoids demeure
donc ouverte.
La fatigue chronique
postchimiothérapie
Malgré la recherche de plus en plus abondante qui lui
est consacrée, la fatigue liée au cancer reste difficile
à définir. Une définition pratique est donnée par le
National Comprehensive Cancer Network (NCCN) :
la fatigue liée au cancer est persistante, avec une
sensation subjective de lassitude en rapport avec un
antécédent de cancer ou de son traitement et qui
interfère avec le bon déroulement de la vie quoti-
dienne (NCCN Cancer related fatigue and anemia:
treatment guidelines for patients). La fatigue liée au
cancer est différente de celle due à l’exercice parce
qu’elle est plus profonde, persistante et qu’elle ne
s’améliore pas avec du repos. Elle peut également
être définie comme une fatigue plus importante que
celle qui devrait normalement résulter d’un exer-
cice physique ou d’un effort mental. Puisque son
origine précise est inconnue, la fatigue liée au cancer
rejoint la catégorie des fatigues d’origine inconnue
qui regroupe celles rencontrées dans de nombreuses
autres maladies immunologiques ou neurologiques.
Bien qu’il existe beaucoup d’éléments incertains, il
est généralement admis que la fatigue liée au cancer
a une origine multifactorielle où interviennent aussi
bien des éléments d’ordre physiologique que psycho-
logique. Par ailleurs, nous ne savons pas si la fatigue
constatée est une conséquence du cancer et de son
traitement ou si elle fait cause commune avec la
maladie. Cette spécificité pourrait expliquer les diffé-
rences constatées dans la littérature. Par exemple, si
plus de 60 % des patients traités par radiothérapie
ou chimiothérapie pour divers cancers présentent
une fatigue après les traitements, le degré pourrait
être dépendant des modalités du traitement, par
exemple les doses reçues. D’un point de vue prag-
matique, la persistance de la fatigue plusieurs mois à
un an après la fin du traitement adjuvant des cancers
du sein concerne près d’une femme sur deux. Une
minorité d’entre elles conservera des symptômes de
fatigue chronique plusieurs années après la fin des
traitements spécifiques.
La physiopathologie demeurant largement inconnue,
il est difficile de proposer des traitements préventifs,
cependant, le maintien d’une activité physique en cours
de traitement adjuvant semble bénéfique. Il importe
également d’éliminer les causes curables de fatigue
chronique et, en premier lieu, les anémies et les endo-
crinopathies (dysthyroïdies). Les patientes doivent être
prévenues de ce type d’effet secondaire (19).
Les troubles cognitifs
La question des troubles cognitifs chez des patients
traités par chimiothérapie a été évoquée pour la
première fois dans les années 1980 par Silberfarb
(20). On reproche généralement à cette étude,
comme à la plupart de celles publiées dans les années
suivantes, un manque de rigueur méthodologique
tel que la comparaisons avec des données publiées,
ou une confusion entre toxicité des traitements et
retentissements cognitifs inhérents aux réactions
psychologiques d’ordre dépressif accompagnant la
prise en charge initiale d’une maladie cancéreuse.
Depuis, nous disposons d’études randomisées et
effectuées dans le but de différencier la toxicité des
traitements, des effets cognitifs de l’anxiété, de la
fatigue, de la dépression ou de la ménopause.
En 1995, Wieneke et Dienst (21) retrouvent une
atteinte significative dans les scores d’évaluation
chez 28 femmes traitées pour cancer du sein par
les protocoles standard de CAF (cyclophosphamide,
adriamycine, 5 FU) ou du CMF (cyclophosphamide,
méthotrexate, 5 FU). Dans cette étude, l’atteinte
cognitive était indépendante de la dépression, du
protocole de chimiothérapie et de la date du traite-
ment. Van Dam et al. (22) ont également effectué
une évaluation en moyenne 2 ans après un trai-
tement pour cancer du sein chez des femmes qui
étaient randomisées entre chimiothérapie haute
dose plus tamoxifène, et traitement standard par
FEC et tamoxifène. Les patientes traitées par des
hautes doses étaient plus à risque de présenter
une dysfonction cognitive. Dans la même étude,
les auteurs ont pu constater un risque relatif de 3,5
chez les patientes traitées par une chimiothérapie
standard comparée au traitement local seul. Cette
étude suggère donc un effet dose-dépendant de
la toxicité de la chimiothérapie sur les fonctions
cognitives.
Schagen et al. (23) ont rapporté 39 cas de cancer du
sein traités par CMF plus ou moins tamoxifène qu’ils
ont comparé à 34 patients n’ayant pas nécessité de
traitement systémique. Les résultats démontrent un
effet toxique neuropsychologique avec 36 % versus
6 % d’atteinte au niveau de la concentration et 21 %
versus 3 % sur la mémoire. La comparaison entre les
patientes recevant ou non le tamoxifène ne retrouve
pas de différence. En 2002, Alhes et al. (24) ont
examiné les performances cognitives des survivants
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