DOSSIER Cancer du sein : peut-on influer sur son destin ? La chimiothérapie dans le cancer du sein non métastatique Chemotherapy in non-metastatic breast cancer Youssef Tazi* Références bibliographiques 1. Peto R, Davies C, Godwin J et al. Comparisons between different polychemotherapy regimens for early breast cancer: meta-analyses of long-term outcome among 100,000 women in 123 randomised trials. Lancet 2012;379:432-44. 2. Piccart-Gebhart MJ, Procter M, Leyland-Jones B et al. Trastuzumab after adjuvant chemotherapy in HER2-positive breast cancer. N Engl J Med 2005;353(16):1659-72. 3. Yerushalmi R, Woods R, Ravdin PM, Hayes MM, Gelmon KA. Ki67 in breast cancer: prognostic and predictive potential. Lancet Oncol 2010;11:174-83. 4. Duffy MJ. Urokinase plasminogen activator and its inhibitor, PAI-1, as prognostic markers in breast cancer: from pilot to level 1 evidence studies. Clin Chem 2002;48:1194-7. 5. Sotiriou C, Pusztai L. Geneexpression signatures in breast cancer. N Engl J Med 2009;360:790-800. 6. Liedtke C, Mazouni C, Hess KR et al. Response to neoadjuvant therapy and long-term survival in patients with triple-negative breast cancer. J Clin Oncol 2008;26:127581. * Institut Gustave-Roussy, département de médecine oncologique, Villejuif. P lusieurs questions se posent au moment de décider d’une chimiothérapie pour un cancer du sein localisé. Pour qui ? L’objectif de la chimiothérapie postopératoire ou adjuvante est de réduire le risque de rechute du cancer du sein après traitement local, et donc d’améliorer la survie globale des patientes. Une méta-analyse récente, incluant 100 000 patientes, retrouve une diminution du risque relatif de mortalité d’environ un tiers en cas d’administration de la chimiothérapie (1). Ce bénéfice est d’autant plus élevé en valeur absolue que le cancer est à haut risque de rechute et peut être minime ou nul en cas de risque spontanément faible. Le défi est donc triple : identifier les patientes avec un risque de rechute jugé significatif, peu résistantes à la chimiothérapie et avec un risque de toxicité attendue acceptable par rapport au gain espéré. Cependant, la décision de proposer une chimiothérapie est encore essentiellement prise sur la présence de critères de mauvais pronostics cliniques et histologiques : l’âge jeune, la grande taille tumorale, l’atteinte ganglionnaire et le grade tumoral élevé. L’immunohistochimie apporte également des informations majeures, qui sont l’expression des récepteurs hormonaux (RH) et du récepteur du facteur humain de croissance épidermique (HER2). On distingue ainsi 2 situations où la chimiothérapie adjuvante est indiquée : les tumeurs n’exprimant ni les RH ni HER2 et les tumeurs surexprimant HER2 de plus de 5 mm. Pour les tumeurs surexprimant HER2, en plus de la chimiothérapie adjuvante, un traitement par trastuzumab est indiqué pendant 1 an (2). La situation la plus discutée reste celle des tumeurs 12 | La Lettre du Gynécologue • n° 376 - novembre 2012 RH+ HER2– où la décision de chimiothérapie adjuvante dépend de la présence des autres critères pronostiques précédemment cités. Nous disposons également d’autres paramètres comme le niveau d’expression de Ki67 (3) ou le biomarqueur UPA (urokinase-type plasminogen activator)/PA1 (4) qui peuvent être utilisés pour affiner la décision. D’autres outils comme les signatures génomiques sont en cours de validation prospective dans cette population, les tests les plus étudiés sont Oncotype DX® et Mammaprint®. En effet, dans des études rétrospectives, ces signatures ont permis d’identifier des patientes avec un risque faible de rechute métastatique alors qu’elles pouvaient avoir des critères classiques de mauvais pronostic. Ces patientes pourront éventuellement être dispensées de chimiothérapie (5). En revanche, nous ne disposons pas encore dans la pratique courante de tests suffisamment robustes pour prédire la résistance à la chimiothérapie ou une toxicité potentiellement limitante pouvant moduler les indications et les schémas de la chimiothérapie adjuvante. Quand administrer la chimiothérapie en préopératoire ? La chimiothérapie préopératoire ou néoadjuvante peut être préconisée en cas de tumeur non accessible d’emblée à un traitement conservateur et pouvant le devenir en cas de réponse tumorale de bonne qualité, qui est elle-même un facteur de meilleur pronostic (6). C’est le cas des tumeurs non multifocales qui présentent des caractéristiques de chimiosensibilité (haut grade, RH– ou HER2+) [7]. Différentes études comparant les chimiothérapies adjuvante et néoadjuvante trouvent que les résul- Points forts Mots-clés »» La décision de chimiothérapie est essentiellement fondée sur des facteurs pronostiques. »» Indiquée chez la plupart des patientes avec des tumeurs RH– et/ou HER2+. »» Les anthracyclines et les taxanes sont largement utilisés. Cancer du sein Chimiothérapie tats en termes de mortalité par cancer du sein sont comparables quel que soit le moment d’administration (8). Il existe finalement une indication formelle de chimiothérapie néoadjuvante : le cancer du sein inflammatoire. Quel protocole ? Les protocoles utilisant les anthracyclines, le cyclophosphamide et les taxanes ont prouvé leur supériorité par rapport aux protocoles à base d’anthracyclines seules (1). Cela aussi bien pour les patientes avec ou sans envahissement ganglionnaire à haut risque (9). Les schémas séquentiels comme FEC (5-fluorouracil-épirubicine-cyclophosphamide)/docétaxel pour 6 à 8 cycles (10) sont largement utilisés, contrairement au protocole associant anthracycline, cyclophosphamide et docétaxel en raison de sa toxicité. L’administration de 4 cycles de docétaxel et cyclophosphamide est moins efficace qu’un schéma séquentiel anthracycline/taxanes (11), mais peut être acceptable en cas de risque de rechute peu élevé. Enfin, un schéma sans anthracycline ne semble pas inférieur, pour les tumeurs surexprimant HER2, que le schéma séquentiel standard (12). ■ Références bibliographiques (suite) 7. Jinno H, Sakata M, Hayashida T et al. Primary systemic chemotherapy of breast cancer: indication and predictive factors. Breast Cancer 2011;18:74-9. 8. Mauri D, Pavlidis N, Ioannidis JP. Neoadjuvant versus adjuvant systemic treatment in breast cancer: a meta-analysis. J Natl Cancer Inst 2005;97:188-94. 9. Martin M, Segui MA, Anton A et al. Adjuvant docetaxel for high-risk, node-negative breast cancer. N Engl J Med 2010;363:2200-10. 10. Roche H, Fumoleau P, Spielmann M et al. Sequential adjuvant epirubicin-based and docetaxel chemotherapy for node-positive breast cancer patients: the FNCLCC PACS 01 Trial. J Clin Oncol 2006;24:5664-71. AGENDA 1 er décembre 2012 – École supérieure des arts et métiers (ENSAM) – 2, bd du Ronceray, 49100 Angers – 15e Journée de gynécologie obstétrique pour les médecins généralistes. Renseignements : AnneLaure Alus, service de gynécologie obstétrique, centre hospitalier universitaire, 4, rue Larrey, 49933 Angers Cedex 09. Tél. : 02 41 35 44 59. Fax : 02 41 35 42 54. E-mail : [email protected] 5-7 décembre 2012 – CNIT, Paris-La Défense – 36es Journées nationales du CNGOF. Renseignements : CNGOF 2012/Colloquium, 13-15, rue de Nancy, 75010 Paris. Tél. : 01 44 64 15 15. Fax : 01 44 64 15 16. E-mail : [email protected] Programme complet : www. cngof.asso.fr/ (rubrique “nos journées nationales”). Inscriptions en ligne : https://www.eiseverywhere.com/ ereg/newreg.php?eventid=36909&& Highlights »» Chemotherapy decision is mainly based on prognosis factors. »» Indicated for most patients with negative hormone receptor and/or overexpressed HER2 tumors. »» A n t h r a c y c l i n e s a n d taxanes are widely used. Keywords Breast cancer Chemotherapy 11. Swain SM, Jeong JH, Geyer CE Jr et al. Longer therapy, iatrogenic amenorrhea, and survival in early breast cancer. N Engl J Med 2010;362:2053-65. 12. Slamon D, Eiermann W, Robert N et al. Adjuvant trastuzumab in HER2-positive breast cancer. N Engl J Med 2011;365:1273-83. décembre | 2012 à janvier | 2013 7 décembre 2012 – CNIT, Paris-La Défense – Les situations de conflit d’intérêt materno-fœtal. Renseignements et inscriptions : www.cngof.org – Tél. : 01 44 64 15 15. IAPM secrétariat : Françoise Jacquiau. Tél. : 01 56 01 60 67. E-mail : [email protected] 8 décembre 2012 – Centre de recherche des Cordeliers, 21, rue de L’École-de-Médecine, 75006 Paris – IVG médicamenteuse, un progrès pour la santé des femmes ? Renseignements et inscriptions : JPCOM, 75, avenue Georges-Clémenceau, 14000 Caen. Tél. 02 31 27 19 18. Fax 02 31 27 19 17. E-mail : jpcom@ jpcom.fr – Internet : www.jpcom.fr 24-29 janvier 2013 – La Havane (Cuba) – XXVIIIes Journées de techniques avancées (JTA) en gynécologie obstétrique, PMA, périnatologie et pédiatrie. Renseignements : JTA-Organisations : 17, avenue du Dr Arnold-Netter, 75012 Paris. Tél. : 01 43 07 29 05. Fax : 01 43 07 43 90. E-mail : [email protected] La Lettre du Gynécologue • n° 376 - novembre 2012 | 13