Suivi densitométrique des patientes ostéoporotiques traitées : est-ce utile ? GRIO www.grio.org

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Suivi densitométrique des patientes
ostéoporotiques traitées : est-ce utile ?
B. Cortet*, B. Sutter**
* Département universitaire de rhumatologie et EA 4490, Lille. ** Institut Calot, Berck-sur-Mer.
Aspects “métrologiques”
Pour un même patient, comparer des valeurs
de densité minérale osseuse (DMO) paraît très
simple. Oui, mais à quelles conditions ? Parmi
celles-ci, deux règles sont à respecter : suivre
sur le même appareil et ne comparer que les
valeurs de DMO mesurées en g/cm2 et non
les T-scores.
Pour pouvoir comparer des valeurs de DMO, il
faut tout d’abord avoir établi la reproductibilité du densitomètre, et non se fonder sur les
“données de la littérature” ou les “données
du constructeur”. Cette reproductibilité est calculée pour les sites utilisés en pratique clinique :
rachis lombaire et fémur proximal (col et fémur
total). Elle est exprimée en g/cm² ou en mg/cm²
et non en pourcentage. Elle est nécessaire au
calcul de la plus petite variation significative à
l’échelon individuel (PPVS), qui conditionne le
choix du délai entre 2 examens.
Applications cliniques :
les mesures de DMO
reflètent-elles l’efficacité
du traitement ?
En 2006, la Haute Autorité de santé (HAS) a
proposé des critères de remboursement de la
densitométrie osseuse pour un premier et un
deuxième examen. Pour les patientes traitées,
l’examen n’est remboursé qu’à la fin d’un cycle
thérapeutique, ce qui suggère que, en dehors
de ces conditions, le suivi densitométrique n’a
pas d’intérêt.
Les données de la littérature dans le domaine
sont plus nuancées. Les conclusions sont
variables en fonction du mécanisme d’action
de la molécule et au sein d’une classe thérapeutique en fonction du traitement pris en
considération.
Pour les traitements inhibiteurs de la résorption osseuse, il a été bien démontré que la
seule augmentation de DMO n’expliquait que
très imparfaitement l’efficacité antifracturaire.
Dans des conditions de pratique clinique quotidienne, la question posée est de savoir si l’existence d’une perte osseuse significative sous
traitement témoigne d’une moindre efficacité
de la thérapeutique.
Différentes publications plus ou moins récentes
ont montré que, avec l’alendronate, le risédronate et, plus récemment, l’ibandronate,
l’efficacité du traitement était moindre, au
minimum dans la prévention des fractures
vertébrales, chez les patientes ayant une perte
osseuse significative sous traitement comparativement à celles n’en ayant pas. En revanche,
même en cas de perte osseuse, l’efficacité était
toujours supérieure à celle observée dans le
groupe placebo.
Des données non encore publiées montrent
également que cette relation existe avec le
dénosumab en ce qui concerne les fractures
vertébrales ou non vertébrales.
Quant au raloxifène, aucune relation significative n’a été mise en évidence entre l’importance du gain densitométrique et l’importance
de la protection antifracturaire. Il convient
néanmoins de préciser que les gains observés
sous raloxifène sont très modérés.
Dans le cas du tériparatide, agent anabolique
osseux, il a été montré que les gains densitométriques expliquaient entre 30 et 41 % de la
variabilité de l’efficacité antifracturaire de cette
molécule en fonction de la DMO initiale.
Enfin, pour le ranélate de strontium, les gains
densitométriques sont expliqués à hauteur
d’environ 50 % par le fait que le strontium
a un poids moléculaire supérieur à celui du
calcium. Néanmoins, et en l’absence de toute
correction, il a pu être démontré que l’augmentation de la DMO observée sous ranélate
de strontium rendait compte de 75 % de la
variabilité de l’efficacité antifracturaire.
En dernier lieu, et bien que les données soient
peu nombreuses, certaines études suggèrent
que le suivi densitométrique pourrait améliorer
l’observance.
En conclusion
Le suivi densitométrique est un outil imparfait
dans le cadre de la prise en charge des patientes
ostéoporotiques sous traitement. Son but principal est de dépister les patients ayant une perte
osseuse accélérée, laquelle est associée à une
■
moindre efficacité antifracturaire.
La Lettre du Rhumatologue • No 370 - mars 2011 |
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