http://www.grio.org Rubrique coordonnée par T. Thomas, Saint-Étienne Le ranelate de strontium e strontium est un cation bivalent dont l’affinité pour l’os est connue Lde longue date. La mise en évidence d’une action originale sur le remodelage osseux a justifié la réalisation d’études cliniques afin d’évaluer l’effet de ce nouvel agent pharmacologique dans l’ostéoporose postménopausique. Le strontium est absorbé par l’intestin de façon passive et active, et cette absorption est réduite en présence de calcium. Le strontium se distribue dans le squelette, à la surface du cristal osseux, de façon proportionnelle aux taux plasmatiques. On estime que le strontium se substitue à un ion calcium sur dix au sein du cristal osseux. À l’arrêt du traitement, le contenu osseux en strontium diminue rapidement (environ 50 % en six semaines). UNE ACTIVITÉ DE DÉCOUPLAGE ? Dans le modèle de la rate ovariectomisée, le strontium réduit la perte osseuse induite par la carence hormonale, en particulier en zone trabéculaire, en diminuant la résorption osseuse, alors que la formation osseuse reste élevée. Chez le rat normal recevant du ranelate de strontium pendant deux ans, il est observé une augmentation des propriétés mécaniques osseuses, en particulier des vertèbres et du fémur, associée à une augmentation du diamètre osseux. Lors de tests en compression, la résistance vertébrale augmente de manière dosedépendante. Aucun trouble de la minéralisation n’a été observé dans ces diverses études. Chez le rat en croissance, la stimulation de la formation osseuse semble liée à une réplication augmentée des cellules ostéoprogénitrices. Ainsi, par un mécanisme moléculaire restant à déterminer, le strontium pourrait avoir sur les cellules osseuses une activité de découplage, favorisant la formation et réduisant la résorption osseuse. Deux études de phase II ont été récemment publiées. Chez des femmes récemment ménopausées, le ranelate de strontium, à la dose de 1 gramme par jour, prévient la perte osseuse rachidienne et fémorale observée dans le groupe placebo. Chez des femmes ménopausées ostéoporotiques ayant déjà des fractures vertébrales, le strontium, à la dose de 2 grammes par jour, est capable d’augmenter la densité minérale osseuse (DMO) avec un gain annuel de 7 % au rachis. Une part de l’augmentation de la DMO est artéfactuelle, liée au poids atomique du strontium, et des formules de correction ont été calculées ; toutefois, ces estimations n’ont qu’un intérêt théorique, et, dans la pratique clinique, la valeur densitométrique mesurée peut être prise en compte comme preuve d’effet pharmacologique de la molécule. L’ÉTUDE SOTI Le bénéfice clinique du strontium a été démontré par l’étude SOTI (Spinal Osteoporosis Therapeutic Intervention), randomisée en double aveugle versus placebo, testant son efficacité et sa tolérance à la dose de 2 grammes par jour pendant trois ans chez 1649 femmes, d’environ 70 ans, ayant des fractures vertébrales prévalentes. La réduction La Lettre du Gynécologue - n° 284 - septembre 2003 du risque de présenter une nouvelle fracture vertébrale a été de 41 % en trois ans et de 49 % dès la première année. L’augmentation non corrigée de la DMO du rachis a été de 12 %. Il n’y a pas eu d’effet indésirable plus important dans le groupe strontium que dans le groupe placebo, en dehors d’un excès de diarrhée (6 % versus 3,6 % pour le groupe placebo) survenant essentiellement en début de traitement. Contrastant avec ces effets cliniques, les marqueurs biologiques classiques du remodelage osseux ont peu varié ; leur analyse détaillée est en cours d’étude. EN CONCLUSION Le ranelate de strontium à la dose de 2 grammes par jour (sachet quotidien) a démontré son effet préventif des fractures vertébrales ostéoporotiques. La variation densitométrique est très ample et pourra peut-être être utilisée dans le suivi des traitements. La place de ce nouveau traitement dans la prise en charge de l’ostéoporose reste à déterminer entre les agents antirésorbeurs (bisphosphonates, SERM, estradiol) et les agents ostéoformateurs (tériparatide). Ch. Roux Service de rhumatologie, hôpital Cochin, Paris. Congrès Journée nationale contre l’ostéoporose, le 18 octobre 2003 à l’initiative du Groupe de recherche et d’information sur les ostéoporoses (GRIO), organisée dans une quinzaine de villes françaises. Nice, 14-17 novembre 2003 : IOF Fourth European Symposium on Clinical & Economical Aspects of Osteoporosis and Osteoarthritis. Paris, 16 janvier 2004 : XVIIIe Journée scientifique du GRIO. Rio de Janeiro, 14-18 mai 2004 : IOF World Congress on Osteoporosis. 37