IMAGERIE Imagerie de l’arthrose Damien Loeuille* Ce que l’on savait Place de l’imagerie dans l’arthrose et hiérarchisation des examens Le bilan radiographique permet d’établir le diagnostic d’arthrose, de classer les patients en fonction de la sévérité structurale (critères de Kellgren et Lawrence) et demeure l’examen de référence à effectuer en première intention quelle que soit l’articulation examinée. À la hanche et au genou, l’incidence et les conditions techniques ont été largement étudiées et, pour les autres articulations, notamment portantes, la réalisation de clichés en A B charge est indispensable. À l’exception de la main, l’examen radiographique doit comporter des incidences de face et de profil. Les autres techniques d’imagerie sont classiquement réalisées en seconde intention, dans le but de confirmer une atteinte structurale infraradiographique, de préciser des lésions abarticulaires articulaires ou osseuses et d’éliminer un autre diagnostic. L’IRM est la technique d’imagerie de choix pour l’évaluation des grosses articulations ou des articulations profondes (épaule, genou, hanche et rachis). En dehors de son accessibilité limitée et de son coût élevé, elle permet une évaluation directe du tissu cartilagineux et visualise l’hypersignal T2 de l’os, l’épanchement articulaire et les structures abarticulaires. Pour les petites articulations, l’échographie est l’examen de seconde intention. Il précise l’existence de signes inflammatoires (synovites, ténosynovites), détermine la nature des tuméfactions périarticulaires (kyste, nodules) et élimine d’autres étiologies : rhumatismes inflammatoires et pathologies microcristallines (goutte, chondrocalcinose). Évaluation structurale au cours de l’arthrose Radiographie C * Service de rhumatologie, hôpital Brabois, CHU de Nancy. Figure 1. Radiographie du genou droit en schuss (A) et en extension (B). L’alignement des bords doit être respecté (C). 18 | La Lettre du Rhumatologue • Supplément 4 au no 370 - mars 2011 La radiographie de bassin en rotation interne de 10° des membres inférieurs et le faux profil de Lequesne constituent les examens de référence. Un cliché centré de hanche ne se révèle pas supérieur à celui du bassin de face, et ce, même pour une évaluation structurale. Au genou, le bilan doit comporter des incidences comparatives en charge de face, en extension et en schuss, de profil, et une incidence fémoropatellaire de 60° (1). Les incidences en charge en schuss avec fluoroscopie sont actuellement recommandées pour évaluer un effet structural des médicaments (2). Ces incidences doivent être réalisées dans des conditions techniques optimales, supposant IMAGERIE que l’alignement des bords antérieur et postérieur des plateaux tibiaux soit respecté (figure 1) [3]. ◆ Kellgren et Lawrence L’évolution radiographique de la maladie arthrosique s’étend sur plusieurs décennies. Le score de Kellgren et Lawrence est le plus largement utilisé et s’applique à de nombreuses articulations. C’est un score composite qui permet de classer les sujets selon une variable dichotomique, arthrosique ou non (4), et selon la sévérité de la maladie. Ce score peut être utilisé pour juger de l’aggravation de la maladie arthrosique et/ou déterminer le nombre de “progresseurs” dans une population d’arthrosiques par le changement d’au minimum un grade au cours d’une période de suivi. Pour certaines articulations et notamment la main, des scores plus spécifiques ont été proposés, qui tiennent compte à la fois de la sévérité, mais également de l’évolution de la maladie (5-7). ◆ Chondrométrie Cette technique est actuellement recommandée par les autorités sanitaires et les sociétés savantes. Sa simplicité et son excellente reproductibilité lui permettent d’identifier un plus grand nombre de patients “progresseurs” sur une période de 1 an que l’utilisation d’un score composite semi-quantitatif (Kellgren et Lawrence) [8]. La différence minimale entre 2 clichés successifs jugée cliniquement pertinente a été calculée à 0,40 mm à la hanche (9). La plus petite différence minimale détectable (SDD) a été calculée à 0,64 mm sur une incidence en semiflexion et à 0,12 mm pour une technique automatique réalisée à partir de clichés en schuss lyonnais avec scopie. À la hanche, Maheu et al. ont montré qu’une SDD au genou de 0,30 mm sur les incidences de bassin et de 0,28 mm sur le cliché centré de la hanche cible permet de classer les patients comme “progresseurs” (10). Évaluation structurale en IRM ◆ Score semi-quantitatif : WORMS Cette approche repose sur le WORMS-cartilage (Whole-Organ Magnetic Resonance Imaging Score) [11]. Est considéré comme “progresseur” tout patient témoignant d’une aggravation de plus de 1 point dans au moins 1 des 14 régions étudiées. Ce score présente une excellente reproductibilité interlecteur (coefficient intraclasse de corrélation [ICC] = 0,99) ainsi qu’une bonne sensibilité au changement (12). Il permet de déterminer rapidement (en moins de 15 minutes) les lésions articulaires responsables de chondrolyse et d’évaluer l’efficacité structurale des traitements dans la gonarthrose. Étude volumique du cartilage L’étude volumique fournit une valeur numérique qui est peu représentative de l’état structural de l’articulation. De multiples ajustements sur les paramètres anthropométriques (poids, taille, surface du plateau tibial, etc.) doivent être pratiqués et seule l’évaluation du volume cartilagineux ou de l’épaisseur moyenne du cartilage sur les zones portantes est pertinente. L’approche volumique nécessite une station de travail et un logiciel de traitement d’image permettant une présegmentation automatique du cartilage : elle doit être validée coupe par coupe par l’opérateur. Le temps nécessaire à une évaluation volumique complète du genou varie entre 1 heure et 1 heure et demie. Les mesures volumiques sont précises, avec une faible variabilité de la mesure (CV = 6,53 %) [13]. En recherche clinique, la différence minimale décelable correspond à 2,8 fois le coefficient de variation de la mesure. Ainsi, des variations de volume de 4 % pour le cartilage patellaire, de 5 % pour le cartilage fémoral, de 8 % pour le cartilage tibial interne et de 10 % pour le cartilage tibial externe peuvent être considérées comme pertinentes à l’échelon individuel (14-16). Comme pour le WORMS, l’étude volumique permet de déterminer les facteurs de chondrolyse et d’évaluer l’efficacité structurale des traitements dans la gonarthrose. Médicament chondromodulateur Le ralentissement du processus de dégradation du cartilage renvoie à la notion de structuromodulation, qui se définit comme la capacité d’un traitement à prévenir, à retarder, à stabiliser, voire à réparer les lésions arthrosiques chez l’homme (17). Deux études cliniques ont été réalisées à la hanche (insaponifiables de soja et d’avocat et diacerhéine) [18, 19] et 5 au genou (2 avec le sulfate de glucosamine, 1 avec le sulfate de chondroïtine [Chondrosulf®], 1 avec le risédronate et la dernière avec la doxycyline) [20-24]. En dehors de l’étude STOPP qui répond sur le plan méthodologique aux recommandations actuelles émises par les sociétés savantes, les autres études montrent soit l’absence d’effet structuromodulateur, soit des limites méthodologiques qui doivent pondérer certaines conclusions (25). La Lettre du Rhumatologue • Supplément 4 au no 370 - mars 2011 | 19 IMAGERIE Imagerie de l’arthrose L’arthrose digitale Cette arthrose répond à une origine multifactorielle avec un poids important des facteurs génétiques, métaboliques et mécaniques. Les formes érosives représentent entre 10 et 20 % des arthroses digitales et se définissent par l’existence d’au moins 2 articulations érodées à la radiographie. L’IRM haute résolution (100 μm) a montré que les premières étapes de la maladie débutaient par une atteinte des structures ligamentaires (épaississement ou rupture ligamentaires) et un hypersignal T2 de l’os trabéculaire juxta-ligamentaire, suivis de lésions plus classiques : amincissement du cartilage, ostéophyte, synovite modérée et hypersignal T2 de l’os juxtaarticulaire. Ces anomalies font évoquer davantage une maladie de type “enthésitique” (26). Cependant, il est possible de différencier un doigt arthrosique, qui présente des lésions inflammatoires focales, d’un doigt porteur d’un rhumatisme psoriasique, qui présente une inflammation intraligamentaire, un œdème osseux et une atteinte de la racine de l’ongle plus sévères et diffuses (27). Gonarthrose et coxarthrose Des progrès considérables ont été accomplis ces dernières années grâce à l’IRM, qui a permis de mieux définir les mécanismes qui aboutissent à la destruction du cartilage en précisant les différentes entités anatomiques incriminées et en déterminant A B Figure 2. A. Radiographie de genou en schuss, normale. B. IRM du même genou montrant une destruction cartilagineuse du compartiment externe, un œdème osseux condylien et un épanchement. L’interligne articulaire est préservé grâce à l’intégrité méniscale. 20 | La Lettre du Rhumatologue • Supplément 4 au no 370 - mars 2011 les facteurs pronostiques cliniques et structuraux. Cette approche quasi “arthroscopique” de l’articulation montre avec précision l’atteinte cartilagineuse, l’épanchement articulaire, l’inflammation synoviale et les atteintes méniscales. Ainsi, dans la coxarthrose à destruction rapide, l’atteinte articulaire en IRM est associée à des lésions osseuses et à une inflammation articulaire majeure (épanchement et synovite) [28]. Cartilage ◆ Qu’apporte l’IRM par rapport à la radiographie dans l’évaluation du cartilage ? La radiographie montre certaines limites pour diagnostiquer les formes débutantes d’arthrose et évaluer la progression structurale sur une courte période. À visée diagnostique, l’IRM montre, dans 35 % des cas, l’existence de lésions focales du cartilage alors que la radiographie est jugée normale (29) [figure 2]. En termes de suivi, l’IRM permet de dépister 3 fois plus de patients “progresseurs” que l’examen radiographique (30) et de préciser l’origine de la perte de l’interligne articulaire au genou (origine méniscale ou cartilagineuse) [31]. ◆ Évaluation morphologique du cartilage en IRM L’IRM permet une visualisation directe, tridimensionnelle du cartilage, qui apparaît comme une fine bande régulière en isosignal sur les séquences pondérées T2, en hypersignal sur les séquences T1 en écho de gradient, qui recouvre l’os sous-chondral épiphysaire. Les lésions peuvent être évaluées selon leur profondeur, leur étendue et leur localisation. Classiquement, les lésions sont gradées en lésions structurales (grade 1) et en lésions morphologiques (grades 2 à 4) [32]. ◆ Continuum entre lésion focale et atteinte diffuse du cartilage On sépare classiquement les lésions focales, souvent post-traumatiques, de la maladie cartilagineuse, qui se caractérise par une atteinte diffuse touchant un ou plusieurs compartiments articulaires. Les lésions focales du cartilage sont fréquentes : 33 % des patients ayant des radiographies de genou jugées normales en ont, avec une localisation préférentielle dans le compartiment fémoro-tibial interne (33). Ces lésions déstabilisent le cartilage avoisinant en provoquant une diminution volumique par rapport à une population normale sans lésion, ajustée sur l’indice de masse corporelle (IMC) et les paramètres anthropométriques (34). IMAGERIE Hypersignal T2 de l’os et arthrose La traduction anatomo-pathologique de cette lésion IRM correspond à un véritable œdème osseux histologique dans seulement 4 % des cas ; mais l’aspect histologique est le plus souvent celui d’un tissu osseux normal (53 %), plus rarement celui d’une plage nécrotique (11 %), d’une zone fibrotique (4 %) ou d’une sclérose des travées osseuses (8 %) [35]. Fréquemment observé en IRM – 50 à 80 % des gonarthroses en présentent –, cet hypersignal T2 de l’os est situé préférentiellement dans le compartiment de contrainte (36). La fréquence de cet hypersignal T2 de l’os est directement corrélée à la sévérité de la gonarthrose (37, 38). Des travaux récents ont montré une augmentation du processus de remodelage osseux, notamment de l’ostéoformation, ainsi que de la densité minérale osseuse (figure 3) [39]. En revanche, aucune corrélation n’a jusqu’ici été mise en évidence entre cette lésion de l’os trabéculaire et une fragilité osseuse (40). Sur le plan clinique, cette lésion est associée aux manifestations douloureuses dans la gonarthrose, avec un facteur de risque variant de 1,1 à 14,2 (41, 42). Sur le plan structural, cette lésion joue un rôle délétère pour le cartilage adjacent et favorise sa disparition avec un odds-ratio compris entre 2,8 et 5,6 (43). Méniscopathie La lésion méniscale non traumatique, encore appelée “dégénérative”, survient sans traumatisme vrai ou est décompensée au cours d’un traumatisme mineur chez un individu de la cinquantaine. On parle ici de “ménisque maladie” (1). La lésion méniscale dégénérative primitive ou “maladie méniscale” est le prélude à une arthrose secondaire ou évolue parallèlement à cette dernière. Devant toute symptomatologie évocatrice de lésion méniscale, il est donc indispensable de débuter par un examen radiographique si le patient a plus de 40 ans. En présence d’une anomalie radiographique, la gonalgie est, jusqu’à preuve clinique du contraire, consécutive à la maladie arthrosique et non pas à la lésion méniscale. En revanche, si le bilan radiographique est normal, l’IRM, qui sera alors demandée, constitue l’examen de référence. Compararativement à l’arthroscopie, l’IRM présente une excellente sensibilité (91 %), une bonne spécificité (71 %) et d’excellentes valeurs prédictives négative et positive. Au cours de la gonarthrose, l’objectif assigné à l’IRM est de préciser ce qui fait mal dans un genou peu ou non arthrosique : la lésion méniscale dégénérative, le cartilage usé (mise à nu de l’os sous-chondral) ou l’inflammation (1), et d’éviter Figure 3. L’hypersignal osseux en séquence T2 est associé à un processus d’ostéoformation dans la gonarthrose (favorise également la formation d’ostéophytes). ainsi un geste chirurgical inutile. En effet, la prévalence à l’IRM des hypersignaux méniscaux sans symptômes est de 5 % avant 30 ans, de 15 % avant 45 ans et de 25 à 63 % après 65 ans. En cas d’arthrose et de douleurs associées, la prévalence des lésions méniscales augmente encore et atteint 91 % (1). L’IRM est donc peu utile, car elle montre des lésions articulaires arthrosiques algogènes (œdème osseux, lésions abarticulaires, épanchement) et des lésions méniscales dégénératives qui, dans la plupart des cas, se résolvent spontanément de manière favorable en un peu moins de 1 an. Ce que l’on a appris Arthrose digitale Évaluation radiographique Les formes érosives se singularisent par un nombre d’articulations douloureuses plus important, une perte de la mobilité plus marquée et une perte fonctionnelle ainsi qu’un a priori esthétique négatif et mal vécu (figure 4). L’évaluation structurale de l’arthrose digitale est en pleine restructuration. La classique évaluation selon Kellgren et Lawrence est actuellement revisitée. Le poids de la composante ostéophytique est plus important que celui du pincement articulaire, ce qui facilite la lecture (44). D’autres approches ont également vu le jour dans le but de mieux La Lettre du Rhumatologue • Supplément 4 au no 370 - mars 2011 | 21 IMAGERIE Imagerie de l’arthrose appréhender un effet structuromodulateur (45). Ainsi, G. Verbruggen et son équipe ont développé un score radiographique reproductible, sensible au changement, qui évalue 3 domaines : l’interligne articulaire, la forme du plateau sous-chondral et l’aspect de l’os sous-chondral. Chaque articulation est évaluée de 0 à 100 (100 représentant une articulation normale et 0 une articulation complètement détruite) pour chacun de ces domaines, et le score total varie de 0 à 300. Avec d’excellentes corrélations comprises entre 0,71 et 0,99, supérieures à celles observées avec le score de Kellgren et Lawrence, la plus petite différence identifiable a été calculée à 40 points à 12 mois. La progression radiographique articulaire peut être définie et la chronologie des événements qui conduisent à la destruction articulaire puis à la reconstruction a pu être identifiée. Ainsi, à une phase quiescente, définie par des changements structuraux mineurs, succèdent une phase de chondrolyse articulaire, puis une phase érosive. Cette dernière peut être suivie d’une phase de reconstruction articulaire avec restitution quasi ad integrum de l’articulation. L’ensemble de ces événements peut être observé sur une courte période (30 mois). Ainsi, dans un essai clinique visant à évaluer l’effet structural de l’adalimumab, Verbruggen et al. montrent que, sur l’ensemble de la population, une progression radiographique est observée dans 60 % des cas avec leur méthode, contre seulement 33 % avec le score de Kellgren et Lawrence. Évaluation échographique L’examen échographique est particulièrement performant pour diagnostiquer ces formes érosives, avec une excellente concordance avec la radiographie (94 %). L’examen échographique se révèle 2 fois plus sensible que la radiographie pour déceler la présence d’ostéophytes. Les articulations érosives ne se révèlent pas plus inflammatoires (synovite en mode doppler B et synovite active en mode DP) que les articulations arthrosiques classiques. En revanche, lorsque l’articulation entre dans une phase érosive, l’activité inflammatoire semble plus intense (46). Gonarthrose Épanchement et chondrolyse Si l’œdème osseux et les lésions méniscales sont bien documentés comme facteurs prédictifs de lésions structurales radiographiques, qu’en est-il des autres lésions articulaires ? Dans ce travail réalisé à partir de l’analyse de 177 patients inclus dans un essai sur la glucosamine, les auteurs ont étudié les facteurs conduisant à une destruction articulaire visible à l’IRM à court terme (6 mois). La perte cartilagineuse a été évaluée à l’aide du WORMS-cartilage. Tout patient dont le score est aggravé de 0,5 point pour l’une des 8 régions déterminées est considéré comme “progresseur”. Les facteurs de progression pour l’articulation fémoro-patellaire sont l’épanchement articulaire et la présence préalable de lésions du cartilage ; pour le compartiment fémoro-tibial, ce sont l’œdème osseux, les luxations méniscales et l’existence préalable de lésions cartilagineuses (47). Chondrolyse et œdème osseux Figure 4. Arthrose digitale érosive atteignant les interphalangiennes distales et épargnant les interphalangiennes proximales et la colonne du pouce. 22 | La Lettre du Rhumatologue • Supplément 4 au no 370 - mars 2011 ◆ Vitamine D et effet sur l’œdème osseux L’hypersignal T2 de l’os joue un rôle prépondérant dans l’aggravation de la destruction du cartilage. Le mécanisme de cette destruction passe par une altération de la texture osseuse liée à un processus d’ostéoformation et par une probable modification de la perfusion vasculaire de l’os sous-chondral avec, comme conséquence, une réduction de l’apport nutritif des couches profondes du cartilage. En revanche, l’hypersignal T2 de l’os ne semble pas s’associer à une fragilité de l’os ou à un défaut de sa minéralisation. Dans une étude présentée cette année à l’ACR est évalué l’impact de la correction d’un déficit en vitamine D sur l’hypersignal T2 de l’os. Au cours d’un essai réalisé sur une IMAGERIE période de 2 ans, 146 sujets atteints de gonarthrose ont été randomisés en 2 groupes : un bras témoin et un bras vitamine D, qui recevait une supplémentation adaptée en fonction de la concentration en vitamine D à 3, 6 et 9 mois dans le but d’obtenir une concentration en 25(OH)D3 ≥ 30 ng/ml. Une évaluation volumique du cartilage et de l’œdème osseux a été effectuée à J0 et à 2 ans. La supplémentation en vitamine D n’a pas amélioré le WOMAC douleur ni l’épreuve de marche sur 20 mètres. Le volume du cartilage est resté inchangé dans les 2 bras, de même que le score d’œdème osseux. La variation de pincement de l’interligne articulaire était inchangée dans les 2 bras. La correction de vitamine D n’améliore pas les paramètres cliniques et structuraux dans la gonarthrose (48). ◆ Sulfate de chondroïtine et effet structural en IRM L’étude de Pelletier et al. est la première étude IRM qui évalue l’efficacité du sulfate de chondroïtine (800 mg) sur le volume cartilagineux et sur les lésions osseuses de la gonarthrose à 6 mois. Cet essai contrôlé en double aveugle, d’une durée de 6 mois, suit en période ouverte les 2 groupes de patients qui reçoivent alors du sulfate de chondroïtine. Les patients inclus souffrent de gonarthroses de grades 2 et 3. Des études volumiques du cartilage du genou et une évaluation quantitative de l’hypersignal T2 de l’os ont été effectuées à J0 puis à 6 et 12 mois. Cette étude montre une réduction de la diminution du volume cartilagineux global à 6 mois (p = 0,06) et à 12 mois (p = 0,025) sous sulfate de chondroïtine. Cette diminution a également été observée dans le compartiment fémoro-tibial latéral à 6 mois (p = 0,015) et à 12 mois (p = 0,004), mais non dans le compartiment médial. Une diminution significative du score d’hypersignal T2 de l’os global et latéral est notée, mais non dans le compartiment médial sous sulfate de chondroïtine. Cette étude pilote montre des résultats prometteurs et confirmerait les résultats structuraux de l’étude STOPP. Les mécanismes évoqués passeraient par une action directe sur le cartilage et indirecte sur l’hypersignal T2 de l’os (49). Ce qui peut changer Dans la pratique Le diagnostic d’arthrose reste clinico-radiographique. La maladie évolue classiquement sur plus d’une décennie. Cependant, l’IRM a permis de modifier profondément notre conduite clinique. ➤ La connaissance des lésions articulaires visibles à l’IRM au cours de la gonarthrose constitue un enjeu important pour le rhumatologue en le repositionnant au centre de la prise en charge thérapeutique du patient âgé de 50 ans souffrant de gonalgie. En effet, cet examen permet une approche quasi arthroscopique de l’articulation et offre la possibilité d’identifier des lésions invisibles à l’arthroscopie (atteinte osseuse). La connaissance de ces lésions doit permettre au rhumatologue de : • différencier les lésions algogènes de celles qui ne le sont pas ; • éviter le recours à une exploration invasive inutile (contexte de lésions méniscales sur gonarthrose) ; • établir une liste de facteurs de mauvais pronostic structural (lésions méniscales, épanchement, œdème osseux) qui doit conduire à une prise en charge mieux adaptée (lavage articulaire, infiltration, décharge partielle de l’articulation pendant 2 à 3 semaines) ; • informer le patient sur l’état de l’articulation et expliquer ainsi la discordance radioclinique parfois observée en cas de gonalgie intense et de retentissement fonctionnel important à radiographie normale. L’IRM permet, dans ce cas, le diagnostic de lésions chondrales sévères (mise à nu de l’os sous-chondral) infraradiographiques. Cette démarche permet au patient d’adhérer à la prise en charge thérapeutique (lavage articulaire, infiltration, viscosupplémentation, décharge) et, en cas d’échec du traitement médical bien conduit, d’envisager avec plus de confiance un traitement chirurgical (ostéotomie de réaxation chez un sujet de moins de 50 ans avec troubles statiques des membres inférieurs ou mise en place d’une prothèse). ➤ L’IRM devrait permettre de mieux comprendre le point d’impact des traitements symptomatiques dans l’arthrose et, plus particulièrement, dans la gonarthrose. Nous disposons actuellement d’outils cliniques performants (indices algofonctionnels, PASS, critères OARSI de réponse) susceptibles d’évaluer l’efficacité des thérapeutiques. En revanche, nous sommes dans l’impossibilité d’expliquer par quel mécanisme agissent ces traitements et quels sont leurs points d’impact sur les structures articulaires (cartilage, os ménisque, synoviale). ➤ Et pourquoi pas l’échographie ? Le recours à l’IRM est quasiment impossible en pratique clinique. En effet, cet examen est réalisé généralement plusieurs mois après le début des symptômes alors que le traitement est déjà entrepris. D’autres stratégies d’imagerie doivent être alors proposées. L’essor récent de l’échographie dans le diagnostic et le suivi des rhumatismes inflammatoires est incontestable. Dans l’arthrose digitale, des travaux récents ont permis de caractériser La Lettre du Rhumatologue • Supplément 4 au no 370 - mars 2011 | 23 IMAGERIE Imagerie de l’arthrose des lésions structurales infraradiographiques, d’en diagnostiquer un plus grand nombre et de mettre en évidence des signes inflammatoires (synovites). Au genou et à la hanche, l’examen échographique est un complément de l’examen radiographique, car il décèle des signes d’inflammation articulaires. Cet examen permet de mieux discerner les formes cliniques d’arthrose, sèche ou congestive. Comme pour la polyarthrite rhumatoïde, la standardisation des plans d’acquisition et la définition échographique des lésions élémentaires est en cours de validation. Sur le plan osseux, la scintigraphie constitue une excellente alternative à l’IRM. En effet, dans le cadre d’une gonarthrose fémoro-tibiale interne, la mise en évidence d’une hyperfixation du compartiment interne à J0 prédit une perte de hauteur de l’interligne fémoro-tibial à 2 ans (50). ■ Références bibliographiques 1. Recommandations professionnelles. Prise en charge théra17. Recommendations for the registration of drugs used peutique des lésions méniscales et des lésions isolées du in the treatment of osteoarthritis. Group for the respect ligament croisé antérieur du genou chez l’adulte. Juin 2008. of ethic and excellence in science (GREES): osteoarthritis www.has-sante.fr section. Ann Rheum Dis 1996;55:552-7. 2. Ornetti P, Brandt K, Hellio-Le Graverand MP et al. OARSI- 18. Lequesne M, Maheu E, Cadet C, Dreisler RL. 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