L Pneumopathies d’hypersensibilité : causes cachées

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mise au point
Pneumopathies
d’hypersensibilité :
causes cachées
Hypersensibility pneumonitis: hidden causes
A. Gondouin*, P. Manzoni**, J.C. Dalphin*
L
es pneumopathies d’hypersensibilité (PHS) sont
des pneumopathies de mécanisme immuno­
allergique dues à l’inhalation chronique de substances antigéniques, le plus souvent organiques,
mais parfois aussi chimiques ou métalliques.
Avant d’identifier la cause d’une PHS, il faut déjà en
assurer le diagnostic et nous ferons un rappel sur les
aspects cliniques, histopathologiques, radiologiques
et fonctionnels de ces pathologies.
Les causes sont multiples, parfois évidentes, parfois
difficiles à préciser. Nous évoquerons donc les causes
classiques, puis les causes plus rares et la démarche
diagnostique à mettre en œuvre devant une PHS dont
l’étiologie n’apparaît pas claire au premier abord.
Rappels
Manifestations cliniques respiratoires
et extrarespiratoires
Les manifestations cliniques respiratoires et extrarespiratoires des PHS ont jusqu’à présent été
décrites au moyen de la classification, en 3 stades,
de Richerson (1), qui a été récemment remise en
cause. Une nouvelle classification propose de retenir
2 entités qui permettent d’orienter également le
diagnostic étiologique et évolutif.
* Service de pneumologie, CHU de
Besançon.
** Service de radiologie, CHU de
Besançon.
◆◆ La classification de Richerson
Elle distingue :
➤➤ une forme aiguë, dont les symptômes apparaissent
2 à 9 h après l’exposition, atteignent leur maximum
au cours des 24 premières heures et évoluent durant
quelques heures à quelques jours ; il s’agit d’un état
pseudo-grippal souvent prédominant et de symp-
tômes respiratoires tels que la toux et la dyspnée ;
➤➤ une forme subaiguë, qui apparaît progressivement en quelques jours ou semaines, dominée par
la toux et la dyspnée, et qui peut progresser vers
une dyspnée sévère conduisant à l’hospitalisation ;
➤➤ une forme chronique, de survenue insidieuse sur
une période de quelques mois, avec une toux et une
dyspnée d’effort progressivement croissantes, une
fatigue et un amaigrissement.
◆◆ Nouvelle proposition de classification
L’étude de Y. Lacasse et al. (2) a identifié 2 tableaux
cliniques, qui permettent de suspecter un type de
source antigénique, et d’évolution probablement
différente :
➤➤ dans la forme 1, les symptômes sont essentiellement pseudo-grippaux, semi-retardés et récidivants, le cliché thoracique est fréquemment normal,
et la fonction respiratoire, peu altérée. Le plus
souvent, l’étiologie est microbienne : l’exemple le
plus typique est la maladie du poumon de fermier,
avec ses facteurs étiologiques représentés pas des
bactéries (actinomycètes thermophiles) ou des
moisissures ;
➤➤ la forme 2, la plus répandue, avec crépitants,
possible hippocratisme digital, altération de la
fonction respiratoire (restriction, hypoxie, diminution de la diffusion de l’oxyde de carbone (DLCO)
et fréquentes opacités réticulaires à l’imagerie, est
généralement d’étiologie aviaire.
Cette classification ne recouvre pas celle de
Richerson, puisque la forme 1 est diagnostiquée pour
la moitié des cas en forme aiguë et l’autre moitié
en forme subaiguë ou chronique, et la forme 2 est
diagnostiquée essentiellement (80 % des cas) en
phase chronique.
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Résumé
Mots-clés
Les pneumopathies d’hypersensibilité (PHS) sont des pathologies qui partagent les mêmes aspects cliniques,
fonctionnels, histologiques et radiologiques, mais dont les antigènes responsables et les circonstances
dans lesquelles ils se développent sont extrêmement variés. C’est cette grande diversité qui complique le
diagnostic étiologique d’une PHS.
Une fois le diagnostic posé, l’identification de la cause d’une PHS se fait par :
»» l’interrogatoire, qui est la phase essentielle ;
»» le dosage de précipitines, qui permet de prouver une exposition chronique à une substance ;
»» des prélèvements dans l’environnement du patient, si nécessaire ;
»» des tests de provocation respiratoires réalistes, de moins en moins usités actuellement.
La forme 1 avec manifestations cliniques systémiques
a un pronostic probablement meilleur que la forme 2.
Histologie
Sur le plan histologique, les PHS réalisent une infiltration lymphocytaire et granulomateuse des bronchioles et de l’interstitium (figure 1).
Il est important de connaître les aspects histologiques, car ils permettent de comprendre les aspects
radiologiques et fonctionnels des PHS (3, 4).
On note une inflammation péribronchiolaire
s’étendant à l’interstitium et aux alvéoles adjacentes, composée principalement de lymphocytes, mais aussi de polynucléaires neutrophiles,
de macrophages, de plasmocytes et de mastocytes,
accompagnés de cellules géantes et se groupant
en granulomes de petite taille, mal organisés, sans
nécrose caséeuse, de localisation centrolobulaire. Par
ailleurs, ces granulomes entourent et/ou compriment
les bronchioles terminales et respiratoires, dont la
lumière peut en outre comporter de la fibrine et des
cellules inflammatoires.
Enfin, il existe dans certaines formes des lésions de
fibrose interstitielle et bronchiolaire.
avec distension lobulaire pourra apparaître soit spontanément, soit lors de l’expiration (figure 4, p. 11).
Enfin, des lésions de fibrose parenchymateuses et
bronchiolaires, se développant dans les formes chroniques, peut résulter un aspect tomodensitométrique
comparable à celui des fibroses pulmonaires idiopathiques (FPI), mais la répartition typique, périphérique
et dans les bases, des lésions de FPI manque, et il faut
rechercher attentivement des signes d’“activité” de
la maladie, sous la forme de quelques micronodules
inhabituels dans les FPI, ou de plages en verre dépoli,
qui orienteront le diagnostic (figure 5, p. 11).
Épreuves fonctionnelles respiratoires
Les épreuves fonctionnelles respiratoires mettent en
évidence un trouble ventilatoire restrictif, inconstant, avec une hypoxie de repos ou révélée à l’effort,
et une altération de la DLCO. Mais une atteinte
obstructive distale, due à l’atteinte bronchiolaire, est
également classique. Notons que les anomalies des
volumes et des débits sont réversibles en quelques
semaines à quelques mois, alors que la DLCO reste
altérée en moyenne 1 an après le diagnostic, ce qui
en fait un examen diagnostique de valeur lorsque
le patient est vu avec retard.
Pneumopathies
d’hypersensibilité
Causes
Interrogatoire
Précipitines
Prélèvements
environnementaux
Summary
Hypersensitivity pneumonitis
(HP) are diseases which share
the same clinical, functional,
histologic and radiologic aspects.
However, the responsible antigens and their circumstances of
development are highly varied.
This diversity complicates the
aetiological diagnosis of HP.
When the diagnosis is done, the
cause of a HP is specified by:
- a thorough history, which is
essential;
- the assay of precipitins, which
allows to prove a chronic exposure to a substance;
- takings in the patient’s environment if necessary;
- realistic provocation tests,
which are nowadays rarely used.
Keywords
Hypersensitivity pneumonitis
Causes
History
Precipitins
Environmental takings
Imagerie
Les aspects radiologiques découlent des atteintes
histopathologiques, et sont au mieux analysés sur
une tomodensitométrie (TDM) thoracique avec
coupes millimétriques et expiratoires.
Les granulomes péribronchovasculaires sont responsables des images de micronodules flous en verre
dépoli de topographie centrolobulaire (figure 2, p. 10).
Si le granulome inflammatoire est localisé dans l’alvéole ou dans sa paroi, le lobule secondaire apparaîtra
uniformément hyperdense, réalisant un aspect en
verre dépoli diffus, souvent inhomogène, “en carte
de géographie” (figure 3, p. 10). Néanmoins, du fait
de l’obstruction des bronchioles par des granulomes
péribronchiques, certains lobules seront épargnés par
le processus pathologique et donneront un aspect
de poumon “en mosaïque”. En fonction du degré de
cette obstruction bronchiolaire, le trappage aérique
Figure 1. Aspect de bronchiolite constrictive avec granulomes à cellules géantes dans la
paroi bronchique et infiltrat lymphocytaire étendu aux cloisons alvéolaires adjacentes.
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Pneumopathies d’hypersensibilité : causes cachées
lymphocytaires n’a pas grand intérêt ; en tout cas, le
dogme de l’alvéolite à lymphocyte CD8+ doit être
oublié, ce que confirme une étude rétrospective multicentrique française qui porte sur 139 cas de PHS (5).
Proposition de critères diagnostiques
Figure 2. Tomodensitométrie thoracique (haute résolution) en inspiration, coupe millimétrique. Micronodules flous centrolobulaires des 2 champs pulmonaires : maladie
du poumon de fermier.
Le diagnostic reste difficile à l’heure actuelle et
aucun des nombreux “algorithmes” diagnostiques
proposés dans la littérature n’a été validé. Une étude
multicentrique internationale comportant plus de
600 sujets a identifié 6 prédicteurs diagnostiques
“cliniques”, indépendants les uns des autres, qui
permettent de distinguer les PHS des autres pneumonies interstitielles avec une bonne sécurité (6).
Ces prédicteurs, ou critères diagnostiques, classés
par ordre de poids décroissant, sont les suivants :
➤➤ exposition à un antigène connu pour être pathogène ;
➤➤ positivité de la sérologie sanguine vis-à-vis de
cet antigène ;
➤➤ récurrence des symptômes à type de fièvre, frissons, douleurs diffuses, toux, dyspnée ;
➤➤ apparition des symptômes 4 à 8 heures après
l’exposition à l’antigène ;
➤➤ présence de crépitants à l’auscultation ;
➤➤ amaigrissement.
Il faut cependant préciser que ce diagnostic difficile
ne sera parfois évoqué qu’après une biopsie pulmonaire chirurgicale. Ce sera alors l’aspect histologique
compatible avec une PHS qui conduira à reprendre
le bilan et, en particulier, un interrogatoire orienté.
Traitement
Figure 3. Tomodensitométrie thoracique (haute résolution) en inspiration, coupe millimétrique. Plages de verre dépoli inhomogènes : pneumopathie d’hypersensibilité liée à
des moisissures domestiques.
Lavage bronchoalvéolaire
Le lavage bronchoalvéoalaire (LBA) est également
d’un grand apport diagnostique. La cellularité est
élevée, et l’hyperlymphocytose constante (> 30 %
chez le non-fumeur et > 20 % chez le fumeur), son
absence éliminant le diagnostic. La formule peut
varier selon le moment de la réalisation du LBA par
rapport à l’exposition, et, si celle-ci est récente, on
pourra voir également des polynucléaires neutrophiles, quelques plasmocytes et mastocytes ainsi
que des macrophages spumeux, cet aspect étant très
évocateur d’une PHS. L’étude des sous-populations
Le traitement de ces PHS est l’éviction antigénique,
parfois associée à une corticothérapie par voie générale dans les formes aiguës et sévères. Cette éviction
permet, si elle est précoce, d’éviter l’évolution vers
la fibrose pulmonaire et l’insuffisance respiratoire.
Causes des pneumopathies
d’hypersensibilité
Les PHS peuvent survenir dans un contexte professionnel ou non professionnel.
Les causes organiques sont de loin les plus
fréquentes : bactéries, moisissures, substances
protéiques d’origine animale (protéines aviaires).
Les exemples les plus connus sont la maladie du
poumon de fermier – les substances responsables
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sont alors des bactéries (actinomycètes thermophiles) ou des moisissures se développant dans
le foin (7, 8) – et la maladie des éleveurs d’oiseaux –
les antigènes y sont des protéines aviaires (9).
D’autres étiologies deviennent classiques, qu’elles
soient identifiées dans des circonstances professionnelles ou domestiques : PHS liées à des moisissures domestiques se développant au domicile des
patients (10), PHS des mécaniciens liées à des mycobactéries colonisant les huiles de coupe (11), PHS
des jacuzzi (12) où sont mises en cause des mycobactéries colonisant les circuits d’eau, etc.
Mais d’autres substances non organiques peuvent
être en cause dans les PHS : chimiques (isocyanates,
cobalt, zinc), enzymatiques (enzymes protéolytiques
contenus dans des produits ménagers, etc.).
Les circonstances les plus fréquentes sont regroupées dans le tableau, p. 12. La liste complète des
causes des PHS peut être consultée dans la Référence
pratique actuelle rédigée par le GERM“O”P et actualisée en 2010 (13). Les causes professionnelles ont
fait l’objet d’un recensement récent (14).
Causes évidentes et causes cachées
Lorsque l'on suspecte une PHS devant une pneumopathie interstitielle diffuse pour laquelle on a
un faisceau d’arguments, la cause peut apparaître
d’emblée à l’interrogatoire : PHS chez un agriculteur,
ou chez un mécanicien manipulant des huiles de
coupe, PHS chez un patient qui décrit des foyers de
moisissures à son domicile, ou qui possède un jacuzzi.
Mais, dans certaines circonstances, le diagnostic
étiologique peut être difficile, la cause étant dans
un premier temps cachée.
Plusieurs cas de figures peuvent se présenter.
Patient 1
Patient 2
Figure 4. Tomodensitométrie thoracique (haute résolution), coupes (1,25 mm) en inspiration
et expiration de 2 patients. Patient 1 : micronodules et discrètes plages en verre dépoli. Les
coupes en expiration démasquent des hyperclartés lobulaires, traduisant le piégeage aérique
lié aux lésions de bronchiolite et réalisant un aspect “en mosaïque” : maladie du poumon de
fermier. Pour le patient 2, les coupes en inspiration peuvent apparaître quasi normales, mais
les coupes en expiration révèlent l’aspect “en mosaïque” : maladie du poumon de fermier.
◆◆ Cause fréquente, connue et classique, mais
l’exposition n’est pas retrouvée au premier abord
Cas d’une secrétaire, sans animaux à son domicile,
en contact régulier avec des oiseaux lors de visites
chez ses parents qui possédent une volière.
L’interrogatoire ne doit donc pas se limiter à l’environnement direct du patient ; une exposition pourtant
classique pourrait alors être facilement méconnue.
◆◆ La cause est connue (par exemple
des moisissures), mais les substances antigéniques
se développent dans des circonstances rares,
inhabituelles, et sont parfois véritablement cachées
Les exemples de PHS diagnostiquées dans
ces circonstances sont nombreux et très variés,
Figure 5. Tomodensitométrie thoracique (haute résolution) coupe millimétrique : aspect
de fibrose pulmonaire avec réticulations et distorsion architecturale avec bronchectasies
de traction pouvant évoquer une fibrose pulmonaire idiopathique, mais la répartition
périphérique et basale fait défaut et on note encore quelques plages en verre dépoli :
pneumopathie d’hypersensibilité aviaire.
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Pneumopathies d’hypersensibilité : causes cachées
Tableau. Causes les plus fréquentes ou classiques des pneumopathies d’hypersensibilité (extrait de la Référence pratique actuelle 2010 du GERM“O”P [13]).
Dénomination
Réservoir antigénique habituel
Antigène en cause
PHS professionnelles
Maladie du poumon de fermier
Foin, fourrage, paille, céréales, fumier, substances végétales moisies
Bactéries (actinomycètes thermophiles dont Saccharopolyspora rectivirgula, bactéries Gram–), moisissures
(micromycètes dont Absidia corymbifera, Eurotium
amstelodami et différents types de penicillium)
Maladies des éleveurs d’oiseaux
Déjections, sérum d’oiseaux (pigeons, poules, dindons, oies)
Protéines aviaires
PHS des fromagers
Moisissures des fromages
Moisissures de type penicillium
PHS des champignonnistes
(lycoperdose)
Compost des champignons, champignons eux-mêmes
Bactéries (actinomycètes thermophiles), moisissures
(micromycètes), spores des champignons
PHS des cribleurs de pommes
de terre
Moisissures présentes sur les pommes de terre
Actinomycètes thermophiles, Aspergillus sp.
Botrytis cinerea, Panonychus ulmi
PHS des vignerons
Moisissures du raisin (pourriture grise), araignée rouge
Bagassose
Résidus moisis de canne à sucre
Actinomycètes thermophiles
PHS des ouvriers du malt
Orge moisie, houblon germé
Aspergillus fumigatus, Aspergillus clavatus
PHS au saucisson
Fabrique de saucissons secs, de salamis, étiquetage des saucissons
Moisissures de type penicillium
PHS des travailleurs du bois
Poussières de chêne et d’érable, de séquoia, moisissures sous l’écorce
du bois, dans les vieilles planches, dans la sciure
Moisissures
Stipatose
Sparte (herbe de la famille des g­ raminées entrant dans la c­ omposition
de paniers, cordes, ficelles, plâtre, p­ roduits et fibres de nettoyage)
Moisissures (actinomycètes thermophiles,
micromycètes), Stipa tenacissima
PHS des mécaniciens
Aérosols de liquide d’usinage des métaux
Mycobactéries (Mycobacterium ­immunogenum,
Mycobacterium c­ helonae complex), Pseudomonas
fluorescens ?
PHS des travailleurs de l’industrie
chimique (ou de secteurs industriels
utilisateurs)
Industries (et utilisation) du plastique, laques, vernis, peintures,
mousses ­polyuréthanes, moulage en fonderie
Isocyanates, anhydrides trimélitiques, résines époxydiques
PHS des prothésistes dentaires
Méthylmétacrylate
PSH non professionnelles
PHS aviaires domestiques
Tourterelles, perruches, inséparables, perroquets, colombes,
canaris, pigeons
Protéines aviaires
PHS des humidificateurs
ou climatiseurs
Système de climatisation et/ou d­ ’humidification, ou système de
v­ entilation ou de chauffage par air pulsé, humidificateurs portables,
­humidificateurs ­ultrasoniques, huile de radiateur soufflant
Moisissures (actinomycètes t­ hermophiles,
micromycètes), bactéries, antigène aqueux
Fièvre d’été (au Japon)
Poussières de maisons provenant des toits ou des sols
Trichosporon cutaneum, Trichosporon ovoides,
Trichosporon asahii, Cryptococcus albidus
PHS liées aux moisissures
domestiques
Moisissures se développant dans les pièces d’eau, les habitations
humides, lors de dégâts des eaux
Diverses moisissures
PHS des jacuzzi
Moisissures se développant dans les canalisations des jacuzzi
Cladosporium cladosporioides, M
­ ycobacterium avium
intracellulare
tant en milieu professionnel que domestique :
➤➤ agriculteur possédant un tracteur dont le
système de climatisation est contaminé par des
bactéries (piège avec une maladie du poumon de
fermier classique !) ;
➤➤ ouvriers saupoudrant des moisissures sur des
objets laqués pour les vieillir artificiellement (fabrication artisanale de bibelots au Japon) ;
➤➤ vignerons exposés à des moisissures de raisin ;
➤➤ ouvriers du liège (bûcherons ou ouvriers d’entreprises de fabrication de bouchons) développant des
PHS aux moisissures du liège (subérose) ;
➤➤ ouvriers du nettoyage à sec manipulant du tétrachloroéthylène ;
➤➤ musiciens utilisant des instruments à vent et
inhalant des moisissures développées dans les
anches, le bec ou le corps de l’instrument ;
➤➤ patient utilisant un ventilateur en pression
positive continue nocturne mis en place pour un
syndrome d’apnées du sommeil dont la tuyauterie
était contaminée par des moisissures ;
➤➤ patients au domicile desquels peuvent se développer des moisissures inapparentes, par exemple
après un dégât des eaux provoquant le développement d’agents fongiques sous les linoléums ou
sous les parquets ;
➤➤ patiente utilisant un fer à repasser dont le réservoir d’eau était contaminé par des moisissures.
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Certains de ces exemples peuvent paraître anecdotiques mais illustrent bien la grande variété
des causes de PHS et l’importance de réaliser un
interrogatoire poussé, après avoir consulté la liste
exhaustive des causes de PHS.
◆◆ Cause rare, non répertoriée
Régulièrement, des cas de PHS avec un agent causal
nouveau sont publiés. S’il y a de forts arguments pour
le diagnostic, il faut réaliser un interrogatoire “policier” sur l’environnement du patient et ses activités,
identifier les circonstances de déclenchement des
symptômes, faire d’éventuels tests d’éviction si l’on
pense avoir identifié une substance antigénique et
réaliser des prélèvements pour confirmer la présence
et l’implication de cette substance.
Cause des PHS : comment
obtenir le diagnostic ?
◆◆ Interrogatoire
L’interrogatoire reste la pièce maîtresse du diagnostic
étiologique.
Il doit comporter :
➤➤ des renseignements sur la profession, le poste
exact, et les substances manipulées, que ce soit par
le patients ou ses collègues, dans un même atelier
ou des ateliers voisins, éventuellement avec l’aide
du médecin du travail ;
➤➤ des renseignements sur l’environnement habituel du patient : animaux (oiseaux), présence de
moisissures au domicile, circonstances ayant pu
être responsables du développement de moisissures (dégât des eaux, inondations), agencement de
l’habitation (cave, grenier, objets entreposés, etc.),
habitudes au domicile (utilisation d’humidificateurs,
d’oreillers ou de duvet en plumes, etc.) ;
➤➤ des renseignements sur un environnement autre :
visites fréquentes d’un lieu (parents, amis, salle sportive, thermes, etc.) ;
➤➤ des renseignements sur les hobbies du patient :
musique, bricolage, jardinage, etc.
Cet interrogatoire peut être orienté par la consultation de la liste exhaustive des causes des PHS qui
peut également être fournie au patient afin qu’il
identifie une circonstance étiologique le concernant.
◆◆ Dosage de précipitines
La présence de précipitines sériques signifie une
sensibilisation chez un sujet prédisposé qui témoigne
d’une exposition souvent importante et prolongée
à un antigène. Mais elle n’est pas obligatoirement
le témoin du développement d’une PHS. On peut
observer la présence de précipitines chez des sujets
exposés, mais non malades, et ceux-ci ne semblent
pas avoir un risque accru de développer une PHS ultérieurement (15). À l’inverse, les précipitines devraient
toujours être positives chez un sujet malade, puisqu’il
est exposé de manière significative, mais on observe
des faux négatifs, liés au fait que les antigènes testés
ne sont pas forcément représentatifs de l’exposition (16, 8). Par exemple, dans le Doubs, avec un
panel d’antigènes commercial, la valeur diagnostique
des précipitines est faible, alors que l’utilisation d’un
panel actualisé d’antigènes incluant l’antigène majeur
du poumon de fermier – Absidia corymbifera – donne
des résultats convaincants, avec de bonnes spécificité
et valeur prédictive négative (17).
Dans certains cas difficiles, on peut donc augmenter
la rentabilité diagnostique en faisant des prélèvements dans l’environnement professionnel ou
domestique du patient, en y isolant l’antigène
responsable et en créant un panel antigénique “à la
carte” contre lequel sera testé le sérum du patient.
À noter que les techniques utilisées pour la détection
de précipitines sont très nombreuses et ne sont pas
toujours standardisées. Parmi elles, l’immunoélectrophorèse et, surtout, l’électrosynérèse (figure 6)
semblent offrir un compromis sensibilité-spécificité
satisfaisant.
Antigène
Arcs de précipitation
Sérum
Figure 6. Électrosynérèse sur acétate de cellulose. Le sérum de 3 patients est testé.
La migration des antigènes et des anticorps est favorisée par un courant électrique.
Le nombre et l’épaisseur des arcs de précipitation des 3 sérums sont différents.
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Pneumopathies d’hypersensibilité : causes cachées
◆◆ Prélèvements au domicile
ou sur le lieu de travail du patient
Quand la suspicion d’une PHS est forte et que l’interrogatoire et le dosage des précipitines ne donnent
aucune orientation étiologique, la visite du domicile
ou du lieu de travail du patient par du personnel formé
permet d’avancer dans la démarche diagnostique.
L’environnement du patient est étudié de manière
complète et des prélèvements sont faits : prélèvements de substrats visibles (objets moisis, etc.) dans
des pots stériles, écouvillonnage de surface, prélèvements de poussières par lingettes électrostatiques,
prélèvements d’air à l’aide d’un impacteur.
Les prélèvements sont ensuite mis en culture, les
micro-organismes sont identifiés et on peut former
des panels antigéniques représentatifs de l’environnement du patient et contre lesquels son sérum sera
testé, à la recherche de précipitines témoignant de la
réaction de l’organisme contre l’antigène suspecté.
◆◆ Tests de provocation respiratoires réalistes
Ces tests ne sont plus recommandés actuellement (18), leurs techniques et leurs résultats n’étant
pas standardisés. Toutefois, une étude sur les PHS
non professionnelles d’origine aviaire suggère qu’ils
peuvent être utiles dans les formes chroniques fibrosantes, lorsque les autres critères diagnostiques ne
sont pas présents (19).
On utilise en cabine la source antigénique (foin
moisi, mousses polyuréthanes, etc.), des extraits
antigéniques totaux (solutions liquidiennes d’extraits
de foin, d’isocyanates, etc.) ou des extraits antigéniques spécifiques (par exemple, de Saccharopoly­
spora rectivirgula).
Ces tests sont en général considérés comme positifs devant l’apparition d’une symptomatologie
semi-retardée évocatrice et d’un trouble ventilatoire restrictif avec diminution d’au moins 15 % des
volumes. L’apparition d’une polynucléose neutrophile et d’une lymphopénie sanguine aurait aussi
une valeur diagnostique intéressante.
Une autre manière de faire un test réaliste est de
réexposer le patient à l’antigène suspecté dans
son milieu naturel et de constater une rechute des
symptômes, test qui est fait parfois de manière non
intentionnelle lors du retour au domicile d’un patient
hospitalisé pour pneumopathie interstitielle diffuse
en cours de diagnostic.
Conclusion
Les PHS sont des maladies peu fréquentes, dont la
cause est le plus souvent précisée à l’interrogatoire,
d’autant plus si l’on en connaît les étiologies les plus
courantes et si l’interrogatoire est bien conduit. Mais
l’identification de l’agent étiologique peut poser
problème en cas de cause très rare, ou cachée, qu’il
faut alors s’attacher à retrouver, sans quoi la maladie
pourrait s’aggraver et évoluer vers l’insuffisance respiratoire sévère et le décès, et ce d’autant que l’éviction
est le seul traitement.
■
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14 | La Lettre du Pneumologue • Vol. XVI - n° 1 - janvier-février 2013
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