La Lettre du Rhumatologue - n° 243 - juin 1998
24
MISE AU POINT
a prise en charge des scolioses de l’adulte pose des pro-
blèmes très différents de ceux posés par les scolioses
de l’enfant. Il n’existe pas de critère spécifique indivi-
duel prédictif de l’évolutivité ; seul un suivi clinique et radiolo-
gique rigoureux permet de déterminer l’évolutivité au cas par cas,
et donc d’adapter la prise en charge thérapeutique, centrée essen-
tiellement sur la rééducation.
DÉFINITION
Chez l’adulte, on distingue deux types de scoliose : la scoliose
dite idiopathique et la scoliose dite de novo ou dégénérative ou
sénile.
La scoliose idiopathique de l’adulte
Elle correspond à l’évolutivité, à l’âge adulte, d’une scoliose
apparue dans l’enfance ou l’adolescence. Cette évolutivité a long-
temps été ignorée : sa tolérance clinique est souvent prolongée,
et un recul de 30 à 40 ans peut donc être nécessaire avant qu’une
évolutivité soit mise en évidence. De plus, la prise en charge
médicale des scolioses de l’enfant ou de l’adolescent est effec-
tuée par des équipes spécifiques, différentes de celles qui pren-
nent en charge l’adulte, avec donc un suivi global parfois diffi-
cile à établir. Cependant, dès 1969, Collis et Ponseti (1) ont
objectivé cette évolutivité radiologique. La comparaison, à 24
ans d’intervalle en moyenne, des radiographies de 134 patients
suivis pour scoliose idiopathique de l’adolescence a mis en évi-
dence une augmentation moyenne de l’angle de Cobb de 15°, soit
environ 0,6°/an.
La scoliose de novo de l’adulte
Ce type de scoliose est également décrit dans la littérature sous
le terme de scoliose dégénérative ou de scoliose sénile. Elle cor-
respond à l’existence d’une scoliose vraie, définie par un angle
de Cobb > 10°, découverte à l’âge adulte sans notion de scoliose
pendant l’enfance ou l’adolescence. L’affirmation d’une scoliose
de novo repose donc sur l’existence, rare en pratique, d’une radio-
graphie rachidienne antérieure normale. Il est à noter qu’il
n’existe pas de critère radiologique spécifique permettant de dif-
férencier une scoliose de novo d’une scoliose idiopathique, les
deux types de scoliose étant souvent confondus dans la littéra-
ture. La preuve de l’existence des scolioses de novo repose d’une
part sur la publication de quelques cas indiscutables (figures 1
et 2), d’autre part sur des arguments indirects épidémiologiques :
le sex-ratio se modifie avec l’âge, avec un taux de 8/1 en faveur
du sexe féminin chez les scolioses de l’enfant ou de l’adolescent
et de 2/1 pour les scolioses de l’adulte (2) ; la prévalence des
scolioses, toutes localisations confondues, augmente avec l’âge :
2 à 4 % chez l’enfant ou l’adolescent, 2 à 7 % chez l’adulte de
moins de 45 ans et 15 % environ chez l’adulte de plus de 60 ans.
Par ailleurs, l’incidence des scolioses de novo évaluée par Robin
(3) était de 10 % sur le suivi de 7 à 13 ans de 554 patients âgés
de 45 à 84 ans.
●
Dr G. Dubourg*
L
■Il n’existe pas de critère radiologique spécifique pour dif-
férencier une scoliose dégénérative d’une scoliose idiopa-
thique : seule l’existence d’une radiographie rachidienne
antérieure normale permet d’affirmer le caractère de novo
d’une scoliose.
■Sur le plan individuel, aucun facteur ne permet de prédire
l’évolutivité d’une scoliose. Globalement, 60 % des sco-
lioses des adultes jeunes évoluent de 0,5°/an, 70 à 100 % des
scolioses des adultes d’âge mûr évoluent de 0,4°/an, et 20 %
des scolioses des sujets âgés évoluent de 1°/an.
■Le suivi clinique repose sur des mesures permettant d’ap-
précier une éventuelle évolutivité de la déformation rachi-
dienne dans les trois plans de l’espace, en portant une atten-
tion toute particulière aux déformations dans le plan sagittal
(perte de la lordose lombaire, projection antérieure du
tronc).
■L’évaluation radiologique repose sur l’analyse des grands
clichés rachidiens (rachis cervical aux articulations coxo-
fémorales) de face debout, de face couché et de profil
debout. Leur répétition systématique est inutile : seule l’ap-
parition de complications cliniques et/ou de modifications
des mesures cliniques peut justifier leur renouvellement.
■La place de la kinésithérapie est essentielle dans la prise
en charge thérapeutique. La mise en place d’un corset, par
des appareilleurs expérimentés, permet le plus souvent de
contrôler les douleurs. La kinésithérapie se poursuit sous
corset.
POINTS FORTS
POINTS FORTS
* Service rhumatologie, CHU Pitié-Salpêtrière, bât. C, 75014 Paris.