serait plus présentée au cytochrome P450 3A4. Moins d’acide
cis-9-rétinoïque serait produit, conduisant à la baisse de l’acti-
vité de son ligand, le “retinoic X receptor” (RXR), à une dimi-
nution de la différenciation des adipocytes périphériques et à
une augmentation de leur apoptose, avec un relargage et/ou un
défaut de stockage des lipides.
!L’inhibition de l’isoforme CYP3A du cytochrome P450,
seule enzyme connue capable de convertir l’acide rétinoïque
en acide cis-9-rétinoïque.
!L’inhibition de la LRP, entraînant une diminution de la recap-
ture hépatique des chylomicrons et du clivage des acides gras à
partir des triglycérides circulants par l’intermédiaire de la LRP-
lipoprotéine lipase endothéliale. Cette inhibition conduirait à
une augmentation des triglycérides circulants responsable d’une
redistribution de la graisse au niveau de l’abdomen (et au niveau
des seins sous l’influence des estrogènes), et une insulinorésis-
tance primitive avec, secondairement, un diabète de type 2.
#Enfin, très récemment, une autre hypothèse physiopatholo-
gique a été soulevée (7) : la toxicité mitochondriale des inhi-
biteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse pourrait jouer
un rôle dans le développement de ces lipodystrophies. L’auteur
établit un parallèle entre les lipodystrophies observées chez les
patients VIH sous traitement antirétroviral et la lipomatose
symétrique multiple (7). Cette affection, qui appartient au cercle
de plus en plus large des maladies du génome mitochondrial,
est caractérisée par une hypertriglycéridémie, une résistance à
l’insuline et un stockage anormal des graisses dans les régions
sous-cutanées, le médiastin et la cavité abdominale, s’accom-
pagnant d’une atrophie marquée des extrémités.
Ces résultats indiquent à l’évidence que des études prospec-
tives sont nécessaires afin d’évaluer le rôle des IP, des inhibi-
teurs nucléosidiques de la transcriptase inverse ou de la com-
binaison de ces deux types de molécules dans l’apparition de
ce syndrome.
"Sur le plan thérapeutique, les troubles métaboliques peu-
vent bénéficier d’un traitement par de la metformine, antidia-
bétique oral de la famille des biguanides qui augmente la sen-
sibilité des tissus périphériques à l’insuline (8). Une étude a
montré que la metformine diminue significativement la réponse
plasmatique d’insuline à une administration de glucose du fait
d’une augmentation de la captation du glucose et d’une dimi-
nution de l’hyperglycémie (8). Simultanément, les patients sous
metformine présentent une diminution marquée du tissu adi-
peux viscéral et du ratio graisse viscérale sur tissu adipeux total
associée à une diminution des triglycérides. Ces données cor-
roborent l’idée que l’hyperinsulinisme pourrait être le méca-
nisme primaire entraînant le syndrome d’adiposité centrale chez
les patients recevant des inhibiteurs de protéase. L’hypertri-
glycéridémie constatée chez ces patients pourrait ainsi être
reliée à l’hyperinsulinisme et n’apparaît plus comme la cause
primaire, ainsi que l’ont suggéré Carr et coll. (6).
Les hypolipémiants (fibrates, statines), associés ou non à un
régime, sont fréquemment prescrits en raison du risque car-
diovasculaire de l’hyperlipémie. Récemment, Murillas et coll.
(9) ont rapporté les effets de l’atorvastatine sur le profil lipi-
dique de 15 patients traités par une trithérapie incluant du rito-
navir seul (14 patients) ou associé au saquinavir (1 patient). La
diminution des taux de cholestérol et de triglycérides à des taux
attendus a été obtenue en 12 semaines et maintenue sur la durée
du suivi des patients. Il faut toutefois rappeler que le ritonavir
inhibe le métabolisme de l’atorvastatine et augmente ainsi ses
concentrations plasmatiques, exposant le patient traité à des
risques de toxicité musculaire. Aucun effet de ce type n’a été
observé dans l’étude citée. Les auteurs ont conclu que l’ator-
vastatine permet de réduire le risque cardiovasculaire lié aux
trithérapies sans changer de traitement antirétroviral, et avec
une tolérance acceptable du traitement (9).
Enfin, certains auteurs ont proposé à leurs patients présentant
des anomalies morphologiques et métaboliques de modifier leur
traitement. Cette modification a consisté à remplacer l’IP par
un inhibiteur non nucléosidique de la transcriptase inverse,
en l’occurrence la névirapine (10), le reste du traitement étant
inchangé. Après six mois de switch, une amélioration des
anomalies métaboliques et du syndrome de répartition des
graisses a été notée. Cependant, le délai de suivi a été trop court
pour déterminer avec précision l’effet à long terme de l’arrêt
des IP.
À l’heure actuelle, le syndrome de redistribution des graisses,
associant un ensemble d’anomalies morphologiques et méta-
boliques, génère un grand nombre d’interrogations. Un consen-
sus sur la définition exacte de ce syndrome semble nécessaire.
S’il est admis que les anomalies métaboliques (troubles lipi-
diques, intolérance au glucose) sont imputables aux traitements
par IP, la relation entre ces traitements et les modifications cor-
porelles semble moins évidente, quelques rares patients ayant
présenté ce syndrome en dehors de tout traitement antirétrovi-
ral. L’étiologie exacte de ces anomalies reste encore incertaine.
La recherche de facteurs de risque cardiovasculaires (person-
nels ou familiaux) ainsi que le dépistage précoce de ces ano-
malies morphologiques et métaboliques s’avèrent nécessaires
ainsi que l’instauration, dans certains cas, d’un traitement spé-
cifique (metformine, fibrates, statines).
Effets indésirables récemment décrits dans la littérature
Depuis la mise sur le marché des inhibiteurs de protéase, des
effets indésirables nouveaux ont été régulièrement rapportés
dans la littérature. Nous avons fait la synthèse des plus récents.
!Plusieurs cas de gynécomasties unilatérales ou bilatérales ont
été décrits au cours des traitements antirétroviraux (11-13). Ces
observations concernent tous les inhibiteurs de la protéase. Le
mécanisme par lequel les IP pourraient induire ce type d’effet
indésirable est peu documenté. Un effet “estrogène-like” de ces
molécules sur le tissu mammaire a été évoqué, ou une éléva-
tion du ratio estrogène-androgène. Ce dernier mécanisme est
peu vraisemblable, dans la mesure où, lorsqu’ils ont été réali-
sés, les bilans hormonaux se sont toujours situés dans les limites
de la normale.
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La Lettre du Pharmacologue - Volume 14 - n° 2 - février 2000
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