Actualité Santé 9 Les céphalées Comment mesurer la gravité ? Si 70 % des personnes souffrent de céphalées, le diagnostic le plus courant est celui de céphalées primaires. Plus rares mais plus graves, existent cependant des maux de tête révélateurs d’une maladie sous-jacente. Comment faire la différence ? M otif fréquent de consultation, la céphalée ne pose pas de problème diagnostique pur sinon étiologique. La cause est le plus souvent retrouvée par un interrogatoire serré, un examen clinique soigneux et sans avoir besoin de mettre en route de nombreux examens complémentaires. Un interrogatoire précis L’interrogatoire précis va s’attacher à reconstituer les circonstances de déclenchement de la douleur depuis sa date d’apparition, le contexte d’alors, le mode d’installation et d’évolution des troubles. S’agit-il d’une première apparition du trouble, d’une manifestation au contraire récurrente ? En ce cas, quel est le mode évolutif : linéaire ou paroxystique ? Au terme de cette introspection, un premier tri des patients peut être effectué : d’abord les céphalées récentes, inhabituelles, à début brutal, ensuite, les récentes, inhabituelles à début progressif. Deuxième élément de classification : les céphalées chroniques paroxystiques ou quotidiennes. Ces premières investigations permettent aussi de repérer les malades à risques : ceux présentant une douleur de déclenchement brutal et récent, sans antécédents céphalalgiques connus, mais aussi ceux ayant vu les caractéristiques de leurs douleurs communes, habituelles, se modifier sans raison apparente. C’est alors le patient lui-même qui signale ce changement parce qu’il l’inquiète. Pour aider au diagnostic, on doit s’attacher aussi à retrouver des éléments précieux comme l’existence d’une HTA, d’une atteinte néoplasique, d’un syndrome immunodépressif, de pathologies artérielles ou psychologiques. Autant d’éléments qui doivent orienter vers une céphalée primaire sans cependant éliminer d’autres pathologies. Circonstances d’apparition Parmi les éléments d’orientation, on doit s’attacher non pas tellement au type de la douleur, à sa localisation, qui sont en ce cas des données peu significatives, mais aux circonstances de son apparition. Y a-t-il eu un élément vraisemblablement déclencheur ? Comme un traumatisme crânien, une prise médicamenteuse, une ponction lombaire récente, un effort violent (céphalée postcoïtale), une thrombose veineuse ? Retrouvet-on des signes neurologiques d’accompagnement ? Des signes généraux de déficience physique ou immunitaire, des signes d’atteinte artérielle, d’un syndrome méningé ? Toutes ces pistes doivent parfois être explorées à l’aide d’examens complémentaires surtout si la céphalée est récente. L’examen clinique préalable doit être précis, mesurant les paramètres usuels mais surtout s’attachant à évaluer l’état des fonctions cognitives supérieures, en particulier l’état de la conscience. Il doit aussi rechercher l’existence de signes de focalisation, de syndrome cérébelleux, d’anomalies du champ visuel. Un examen normal ne permet pas toujours d’éliminer une pathologie grave sous-jacente. Maladies sous-jacentes À ce stade, on doit tenir compte de la classification instaurée : toute céphalée récente, inhabituelle à début brutal doit être explorée, en urgence. Une pathologie vasculaire est en effet à craindre et à éliminer. En premier : l’hémorragie méningée, puis l’hématome ou l’infarctus cérébral. Sont aussi à craindre les causes infectieuses : une encéphalite ou une méningoencéphalite. Devant un doute, le premier examen à pratiquer alors aux urgences est le scanner cérébral sans injection. Si le doute persiste avec une tomodensitométrie normale, on poursuit par une IRM cérébrale, un échodoppler cervical (recherche de dissection artérielle), une angiographie (dissection artérielle, thrombose veineuse). Autre cas : la céphalée est chronique et date de plusieurs jours, de plusieurs semaines ; c’est alors un tout autre tableau. Elle a toutes les chances d’être primaire et de manifester une migraine, une algie de la face, qui sont les principaux diagnostics. Ceux-ci ont souvent déjà été portés et le patient recherche, en consultant, une solution thérapeutique nouvelle. Cette impression de nomadisme médical injustifié ne doit cependant pas faire courir le risque de passer à côté d’une dépression (se servir des échelles d’évaluation) ou d’une céphalée aux antalgiques (pas si rare). En ce cas, une prise en charge psychologique, dans le premier cas, un arrêt progressif des antalgiques dans le second apporteront la solution. JB Entretiens de Bichat Paris 2004 (Dr Ducros, hôpital Lariboisière Paris) La céphalée aiguë La démarche diagnostique est conditionnée par le mode d’installation de la céphalée. Les céphalées aiguës sont des céphalées récentes non régressives d’installation soudaine ou rapide, qu’elles surviennent de novo ou chez les sujets ayant un passé de céphalées chroniques ; dans ce cas, les céphalées aiguës sont immédiatement reconnues par le patient lui-même comme complètement différentes de ses céphalées habituelles. Infos ... La ponction lombaire Elle doit être impérativement effectuée dans toute céphalée à scanner normal, à la recherche de sang ou d’une méningite, même en l’absence de tout syndrome méningé. Elle n’est pas contre-indiquée en première intention devant un syndrome méningé fébrile sans signes neurologiques focaux et sans troubles de la vigilance ou en cas de suspicion méningée, lorsque le scanner cérébral ne peut être réalisé au préalable. La seule contre-indication est l’existence de troubles de l’hémostase documentée. Professions Santé Infirmier Infirmière N° 61 • janvier-février 2005