R E V U E D E P R E S S E Revue de presse ● A. Travade* IMAGERIE L’amélioration des techniques que l’on a vu apparaître ces dernières années s’est nettement confirmée au cours des derniers mois, l’objectif étant une meilleure détection des cancers à un stade précoce, enjeu majeur si l’on veut diminuer la mortalité par cancer du sein. Mammographie Muller S. Full-field digital mammography designed as a complete system. Eur J Radiol 1999 ; 31-25. Avec le sénographe 2000 D de GE Medical Systems, la mammographie numérique directe plein champ est maintenant disponible en routine. L’appréciation de la qualité-image fait appel à des critères différents de ceux utilisés pour l’évaluation d’un couple écran-film, ce qui explique que son emploi ne soit pas encore possible en dépistage organisé. La fonction de transfert de modulation et surtout la DQE, efficacité quantique de détection, permettent de cerner au mieux les paramètres de qualité, qui doivent être au moins aussi bons, sinon meilleurs. Les possibilités de la numérisation, variations de contraste, de brillance, agrandissements, permettent d’optimiser la visibilité des petites images et des foyers de microcalcifications. Enfin, les caractéristiques techniques du matériel (sénographe avec choix de l’anode, molybdène ou rhodium, générateur puissant et détecteur plat en iodure de silicium permettant d’explorer une surface de 19 x 23 cm) sont particulièrement bien détaillées dans cet article et permettent de mieux explorer les seins denses. Pearson KL et al. Efficacy of step-oblique mammography for confirmation and localization of densities seen on only one standard mammographic view. AJR 2000 ; 174-745. Une image visible sur une seule incidence, non retrouvée sur l’incidence orthogonale, n’est pas toujours une image construite. Il peut aussi s’agir d’une lésion dystrophique ou d’un carcinome. Si l’échographie est normale, le diagnostic de cancer ne peut pas être écarté. Les auteurs utilisent alors une technique mammographique ici décrite avec soin, technique “pas à pas en oblique”, ou step-oblique, permettant de faire la différence entre une image construite et une lésion réelle mais aussi une localisation. À partir de l’incidence qui a permis de découvrir l’image, et sans que la patiente ne bouge, on renouvelle, avec le sein dans * Centre de sénologie République, 63000 Clermont-Ferrand. 38 la même orientation, des incidences en faisant varier le tube à rayons X de 15°, en prenant soin de bien positionner le mamelon de la même façon. On peut de plus s’aider de clichés en compression localisée ou agrandis. Cette méthode permet la détection de cancers qui auraient pu être méconnus car pris pour une image construite. Dullum JR et al. Rates and correlates of discomfort associated with mammography. Radiology 2000 ; 214-547. Mille huit cents patientes âgées de 50 à 74 ans participant à un dépistage organisé ont répondu à un questionnaire téléphonique comprenant 43 points dans les trois semaines qui ont suivi la mammographie de dépistage. Cinquante-deux pour cent d’entre elles rapportent un inconfort lié à l’examen qualifié de “modéré” à “extrême”, et cela sans que soit établie une corrélation avec l’intention d’avoir une mammographie ultérieure. Le désagrément dû à la mammographie n’est donc pas si rare. Berg WA et al. Breast Imaging Reporting and Data System : inter- and intraobserver variability in feature analysis and final assessment. AJR 2000 ; 174-1769. La classification BI-RADS de l’ACR a été décrite aux ÉtatsUnis dès 1993 et est de plus en plus répandue, de façon à uniformiser les comptes-rendus mammographiques et de corréler les images avec une conduite à tenir. Un lexique des anomalies est édité et décrit opacités, calcifications, désorganisations architecturales et lésions associées. Sur des séries rétrospectives, les auteurs américains, tels Orel, Liberman et Sickles, retrouvent dans leur classe 3 pas plus de 2 à 3 % de cancers. Berg, auteur de cette étude, avait déjà insisté, lors de travaux précédents, sur la difficulté de reproduction de cette classification. Dans ce travail tout récent, il confirme la variabilité entre les observateurs et pour un même observateur, deux lectures étant réalisées à un mois d’intervalle. Il en conclut que l’on doit pouvoir améliorer cette classification. Résonance magnétique nucléaire Tardivon A, Dromain Cl. IRM du sein : techniques, sémiologie et indications. Feuil Radiol 2000 ; 40-186. Les techniques et pièges sont ici bien détaillés. Rappelons que de nombreux faux positifs sont liés à un mauvais choix de la date d’examen, la période optimale étant la deuxième semaine du cycle. Après injection intraveineuse de sels de gadolinium, la prise de contraste est très rapide et le temps d’acquisition La Lettre du Sénologue - n° 10 - septembre 2000 doit donc être inférieur à deux minutes. Le suivi peut ensuite être étudié jusqu’à huit minutes après l’injection : les lésions malignes se caractérisent par un phénomène de wash-out, décroissance d’intensité de la lésion ou de sa périphérie 5 à 8 minutes après l’injection en rapport avec la présence anormale de shunts artério-veineux. Ce phénomène de décroissance n’a jamais été décrit dans les lésions bénignes. L’auteur rappelle les indications retenues en pratique courante. L’absence de prise de contraste dans les deux minutes permet en effet d’affirmer l’absence de cancer invasif dans 95 % des cas. Il reste donc le problème de la détection des carcinomes canalaires in situ, qui n’est pas résolu. Par ailleurs, dans un sein traité par radiothérapie, la spécificité de l’IRM atteint 90 %, alors qu’elle n’est que de 50 % dans les autres cas : cela en fait une indication importante dans la recherche des récidives sur sein conservé à condition d’observer un délai de six mois après la chirurgie et d’un an après la radiothérapie. Kuhl CK et al. Breast MR imaging screening in 192 women proved or suspected to be carriers of a breast cancer susceptibility gene : preliminary results. Radiology 2000 ; 215-67. Jusqu’à maintenant, l’IRM était considérée comme un examen de deuxième intention permettant l’étude des problèmes non résolus par un bilan classique. Cette étude menée à Bonn, surtout si elle est confirmée par d’autres, évalue l’intérêt de l’IRM utilisée en dépistage systématique chez les femmes à haut risque. Cent quatre-vingt-douze femmes asymptomatiques et 6 femmes symptomatiques à haut risque du fait de leurs antécédents familiaux et personnels ou de la présence d’un gène de prédisposition type BRCA1 ou BRCA2 ont eu un examen par résonance magnétique en complément de la mammographie et de l’échographie : les 9 cancers détectés ont été correctement imagés par l’IRM. Pour éviter les faux positifs fréquents, les auteurs ont systématiquement, lorsque la lésion était visible uniquement en IRM, renouvelé l’examen après un délai de trois mois de façon à éviter un trop grand pourcentage de chirurgie pour lésion bénigne. Mammoscintigraphie Hermans J et al. Apport de la mammoscintigraphie 99 m Tc MiBi dans le diagnostic et le suivi des cancers du sein. Bull Cancer 2000 ; 87-334. Cette étude menée en Belgique a pour but d’analyser la mammoscintigraphie comme méthode diagnostique. Tous les cancers de plus de 10 mm sont correctement décelés. Il est possible de détecter des lésions multifocales ou controlatérales, de même qu’une infiltration du muscle pectoral. Les faux positifs sont souvent liés à des lésions d’adénose sclérosante. Klaus AJ et al. Comparative value of 99m Tc-sestamibi scintimammography and sonography in the diagnostic workup of breast masses. AJR 2000 ; 174-1779. Les auteurs ont comparé l’intérêt de la mammoscintigraphie et de l’échographie lorsque l’examen clinique et la mammographie ne suffisent pas au diagnostic, de façon à réduire le taux de chirurgie pour lésions bénignes. Cette équipe, dont les travaux en échographie sont bien connus (Stavros), rapporte, sur La Lettre du Sénologue - n° 10 - septembre 2000 25 patientes ayant 33 lésions, un taux de faux négatifs de 0 % pour l’échographie et de 5 % pour la mammoscintigraphie. Ce taux ne permet pas d’éviter la chirurgie diagnostique. De plus, les auteurs rappellent que l’avantage majeur de l’échographie est la possibilité de faire le diagnostic de kyste ou de dystrophie kystique et de guider les ponctions à l’aiguille. GANGLIONS AXILLAIRES De très nombreux travaux paraissent régulièrement concernant l’importance du statut ganglionnaire et les progrès réalisés dans la technique du ganglion sentinelle, qui permettent d’obtenir avec fiabilité un reflet de l’état ganglionnaire sans avoir à déplorer les éventuelles séquelles d’un curage. Envahissement ganglionnaire et risque de récidive Hetelekidis S et al. Int J Radiat Oncol Biol Phys 2000 ; 46 : 31. Les auteurs ont étudié le risque de récidive (récidive locale dans le sein, récidive ganglionnaire, axillaire, sus-claviculaire ou mammaire interne, ou métastase à distance) en fonction de divers facteurs pronostiques, dont le nombre de ganglions envahis et la présence ou non d’une extension néoplasique extracapsulaire. Ce dernier critère est lié au nombre de ganglions envahis et n’a pas de valeur statistique indépendante pour apprécier le risque de rechute. Quand peut-on éviter un curage axillaire ? Maibenco DC et al. Axillary lymph node metastases associated with small invasive breast carcinomas. Cancer 1999 ; 85 : 1530. Douze mille neuf cent cinquante patientes atteintes d’un cancer invasif de 1 cm ou moins et ayant eu un curage ont été évaluées. Dans certains groupes, le risque de trouver un envahissement axillaire est très faible (moins de 5 %), et l’on pourrait alors éviter le curage : cancers mucineux et tubuleux T1a et T1b, cancers papillaires T1a et carcinomes de grade I T1a. L’âge est aussi à prendre en compte : 10 % des patientes de plus de 70 ans sont N+, contre 22,6 % de celles de moins de 40 ans. Jackson JSH et al. A decision analysis of the effect of avoiding axillary lymph node dissection in low risk women with invasive breast carcinoma. Cancer 2000 ; 88 : 1852. Les auteurs ont simulé deux groupes de patientes, avec ou sans traitement adjuvant, pour évaluer l’impact de l’absence de curage axillaire sur le risque de récidive à 5 ans. Dans le groupe à bas risque d’envahissement ganglionnaire, évalué à 5 %, l’absence de curage ne modifie pas significativement le taux de rechutes. Hoebers FJP et al. Primary axillary radiotherapy as axillary treatment in breast conserving therapy for patients with breast carcinoma and clinically negative axillary lymph nodes. Cancer 2000 ; 88 : 1633. Une solution pour éviter les séquelles du curage axillaire serait d’irradier systématiquement le creux axillaire sans faire de 39 R E V U E D curage dans le cas des petites tumeurs de bon pronostic sans ganglion palpable chez les patientes ménopausées. Dans cette étude, le taux de récidives axillaires est effectivement bas et les séquelles de la radiothérapie sont limitées. Galper et al. Factors associated with regional nodal failure in patients with early stage breast cancer with 0-3 positive axillary nodes following tangential irradiation alone. Int J Radiat Oncol Biol Phys 1999 ; 45 : 1157. Les auteurs ont l’habitude de n’irradier le creux axillaire après curage et chimiothérapie adjuvante que si 4 ganglions ou plus sont envahis. Lorsqu’il y a moins de 4 ganglions envahis, les facteurs de rechutes sont la taille (0,7 % pour les T de moins de 1 cm) et la présence d’une composante intracanalaire extensive. Toutefois, le faible taux de rechute ne justifie pas que l’on irradie le creux axillaire. Ganglion sentinelle Nos C et al. Détection du ganglion sentinelle dans les cancers du sein. Expérience de l’Institut Curie. J Gynecol Obstet Biol Reprod 2000 ; 29 : 251. Excellente mise au point sur la technique du ganglion sentinelle associant injection de bleu et injection de colloïdes radioactifs. Dans le but d’éviter les séquelles du curage, cette méthode pourrait être proposée dans les petites tumeurs de moins de 2 cm. P R E S S E Schrenk P et al. Morbidity following sentinel lymph node biopsy versus axillary lymph node dissection for patients with breast carcinoma. Cancer 2000 ; 88 : 608. Les auteurs ont évalué les séquelles dans deux groupes de 35 patientes ayant subi soit un curage axillaire des niveaux I et II, soit la technique du ganglion sentinelle. Dans le dernier cas, les séquelles sont négligeables. Dowlatshahi K et al. Occult metastases in the sentinel lymph nodes of patients with early stage breast carcinoma. Cancer 1999 ; 86 : 990. L’étude histologique faite en routine des ganglions axillaires obtenus soit par curage soit par ganglion sentinelle sous-estime la présence de micrométastases. Celles-ci ne sont en effet détectées que sur les coupes rapprochées, 0,25 mm au lieu de 2 mm, avec étude immunohistochimique en cytokératine. L’intérêt de la technique du ganglion sentinelle est que l’on peut analyser de façon plus approfondie ces ganglions en faible nombre, alors que l’on ne peut pas faire de coupes sériées sur toute une pièce de curage. Weaver DL et al. Pathologic analysis of sentinel and nonsentinel lymph nodes in breast carcinoma. Cancer 2000 ; 88 : 1099. À rapprocher de l’article précédent. Les auteurs ont évalué la distribution des métastases occultes ou non dans le ganglion sentinelle et les ganglions d’un curage (coupes rapprochées, 0,2 mm et technique en immunohistochimie, cytokératine). Ils en ont conclu que cela permet de valider l’hypothèse du ganglion sentinelle : l’état des ganglions sentinelles est prédictif du statut axillaire global. De plus, la recherche de métastases occultes est facilitée, puisqu’il y a peu de ganglions à analyser. Toutefois, la signification clinique de la présence de métastases occultes est encore à déterminer. Voir l’éditorial de Laura Liberman : Pathologic analysis of sentinel lymph nodes in breast carcinoma. Cancer 2000 ; 88 : 971. L’eau, Dan Dailey - © CFC Daum Bedrosian I et al. Accuracy of sentinel lymph node biopsy in patients with large primary breast tumors. Cancer 2000 ; 88 : 2540. Contrairement à l’article précédent, les auteurs pensent que l’on peut proposer la technique du ganglion sentinelle même en cas de grosse tumeur, lorsque la chimiothérapie d’induction est indiquée alors qu’il n’y a pas de ganglion axillaire palpable. E Avec les remerciements du Dr A. Lesur 40 La Lettre du Sénologue - n° 10 - septembre 2000