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Endoscopie et transmission
de la maladie de Creutzfeldt-Jakob (II partie)
e
Faut-il compléter les recommandations de la circulaire n°100 du 11 décembre 1995 ?
T. Vallot*
Procédures à
recommander
D
avérées. Les auteurs proposent :
– mise en place d'unité(s)
spécialisée(s) nationale(s)
ou régionale(s) qui se
chargerai(en)t du traitement du matériel et assurerai(en)t les recherches et
le développement dans le
domaine de l'inactivation
des agents de l'ESST ;
– mise en place d'une
équipe
opérationnelle
pour apporter de façon homogène son
aide aux établissements confrontés à ce
type de situation.
ans notre numéro précédent, nous faisions état d'un
rapport du groupe de travail d'experts sur les
risques de transmission de la maladie de CreutzfeldtJakob (MCJ) au cours des endoscopies digestives. Dans
cette deuxième partie, nous rapportons les propositions
des auteurs en réponse à la question du directeur de la
Santé qui porte sur la nécessité de revoir les
recommandations prosposées en 1995.
Les procédures sont
fonction du degré de
suspicion de MCJ et du
type de la maladie :
MCJ sporadique ou
nouveau variant (nv) de
MCJ. Les situations
envisagées ici ne sont
pas comparables à celles
où le matériel a été en contact avec le
système nerveux central, la dure-mère
où les yeux d'un patient atteint de MCJ
qui, compte tenu de la charge infectieuse potentielle, doit être détruit.
Suspicion de MCJ sporadique
Patient à risque virtuel
Les endoscopes utilisés sur les patients
du groupe à risque virtuel subissent un
simple nettoyage mécanique, suivi
d'une désinfection avec des produits
dont il conviendrait qu'ils soient le
plus rapidement possible sans aldéhyde.
Les auteurs rappellent que l'usage en
France a été de sélectionner, pour la
désinfection des endoscopes ne pénétrant pas dans les cavités stériles, le
glutaraldéhyde, à cause de sa capacité
sporicide, (même si pour l'instant la
nécessité ne s’en impose pas). Cet état
de fait est en cours de réévaluation en
* Centre d’endoscopie générale,
hôpital Bichat, Paris.
raison de la nécessaire prise en compte
de l'action sur les muycobactéries
(obligatoire par la FDA) et compte
tenu des risques liés à la manipulation
de ce produit. Un certain nombre de
propositions alternatives sont donc à
l'étude, avec notamment les produits
contenant des peroxydes ou des produits chlorés, ainsi que des appareils
utilisant le gaz plasma (peroxyde d'hydrogène).
Patient à risque avéré
La recommandation est le double nettoyage mécanique sans utilisation de procédure de désinfection chimique ou thermique entre les deux nettoyages ;
l’application lorsque les matériaux sont
compatibles, d'une solution de 0,25 % de
chlore actif, avec un temps de contact de
30 minutes. Cette application ne remplace pas la désinfection classique, qui
vient ensuite et dont l'efficacité est validée sur les germes pathogènes conventionnels. Éviter l'utilisation des machines
à laver ne répondant pas à un cahier des
charges adapté (voir plus loin).
Patient atteint de MCJ
En cas de MCJ sporadique, le risque est
probablement voisin de celui des MCJ
Act. Méd. Int. - Gastroentérologie (14) n° 3, mars 2000
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Lorsque l'apparition des signes
cliniques de la MCJ est postérieure
à l'acte d'endoscopie
En France, depuis deux ans, cette situation a été rencontrée douze fois. Dans ces
conditions, les endoscopes ont été utilisés pendant des délais variant de
quelques heures à quelques mois. Dans
beaucoup de cas, les appareils ont subi
plusieurs cycles de désinfection aux
aldéhydes, ce qui rend toute action complémentaire illusoire. Cependant, dans
un souci de cohérence face à des situations très différentes, il serait licite de
traiter les appareils. Rien n'est précisé sur
ce qu'il faut faire et dire aux malades qui
ont été endoscopés avec l'appareil avant
que l'on reconnaisse la contamination
possible.
À ces recommandations s’ajoutent plusieurs recommandations complémentaires :
– respecter les indications des actes d'endoscopie : chez les patients qui ont un
tableau clinique suspecté de MCJ, l'indication de l'endoscopie doit être indiscutable ;
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– à l'avenir, l'usage unique est probablement la réponse permettant de minimiser le risque infectieux quel qu'il soit.
Pour ce qui concerne les endoscopes, des
solutions sont en cours d'évaluation. S'il
s'avère utilisable en pratique, ce matériel
ne pourra pas être généralisé avant de
nombreuse années et serait, dans un premier temps, réservé à des circonstances
particulières. L'endoscope autoclavable
paraît être une solution à privilégier. Pour
ce qui concerne les pinces à biopsie, le
groupe de travail considère que l'utilisation de matériel à usage unique devrait
s'imposer dès maintenant.
Concernant la traçabilité des endoscopes, une procédure comprenant deux
volets devrait être mise en place :
– une traçabilité des procédés et des procédures, numéro de l’endoscope, nom du
patient, date de l’examen, nom de l'opérateur, différentes phases du nettoyage et
de la désinfection, nom des produits utilisés, temps de contact et qualité de l'eau
utilisée pour le rinçage terminal en procédure manuelle et numéro de la
machine et du cycle en procédure automatisée ;
– une traçabilité des actes, avec recueil
du nom du patient, de la date d'examen,
du type et du numéro d'identification de
l'endoscope, du type de prélèvement réalisé et du ou des opérateurs ;
Pour les lave-endoscopes : les endoscopes peuvent contaminer la machine et
un autre endoscope soit lorsqu'ils subissent une procédure simultanée, soit par
le recyclage de la solution désinfectante
ou l'utilisation d'aldéhyde. Les filtres de
0,22µ n'assurent aucune sécurité. Le
groupe de travail considère que les laveendoscopes ne sont pas adaptés au risque
lié aux ESST et préconise la mise au
point de nouvelles machines !
Patients suspects
de nouveau variant de MCJ
Dans l'état actuel de nos connaissances, tant
sur la maladie que sur les conditions d'inactivation du prion, le matériel utilisé dans ces
circonstances doit être mis en quarantaine et
détruit si le diagnostic est confirmé. Pour les
experts, le risque de contamination du matériel est théoriquement plus élevé que dans la
MCJ sporadique, puisque le prion est
retrouvé dans le système lymphoïde, c'està-dire les amygdales et le tissu lymphoïde.
Le risque est maximal en cas de biopsie de
l'intestin grêle. C'est pourquoi on considère
que toute biopsie de l'intestin grêle devrait
se faire avec des pinces à usage unique.
À ce jour, l'incidence annuelle de nv de MCJ
ne justifie pas de mesures spécifiques. Si une
augmentation de l'incidence de nv de MCJ
était constatée, il faudrait considérer très
sérieusement la possibilité de l'usage systématique des endoscopes à usage unique.
“Même si aujourd'hui ce matériel n'est pas
encore opérationnel, il peut l'être rapidement
si on mobilise les moyens de recherche disponibles. Cette prise en charge anticipée
d'une situation de crise sera d'un coût bien
inférieur aux mesures qu'il conviendrait de
prendre dans l'urgence. Elle permettrait
d'augmenter la compétitivité industrielle
nationale dans ce domaine” (qui, comme
chacun le sait, est très avancée dans le
domaine du matériel d'endoscopie N.D.L.R).
Redéfinition des critères
de suspicion de MCJ
En dernier lieu, le groupe s'interroge sur
la définition de la MCJ sporadique, puisqu'elle diffère d'un texte à l'autre. Tout
Act. Méd. Int. - Gastroentérologie (14) n° 3, mars 2000
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dépend de la finalité de la définition. Les
définitions très spécifiques sont de bons
instruments d'épidémiologie (classification de l'OMS) mais trop tardives pour être
opérationnelles dans la définition des suspicions ou dans l'établissement du niveau
de risque pour un patient susceptible d'être
à l'origine d'une contamination. À l'inverse, une définition plus sensible a l'avantage d'être plus exhaustive dans une
optique sécuritaire, mais expose au risque
d'avoir à prendre trop souvent des mesures
préventives inutiles. Rappelons que 20 %
des déclarations obligatoires de 19961997 et 58 % des signalements au réseau
d'épidémiologie-surveillance en 1997 ont
abouti à un autre diagnostic que celui de
MCJ. Les auteurs proposent de retenir
comme définition des critères de suspicion
de MCJ : “Présence d'apparition récente
et d'installation progressive sans rémission
d'au moins un signe clinique neurologique
associé à une démence et après élimination de toute autre cause.” Par rapport au
texte de la circulaire de 1995, les signes
cliniques neurologiques (ataxie cérébelleuse, trouble oculomoteur) ne sont plus
précisés ; par rapport au texte de la déclaration obligatoire, les termes “apparition
récente et évolution progressive sans
rémission” ont été ajoutés. La définition
de l'OMS reste la base de la classification
finale de la MCJ.
Par ailleurs, le groupe de travail, considérant que, bien que les greffes de duremère aient été interdites en France en
1994 tandis que l'emploi systématique de
méthodes de stérilisation des instruments
de neurochirurgie validées contre le
prion ne date que de janvier 1997, propose de n'exclure du groupe à risque que
les patients ayant bénéficié d'une intervention neurochirurgicale après janvier
1997.
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