
M.-O. Krebs12
ont été développés pour quantifi er cette symptomatolo-
gie : la CAARMS et la SIPS-SOPS. Dans ces échelles, la caté-
gorisation des sujets à haut risque repose sur la présence
des symptômes positifs, qui semblent les plus spécifi ques,
mais ces outils permettent d’évaluer des symptômes cou-
vrant l’ensemble de la psychopathologie (Tableau 3).
L’étude multicentrique NAPLS (North American Prodrome
Longitudinal Study) a testé la validité de la défi nition d’un
« syndrome prodromique à risque » de premier épisode psy-
chotique [6] en comparant diverses variables démogra-
phiques, symptomatiques, fonctionnelle, anamnestiques, ou
évolutives, parmi 5 groupes de sujets « prodromiques »,
contrôles, « demandeurs d’aide », « à risque familial de psy-
chose », « schizotypiques ». Les résultats montrent que les
sujets « prodromiques », ont, par rapport aux sujets
contrôles, une symptomatologie nettement plus marquée et
un fonctionnement altéré. Mais cette différence est moins
marquée entre les sujets prodromiques et les sujets « deman-
deurs d’aide » ; les sujets à haut risque familial ont un niveau
d’adaptation prémorbide aussi altéré ; et les sujets schizoty-
piques un fonctionnement et une symptomatologie au moins
aussi altérés, et même une adaptation prémorbide de nette-
ment moins bonne qualité (Tableau 4).
Les auteurs de cette étude plaident, avec de nombreux
autres, pour faire de l’existence de prodromes une catégo-
rie diagnostique, en particulier pour des raisons socio -
économiques (l’appartenance à une catégorie diagnostique
permet le remboursement des soins et le bénéfi ce d’un
soutien social). Ils soulignent que les patients du groupe
« prodromique à risque » se distinguent nettement des
sujets contrôles, ainsi que des sujets demandeurs d’aide et
suivis en psychiatrie pour un trouble psychotique (c’est-à-dire
remplissant les critères d’un premier épisode psychotique),
d’autre part dans une population d’adolescents suivi en psy-
chiatrie pour un trouble non-psychotique, et enfi n dans un
groupe contrôle d’adolescents représentatifs de la population
générale. Les résultats montrent que ces symptômes de base
sont retrouvés chez 30 % des adolescents de la population
générale, chez 81 % des adolescents suivis pour un trouble
psychiatrique non psychotiques, et chez 96 % des adolescents
suivis pour un premier épisode psychotique. On peut relever
que, dans cette étude, les symptômes les plus cognitifs sont
ceux qui permettent le mieux de faire la distinction entre
troubles psychotiques et troubles non-psychotiques.
Un travail réalisé dans l’unité de recherche de psycho-
pathologie de l’Hôpital Sainte-Anne [4] a utilisé la fl uence
verbale comme outil d’exploration des sujets à ultra-
haut-risque de psychose, vs des sujets demandeurs d’aide
psychologique mais qui ne sont pas à haut risque. Les
résultats montrent que les tâches de fl uence verbale
sémantique – et non celles de fl uence verbale phonolo-
gique – sont altérées chez les sujets à ultra haut risque.
Ceci est intéressant car les tâches de fl uence verbale sont
très aisées à réaliser, même en pratique clinique.
Mesure de la symptomatologie
des sujets à haut risque de psychose
Parallèlement à l’échelle de Bonn sur les symptômes de
base (Bonn Scale for the Assessment of Basic Symptoms ou
BSABS), deux outils principaux, très proches l’un de l’autre,
Tableau 3 Liste des 28 items CAARMS 2006
1. Symptômes positifs
1.1. Troubles du contenu de la pensée
1.2. Idées non bizarres
1.3. Anomalies perceptuelles
1.4. Discours désorganisé
2. Changement cognitif Attention/Concentration
2.1. Expérience subjective*
2.2. Changements cognitifs observés
3. Perturbation émotionnelle
3.1. Perturbation émotionnelle subjective*
3.2. Émoussement de l’affect observé
3.3. Affect inapproprié observé
4. Symptômes négatifs
4.1. Alogie
4.2. Avolition/Apathie*
4.3. Anhédonie
5. Changement comportemental
5.1. Isolement social
5.2. Altération du fonctionnement
5.3. Comportements désorganisés/bizarres/stigmatisants
5.4. Comportement agressif/dangereux
6. Changements physiques/moteurs
6.1. Plaintes subjectives d’altération
du fonctionnement moteur*
6.2. Changements dans le fonctionnement moteur observés
ou rapportés par le tiers
6.3. Plaintes subjectives d’altération des fonctions
végétatives/autonomes*
6.4. Plaintes subjectives d’altération des sensations
corporelles*
7. Psychopathologie générale
7.1. Manie
7.2 Dépression
7.3. Intensions suicidaires et auto-mutilations
7.4 Changements d’humeur/labilité
7.5. Anxiété
7.6. Symptômes obsessionnels et compulsifs TOC
7.7. Symptômes dissociatifs
7.8. Diminution de la tolérance au stress habituel*
*symptômes de base de Muber