L'Encéphale
Available online 23 January 2013
Prodromes de la schizophrénie : consensus
ou confusion ?
J.-R. Teyssier
Service de psychiatrie, département de génétique, laboratoire de psychopathologie et psychologie clinique (IFR
100), université de Bourgogne, CHU de Dijon, 2, Angélique-Ducoudray, BP 37013, 21070 Dijon cedex, France
Résumé
La constellation de symptômes identifiés rétrospectivement, et qui se manifestent des mois ou
des années avant le premier épisode psychotique, a été appelée prodromes. Une stratégie dite
de close-in a utilisé des critères de type trait (risque génétique) et état (symptômes positifs et
perturbations subjectives infracliniques), qui ont été élaborés dans des buts de recherche, pour
sélectionner des groupes à risque de psychose. Ces critères ont été opérationnalisés par des
outils psychométriques (CAARMS, SIPS, BSABS). Cependant, la valeur prédictive des
critères symptomatiques est médiocre en raison d’un rapport sensibilité/spécificité
défavorable, les troubles se révélant transitoires dans plus de 80 % des cas. En revanche, des
facteurs d’endogénicité (personnalité schizotypique) et de sévérité (score symptomatique et
altération du fonctionnement psychosocial) jouent un rôle pronostique majeur, et capturent un
groupe minoritaire de sujets au seuil du diagnostic cagoriel, qui évoluent vers le premier
épisode psychotique en moins de deux ans. La population des sujets à risque paraît donc
constituée par deux sous-ensembles latents, que les études actuelles ne peuvent discriminer
précocement, sans doute en raison de la dynamique évolutive individuelle du processus
psychotique : d’une part, ceux qui présentent des troubles transitoires et, d’autre part, ceux
dont les symptômes sont la manifestation d’un trouble psychotique débutant. Les résultats des
études pilotes d’intervention thérapeutique préventive ne sont pas concluants, seule la prise
d’acides gras polyinsaturés ω-3 ayant produit des effets encourageants. Dans ces conditions,
l’introduction de la catégorie de « syndrome de risque psychotique » dans le futur DSM-V a
été vivement critiquée, dans la mesure où sa consistance et sa valeur prédictive sont
insuffisamment établies pour un transfert en clinique. Toutefois, certains auteurs ont souligné
qu’elle permettrait la reconnaissance et la prise en charge d’un état à l’évidence pathologique.
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