Les rechutes après un premier épisode
traité par ganciclovir sont fréquentes, et
leurs caractéristiques ont été longtemps
méconnues bien que, dans l’étude ini-
tiale, 79 % des patients aient présenté une
rechute. On estime que le risque de
rechute est de 20 à 40 %, sans doute supé-
rieur en cas de primo-infection à CMV
(13). La prévention des rechutes repose
sur l’obtention de la clairance du CMV à
la fin du traitement de l’épisode initial et
l’utilisation du ganciclovir oral pendant
une période prolongée (jusqu’à 3 mois),
bien que cette attitude ne soit pas validée
et expose peut-être au risque d’émer-
gence de souches résistantes au ganci-
clovir.
L’utilisation du ganciclovir, utilisé par
voie orale, pour traiter l’infection symp-
tomatique à CMV n’est pas validée, et ne
peut donc pas être recommandée.
Le foscarnet est peu utilisé en transplan-
tation d’organes en raison de sa neuro-
toxicité et de sa néphrotoxicité. Celle-ci
est toutefois considérablement diminuée
par une hydratation correcte. La dose est
de 180 mg/kg/j en trois perfusions de
60 minutes, avec une hydratation de 500
à 1 000 cc par perfusion de sérum salé
isotonique. Cette dose est à adapter à la
fonction rénale. Le foscarnet est actuel-
lement réservé aux formes de plus en plus
fréquentes de maladie à CMV résistantes
au ganciclovir.
L’autre traitement des formes résistantes
au ganciclovir est le cidofovir, lui aussi
très néphrotoxique.
Enfin, dans les formes sévères, en parti-
culier lorsqu’il existe une localisation
pulmonaire, ou dans les formes clinique-
ment résistantes au ganciclovir, de
nombreuses équipes utilisent des
gammaglobulines, soit anti-CMV, soit
standard, bien que, là encore, le bénéfice
réel ne soit pas démontré.
Traitement préventif
À l’heure actuelle, de nombreuses possi-
bilités de prévention existent ; elles per-
mettent de définir une véritable stratégie
de prévention de l’infection à CMV. Cette
prévention a d’une part modifié la pré-
sentation clinique de la maladie et, d’autre
part, fait surgir de nouvelles interrogations,
en particulier le risque d’émergence de
souches virales résistantes aux antiviraux.
La prévention de l’infection à CMV peut
reposer sur une prophylaxie, une préven-
tion ciblée ou l’association des deux.
La prophylaxie consiste à administrer un
traitement ou toute autre modalité pré-
ventive à l’ensemble d’un groupe à
risque, en espérant que les patients qui
auraient dû développer l’infection ne la
développeront pas. Le nombre de patients
traités “inutilement” est donc par défini-
tion important.
La prévention ciblée consiste, au
contraire, à définir au préalable les
patients les plus à risque, et à n’appliquer
le traitement qu’à cette sous-population.
Les deux attitudes ont été utilisées en
transplantation d’organe, sans qu’il soit
possible actuellement de définir quelle
est la plus pertinente.
La prophylaxie peut reposer sur :
#La prévention de la transmission
du CMV au receveur, que ce soit par
l’organe transplanté ou par les produits
sanguins.
#La modulation de l’immunosuppres-
sion : la limitation de l’utilisation des
anticorps mono- et polyclonaux à la
phase initiale de la transplantation dimi-
nue le risque de survenue d’une infection
à CMV.
#L’interféron-alpha n’est plus utilisé
aujourd’hui en raison d’une efficacité
discutée, et surtout de la survenue de
plusieurs cas d’insuffisance rénale aiguë
parfois irréversible.
#La vaccination anti-CMV n’est plus
utilisée, car elle ne modifiait l’incidence
ni des infections, ni des maladies à CMV,
et n’entraînait qu’une diminution globale
et modérée du score de sévérité des mala-
dies à CMV.
#Les gammaglobulines standard ou spé-
cifiques anti-CMV, seules ou associées à
d’autres antiviraux, apportent un béné-
fice documenté par une méta-analyse qui
retrouve une diminution significative de
l’incidence des maladies à CMV quel que
soit le type de gammaglobulines utilisé
(risque relatif = 0,58, intervalle de
confiance à 95 % 0,42-0,77) (14). En
France, il convient cependant de noter
que l’on ne dispose plus de gamma-
globulines spécifiques anti-CMV.
#La chimioprophylaxie, qui repose prin-
cipalement sur le ganciclovir utilisé par
voie intraveineuse ou per os, sur le vala-
ciclovir et, à un moindre degré, sur l’aci-
clovir à fortes doses. La chimioprophy-
laxie a largement supplanté les autres
méthodes en raison de son excellente effi-
cacité et de sa bonne tolérance. Globale-
ment, la méta-analyse réalisée par Cou-
choud et al. (15) indique que malgré
l’hétérogénéité des études, notamment en
ce qui concerne les antiviraux utilisés et
leurs modalités d’utilisation, la chimio-
prophylaxie est efficace et diminue signi-
ficativement l’incidence des infections
(risque relatif = 0,74, intervalle de
confiance à 95 % 0,62-0,88, p < 0,001)
et des maladies à CMV (risque rela-
tif = 0,5, intervalle de confiance à 95 %
0,40-0,62,p<0,001) (figure 3).
Les études les plus récentes, méthodolo-
giquement moins sujettes à caution, rap-
portent une efficacité encore supérieure.
En utilisant le valaciclovir pendant
90 jours par rapport à un placebo en
transplantation rénale, Lowance et al.
(10) ont démontré une diminution de l’in-
cidence de l’infection et de la maladie à
CMV, en particulier dans le groupe le
plus à risque (maladie à CMV, de 45 à
16 %) (figure 4). À titre d’exemple, dans
notre unité à l’hôpital Saint-Louis (Paris),
nous n’avons observé chez 120 patients
transplantés qu’un seul cas de maladie à
CMV pendant la durée du traitement pro-
phylactique. Il faut remarquer qu’un
faible pourcentage de patients (5 sur 120
dans notre expérience) développe, dans
les semaines qui suivent l’arrêt du vala-
ciclovir, une primo-infection retardée, ce
qui justifie probablement la prolongation
de la prophylaxie pendant une durée
totale de 4 à 6 mois. La figure 5 illustre
bien la nouvelle épidémiologie de l’in-
fection à CMV depuis l’utilisation du
valaciclovir. De nouveaux médicaments
apporteront probablement de nouveaux
bénéfices en termes d’efficacité et de
Le Courrier de la Transplantation - Volume I - n o3 - oct.-nov.-déc. 2001
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