c-Kit S. Nahon* Les tumeurs stromales gastro-intestinales (GIST pour les Anglo-Saxons) sont des tumeurs conjonctivales d'individualisation récente grâce au progrès de l’immuno-histochimie. Ces tumeurs sont rares car leur incidence est estimée à 1 000 cas par an en France (1). Auparavant, elles étaient classées en deux types : les léiomyomes (dérivés des cellules musculaires) et les schwannomes (dérivés des cellules nerveuses). La distinction entre ces deux types était essentiellement pronostique puisque les schwannomes étaient considérés comme des tumeurs de bon pronostic, à la différence des léiomyomes, à potentiel évolutif incertain. Les études immuno-histochimiques ont montré que cette classification était imprécise et parfois erronée. Un marqueur commun à ces tumeurs a été identifié, il s’agit du CD34. Plus récemment, un nouveau marqueur des tumeurs stromales digestives a été découvert, il s’agit d’un récepteur transmembranaire KIT (CD117) possédant une activité tyrosinekinase, dont le ligand est un facteur * Centre hospitalier intercommunal Le Raincy-Montfermeil. de croissance (stem cell factor). Ces tumeurs sont issues dans la plupart des cas des cellules de Cajal des plexus myentériques, cellules qui expriment à l’état normal la protéine c-KIT. Ces cellules sont les cellules pacemaker de la paroi intestinale et ont un rôle dans la régulation péristaltique de la musculature lisse du tube digestif. Ces cellules expriment à la fois c-KIT et le CD34. Les tumeurs stromales digestives expriment CD34 dans plus de 75 % des cas, et c-KIT dans plus de 90 % des cas. c-KIT est le siège de mutations activatrices dans ce type de tumeur, et ces mutations sont probablement responsables de la transformation tumorale de la majorité des tumeurs stromales digestives. Outre une meilleure classification des tumeurs stromales digestives, la découverte de c-KIT a eu un intérêt majeur dans la prise en charge thérapeutique. En effet, ces tumeurs ont un pronostic souvent redoutable, notamment en l’absence de traitement chirurgical. Le STI571 (imatinib, Glivec®) est un inhibiteur sélectif de certaines tyrosineskinases, dont la kinase abl intracellulaire (oncoprotéine de fusion chimérique bcr-abl de la leucémie Act. Méd. Int. - Gastroentérologie (17), n° 4, mai 2003 myéloïde chronique) et du récepteur transmembranaire KIT. L’efficacité de ce traitement a été montrée pour la première fois chez une patiente ayant une tumeur stromale gastrique métastatique résistante à plusieurs lignes de chimiothérapie (2). Une étude de phase I a étudié l’efficacité de l’imatinib chez 36 patients répartis en quatre bras (400 mg x 1, 300 mg x 2, 400 mg x 2, 500 mg x 2) (3). Une réponse partielle a été observée dans 25 cas sur 36 (70 %) cas, une stabilisation dans 7 cas sur 36 (19 %), et une progression dans 4 cas sur 36 (13 %) après un suivi médian d’environ 9 mois (3). La dose toxique limitante était de 500 mg x 2. Une étude randomisée plus récente de phase II a comparé deux doses d’imatinib 400 mg et 600 mg par jour chez 147 patients ayant une tumeur stromale digestive (4). Parmi ceux-ci, 79 (53,7 %) avaient une réponse partielle et 41 (27,9 %) une stabilisation. Aucune réponse complète n’a été observée. La durée médiane de réponse n’a pas été atteinte après un suivi médian de 24 semaines succédant à l’apparition de la réponse. Une hémorragie digestive, complication 108 Mot du mois Mot du mois classique et parfois grave de ces tumeurs traitées par imatinib, a été notée dans 5 % des cas. La dose de 400 mg était aussi efficace que la dose de 600 mg. Ce traitement est habituellement bien toléré aux doses utilisées dans les tumeurs stromales, soit 4 gélules de 100 mg une fois par jour. On retiendra essentiellement une inflation hydrosodée, notamment des œdèmes, dont un œdème périorbitaire mati- nal s'atténuant dans la journée, puis au cours du temps. Références En conclusion, les tumeurs stromales digestives ont connu ces dernières années de grandes avancées, tant dans la compréhension et dans la classification nosologique, par la découverte de la protéine c-Kit, que dans le traitement spécifique, par la découverte de l’inhibiteur spécifique des protéines kinases qu’est l’imatinib (Glivec®). 1. Tumeurs stromales digestives. Dossier thématique. La lettre de l’hépato-gastroentérologue 2002 ; (2) 2. 2. Joensuu H et al. Effect of the tyrosine kinase inhibitor STI571 in a patient with a metastatic gastrointestinal stromal tumor. N Engl J Med 2001 ; 344 : 1052-6. 3. Van Oosterom AT et al. Safety and efficacy of imatinib (STI571) in metastatic gastrointestinal stromal tumours : a phase I study. Lancet 2001 ; 358 : 1421-3. 4. Demetri et al. Efficacy and safety of imatinib mesylate in advanced gastrointestinal stomal tumors. N Engl J Med 2002 ; 347 : 472-80. Mot du mois Mot du mois Imagerie du foie, des voies biliaires, du pancréas et de la rate V. Vilgrain, Y. Menu Éditions Médecine-Sciences, Flammarion 2003 Par T. Vallot Voilà un livre précieux ! Précieux parce qu’il réunit en 500 pages l’expérience inégalée d’une équipe multidisciplinaire regroupant, bien sûr, des spécialistes de l’imagerie du foie, des voies biliaires, du pancréas et de la rate, mais également tous les spécialistes médecins, endoscopistes, chirurgiens concernés par ces pathologies. Le vécu qui s’en dégage, se sent tout au long de l’ouvrage qui montre parfaitement ce que peuvent apporter les techniques les plus modernes d’imagerie et la radiologie interventionnelle dans la prise en charge de ces malades. Chaque chapitre est construit de façon pratique : après un bref rappel général sur l’épidémiologie, l’anatomopathologie Act. Méd. Int. - Gastroentérologie (17), n° 4, mai 2003 éventuellement la pathogénie, la clinique, les auteurs développent l’apport diagnostique de l’échographie, du scanner, et éventuellement de l’IRM lorsqu’elle est indiquée ou d’autres techniques comme la ponction, mais aussi la place du radiologue dans le traitement de l’affection ainsi que dans le suivi. Ce livre est donc plus qu’un ouvrage de radiologie, c’est aussi un ouvrage de médecine ! Conçu avec une grande objectivité et avec le souci d’emmener le clinicien dans une démarche raisonnée et raisonnable, cet ouvrage fait référence et peut être utilisé tous les jours comme une aide dans notre pratique. " 109