Cancer du côlon : quoi de neuf en 2008 ? mots-clés DOssIER ThémATIQuE

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dossier thématique
Journée FFCD-PRODIGE
Cancer du côlon :
quoi de neuf en 2008 ?
What’s new for colon cancer in 2008?
T. Aparicio*
Mots-clés
Cancer du côlon
Chimiothérapie
Keywords
Colon cancer
Chemotherapy
* Service d’hépato-gastroentérologie, hôpital Bichat-Claude-Bernard,
Paris.
Cancer métastatique
Thérapies ciblées
Ces dernières années ont vu l’émergence de thérapies
dites ciblées utilisées chez tous les patients sans
discernement. L’année 2008 a mis en lumière l’adaptation du traitement “ciblé” aux caractéristiques
tumorales. La valeur prédictive de la mutation KRAS
dans les tumeurs pour l’efficacité a été confirmée
par plusieurs études. Une analyse a posteriori des
tumeurs de 394 patients inclus dans l’étude CO17,
comparant un traitement par cétuximab aux soins
palliatifs après échappement à plusieurs lignes de
chimiothérapie, rapporte que 42 % des tumeurs
présentaient une mutation de l’exon 2 de KRAS.
La survie des patients dont la tumeur ne présentait pas de mutation KRAS était significativement
prolongée par le traitement par cétuximab (9,5 mois
versus 4,5 mois ; p < 0,001), alors qu’il n’y avait pas
de différence de survie en fonction du traitement
chez les patients dont les tumeurs présentaient une
mutation KRAS. Pour les patients inclus dans le bras
soins palliatifs seuls, la mutation KRAS n’avait pas
de valeur pronostique (1). Des résultats comparables ont été observés chez des patients traités par
panitumumab (2). L’étude d’une série rétrospective
française de 89 patients traités par cétuximab après
échec d’une chimiothérapie antérieure rapporte des
résultats concordants, avec, notamment, 40 % de cas
de réponse tumorale en l’absence de mutation KRAS,
versus 0 % en cas de mutation KRAS (p < 0,001) [3].
Ces études sont à l’origine de la restriction de la
prescription des anticorps anti-EGFR aux patients
dont la tumeur ne présente pas de mutation KRAS.
Cependant, au sein de la population des patients
dont la tumeur ne présente pas de mutation KRAS,
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il semble que la présence d’une mutation de BRAF
soit également un facteur pronostique de réponse
au cétuximab ou au panitumumab (4).
Les résultats du cétuximab associé à l’irinotécan en
deuxième ligne thérapeutique après échec d’une
première ligne par association 5-FU + oxaliplatine ont été rapportés par l’étude EPIC, portant
sur 1 298 patients. La survie sans progression et
le taux de réponse tumorale des patients traités
par l’association irinotécan + cétuximab étaient
significativement meilleurs que ceux des patients
traités par irinotécan seul. En revanche, il n’y avait
pas d’augmentation significative de la survie globale.
L’explication est peut-être le nombre important de
patients (47 %) du bras irinotécan seul traités par
cétuximab après progression (5).
Deux études ont évalué les résultats de l’association
fluoropyrimidine, oxaliplatine et bévacizumab en
première ligne thérapeutique. Dans l’étude TREE,
150 patients ont, dans un premier temps, été randomisés en trois bras : FOLFOX-6, bFOL et CAPOX
(TREE 1) ; dans un second temps, 225 patients ont
été randomisés de la même façon, mais avec ajout
du bévacizumab (TREE 2). La survie globale a été de
18,2 mois dans TREE 1 et de 23,7 mois dans TREE 2 (6).
Une étude de phase III portant sur 1 401 patients a
comparé l’association XELOX ou FOLFOX-4 avec et
sans bévacizumab. La survie sans progression a été de
8 mois versus 9,4 mois (p = 0,0023) en faveur du bras
traité par bévacizumab. En revanche, il n’y avait pas
de différence significative de taux de réponse objective ni de survie globale entre les deux groupes (7).
Une hypothèse avancée pour expliquer ces résultats
décevants est le fait que seuls 29 % des patients du
bras bévacuzimab ont reçu le traitement protocolaire jusqu’à progression, versus 47 % dans le bras
chimiothérapie seule.
dossier thématique
Chimiothérapie
L’analyse de l’étude précédente révèle également
des résultats comparables pour la chimiothérapie
par FOLFOX-4 et par XELOX : survie sans progression de 8,5 mois versus 8 mois et survie globale de
19,6 mois versus 19,8 mois, respectivement (8). L’intensification de la chimiothérapie donne également
des résultats encourageants et pourrait être une
alternative aux biothérapies. Une étude de phase II
portant sur 34 patients avec métastases hépatiques
non résécables d’emblée traités par FOLFIRINOX
révèle un taux de réponse objective de 70 % ; 82 %
des patients ont pu bénéficier d’une intervention
hépatique, avec un taux de résection R0 de 32 %
(26 % de l’effectif total) [9]. Une autre manière
d’améliorer les résultats de la chimiothérapie est
l’adaptation de la dose de 5-FU à la pharmacocinétique. Une étude randomisée française a comparé
une monothérapie de 5-FU en première ligne thérapeutique au même traitement avec adaptation de
la dose à un dosage plasmatique de 5-FU. L’adaptation de la dose de 5-FU a permis une amélioration
significative du taux de réponse (34 % versus 18 % ;
p = 0,004) et une diminution des effets indésirables
(p = 0,003) [10], résultats à méditer à l’heure ou la
stratégie séquentielle est une option parfaitement
valable. Enfin, quel traitement administrer après une
première ligne de 5-FU en monothérapie ? C’est la
question que pose une étude randomisée portant
sur 628 patients et comparant l’irinotécan seul à
l’association irinotécan + oxaliplatine. La bithérapie
permet d’améliorer la survie globale en deuxième
ligne (13,4 mois versus 11,1 mois ; p = 0,0072), le
taux de réponse (2 % versus 7 % ; p < 0,0001) et
les symptômes liés à la tumeur (32 % versus 19 % ;
p = 0,0072) [11].
Traitement adjuvant
Une analyse conjointe d’une étude de la FFCD et
d’une étude internationale, regroupant 278 patients,
a comparé un traitement adjuvant par chimiothérapie 5-FU-acide folinique à la chirurgie seule après
résection complète de métastases hépatiques de
cancer colo-rectal. Les résultats, à la limite de la
significativité, sont en faveur de la chimiothérapie en
termes de survie sans progression (27,9 mois versus
18,8 mois ; p = 0,05) et de survie globale (62 mois
versus 47 mois ; p = 0,095) [12]. Une étude de l’Euro­
pean Organisation for Research and Treatment
(EORTC), plus récente, a randomisé 364 patients
atteints de métastases hépatiques opérables de
cancer colo-rectal entre 6 cures de FOLFOX-4
avant puis après la chirurgie et la chirurgie seule.
Les résultats sont en faveur du bras chimiothérapie
périopératoire, avec une amélioration de la survie
sans progression à 3 ans (7,3 % versus 35,4 % ;
p = 0,058). La même proportion de patients a pu
être opérée dans les deux bras (83 % et 84 %). La
survie sans progression à 3 ans des patients opérés
a été de 9,2 % versus 42,4 % (p = 0,025), en faveur
du bras chimiothérapie périopératoire. Seuls 63 %
des patients inclus dans le bras chimiothérapie
périopératoire ont recu une chimiothérapie post­
opératoire (13).
Facteurs pronostiques
Une recherche de facteurs pronostiques après récidive
a été réalisée à partir de la base de données ACCENT,
regroupant les données de plus de 17 000 patients
opérés de cancers du côlon de stades II et III et inclus
dans des essais de chimiothérapie entre 1978 et 1999.
Les paramètres associés à une survie prolongée après
récidive étaient : un délai long entre l’intervention
initiale et la récidive, un stade II initial, la période
d’inclusion la plus récente et l’absence de chimiothérapie adjuvante. Ces facteurs pronostiques devraient
être pris en compte dans les essais thérapeutiques
chez les patients présentant une récidive de cancer
du côlon (14).
La valeur pronostique de la qualité de vie a également été démontrée chez 564 patients inclus dans
une étude randomisée testant la chronothérapie
dans le traitement des cancers colo-rectaux méta­
statiques. Les paramètres indépendants associés à
la survie étaient le taux de phosphatase alcaline,
le nombre de globules blancs, le nombre de sites
métastatiques et le score fonctionnel du QLQ-C30
de l’EORTC (15).
Évaluation des réponses
Une étude française a révélé que l’évolution de l’anti­
gène carcino-embryonnaire (ACE) prélevé à chaque
cure de chimiothérapie pendant les 4 premières cures
était bien corrélée à la réponse tumorale et à la
survie sans progression. Cette étude confirme la
validité du dosage de l’ACE pour évaluer l’évolution tumorale. La cinétique de l’ACE pourrait ainsi
permettre de déterminer précocement l’efficacité
d’une chimiothérapie (16).
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Journée FFCD-PRODIGE
Cancer du côlon : quoi de neuf en 2008 ?
Dépistage
Une étude randomisée néerlandaise a comparé le
dépistage des cancers colo-rectaux par les tests de
détection immunologique au dépistage par test au
gaïac dans les selles. Elle a inclus 20 623 patients :
le taux de participation a été de 46,9 % pour le
test au gaïac et de 59,6 % pour le test immunologique (p < 0,01) : 2,4 % des tests au gaïac
étaient positifs, et 5,5% des tests immunologiques (p < 0,01). Onze cancers et 48 adénomes
avancés ont été dépistés avec le test au gaïac,
contre 24 cancers et 121 adénomes avancés avec
le test immunologique. Le test au gaïac avait une
meilleure spécificité, mais le test immunologique
permettait un meilleur taux de détection des
lésions sur l’ensemble de la population (intention
de dépister) [17].
Dépistage de récidive
Une étude française ayant inclus 130 patients a
rapporté que la surveillance par PET scan après résection d’un cancer colo-rectal permettait un diagnostic
plus précoce des récidives (12,1 mois versus 15,4 mois ;
p = 0,01) et un plus grand nombre de résections R0
de ces récidives (10 versus 2). Cependant, l’effectif
et la durée de suivi n’ont pas permis de mettre en
évidence un gain de survie (18).
■
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