L Gestion des effets indésirables du bévacizumab DOSSIER THÉMATIQUE

102 | La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue Vol. XIV - n° 3 - mai-juin 2011
DOSSIER THÉMATIQUE
Gestion des thérapies ciblées
Gestion des effets indésirables
du bévacizumab
Managing bevacizumab-related adverse events
Aziz Zaanan*, Julien Taïeb*, Olivier Bouché**
* Service de gastroentérologie et on-
cologie digestive, hôpital européen
Georges-Pompidou, Paris.
** Service de gastroentérologie et
oncologie digestive, CHU de Reims,
hôpital Robert-Debré, Reims.
L
es biothérapies ou thérapies ciblées sont deve-
nues aujourd’hui un arsenal thérapeutique
incontournable en cancérologie digestive. En
particulier les thérapies liées aux agents biologiques
qui bloquent l’angiogenèse tumorale en ciblant la
voie du facteur de croissance endothéliale vasculaire
(Vascular Endothelial Growth Factor [VEGF]) et qui
ont permis, associés à l’éventail des chimiothérapies
cytotoxiques classiques, une augmentation de la
survie des patients. Le bévacizumab est un anticorps
humanisé de type IgG1 permettant une involution
des néovaisseaux tumoraux en empêchant le VEGF
de se xer sur ses récepteurs à la surface des cellules
endothéliales. À ce jour, le bévacizumab est le seul
antiangiogénique (AA) ayant obtenu une autorisa-
tion de mise sur le marché (AMM) dans le traitement
du cancer colorectal avancé. Avec le développement
de cette thérapie AA, de nouveaux effets indésirables
sont apparus : même mineurs, ils peuvent retentir sur
la qualité de vie des patients et imposer des reports
de cure, voire des arrêts thérapeutiques délétères.
Sous l’égide de sociétés savantes françaises, un
groupe de travail a élaboré des Recommandations
pour la pratique clinique (RCP) de prise en charge
des effets vasculaires et rénaux des AA, qui sont
reformulées dans cette revue. Le patient doit être
informé des risques (rares) de complications graves.
La collaboration interdisciplinaire entre le médecin
prescripteur et ses confrères généralistes et spécia-
listes cardiologues et néphrologues doit être étroite,
confortée et optimisée par l’utilisation d’un carnet
de suivi remis au patient.
Prérequis à la prescription
des antiangiogéniques
La lecture du résumé des caractéristiques du produit,
le respect des indications, des contre-indications et
des posologies ainsi que la connaissance parfaite
des précautions d’emploi, des modalités de surveil-
lance et des effets indésirables sont des prérequis
généraux indispensables (1, 2). Les données spéci-
ques principales à connaître avant la prescription
du bévacizumab sont résumées dans le tableau I (1).
La remise de documents d’information ou de carnets
de liaison est conseillée (1, 2).
Hypertension artérielle
L’hypertension artérielle (HTA) est l’effet indésirable
le plus fréquemment rencontré chez les patients
traités par le bévacizumab (15 à 30 %) [3]. Cet effet
indésirable est probablement lié au mode d’action
des AA sans que son mécanisme physiopatholo-
gique soit bien compris (3). L’incidence de l’HTA n’est
pas établie avec exactitude car la pression artérielle
rapportée dans les essais cliniques a été mesurée
dans des conditions souvent imparfaites. De plus,
la pression artérielle a été estimée selon les critères
de la classifi cation Common Terminology Criteria-
Adverse Events du National Cancer Institute (NCI-
Tableau I. Contre-indications, prérequis et surveillance de la prescription du bévacizumab.
Contre-indications générales : hypersensibilité au produit, grossesse et allaitement
Précautions générales : peu de données chez l’insuffi sant rénal ou l’hépatique sévère
• Contre-indications : accident artériel récent, HTA non contrôlée, intervention chirurgicale
de moins de 28jours, plaies non cicatrisées, association au sunitinib
• Examen : cardiovasculaire avec mesure de PA, cutané, bucco-dentaire (soins dentaires
et parodontaux si besoin)
• Conseils : mesure de la PA à domicile (automesures) ou par un médecin généraliste
• Précautions : interruption de 4 à 5semaines si chirurgie majeure, extraction dentaire,
polypectomie ou embolisation portale
• Surveillance : PA, bandelette urinaire (BU), créatininémie, saignements, douleurs abdominales
• Surveillance paraclinique : si protéines 2+ ou 3+ à la BU => protéinurie/24heures
ou sur échantillon matinal (rapport protéine/créatinine)et clairance calculée de créatinine
La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue Vol. XIV - n° 3 - mai-juin 2011 | 103
Points forts
»
Le bévacizumab est le seul antiangiogénique ayant obtenu une autorisation de mise sur le marché dans
le traitement du cancer colorectal avancé.
»La prise en charge des effets indésirables liés au bévacizumab doit s’intégrer dans un réseau interdis-
ciplinaire.
»La balance bénéfice/risque du traitement par bévacizumab est largement favorable aux patients mais
les effets indésirables à long terme restent peu connus.
Mots-clés
Bévacizumab
Toxicité
Iatrogénie
Hypertension
artérielle
Protéinurie
Cancer
VEGF
Keywords
Bevacizumab
Toxicity
Iatrogenic
Hypertension
Proteinuria
Cancer
VEGF
CTCAE), propre à la communauté oncologique, qui
utilise un seuil de pression artérielle plus haut (≥ 140
et/ou 90 mmHg) que celui défi ni par les recom-
mandations des sociétés savantes européennes de
cardiologie (1, 2).
Les caractéristiques de l’HTA induite par le bévaci-
zumab sont relativement constantes :
l’élévation de la pression artérielle survient dès
les premières semaines de traitement chez tous les
patients, qu’ils soient initialement hypertendus ou
normotendus ;
l’HTA nest sévère que dans 10 à 15 % des cas ;
l’HTA est en général dose-dépendante.
À partir d’une méta-analyse d’essais cliniques
portant sur plusieurs milliers de patients dont la
moitié avaient reçu du bévacizumab, le risque relatif
d’HTA sous une faible dose de bévacizumab (2,5 mg/
kg/sem.) était de 4,78 (IC95 : 3,59-6,36 ; p < 0,001)
et de 5,39 (IC95 : 3,68-7,90 ; p < 0,001) pour une
dose de 5 mg/kg/sem. (4).
La recherche de signes cliniques évocateurs d’HTA
(acouphènes et céphalées) et la mesure de la pres-
sion artérielle au repos doivent être systématiques
avant chaque nouvelle administration de bévaci-
zumab (1). Les mesures conventionnelles de pres-
sion artérielle ne permettent pas toujours de faire le
diagnostic de l’HTA, en particulier dans un contexte
anxiogène lié au diagnostic ou avant la chimiothé-
rapie en hôpital de jour. Cela justifi e l’utilisation en
ambulatoire de l’automesure ou de la mesure par le
médecin généraliste de la pression artérielle chez les
patients traités ou devant être traités par des AA.
Les RCP françaises sont les suivantes (5) :
la première administration d’un AA ne doit pas
être retardée en raison d’une pression artérielle
élevée (hors urgence hypertensive) ;
la mesure de la pression artérielle doit au mieux
être réalisée en ambulatoire par le médecin traitant
et/ou par automesures à domicile par un appareil
validé par l’Agence française de sécurité sanitaire des
produits de santé (AFSSAPS). Le “schéma des 3” dicté
par la Haute Autorité de santé (HAS) est conseillé
(6) : 3 prises de la pression artérielle le matin au
réveil et le soir au coucher, à 5 minutes d’intervalle,
3 jours de suite ;
la prise en charge thérapeutique de l’HTA doit
s’effectuer conformément aux recommandations
de l’HAS et de l’European Society of Hypertension
(ESH) [6, 7] si la pression artérielle est confi rmée –
supérieure à 135 mmHg pour la pression artérielle
systolique et/ou 85 mmHg pour la pression artérielle
diastolique en ambulatoire (fi gure 1) [5] ;
la prise en charge se fera au mieux dans le cadre
d’un traitement en réseau comprenant médecin
généraliste, oncologue, cardiologue et néphrologue
avec carnet de suivi.
Les objectifs de ces mesures sont d’éviter, d’une part,
un arrêt inapproprié du traitement AA et, d’autre
part, une complication grave de l’HTA. Seule une
urgence hypertensive de type encéphalopathie, HTA
maligne, HTA avec insuffi sance cardiaque, dissection
aortique, accident vasculaire cérébral, infarctus du
myocarde ou syndrome de leucoencéphalopathie
postérieure réversible nécessite un arrêt défi nitif du
bévacizumab (5, 8). Une urgence de ce type doit être
prise en charge par une équipe spécialisée de cardio-
logie et/ou de neurologie vasculaire. En l’absence de
protéinurie, les antihypertenseurs classiques peuvent
être utilisés : inhibiteurs de l’enzyme de conversion
(IEC), antagonistes des récepteurs AT1 de l’angioten-
sine II (ARA2), inhibiteurs calciques, bêtabloquants
ou diurétiques (5, 8). Dans les rares cas d’HTA résis-
tant aux traitements standards, les dérivés nitrés
semblent être un recours intéressant. Les comor-
bidités associées seront à prendre en compte dans
le choix thérapeutique (tableau II) [2, 5].
Protéinurie
Le rein est l’un des organes qui exprime de façon
physiologique le plus le VEGF et son récepteur
le VEGF-R, rendant compte ainsi de la fréquence
élevée de la protéinurie et de l’HTA observées chez
les patients après quelques semaines à quelques
mois de traitement par bévacizumab. La protéi-
nurie est habituellement dose-dépendante et réver-
sible, parfois massive et presque toujours associée
à une HTA. Des cas de néphrites interstitielles et
de microangiopathies thrombotiques (syndrome
hémolytique et urémique) ont été rapportés, notam-
ment lors d’une association bévacizumab-sunitinib
(5). Selon les RCP françaises, la bandelette urinaire
(BU) – et, le cas échéant, la quantifi cation de la
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Gestion des effets indésirables du bévacizumab
DOSSIER THÉMATIQUE
Gestion des thérapies ciblées
PA ambulatoire (MG ou AMT) systématiquement
à S1, S2, S4 puis chaque mois
Traitement anti-HTA initial :
tFOMBCTFODFEFQSPUÏJOVSJFDIPJTJSQBSNJEFTHSBOEFTDMBTTFTEBOUJIZQFSUFOTFVST
tTJQSPUÏJOVSJF*&$PV"3"FOQSFNJÒSFJOUFOUJPO
PA normale
ou HTA contrôlée
PA non contrôlée*
chez un patient asymptomatique
PA non contrôlée*
chez un patient symptomatique
1"GPJTNPJT
(MG ou AMT)
6OFGPJTNPJTPVQMVTGSÏRVFNNFOU
UBOURVFMB1"OFTUQBTDPOUSÙMÏF
6OFGPJTQBSTFNBJOFUBOURVF
M)5"FTUTZNQUPNBUJRVF
PCUFOUJPOEVODPOUSÙMFEF1"
BEÏRVBUJOEJTQFOTBCMF
1"OPODPOUSÙMÏFFUPVNN)H1"FO".5PVɋFUPVNN)H1"EFDPOTVMUBUJPO
""BOUJBOHJPHÏOJRVFT".5BVUPNFTVSFUFOTJPOOFMMF.(NÏEFDJOHÏOÏSBMJTUF444TFNBJOFFU
6SHFODF
hypertensive
1BTEF
NPEJmDBUJPO
UIÏSBQFVUJRVF
continuer AA
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OJWFBVEF1"FUÏWPMVUJWJUÏ
monothérapie initiale si PA
NPEÏSÏNFOUÏMFWÏFCJUIÏSBQJF
EFNCMÏFTJQMVTTÏWÒSFcontinuer AA
Traitement anti-HTA
JOTUJUVÏCJUIÏSBQJFEFNCMÏF
MFQMVTTPVWFOUJOUFOTJmDBUJPO
SBQJEFEVUSBJUFNFOU
continuer AA
)PTQJUBMJTBUJPO
QSJTFFODIBSHF
EFMVSHFODF
arrêt des AA
Situation
Surveillance
Conduite à tenir
Traitement antihypertenseur
Figure 1. Prise en charge de la pression artérielle au cours du suivi (d’après [5]).
Tableau II. Classes de médicaments antihypertenseurs à privilégier ou à éviter en fonction des pathologies associées
(d’après [5]).
Pathologies associées Classes à privilégier Classes à éviter
ou à utiliser avec prudence
HTA + protéinurie IEC, ARA2
HTA résistante Dérivés nitrés ?
Hypercalcémie Thiazidiques
Insuffi sance coronaire Bêtabloquants, A. calciques Vasodilatateurs directs
Insuffi sance cardiaque IEC, diurétiques Bêtabloquants
A. calciques (vérapamil, diltiazem)
Troubles conductifs IEC, diurétiques A. calciques (vérapamil, diltiazem)
Bêtabloquants
Cardiopathie obstructive Vérapamil, diltiazem IEC, bêtabloquants, anti-HTA centraux,
diurétiques
Artériopathie IEC, A. calciques Bêtabloquants
Insuffi sance rénale IEC faible dose, diurétiques de l’anse Thiazidiques, spironolactone
Diabète IEC, A. calciques Bêtabloquants
Asthme, BPCO Bêtabloquants
Dyslipidémie Bêtabloquants, diurétiques
Dépression Antihypertenseurs centraux
IEC : inhibiteurs de l’enzyme de conversion ; ARA2 : antagonistes des récepteurs AT1 de l’angiotensine II ; A. calciques : antagonistes
calciques.
La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue Vol. XIV - n° 3 - mai-juin 2011 | 105
DOSSIER THÉMATIQUE
protéinurie – et l’estimation de la fonction rénale
(par la formule “Modification Of the Diet in Renal
Disease” [MDRD] simplifi ée plutôt que la formule
de Cockcroft et Gault) doivent être faites, avant
et tout au long du traitement (avis néphrologique
si clairance < 30 ml/mn). Une protéinurie à 2+ ou
3+ à la BU est une indication à la mesure de la
protéinurie et de la créatininémie durant l’inter-
cure (figure 2) [5]. Le bévacizumab peut être pres-
crit jusqu’au seuil de protéinurie de 3 g/4 heures,
sous réserve de l’avis d’un néphrologue (5). En cas
de syndrome néphrotique, défi ni par une protéi-
nurie > 3 g/24 heures associée à une hypoalbumi-
némie < 30 g/l, qui pourrait concerner 1 à 2 % des
patients traités par AA, une biopsie rénale à visée
diagnostique et pronostique doit être discutée. En
cas de protéinurie > 1 g/24 heures, l’utilisation
d’un antihypertenseur de la classe des IEC ou des
ARA2 est conseillée compte tenu de leur effet anti-
protéinurique.
Perforations digestives
Il s’agit d’une complication rare mais redoutée.
Une méta-analyse d’essais randomisés de patients
traités par bévacizumab a montré une incidence
des perforations digestives de 0,9 % avec un risque
relatif de 3,1 pour les cancers colorectaux (9). Les
facteurs de risque de perforation digestive lors d’un
traitement par bévacizumab sont : tumeur colorec-
tale en place, carcinose péritonéale, antécédent
de radiothérapie abdominale ou pelvienne, ulcère
gastro-intestinal, colite infl ammatoire ou diverti-
culite (10). Toutefois, la présence d’une tumeur en
place n’est pas une contre-indication au bévaci-
zumab car le risque de perforation ou d’hémorragie
digestive grave reste inférieur à 5 % et la morta-
lité, inférieure à 1 % (10). En revanche, il convient
d’être plus prudent et d’éviter le bévacizumab si la
tumeur primitive est traitée par prothèse endos-
copique. En effet, dans 2 études rétrospectives, le
taux de perforation semblait augmenté chez les
patients avec prothèse traités par bévacizumab
(11, 12). Un tableau clinique de douleurs abdomi-
nales avec un syndrome occlusif et des vomisse-
ments doit faire rechercher systématiquement une
perforation digestive et faire arrêter le bévacizumab
défi nitivement. La perforation digestive survient
habituellement au cours des 3 premiers mois de
traitement par bévacizumab. La prise en charge
doit être, si possible, conservatrice, avec aspiration
nasogastrique sans chirurgie (10).
Hémorragies
Des manifestations hémorragiques peuvent survenir,
y compris en l’absence d’AA chez les patients traités
par une chimiothérapie pour un cancer colorectal.
Elles peuvent être secondaires à une nécrose hémor-
ragique de la tumeur, ou d’une de ses métastases,
ou tout simplement consécutives à une fragilité des
muqueuses liée à la chimiothérapie.
Pour les patients recevant une chimiothérapie
associée au bévacizumab, diverses manifestations
hémorragiques peuvent survenir (13) :
les hémorragies mineures : relativement
fréquentes, principalement cutanéomuqueuses,
telles que l’épistaxis, les gingivorragies ou les saigne-
ments vaginaux (jusqu’à 50 % des patients dans
certaines études) ;
les hémorragies graves : rares (5 %), quelquefois
fatales, notamment en cas d’hémoptysie massive ou
d’hémorragie intracérébrale. Cependant, à la suite de
données cliniques favorables, la présence de métas-
tases cérébrales n’est plus considérée comme une
contre-indication au bévacizumab (14).
Le risque hémorragique associé au bévacizumab
n’apparaît pas augmenté par la prise concomitante
d’anticoagulants oraux (15), ni par la présence d’une
tumeur primitive colorectale en place (10). Cepen-
dant, la prise d’anticoagulants nécessite une surveil-
lance étroite du bilan de coagulation. En pratique,
en cas de survenue d’un événement hémorragique
mineur, le bévacizumab peut être poursuivi à pleine
Protéinurie bandelette urinaire 2+ ou 3+
OK AA 100 %
avant la cure suivante
Protéinurie des 24 heures (g/24 h) ou échantillon matinal
(g/g créatinine urinaire) et créatininémie
AA : antiangiogéniques ; IEC : inhibiteurs de l’enzyme de conversion ;
ARAII : antagonistes des récepteurs AT1 de l’angiotensine II.
≤ 1 g/24 h
ou < 1 g/g
Continuer AA
1 à 3 g/24 h
ou 1 à 3 g/g
Continuer AA
tBWJTEVOÏQISPMPHVF
t*&$PV"3"
> 3 g/24 h
ou > 3 g/g
Avis du néphrologue
avant AA
Syndrome
néphrotique
(> 3 g/24 h
et albuminémie
< 30 g/l)
AA contre-indiqué
Figure 2. Conduite à tenir si la protéinurie à la bandelette urinaire 2+ ou 3+ (d’après [5]).
106 | La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue Vol. XIV - n° 3 - mai-juin 2011
Gestion des effets indésirables du bévacizumab
DOSSIER THÉMATIQUE
Gestion des thérapies ciblées
dose. En revanche, pour les événements hémorra-
giques graves, un arrêt défi nitif du bévacizumab est
recommandé.
Troubles de la cicatrisation
En raison du rôle majeur des voies de signalisation
impliquant le VEGF dans le processus de cicatrisation,
le bévacizumab doit être arrêté 5 à 6 semaines avant
et repris 4 semaines après une chirurgie majeure (13).
La cicatrisation complète doit être vérifi ée. Il est
également recommandé un intervalle libre d’au
moins 4 semaines entre la dernière administration de
bévacizumab et une embolisation portale (16). Cette
recommandation du Thésaurus national de cancé-
rologie digestive (TNCD) s’appuie sur une étude
rétrospective montrant une réduction par le bévaci-
zumab de l’hypertrophie du foie non embolisé (17).
Une autre étude ne montrait pas cet effet sur la
régénération hépatique (18). Une intervention
mineure ne doit pas retarder le début du traite-
ment. En revanche, il semble prudent de suspendre
le bévacizumab en cas d’extraction dentaire ou de
polypectomie (1, 16). Lorsqu’une intervention est
envisagée en urgence, le rapport bénéfi ce/risque
sera évalué et le chirurgien informé du risque accru
de complications postopératoires (1).
Événements
thromboemboliques
veineux ou artériels
Les complications thromboemboliques représentent
la seconde cause de mortalité chez les patients
atteints par un cancer. La pathologie néoplasique,
notamment en situation métastatique, est un facteur
de risque d’événements thromboemboliques veineux
(ETEV) connu depuis plus de un siècle. La survenue
d’ETEV est en partie expliquée par une augmentation
de l’expression des facteurs de la coagulation ainsi
qu’une activation de ces voies de la coagulation,
mais aussi – et plus particulièrement – par l’état
général du patient, le type de cancer et les différents
traitements réalisés. Une méta-analyse a montré
que l’adjonction du bévacizumab à une chimiothé-
rapie cytotoxique augmentait le risque d’ETEV de
l’ordre de 12 % (19). En cas de survenue d’un ETEV,
le bévacizumab doit être suspendu pendant 2 ou 3
semaines, puis repris après l’obtention d’une anti-
coagulation (par antivitamine K ou héparine de bas
poids moléculaire) effi cace et stable (1, 16). Pour
les ETEV graves, de type embolie pulmonaire ou
thrombus menaçant le pronostic vital, l’arrêt défi nitif
du bévacizumab peut être discuté. Une surveillance
du bilan de coagulation est conseillée, initialement
2 fois par semaine, puis après stabilisation, au moins
avant chaque cure.
Par ailleurs, d’autres travaux ont plutôt suggéré que
le bévacizumab était responsable d’une augmenta-
tion du risque des événements thromboemboliques
artériels (ETEA) de type AVC et IDM (20, 21). Ce
risque est majoré en cas d’antécédents thromboem-
boliques artériels et chez les patients de plus de
65 ans et/ou hypertendus (20, 22). Dans l’analyse
groupée de 2 essais incluant des patients de plus de
65 ans, le risque d’ETEA sous bévacizumab semblait
davantage en rapport avec les antécédents vascu-
laires qu’avec l’âge (22). Les faibles doses d’aspirine
ne sont pas contre-indiquées et pourraient même
être bénéfi ques chez les patients à risque (23). Les
mécanismes proposés des ETEA seraient l’induction
d’une apoptose endothéliale et l’apparition d’un état
d’hypercoagulabilité endovasculaire par exposition
de la membrane basale de la paroi vasculaire avec
le sang, ou la libération d’emboles de cholestérol à
partir de l’athérome favorisée par les AA (24). Le
Centre d’études et de recours sur les inhibiteurs de
l’angiogenèse (CERIA) a proposé un score prédictif du
risque vasculaire (en cours de validation) défi ni par
la présence et la localisation des plaques d’athérome
visibles au scanner. La survenue d’un ETEA impose
l’arrêt défi nitif du bévacizumab.
Sujet âgé
Actuellement, l’âge médian lors du diagnostic du
cancer colorectal est proche de 70 ans. Certains
patients, âgés, fragiles, avec des comorbidités ou des
troubles de l’autonomie, ne relèvent pas d’un traite-
ment actif de leur maladie et pourront être traités
après une évaluation oncogériatrique de manière
symptomatique. D’autres patients, au contraire,
présentant une conservation de l’état général et peu
de comorbidités, pourront être traités de la même
façon que les patients plus jeunes. Chez le sujet
âgé, les données de différentes études montrent,
d’une part, que l’adjonction du bévacizumab à
une chimiothérapie classique permet d’améliorer
l’effi cacité du traitement (22) et, d’autre part, que
cette amélioration d’effi cacité est comparable à
celle remarquée chez le sujet jeune (25). Globa-
lement, les toxicités du bévacizumab observées
chez le sujet âgé sont similaires à celles observées
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