Top 5 des études de 2013 portant sur les cancers colorectaux Actualités

C. Tournigand
La Lettre du Cancérologue Vol. XXIII - n° 5 - mai 2014 | 183
Actualités
à la 25e JFCD
Top 5 des études de 2013
portant sur les cancers
colorectaux
Top five studies in colorectal cancers in 2013
C. Tournigand*, H. Boussion*
* Service d’oncologie médicale,
hôpital Henri-Mondor ; université
Paris-Est Créteil Val-de-Marne.
Actualisation de l’étude PRIME :
rechercher les mutations
de KRAS et de NRAS avant
de commencer un traitement
par anti-EGFR est nécessaire
La mutation de KRAS initialement recherchée
était celle de l’exon 2. Il a été démontré qu’elle
entraîne un effet délétère du traitement par anti-
EGFR sur la survie par rapport à une chimio thérapie
seule. L’impact des autres mutations de KRAS
(exons 3 et 4), des mutations de NRAS (exons 2,
3 et 4) et de celle de BRAF (exon 15) a été recherché
dans l’étude PRIME (1). Parmi les 512 patients initia-
lement inclus dans l’étude (FOLFOX associé ou non
au panitumumab en première ligne métastatique),
108 (17 %) présentaient une mutation de RAS autre
que celle de l’exon 2. Dans ce sous-groupe, la survie
globale (SG) était de 18,3 versus 17,1 mois, respecti-
vement dans les groupes FOLFOX et FOLFOX + pani-
tumumab. Il devient donc nécessaire de rechercher
l’ensemble de ces mutations avant de commencer
un traitement par anti-EGFR.
Étude CORRECT :
validation d’une nouvelle ligne
thérapeutique
Le régorafénib est un inhibiteur de tyrosine kinase
(ITK) multisites inhibant des protéines kinases impli-
quées dans l’angiogenèse (VEGFR), le microenviron-
nement tumoral (PDGRF, FGFR) et l’oncogenèse (KIT,
BRAF, RET). Des résultats prometteurs en phase IB
retrouvaient, sous régorafénib, un taux de contrôle
de la maladie tumorale de 70 % chez des patients
lourdement prétraités.
Létude CORRECT est une étude de phase III multi-
centrique, internationale, randomisée (2:1) contre
placebo. Entre avril 2010 et mars 2011, 760 patients
présentant un cancer colorectal métastatique en
progression après avoir reçu l’ensemble des traite-
ments standard (chimiothérapie, bévacizumab et/ou
anti-EGFR) ont été inclus (2). Les patients devaient
être en bon état général (OMS 0 ou 1). Ils recevaient,
en double aveugle, soit un placebo soit 160 mg/j de
régorafénib, 3 semaines sur 4. Lobjectif principal de
l’étude était la SG. Cette étude est positive, avec une
SG médiane de 6,4 versus 5 mois dans les bras régo-
rafénib et placebo respectivement (HR = 0,77 ; IC
95
:
0,64-0,94 ; p = 0,0052). Malgré un taux élevé d’effets
indésirables (respectivement 93 versus 61 %), la
qualité de vie restait similaire dans les 2 groupes.
Les principaux effets indésirables observés étaient
les syndromes mains-pieds, l’hypertension artérielle,
les diarrhées et l’asthénie. Le régorafénib devient
donc une nouvelle alternative thérapeutique pour
les patients multitraités mais restant en bon état
général.
Étude ML18147 :
intérêt de la poursuite
de l’antiangiogénique
en deuxième ligne
L’utilisation du bévacizumab en association avec
une chimiothérapie est actuellement validée en
première ligne métastatique et en deuxième ligne
uniquement chez les patients naïfs. Plusieurs études
observationnelles (BriTE, ARIES) semblaient montrer
l’intérêt de la poursuite de l’inhibition du VEGF en
deuxième ligne. Ces résultats sont confi rmés dans
l’étude multicentrique randomisée (1:1) ML18147,
menée entre février 2006 et janvier 2011 chez
184 | La Lettre du Cancérologue Vol. XXIII - n° 5 - mai 2014
Résumé
Parmi les nombreuses publications sur le traitement du cancer colorectal métastatique, nous en avons retenu5,
dont3 constituent des avancées qui sont d’ores et déjà appliquées en pratique courante. Le regorafenib,
en démontrant son efficacité chez les patients ayant reçu l’ensemble des chimiothérapies et thérapies
ciblées actives, offre une solution lorsque l’état général est satisfaisant. En deuxième ligne, chez des
patients prétraités par une chimiothérapie avec du bévacizumab, le fait de poursuivre le bévacizumab en
changeant de chimiothérapie permet un allongement de la survie globale, et enfin, les dernières analyses
des différentes mutations de ras permet de mieux cerner les patients les plus à même de tirer un bénéfice
du panitumumab en première ligne en association avec une chimiothérapie.
Mots-clés
Cancer colorectal
métastatique
Panitumumab
Oxaliplatine
Bévacizumab
Ras
Braf
Summary
Among the many publications
on the treatment of metastatic
colorectal cancer, we selected
ve of which 3 are steps that
are already applied in practice.
Regorafenib, demonstrating its
effectiveness in patients who
received all active chemo-
therapy and targeted thera-
pies, can be proposed when
the general condition is satis-
factory. In patients pre-treated
with chemotherapy with
bevacizumab, a bevacizumab-
based combiantion allows a
prolonged overall survival, and
nally, the latest analysis of the
various mutations of ras helps
identify patients most likely
to derive a benefi t of panitu-
mumab in combination with
rst-line chemotherapy.
Keywords
Metastatic colorectal cancer
Panitumumab
Oxaliplatin
Bevacizumab
Ras
Braf
820 patients (3). Après une première ligne compre-
nant du bévacizumab, les patients recevaient une
deuxième ligne standard associée ou non à du béva-
cizumab à une dose équivalente à 2,5 mg/kg/sem.
Lobjectif principal a été atteint avec une augmen-
tation signifi cative de la SG – 11,2 versus 9,8 mois
(HR = 0,81 ; IC95 : 0,69-0,94 ; p = 0,0062) – et une
tolérance similaire à celle observée en première ligne.
Étude EORTC 40983 :
pas d’impact sur la survie
globale du FOLFOX
périopératoire dans
les métastases hépatiques
Cette étude de phase III randomisée (1:1), multi-
centrique, avait fait l’objet d’une première publica-
tion en 2008 concernant la survie sans progression
(SSP), qui était l’objectif principal. Au total,
364 patients atteints d’un cancer colorectal avec
1 à 4 métastases hépatiques d’emblée résécables
avaient été inclus. Une chimiothérapie périopé-
ratoire par FOLFOX4 (6 cycles avant et après la
chirurgie) montrait une augmentation absolue de
la SSP à 3 ans de 8,1 % (HR = 0,77 ; IC95 : 0,60-1,00 ;
p = 0,041) [4]. Les résultats en termes de SG à 5 ans
sont en revanche non signifi catifs : 51,2 % dans le
groupe chimiothérapie versus 47,8 % (HR = 0,88 ;
IC
95
: 0,68-1,14 ; p = 0,34). L’absence de différence
observée pourrait s’expliquer, d’une part, par le
manque de puissance de l’étude (hypothèses statis-
tiques établies pour montrer une différence en SSP)
et, d’autre part, par une SSP plus longue que prévu
dans le groupe chirurgie seule.
FOLFOXIRI + bévacizumab :
une première ligne
prometteuse dans les cancers
colorectaux BRAF muté
La présence d’une mutation de BRAF (5 à 10 %
des cas) est un facteur indépendant de mauvais
pronostic dans les cancers colorectaux. La SSP en
première ligne dépasse rarement les 6 mois, et la
survie médiane est de l’ordre de l’année. Dans cette
étude de phase II, F. Loupakis et al. (5) ont étudié,
pour cette population, l’intérêt d’une chimio thérapie
intensive par FOLFOXIRI (5-FU, acide folinique, oxali-
platine, irinotécan) + bévacizumab en première ligne
avec entretien par LV5FU2 + bévacizumab après un
maximum de 12 cycles. Au total, 50 patients prove-
nant de 2 centres italiens ont été inclus. La SSP était
de 9,2 mois, et la SG, de 24,1 mois. Les principaux
effets indésirables observés étaient la neutropénie
(40 % de grade 3-4), la mucite (20 % de grade 3-4)
et la diarrhée (13 % de grade 3-4). Ces résultats
prometteurs semblent se confi rmer dans l’étude
de phase III TRIBE qui compare FOLFOXIRI + bévaci-
zumab à FOLFIRI (5-FU, acide folinique, irinotécan) +
bévacizumab en première ligne méta statique chez
508 patients, dont 28 porteurs d’une mutation de
BRAF muté.
1. Douillard JY, Oliner KS, Siena S et al. Pani-
tumumab-FOLFOX4 treatment and RAS
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2. Grothey A, Van Cutsem E, Sobrero A et al.
Regorafenib monotherapy for previously
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(CORRECT): an international, multi-
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3. Bennouna J, Sastre J, Arnold D et al.
Continuation of bevacizumab after first
progression in metastatic colorectal cancer
(ML18147): a randomised phase 3 trial.
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4. Nordlinger B, Sorbye H, Glimelius B et al.
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liver metastases from colorectal cancer
(EORTC 40983): long-term results of a
randomised, controlled, phase 3 trial. Lancet
Oncol 2013;14(12):1208-15.
5. Loupakis F, Cremolini C, Salvatore L
et al. FOLFOXIRI plus bevacizumab as
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static colorectal cancer. Eur J Cancer
2014;50(1):57-63.
Références bibliographiques
C.Tournigand déclare avoir
desliens d’intérêts avec Amgen,
Bayer, Merck, Roche et Sanofi ..
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