Le Courrier de la Transplantation - Volume V - n
o
1 - janvier-février-mars 2005
7
DOSSIER
thématique
PLACE DES DIFFÉRENTES TECHNIQUES
En effet, la détermination du génome
humain a modifié l’approche de nombreux
domaines de la médecine grâce au déve-
loppement d’outils diagnostiques et/ou
thérapeutiques innovants. Nous avons
décidé d’articuler ce dossier autour des
techniques, en prenant dans tous les cas
des exemples de leur utilisation clinique
dans le domaine de la transplantation. Les
techniques qui seront l’une après l’autre
étudiées par les auteurs de ce dossier sont
donc le génotypage à haut débit, le trans-
criptome, le protéome et le métabolome.
La recherche d’altération du génome ou de
détection des polymorphismes repose sur
les puces ou microarrays. Ces deux
domaines sont complémentaires puisque,
à côté des mutations de grands segments
d’ADN qui ont fait l’objet des premières
études, la médecine moléculaire s’inté-
resse de plus en plus à des polymorphismes
ponctuels de séquence nucléotidique
(Single Nucleotide Polymorphism [SNP]),
ou à l’association de ces polymorphismes
sous forme d’haplotype. Ces polymor-
phismes peuvent avoir des conséquences
fonctionnelles pour l’expression ou l’acti-
vité d’une protéine, et être ainsi associés à
une variation d’expression phénotypique.
L’utilisation des puces peut permettre, à
partir d’un simple prélèvement sanguin,
d’effectuer le génotypage pour de nom-
breux gènes, et, pour chacun des gènes, à
de nombreux haplotypes, en utilisant pour
les dépôts des oligonucléotides porteurs ou
non du polymorphisme recherché.
La deuxième grande application de ces
puces est le transcriptome. Le transcrip-
tome est l’analyse instantanée du niveau
d’expression de tous les ARNm des
gènes choisis. Cette analyse permet de
préciser pour chaque situation patholo-
gique (rejet, infection…) l’expression de
certains gènes, leur association et leur
niveau d’expression. Cette expression
peut être spécifique d’organe ; par
exemple, il est possible de s’intéresser au
niveau d’expression des ARNm dans
l’organe greffé ou dans les lymphocytes
périphériques. Les retombées peuvent
être doubles. Il peut s’agir d’un côté
d’une aide au diagnostic, si le profil d’ex-
pression pour une situation donnée a été
bien défini avec l’utilisation de puces
dédiées qui comportent un plus petit
nombre de gènes sélectionnés. Il peut
s’agir aussi de mettre en lumière le rôle
d’une protéine ou d’une famille de pro-
téines dont l’importance avait été jusque-
là inconnue ou négligée.
La dernière avancée de ces techniques est
la protéomique. Cette technique permet
l’analyse de la diversité des protéines en
réponse à certaines situations cliniques.
Contrairement au génotypage ou au
transcriptome, les techniques utilisées
reposent sur l’électrophorèse bidimen-
sionnelle et la spectrométrie de masse.
Les protéines sont le degré final du
polymorphisme, puisqu’elles prennent
en compte tous les phénomènes post-
transcriptionnels. De plus, ce sont les
véritables cibles ou les responsables des
mécanismes effecteurs des phénomènes
biologiques. L’étude de leur polymor-
phisme se rapproche donc plus de la
réponse fonctionnelle de l’organe ou de
la population cellulaire considérée.
PLACE POUR LE SUIVI D’UN PATIENT
TRANSPLANTÉ
Il convient également de replacer ces
techniques dans une évaluation “chrono-
logique” d’un patient transplanté. On
peut résumer les principales étapes de la
transplantation :
$tout d’abord une période d’attente
avant la greffe ;
$une période immédiate précédant la
greffe lorsque le donneur a été identifié ;
$une période initiale suivant la greffe
lorsque le diagnostic de phénomènes
aigus tels qu’un rejet est particulièrement
important à poser ;
$une période à plus long terme.
Durant cette dernière période, il est
important de caractériser finement l’état
immunitaire et les capacités de réponse
d’un individu vis-à-vis de son greffon et
de sa capacité à se défendre contre
d’autres agressions, comme des infec-
tions ou des cancers. Les différentes tech-
niques énumérées ci-dessus peuvent
trouver leur place dans ce suivi
(figure 1A, B, C et D).
Durant la période d’attente (dialyse ou
insuffisance rénale chronique), le patient
bénéficie d’une évaluation prétransplan-
tation visant à préciser son état immuno-
logique, infectieux, cardiovasculaire et
chirurgical. Même si nous ne traitons
pas cet aspect dans ce dossier, il faut
noter que l’amélioration de la caractéri-
sation des groupes HLA et des anticorps
anti-HLA pour définir des groupes à
risque immunologique permet une
meilleure approche de la compatibilité
du couple donneur/receveur grâce à la
détermination d’antigènes permis ou
interdits. La caractérisation génomique
du profil d’un patient pour des média-
teurs de la réponse immunitaire (immu-
nogénétique) ou pour des enzymes du
métabolisme et des transporteurs des
xénobiotiques (pharmacogénomique)
pourra aider au choix des molécules
ainsi qu’à leur dose pour individualiser
les traitements immunosuppresseurs.
Lors d’un appel de greffe, un greffon est
proposé à un receveur donné. C’est
donc un organe provenant d’un individu
différent avec son capital génétique
propre qui va être utilisé. Les caractéris-
tiques génétiques de ce greffon peuvent
se révéler importantes à prendre en
compte pour la détermination de la pro-
babilité d’une reprise immédiate ou
retardée de la fonction du greffon, du
risque immunologique de rejet, d’une
toxicité spécifique d’organe ou de la
fonction et de la survie du greffon à
long terme. En ce qui concerne les
médicaments, cela est particulièrement