La Lettre du Rhumatologue - n° 245 - octobre 1998
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e numéro de La Lettre du Rhumatologue est consa-
cré à la rhumatologie pédiatrique, spécialité aux
confins de la rhumatologie et de la pédiatrie. Long-
temps demeurée relativement confidentielle en France, elle s’est,
en revanche, beaucoup développée aux États-Unis et chez nos
voisins européens, notamment en Grande-Bretagne sous l’im-
pulsion de Barbara Ansell, et dans les pays du Nord de l’Europe
(Allemagne et pays scandinaves). Elle n’a malheureusement pas
encore reçu de visa universitaire, si bien que les connaissances
dans ce domaine sont peu diffusées, même chez les pédiatres et
les rhumatologues, pourtant hautement concernés par ces affec-
tions. Depuis une dizaine d’années, des consultations spéciali-
sées se sont développées, tant à Paris qu’en province, faisant appel
le plus souvent à des “tandems” associant rhumatologues et
pédiatres, auxquels s’ajoutent éventuellement les orthopédistes
infantiles.
UNE QUESTION CENTRALE : LA CLASSIFICATION
DES ARTHRITES INFLAMMATOIRES DE L’ENFANT
En effet, les pathologies concernées sont multiples : mécaniques,
le plus souvent prises en charge par les orthopédistes infantiles,
et surtout inflammatoires. Si certaines de ces affections et cer-
tains symptômes sont proches de ceux observés chez l’adulte,
l’étude des symptômes et surtout la prise en charge thérapeutique
doivent tenir compte du fait que l’enfant est un organisme en voie
de croissance, ce qui constitue une différence fondamentale. Par
ailleurs, il faut souligner que, chez l’enfant, il existe des mala-
dies articulaires inflammatoires pratiquement inexistantes chez
l’adulte.
Une question centrale en rhumatologie pédiatrique est la classi-
fication des arthrites inflammatoires de l’enfant, objet pendant de
très nombreuses années d’une confusion importante. Depuis la
première description par Diamant Berger, en 1891, de l’arthrite
juvénile à forme systémique, de multiples dénominations ont été
attribuées à ces affections. Un premier effort de clarification a été
fait en 1977 avec l’élaboration d’une classification par l’Asso-
ciation américaine de rhumatologie, rapidement suivie, en 1978,
d’une classification européenne. Cependant, ces premières clas-
sifications ne différenciaient pas nettement les spondylarthropa-
thies des autres arthrites inflammatoires, et la dénomination d’ar-
thrite rhumatoïde juvénile alors employée était source de
confusion, puisque seules les polyarthrites à facteur rhumatoïde
positif, voire négatif, méritent réellement cette appellation.
UNE CLASSIFICATION RÉCENTE ET INDISPENSABLE
Ce n’est que récemment, en 1994 puis en 1996, qu’une classifi-
cation complète des arthrites chroniques juvéniles dites idiopa-
thiques a été élaborée, subdivisant et reconnaissant plusieurs
maladies : les polyarthrites systémiques (anciennement dénom-
mées maladie de Still) ; les polyarthrites à facteur rhumatoïde
positif(modèle réduit de la polyarthrite rhumatoïde de l’adulte) ;
les polyarthrites à facteur rhumatoïde négatif ; les oligoar-
thrites juvéniles (avec un sous-groupe de formes à évolution
extensive polyarticulaire), particulières par l’association fréquente
d’une atteinte inflammatoire de la chambre antérieure de l’œil ;
les spondylarthropathies (dénommées, dans la classification
internationale, arthrite et enthésopathie) ; le rhumatisme pso-
riasique. L’élaboration de cette classification a été rendue pos-
sible par la description précise de ces différentes maladies, mais
aussi et surtout par l’appui de la génétique et la meilleure connais-
sance des processus inflammatoires impliqués dans chacune
d’entre elles, ces éléments ayant clairement démontré qu’il s’agis-
sait bien de maladies différentes et non pas de formes cliniques
d’une seule affection.
La mise au point de cette classification était une étape nécessaire
et indispensable à une meilleure connaissance de ces maladies et
à une meilleure prise en charge thérapeutique, puisqu’elle per-
mettait enfin de réaliser des essais collaboratifs européens et amé-
ricano-européens, tant pour les anti-inflammatoires non stéroï-
diens que pour les traitements de fond.
Dans les dix à quinze dernières années, le retentissement de ces
maladies et de leur thérapeutique sur le métabolisme osseux et la
croissance chez les enfants atteints d’arthrite inflammatoire a éga-
lement été étudié, permettant d’envisager des traitements effi-
caces de ces complications.
É
DITORIAL
La rhumatologie pédiatrique :
une spécialité en voie de développe
ment
●
Dr C. Job-Deslandre*
C
* Service rhumatologie A, Hôpital Cochin, 27, rue du Faubourg-St-
Jacques, 75014 Paris.
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