Préparation à l’agrégation interne - 2006-2007 L.Grandmougin - niveau 1 L’EVOLUTION - Mécanismes INTRODUCTION : Historique, difficultés d’établir une classification, l’idée d’évolution. I - ÉTABLISSEMENT D’UNE PARENTÉ : 1 - 1 - Quelques termes de classification 2 - 2 - Cladistique : a - Principe b – Caractères utilisés c – Etat ancestral, dérivé, apports de l’embryologie, des fossiles, des molécules. => étude d’exemples (matrices, cladogrammes…) 3 - Phénétique : a - Principe b - Phénogramme 4 - Les « concepts flous » - chaînon manquant, horloge moléculaire, anthropocentrisme et idées reçues, les termes à oublier… => Partie traitée en conférence su Samedi matin II - MÉCANISMES DE L’EVOLUTION *: 1 - Facteurs internes a - Mutations germinales b - Accidents chromosomiques c - Duplications géniques d - Conversions géniques, transpositions 2 - Facteurs externes a - La niche écologique ; dynamique des populations b - Facteurs de spéciation c - Catastrophes et crises 3 - Macro et microévolution a - Anagenèse, cladogenèse, équilibres ponctués b - EvoDevo et EcoEvo c - Neutralisme et contingence, « mur de complexité » d - Un exemple à l’échelle moléculaire : HSP90. * : Partie traitée au niveau 1 CONCLUSION : Réflexions sur la vitesse de l’évolution ; rôle de l’Homme dans l’évolution de sa propre espèce et des écosystèmes. Evolution et spéciation : phénomènes actuels. Bibliographie : - Classification phylogénétique du vivant - G.Lecointre, H.Le Guyader ; éd.Belin L’évolution, des faits aux mécanismes - L.Allano, A.Clamens ; éd.Ellipses - Biologie animale - A.Beaumont, P.Cassier ; éd.Dunod - Précis de zoologie -P.Grassé, R.Poisson, O.Tuzet - éd.Masson - Pour la Science : Hors séries « l’évolution »Janv.97, « de la graine à la plante »Janv.2000 , « les fossiles témoins de l’évolution »(bibliothèque PlS), « la valse des espèces »Juillet 2000, n°256 Fév.99 ; « le monde des dinosaures »n°48, juillet 2005. - Nature : 29/11/2001, 4/10/2001, 24/6/99, 14/12/2001, 16/10/97, - Illustrations : .S.Harris : « Quoi, c’est ça le Big Bang ? » éd.Point sciences Pour en savoir plus : - Eléments de paléontologie - C.Babin éd.A.Colin, PlS : hors séries (origines de l’humanité, maladies émergentes...), - S.J.Gould (divers ouvrages...), tout ouvrage de classification, embryologie... - Biologie Campbell P1 DIFFÉRENTES CONCEPTIONS DE L’EVOLUTION : Les « Grands noms » 427 – 347 avJC PLATON (>ARISTOTE) => XVIè (≠ civilisations) (1530 : Botanistes) 1707-1778 : Carl Von Linné Observations - Ressemblances entre groupes - Fossiles idem - Ressemblances entre végétaux - Constance de caractères « repères » 1769 – 1832 - Anatomie comparée et Georges Cuvier plans d’organisation des animaux - Fossiles et lacunes géologiques 1744 – 1829 - Comparaison de fossiles / J.Baptiste de Lamarck actuels ; modifications de caractères chez les espèces 1758 - Comparaison de fossiles / Charles Darwin actuels . - Les milieux changent ainsi que les populations au cours du temps. - modifications de caractères chez les espèces selon le milieu de vie - Obtention de caractères stables lors de sélections par l’Homme. ± 1977 - Lacunes des fossiles S.J.Gould & - transformations N.Eldredge spectaculaires des faunes et flores dans les « grandes coupures » Interprétation Formes « imparfaites » Hasard Idées / théories - Echelle de perfection Idem Créationnisme + utilitaire Caractères « emboîtés » permettent de faire une hiérarchie « Classification binominale » Créationnisme - Plans d’un « architecte » donc Divin - Déluge Catastrophisme Les espèces changent au cours du temps pour s’adapter à leur milieu - Les modifications apparaissent par hasard - Le milieu peut favoriser ceux qui possèdent un caractère nouveau si compétition - Si l’Homme peut faire une sélection, pourquoi pas le milieu ? - transformations lentes entre 2 coupures - brutales lors des crises et accélération de l’Evolution Transformisme Évolutionnisme et transformations progressives (microévolution) => Théorie de la sélection naturelle. Equilibres ponctués (Macroévolution.) Dans les programmes: Comparaison (quelques caractères) ========== Phylogénie ============ théorie explicative Groupe A Groupe B Groupe C C B A C B A mutations Milieu ≠ L’OREILLE MOYENNE DES MAMMIFERES P4 DOCUMENT 1 ( Aide pour les autres documents, n’est pas à analyser !) : Structure et rôle de la mandibule et de l’oreille moyenne. Reptiles Structure de la 3 os principaux : mandibule et rôle - Le dentaire : porte les dents => nutrition - L’angulaire : aide à la transmission des sons - L’articulaire : articule la mandibule sur l’os du crâne appelé « carré » (articulation reptilienne) Structure de Un os principal : la columelle => conduction des sons jusqu’à l’oreille moyenne l’oreille interne (où se trouvent les cellules nerveuses permettant l’audition) Mammifères 1 seul os - Le dentaire : porte les dents=> nutrition. Il s’articule sur l’os du crâne appelé « squamosal » (articulation mammalienne) Une « chaîne d’osselets » enfermés dans la bulle tympanique => transmission amplifiée d’une gamme d’ondes sonores étendue DOCUMENT 2 : Structure la mandibule et de l’oreille moyenne de différents groupes : Légende : - Sq = squamosal, Art = articulaire Ang = angulaire - Q = carré - D = dentaire a) Reptile actuel (ex. Lézard) b) Mammifère actuel (ex. Chien) c) Reptiles fossiles dits « mammaliens » du Trias ( Cynognathus :Trias inférieur, -245 à -241 millions d’années, Diarthrognathus : Trias supérieur, - 235 à –208 M.a) (NB : L’os « angulaire » n’est pas toujours visible, il se trouve en partie derrière le dentaire et est parfois masqué par celui-ci.) DOCUMENT 3 : Schéma du développement de la mandibule chez l’embryon d’opossum ( ou sarigue, petit animal appartenant au groupe des Marsupiaux). La taille de la mandibule de l’embryon est artificiellement ramenée à la même échelle que celle de l’adulte, représentée ici pour comparaison. Source des documents : - Document 2 : d'après Beaumont et Cassier - "Biologie animale" t.3 - ed. Dunot - Document 3 : d'après Pour la Science - Hors-série de Janvier 1997, dossier "L'Evolution". PHYLOGENIE, ANTHROPOCENTRISME ET ECHELLE DES ETRES P6 LE SEXE DE L’ORNITHORYNQUE D’après Nature, vol.432 16 Décembre 2004. Comment faire un grand bec ? La théorie de Charles Darwin sur la sélection naturelle est souvent illustrée par l’exemple des pinsons des Galapagos, bien que le grand homme n’ait pas tout de suite vu leur parenté. En effet, la forme de leur bec, étroitement liée à leur alimentation, est si variée qu’ils semblent appartenir à des espèces très éloignées. Pourtant, la douzaine d’espèces que l’on compte sur ces îles dérive bel et bien d’un même ancêtre commun. Dans des travaux récents, Abzhanov et ses collègues ont étudié les relations étroites entre milieu de vie et forme du bec, à l’échelle moléculaire. Les recherches se sont portées sur l’expression de gènes impliqués dans la construction du squelette facial chez les vertébrés et synthétisés au début du développement embryonnaire. L’un d’eux, codant pour une protéine intervenant dans la communication cellulaire, BMP4 (bone morphogenetic protein 4), s’exprime en plus faible quantité chez les oiseaux à bec mince que chez ceux à bec large, ce que l’on peut modifier expérimentalement. Un autre plus connu, codant pour la calmoduline (CaM) est également exprimé plus largement chez les pinsons à bec long et fin. Or la calmoduline intervient dans les signaux intercellulaires impliquant le calcium. Selon la concentration variable de celui-ci, la cellule active ou bloque diverses protéines contrôlant – entre autres – le développement et la différenciation des tissus. Lors d’expériences, l’équipe a montré que CaM est activé par de fortes concentrations de calcium intracellulaire. Plus ce gène est activé, plus les poussins développent un long bec. Par contre, sa largeur n’est pas affectée. En jouant sur les deux voies de signalisation BMP4 / épaisseur et CaM / longueur, on peut comprendre comment une grande diversité de formes de bec est apparue chez les pinsons de Darwin, par mutations puis sélections successives. Reste à savoir si ces mutations touchent un nombre restreint ou important de gènes pour produire une telle variété d’effets. L.G. D’après Nature – vol.442 – 3 Août 2006. Etapes du développement de la souris Souris adulte Embryon de Lamproie (tête) Bilatérien segmenté avec une tête et des appendices clairement marqués somitogenèse chez l'embryon bilatérien segmenté post-gastrulation; embryon avec symétrie bilatérale et axe antéro-postérieur Morula Zygote arcs pharyngés lèvres Bilatérien arc mandibulaire Expression de HoxL6 Pluricellulaire Unicellulaire ONTOGENIE PHYLOGENIE Evolution du développement de lignées au phénotype complexe. L'ontogénie d'un individu, ici la souris (a) récapitule les grandes étapes de la complexification (b), mais ne montre pas (à l'état embryonnaire ou adulte) les formes ancestrales successivement traversées au cours de l'Evolution de la lignée.(d'après Nature-14/2/02) Expression de HoxL6 chez l'embryon de Lamproie Chez l'Amphioxus, amphiHox6 s'exprime aux mêmes endroits. Chez les gnathostomes, HoxL6 ne s'exprime pas au niveau de l'arc mandibulaire. Si on le fait s'exprimer expérimentalement, les mâchoires ne se développent pas.( D'autres gènes du développement sont également impliqués -d'après Nature, 28/3/2002) Alignement de régions protéiques, codées par des gènes du développement Tx4, Tx5 et Tb4/5 (extrait, suppl. internet- Nature-4/4/2002). Am =amphioxus D = Danio rerio Po = Poulet R = Roussette (requin) H = Homme Evolution des membres chez les Tétrapodes (Nature-4/4/2002) CH R.16 hu main ag rand i (sché ma ) Orang -out an (P ongo pyg maeu s) Ho mm e (Ho mo sapiens ) Babouin (Papio anub is) Ch im pan zé (P an troglody tes) Titi (Callicebus mollochus ) Macaque ( M aca ca fasc icularis) Ch im pan zé (P an p aniscu s) Entelle(Pr esby tis cristata) Go ril le ( Go rilla go rilla) UN CHAPERON DE CHOC POUR L’EVOLUTION ! P10 Une protéine chaperon, HSP90 (Heat Shock Protein 90 ou protéine de choc thermique), pourrait bien réconcilier les deux camps traditionnellement opposés chez les évolutionnistes : ceux qui militent en faveur du gradualisme (changements continus au cours du temps) et ceux qui sont en faveur des équilibres ponctués (modifications brutales des faunes et flores, une théorie soutenue par Eldredge et le regretté S.J.Gould, disparu récemment). Les protéines chaperons doivent leur nom facétieux à leur rôle : elles assurent un repliement correct des protéines dans l’espace. HSP 90 est plus ou moins spécialisée : elle agit par exemple sur les protéines impliquées dans le développement des individus. Une étude chez la Drosophile a révélé son importance (1). Prenons pour simplifier l’exemple d’un individu hétérozygote pour un gène capital dans le développement embryonnaire. Cet individu devrait présenter une anomalie de morphologie : il n’en est rien. En effet, la protéine résultant du gène muté sera « chaperonnée » par HSP90 et correctement repliée dans l’espace. Sa fonction pourra être restaurée (ou du moins la protéine « dangereuse » sera neutralisée, selon les cas). Ainsi, une mutation modifiant la structure tridimensionnelle d’une Fig1 : écotypes avec ou sans GDA et ses effets protéine peut-elle être masquée phénotypiquement ; si elle affecte une (échelle :2 mm) cellule germinale, l’anomalie peut se répandre dans la population, sans Fig2 : croissance des F1 (LerX Col ) par rapport à conséquence visible. celle des parents Ler, sans ou avec GDA. Les choses se compliquent dans le cas où l’individu est également hétérozygote pour un gène codant pour HSP 90 (il y en a plusieurs, en réalité). Tant que les conditions de milieu sont normales, les doubles hétérozygotes se développent correctement : la « demi quantité » de HSP90 suffit à replier la « demi quantité » de protéine du développement anormale. Par contre, un choc thermique expérimental, à un stade précoce du développement, perturbe cette belle harmonie. La variation de température déforme d’autres protéines ; HSP90 devient alors ubiquiste et « tente » de replier ces autres protéines, mais est vite « débordée » car en « demi quantité. Elle ne peut replier toutes les protéines et laisse agir quelques protéines du développement anormales. Le résultat sur l’individu est parfois spectaculaire (drosophiles à ailes atrophiées ou yeux déformés...) . Cette évolution miniature à l’échelle moléculaire restait jusqu’à présent limitée à un seul modèle animal. Elle vient d’être réalisée sur l’autre célèbre « cobaye » des généticiens : Arabidopsis thaliana(2). Comme tous les végétaux, Arabidopsis présente une morphogenèse dépendant à la fois de son génome et des facteurs de milieu ; elle possède aussi 7 gènes codant pour HSP90. Les expérimentateurs les ont bloqués en administrant aux cellules de la geldanamycine (GDA) ou du radicicol. Dans les deux cas, ces substances présentent l’avantage d’être détruites après une exposition prolongée à la lumière ce qui permet de limiter leur action à une période déterminée. Des variants (écotypes) d’Arabidopsis, soumis à 1 M de GDA ont clairement montré des anomalies de développement (hypocotyle tordu, asymétrie, pigmentation exagérée ou nanisme...). Lors d’un développement à l’obscurité, les graines d’Arabidopsis germent habituellement avec un allongement important de l’hypocotyle (phénomène d’étiolement) ; avec GDA, certains individus se sont développés avec une absence totale ou partielle d’étiolement bien que placés à l’obscurité. Des hybrides, réalisés entre ces individus déjà sensibles à GDA, ont montré des variations morphologiques en plus forte proportion. HSP90 est donc une protéine fortement conservée dans l’évolution qui peut masquer une variation de génome. Cette variation se répand sans conséquence au sein d’une population, la protéine chaperon assurant un rôle « tampon » entre génotype et phénotype. Une modification de milieu, en bouleversant le rôle de HSP90, fait basculer une mutation neutre vers une mutation non neutre, avec des conséquences phénotypiques parfois spectaculaires, affectant toute une population. Il s’agit donc d’un modèle à l’échelle moléculaire de « crise », qui expliquerait en partie ces brusques changements de faunes et flores au cours des temps géologiques. L.G. Sources : (1) Nature vol.396, 26 Novembre 1998, (2) Nature vol.417, 6 Juin 2002. Voir aussi : Pour la Science - n°256, Février 1999. D’après « L’Evolution, des faits aux mécanismes »- L.Allano, A.Clamens –éd. Ellipses". « La valse des espèces » Dossier Pour la Science Juillet 2000. P11