Complications et séquelles
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Risque thromboembolique ?
A.C. Piketty et al. (16) ont rapporté, dans une étude compara-
tive avec un groupe contrôle de sujets appariés recevant une
chimiothérapie par cisplatine pour un autre type de tumeur, que
le risque thromboembolique était augmenté dans les tumeurs
germinales et prédit par le taux de lacticodéshydrogénases
(LDH) sériques et la surface corporelle.
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Cryopréservation de sperme : qui l’utilise ?
Toujours les Norvégiens, pour faire des enquêtes à large
échelle. Dans une série de 422 patients (17) ayant eu un prélè-
vement de sperme entre 1983 et 2002, sur 1 388 patients (pour-
centage pouvant nous paraître très faible par rapport à nos pra-
tiques, même s’il est d’environ 43 % depuis 1994…), 29 (7 %)
se sont servi de leur sperme congelé pour une reproduction
assistée, suivie d’une grossesse chez 16 partenaires (dont
2fausses couches). Même si en pratique l’utilisation de sperme
congelé reste faible, il est nécessaire de proposer systématique-
ment à ces patients la possibilité d’une cryopréservation.
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Paternité après traitement
Mille huit cent quatorze hommes traités pour cancer unilatéral
du testicule en Norvège entre 1980 et 1994 ont été invités à par-
ticiper à une enquête de suivi qui s’est déroulée de 1998 à 2002
(827 étaient pères avant leur traitement). Les essais de concep-
tion post-traitement ont concerné 554 hommes, parmi lesquels
le taux de paternité à 15 ans a été de 71 % (IC95 : 66-75 %) sans
recours à la cryoconservation du sperme. Ce taux varie de 48 %
(IC95 : 30 %-69 %) dans le groupe chimiothérapie fortes doses à
92 % (IC95 : 78 %-98 %) dans le groupe surveillance. Vingt-
deux pour cent des couples essayant de concevoir un enfant ont
utilisé des techniques de reproduction assistée (18).
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Qualité de vie et séquelles à distance
Beaucoup de travaux s’intéressent au devenir tardif des cancers
du testicule traités par chimiothérapie et guéris.
Les données sur la qualité de vie à distance ne montrent en
règle générale que peu de retentissement même s’il peut persis-
ter un certain niveau d’anxiété (19, 20).
H. Sagstuen et al. (21) ont rapporté l’index de masse corporelle
(IMC) dans une enquête norvégienne où 1 814 patients traités il
y a de 5 à 20 ans pour un cancer du testicule unilatéral ont été
sollicités pour participer à une étude de suivi (1998-2002)
incluant la mesure de la TA systolique et diastolique. Les
patients étaient répartis en 4 groupes : 242 traités par chirurgie
seule, 547 par radiothérapie, 402 par chimiothérapie avec doses
totales de cisplatine inférieures à 850 mg, 98 avec doses totales
supérieures à 850 mg. Avec un suivi médian de 11,2 ans, les
TA systoliques et diastoliques ajustées à l’âge étaient significa-
tivement plus élevées en cas de chimiothérapie, notamment
dans le groupe cisplatine à doses supérieures à 850 mg, groupe
pour lequel l’IMC à 10 ans était significativement plus impor-
tant, avec une prévalence d’obésité plus élevée.
Une autre étude, celle-là néerlandaise (22), s’est intéressée aux
perturbations métaboliques et hormonales d’une série de
86 patients traités par chimiothérapie avec un suivi médian de
7ans, patients comparés à 46 autres de stade I et 47 contrôles.
Les patients traités par chimiothérapie qui présentaient un
metabolic syndrome (n = 22, 26 %) avaient, avant traitement,
un IMC plus important ; au cours du suivi, on constatait une
augmentation de leur IMC, une testostéronémie plus basse et
des métabolites urinaires du cortisol plus élevés. Les auteurs
ont soulevé l’hypothèse d’une implication de la testostérone
dans le développement de ces troubles métaboliques.
Risque de tumeur controlatérale, second cancer et leucémie
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Risque de tumeur controlatérale et pronostic
Une vaste étude rapportée à partir des données du SEER
recueillies au sein d’une cohorte de 29 515 patients âgés de
moins de 55 ans et enregistrées entre 1973 et 2001 (23) a
retrouvé 175 cas de cancers synchrones et 287 cas de cancers
métachrones, soit un risque cumulé à 15 ans de 1,9 % (IC95 :
1,7 %-2,1 %). Ce faible taux justifie le consensus habituel quant
à la non-pertinence d’une biopsie controlatérale systématique.
En analyse multivariée, seules les TGNS sont associées à une
diminution du risque de tumeurs métachrones (HR = 0,6, IC95 :
0,46-0,79 ; p < 0,001). Le taux de survie globale à 10 ans est de
93 % (IC95 : 88 %-96 %) en cas de tumeurs métachrones et de
85 % (IC95 : 78 %-90 %) en cas de tumeurs synchrones.
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Risque de seconds cancers
L’analyse de données concernant 40 576 patients longs survi-
vants – analyse réalisée à partir de 14 registres européens et
nord-américains (1943-2001) [24] – a retrouvé 2 285 seconds
cancers. Chez les survivants à 10 ans atteints d’un cancer du
testicule à l’âge de 35 ans, il existe une augmentation du risque
de tumeur solide (RR = 1,9, IC95 : 1,8-2,1). Ce risque reste sta-
tistiquement significatif à 35 ans (RR = 1,7, IC95 : 1,5-2 ;
p < 0,01) avec, de façon étonnante, une augmentation des méso-
théliomes (RR = 3,4, IC95 : 1,7-5,9), mais aussi des cancers de
l’œsophage (RR = 1,7, IC95 : 1-2,5), du poumon (RR = 1,5,
IC95 : 1,2-1,7), du côlon (RR = 2, IC95 : 1,7-2,5), de la vessie
(RR = 2,7, IC95 : 2,2-3,1), du pancréas (RR = 3,6, IC95 : 2,8-
4,6), de l’estomac (RR = 4, IC95 : 3,2-4,8), qui comptent pour
60 % du total. Les risques sont similaires pour les séminomes
et les TGNS (sauf celles traitées après 1975). Une augmenta-
tion significative a été observée pour les patients traités par
radiothérapie seule (RR = 2, IC95 : 1,9-2,2) ou par chimiothéra-
pie seule (RR = 1,8, IC95 : 1,3-2,5) ou les deux (RR = 1,8, IC95 :
1,3-2,5). Pour les patients traités à l’âge de 35 ans d’un sémi-
nome ou d’une TGNS, les risques cumulés 40 ans plus tard
(jusqu’à l’âge de 75 ans) sont de 36 % et 31 % respectivement,
versus 23 % pour la population générale.
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Risque de leucémies secondaires après chimiothérapie
intensive de première ligne
Dans l’expérience multicentrique allemande publiée par
J. Wierecky (25), il n’est rapporté, avec un suivi de 36 mois,
qu’un cas de leucémie secondaire myéloïde avec une transloca-
tion t (11;19) (q23;p13.3) dans une série de 323 patients traités
dans deux essais prospectifs de phase II (221 par VIP à fortes
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La Lettre du Cancérologue - Volume XIV - n° 6 - novembre-décembre 2005
RÉTROSPECTIVE 2005