dossier
CANCER DU REIN :
les grands débats,
les grandes questions
Correspondances en Onco-Urologie - Vol. V - no 2 - avril-mai-juin 2014
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TRAITEMENT MÉDICALTRAITEMENT MÉDICAL
Deuxième ligne
A. Guillot*, C. Chevreau**
* Département d’oncologie médicale, institut de cancérologie Lucien-Neuwirth, Saint-Priest-en-Jarez.
** Institut Claudius-Regaud, Toulouse.
Place de l’évérolimus
La prise en charge médicale du cancer du
rein métastatique repose sur l’administration
de thérapies ciblées antiangiogéniques. Les
recommandations en première ligne n’ont
pas évolué car les études de phase III AGILE
− axitinib − et RECORD 03 − évérolimus −
versus sunitinib en première ligne ont échoué
à démontrer une équivalence d’effi cacité avec
le sunitinib. Le sunitinib, le pazopanib, l’asso-
ciation bévacizumab-interféron et le temsiro-
limus gardent leurs indications respectives en
première ligne. L’axitinib et l’évérolimus font
l’objet d’une recommandation en deuxième
ligne fondée sur leur effi cacité démontrée
par 2 études de phase III − les essais AXIS et
RECORD 01 −, avec une survie sans progres-
sion (SSP) de 4,8 mois pour l’axitinib chez les
patients traités en première ligne par ITK, et
de 4,9 mois pour l’évérolimus.
L’essai RECORD 01 (Motzer RJ et al. Lancet
2008;372:449-56) a comparé l’évérolimus à
un placebo après 1 ou 2 traitements anti-
angiogéniques. Cette étude a porté sur
416 patients traités, dont 308 en deuxième
ligne et 108 en troisième ligne. L’objectif
principal de l’essai était la SSP : la SSP globale
était de 4,9 mois versus 1,9 pour le placebo.
Dans une étude préplanifiée, les patients
ayant reçu un seul ITK avaient une SSP de
5,4 mois, et ceux ayant pris du sunitinib,
une SSP de 4,6 mois. En troisième ligne, la
SSP était de 4 mois. L’objectif principal de
l’étude a donc été atteint. Depuis ces résul-
tats, l’évérolimus bénéficie d’une recom-
mandation en deuxième ligne en Europe
(ESMO 2009 confi rmée en 2012, et NCCN).
Par ailleurs, l’étude de phase II en première
ligne, RECORD 03 (Motzer RJ et al. ASCO® 2013,
LBA 4504), n’a pas démontré d’équivalence
d’effi cacité entre les séquences sunitinib-
évérolimus et évérolimus-sunitinib, mais
retrouve une SG de 32 mois pour la séquence
sunitinib-évérolimus. L’efficacité de l’évé-
rolimus en troisième ligne dans l’étude
RECORD 01 incite parfois les praticiens à
faire une séquence ITK-axitinib-évérolimus
car l’axitinib n’a pas été évalué en troisième
ligne.
Il existe une effi cacité d’autres ITK en troi-
sième ligne. Le “rechallenge” de sunitinib, pra-
tique fréquente chez les patients répondeurs
au sunitinib et pour lesquels la tolérance le
permet, est en cours d’étude. Une étude
récemment publiée a repris les données de
36 patients de RECORD 01 traités par ITK en
troisième ligne avec un bénéfi ce constaté.
Surtout, l’étude GOLD (Motzer RJ et al. ESMO
2013, LBA 34) comparant, en troisième ligne
après une séquence ITK (dont 97 % d’ITK et
92 % de sunitinib) puis évérolimus, le sora-
fénib au dovitinib a montré une même effi ca-
cité des 2 molécules avec une SSP de 3,7 mois,
identique à celle retrouvée dans RECORD 01
pour l’évérolimus en troisième ligne (4 mois)
après 2 ITK.
L’évérolimus présente un profi l de toxicité
diff érent de celui des ITK, notamment en ce
qui concerne l’hypertension. Les toxicités
de l’évérolimus sont gérables en se fondant
sur une bonne connaissance des recom-
mandations en termes de prévention et
de prise en charge des eff ets indésirables,
particulièrement la mucite et la pneumo-
pathie interstitielle. Le choix de l’évérolimus
en deuxième ligne peut reposer sur la tolé-
rance du traitement de première ligne (ITK
ou interféron-bévacizumab), notamment sur
le plan cardiovasculaire, et éviter le cumul de
toxicité possible de 2 ITK successifs. Le profi l
du patient, ses comorbidités, sa capacité à
gérer le traitement (prise et effets indési-
rables) doivent être pris en compte dans le
choix de la séquence thérapeutique, ainsi
que la bonne connaissance de la molécule
par le prescripteur.
En conclusion, le choix du traitement de
deuxième ligne repose sur les recomman-
dations internationales s’appuyant sur les
études de phase III, mais également sur la
tolérance au traitement de première ligne, le
profi l du patient, l’expérience du praticien et
l’éducation thérapeutique. La SSP des ITK en
troisième ligne dans l’essai GOLD rend légi-
time l’utilisation de l’évérolimus en deuxième
ligne. Outre l’effi cacité de l’évérolimus, la dose
unique de 10 mg à l’induction ainsi que les
recommandations claires en termes de pré-
vention et de prise en charge des toxicités
permettent une utilisation simple par le
patient et le médecin. L’évérolimus garde
donc toute sa place en deuxième ligne méta-
statique après échec d’un ITK.
Y a-t-il encore uneplace
pourl’évérolimus ? Non
Les résultats des études de phase III
− RECORD 01 (1) et AXIS (2) − ont respecti-
vement permis de positionner l’évérolimus
et l’axitinib comme des standards dans la
prise en charge en deuxième ligne du cancer
du rein métastatique (recommandations
ESMO 2012) [3].
Même s’il est incontestable que ces 2 études
sont diff érentes dans leur schéma et leurs
critères d’inclusion (type, nombre de lignes
de traitement, bras comparateur), les résul-
tats sont dans les 2 cas signifi cativement en
faveur de l’évérolimus et de l’axitinib par
rapport au bras comparatif : placebo dans
l’étude RECORD 01, et sorafénib, dans l’étude
AXIS. La médiane de SSP objectivée (critère