échec et mat Le syndrome algodystrophique B. Escudier* L e traitement du cancer du rein métastatique s’est considérablement enrichi ces dernières années avec l’arrivée rapide de nouvelles thérapeutiques, dont même les spécialistes ont du mal à suivre le rythme. Le sorafénib, le sunitinib et le bévacizumab * Institut Gustave-Roussy, Villejuif. Avant Figure 2. Évolution en mai 2009. 46 Figure 1. Scanner à l’instauration du temsirolimus (mars 2008). Après 8 mois de traitement (associé à l’interféron) ont été approuvés en 2006, le temsirolimus en 2008, l’évérolimus en 2009 et très prochainement va arriver sur le marché le pazopanib, déjà approuvé par la FDA. Et de nouvelles molécules pointent déjà leur nez : axitinib, tivozanib, etc. Dans ce déluge de nouvelles molécules, le positionnement des différents traitements constitue d’ores et déjà un casse-tête qui alimente nombre de débats lors des multiples congrès portant sur le cancer du rein : congrès généraux (ASCO, ESMO, EAU, AUA) ou plus spécialisés (ASCO GU, EMUC, ARTuR, european KCA, etc.). Mais que dire de la connaissance des effets indésirables de ces différents traitements ? Toutes les semaines, de nouveaux effets secondaires sont rapportés, souvent non identifiés lors des essais initiaux. Le syndrome algodystrophique, survenant sous inhibiteur de mTOR (temsirolimus ou évérolimus), fait partie de ces effets indésirables encore très méconnus, à tort, car pouvant considérablement altérer la qualité de vie de nos patients. Récemment, une revue sur le sujet a été publiée (1), et je voudrais résumer ici un cas particulièrement démonstratif. Il s’agit d’un homme âgé de 55 ans, opéré en octobre 2006 d’une tumeur papillaire de type I, T2N1. En mai 2007, devant une récidive ganglionnaire, le patient est traité par sunitinib (6 cycles), avec malheureusement une progression tumorale ganglionnaire après ces 6 cycles. Un traitement par temsirolimus est alors mis en place dans le cadre d’un essai thérapeutique. Le scanner met en évidence des adénopathies abdominales dont la plus volumineuse mesure 37 mm (figure 1). Après 3 mois de traitement, les adénopathies ont diminué d’environ 30 %, résultat qui se maintient après 8 mois de traitement (figure 2). Parallèlement, des œdèmes des membres inférieurs (OMI) apparaissent, initialement modérés, puis de plus en plus invalidants. À partir de mars 2009, les OMI sont très gênants et s’associent à des douleurs des extrémités avec, sur la scintigraphie osseuse, des hyperfixations des extrémités (figure 3). Le diagnostic de syndrome algodystrophique est alors posé, et le temsirolimus arrêté, malgré le maintien d’une efficacité clinique. Les symptômes régressent très lentement sur 6 mois, les OMI disparaissent, et les douleurs régressent, venant confirmer l’hypothèse diagnostique. Correspondances en Onco-urologie - Vol. I - n° 1 - avril-mai-juin 2010 ed R d V v e Le syndrome algodystrophique Cet effet indésirable lié aux inhibiteurs de mTOR est heureusement rare, mais parfois très invalidant comme chez ce patient. Tous les cas rapportés (1) ont heureusement régressé à l’arrêt du traitement. Dans aucun cas, le traitement n’a été réintroduit, et le mécanisme exact de cette manifestation reste inconnu. Le rôle des anomalies métaboliques – classiques sous inhibiteurs de mTOR a été évoqué – mais sans certitude. Scintigraphie osseuse 99 mTc Crâne profil gauche Crâne profil droit Thorax profil gauche Thorax profil droit En pratique, cette complication rare doit être connue. La survenue d’OMI réfractaires sous traitement doit faire évoquer le diagnostic et faire discuter l’arrêt des inhibiteurs de mTOR. Aucun traitement n’a fait la preuve de son efficacité à ce jour. ■ edimarksanté R é f é r e n cV eo t r e info médicale 1. Massard C, Fizazi K, Gross-Goupil M et al. Reflex sympathetic dystrophy in patients with metastatic renal cell carcinoma treated with everolimus. Invest New Drugs 2009 (Epub ahead of print). Face antérieure Face postérieure Bassin face antérieure Bassin face postérieure Figure 3. Scintigraphie osseuse montrant une hyperfixation des extrémités. edimark U n a u t re re g a rd sur v otre spécialité Un autre regard sur votre spécialité Retrouvez en vidéo les actualités de votre spécialité sur www.edimark.tv Vous pourrez à tout instant télécharger nos reportages en podcast et poster vos commentaires et vos questions à nos experts. Ils vous répondront personnellement. edimark Correspondances en Onco-urologie - Vol. I - n° 1 - avril-mai-juin 2010 47