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La Lettre du Gynécologue - n° 313 - juin 2006
DOSSIER
la résection pourra être considérée comme insuffisante du fait des
constatations peropératoires (R2), ou du fait de marges insuffi-
santes sur les résultats anatomopathologiques définitifs (R1). Un
élargissement de l’exérèse peut être envisagé et prévu, pour ces
récidives avec extension latéropelvienne, nécessitant une dissec-
tion des racines sacrées, une résection musculo-aponévrotique
latéropelvienne et parfois une résection vasculaire. La réalisation
d’un pontage vasculaire s’impose en cas de résection artérielle, ce
qui est exceptionnel, et en cas de résection veineuse lorsqu’il
n’existe pas de thrombose au préalable. L’amélioration du
contrôle local peut être obtenu en complétant l’exérèse par une
radiothérapie per opératoire ou par une curiethérapie à haut ou bas
débit de dose, soit en peropératoire, soit en postopératoire précoce
à travers les guides vecteurs laissés en place (13-16). Il est cepen-
dant reconnu que l’importance du résidu, macroscopique (R2) ou
microscopique (R1), a un impact majeur sur les possibilités de
contrôle local de la maladie et sur la survie (13). De ce fait, la pré-
sence d’une symptomatologie de sciatalgie, de thrombose vei-
neuse iliaque par un envahissement latéral avec un œdème du
membre inférieur, représente une contre-indication classique à ce
type d’exérèse à visée curative, d’autant plus que ces symptômes
sont associés. Les taux de résécabilité et de résections curatives
(R0) sont donc étroitement liés aux indications et contre-indica-
tions retenues par les différentes équipes : 10 à 20% de taux de
résection pour Hogan et al. (17), 34% de résection non in sano
dans notre expérience où les seules contre-indications absolues
ont été la présence d’une carcinose et/ou de métastases.
Les indications doivent également tenir compte du bilan géné-
ral d’opérabilité et de l’acceptation de ce type de chirurgie
avec ses conséquences fonctionnelles et psychosociales.
La réalisation d’exentération palliative, en cas de fistule(s), de
nécrose tumorale souvent purulente, d’hémorragie, garde
quelques indications qui doivent être discutées au cas par cas,
avec pour objectif principal l’amélioration du confort de survie.
Les progrès des techniques chirurgicales et particulièrement de
la prise en charge de l’anesthésie-réanimation ont permis de
diminuer les taux de mortalité opératoire des exentérations pel-
viennes de 18 à 25% dans les séries les plus anciennes à moins
de 10%, et moins de 5% dans les séries les plus récentes (18,
19-23). Le taux de mortalité dans les 3 mois postopératoires
après chirurgie d’exérèse à visée curative de récidives de can-
cer du col utérin a été dans notre expérience de 6,8% (5/74),
dans tout les cas à la suite de complications médicales et dans
la première période d’expérience avant 1990.
La morbidité postopératoire reste cependant très élevée après
exentération pelvienne de 38 à 65 % (18, 19, 21-25). Dans
notre expérience, la morbidité, toutes complications observées
après exentération pour cancer du col utérin, a été de 50 %
(57/113), en observant une diminution significative au cours
de la dernière période : 38 % (8/21) de 1996 à 2000 et 52 à
56% au cours des périodes de 5 ans de 1980 à 95 (49/102). La
morbidité a été de 55 % après exentération pour récidive de
cancer du col avec un taux de 30 % de réinterventions. Les
taux de morbidité chirurgicale majeure ont été de 38% (26), 43%
(27), 58% (28) et 33% (22) avec des taux respectifs de réinter-
vention de 33, 40, 36 et 22%. Cependant, le taux de morbidité
varie en fonction du type d’exentération pelvienne, des procé-
dures de reconstruction utilisées et de la localisation de la réci-
dive (23) (45,6% de complications pour les récidives centro-
pelviennes et latéropelviennes, 21/46 versus 71,4 % pour les
récidives panpelviennes, 20/28 dans notre expérience).
Les résultats en termes de survie après résection chirurgicale des
cancers du col utérin sont étroitement liés à la sélection des
patientes et donc aux principaux facteurs pronostiques. La possi-
bilité de réaliser une résection curative (R0) apparaît être le fac-
teur déterminant (1, 16, 20) : une résection R0 sera d’autant plus
fréquemment obtenue que la récidive reste localisée en centropel-
vien par rapport aux récidives latéro- et panpelviennes (respecti-
vement 97, 58 et 32% dans notre expérience : p < 0,0001) (1, 20,
21, 29). La taille de la récidive est également un facteur significa-
tif important (1, 21, 30, 31) qui est cependant fréquemment cor-
rélé à la localisation de la RLR, les récidives latéro- et panpel-
viennes étant plus volumineuses : les tailles moyennes des
récidives étaient de 38,7 mm en centropelvien, 45,3 mm en latéro-
pelvien et 57,8 mm pour les récidives panpelviennes. Les autres
facteurs pronostiques le plus souvent retrouvés dans les séries de
la littérature sont : le délai de récidive (1, 21, 30), l’âge et le stade
initial (29, 30). Les principaux facteurs pronostiques (localisation,
taille et délai de la RLR) peuvent être déterminés en préthérapeu-
tique, permettant de prévoir les chances de résection curative et de
survie (1, 30) (tableau II). Dans notre expérience, la taille et la
localisation, sans tenir compte du délai, étaient plus discrimi-
nantes (figure 1). Les survies à 5 ans sont donc étroitement liées à
ces facteurs, avec des taux de 24 à 55% pour des récidives vagi-
nales ou essentiellement vaginales (26, 28, 29), 22 à 60% pour
des récidives centropelviennes (20, 21, 27, 29) et 0 à 10% pour
des récidives latéro- ou panpelviennes (1, 20). Cependant, des
exérèses latérales élargies (14, 22, 32, 33) et éventuellement asso-
ciées à une réirradiation focalisée, ou à une irradiation peropéra-
toire, ou à une curiethérapie peropératoire (13-15), sont suscep-
tibles d’améliorer le contrôle local et la survie, avec des résultats
encourageants qui ont pu atteindre, dans ces situations, des taux
de 41% de contrôle local et de 44% de survie à 5 ans (22).
CONCLUSION
Les progrès de l’anesthésie-réanimation et des techniques chi-
rurgicales, c’est-à-dire de reconstruction, ont permis de réduire
les taux de mortalité et de morbidité après 1990. L’utilisation
de radiothérapie complémentaire ou curiethérapie per- ou post-
opératoire précoce permet d’améliorer le contrôle local, en
particulier en cas de résection sans marge pour les récidives
avec une extension latéropelvienne. Une meilleure sélection
des patientes à opérer peut être envisagée en ayant recours à
une cœlioscopie et/ou à une TEP-FDG. ■
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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