Soins de support en oncologie DOSSIeR THÉmATIQue Supportive care in cancer

La Lettre du Cancérologue Vol. XVIII - n° 1 - janvier 2009 | 63
DOSSIER THÉMATIQUE
Rétrospective 2008
Soins de support en oncologie
Supportive care in cancer
Florian Scotté*, Sandrine Marsan*, Jacques Medioni*, Alexandre Morel*, Jorge Ayllon*,
Nina Arakelian*, Stéphane Oudard*
* Service d’oncologie médicale,
hôpital européen Georges-Pompidou,
Paris.
L
es discussions sur l’usage et la sécurité d’utili-
sation des érythropoïétines (EPO) ont occupé
une place majeure dans le domaine des soins
de support durant cette année 2008. Mais, outre
ces débats qui font réfléchir à l’ambivalence des
notions de qualité et de “quantité” de vie, de plus en
plus de domaines de la vie quotidienne sont étudiés,
qui confirment l’essor de l’intérêt porté aux soins
de support en oncologie et à la qualité de vie des
patients et de leurs proches.
Toxicités digestives
Mucites
Où l’on reparle du laser basse énergie (LEL)… Deux
études prospectives portant sur l’utilisation du LEL
ont été présentées lors du congrès 2007 de l’Ame-
rican Society of Clinical Oncology (ASCO). L’une
portait sur le traitement préventif de la mucite
chimio-induite, l’autre, randomisée, sur le trai-
tement curatif de mucites après chimiothérapie
intensive dans le cadre de tumeurs hématologiques,
en association ou non avec une irradiation corpo-
relle totale (1). Dans la première étude, 26 patients
atteints de tumeur solide et ayant présenté une
mucite sévère de grade supérieur à 2 lors du premier
cycle ont été traités par LEL, avec succès (absence
de mucite de grade 2) pour 81 % d’entre eux
(IC
95
: 61-93) ; on relevait une augmentation du
délai jusqu’à apparition du grade 2 pour les 19 %
restants. Dans la deuxième étude, 36 patients ont
été randomisés entre traitement et placebo (rayon-
nement lumineux sans déclenchement du laser).
Le succès a été évalué à 83 % dans le bras traité
par laser, versus 11 % dans l’autre bras. Lobjectif
principal initial, qui était le retard d’apparition d’une
mucite de grade 3, n’a pas été atteint en raison
du faible nombre de grades 3 enregistrés dans le
bras traité, mais ce délai a été retardé au-delà de
7 jours. L’utilisation du LEL au rythme de 3 séances
hebdomadaires de 6 minutes (33 secondes par site :
lèvres, palais, gencives et langue) a déjà été testée
dans des cas de cancer des voies aéro-digestives
supérieures (VADS) et en intensification de dose en
hématologie. Cette méthode est efficace, reconnue
dans les différentes recommandations. Il reste à
présent à élargir la disponibilité de ce traitement
à l’ensemble des centres accueillant des patients
traités pour cancer.
Des troubles du goût accompagnent habituelle-
ment les mucites, mais ils peuvent également être
dus à des chimiothérapies comme les taxanes. La
dysgueusie est mal appréhendée à ce jour, et aucune
réponse thérapeutique réelle, en dehors de règles
hygiéno-diététiques et du traitement des compli-
cations fongiques, n’a été proposée. F. Strasser et
al. ont tenté de prouver, sans succès, l’intérêt de la
glutamine orale à 30 g/j (2). Parmi les 52 patients
randomisés entre glutamine et placebo, évalués
selon une échelle visuelle analogique (EVA) d’al-
tération du goût mais également selon des critères
objectifs (sensation sucrée, salée, amère) et subjec-
tifs (NCI CTC version 3.0), aucune différence n’a
été retrouvée. La meilleure prise en charge pour ce
trouble reste donc un parfait traitement de la mucite
et des surinfections fongiques, et des conseils de
soins et d’alimentation.
Nausées et vomissements :
revue des recommandations
Une revue de la littérature a été proposée afin de
redéfinir les recommandations antiémétiques (3).
Le risque émétogène est présenté dans différents
travaux, publiés notamment par l’ASCO et la Multi-
national Association of Supportive Care in Cancer
(MASCC), et défini en fonction du pourcentage de
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Résumé
L’appellation “soins de support” en oncologie associe les notions de soins (entendons “traitements”) et de support
(organisation). La littérature sur ce sujet qui correspond à notre activité quotidienne d’accompagnement des
patients cancéreux et de leurs proches augmente d’année en année. Cette revue non exhaustive de la littérature
en 2008 tente de mettre en avant les avancées thérapeutiques et organisationnelles, et également de répondre
à des questions fondamentales telles que celle de l’impact des prescriptions d’érythropoïétines.
Mots-clés
Érythropoïétine
Soins de support
Mucite
Vomissement
Cancer
Highlights
Supportive care in cancer covers
in its name both treatments and
organization over the patients’
needs. The number and impact
of publications increase every
year. This nonexhaustive review
of the year 2008 attempts to
highlight therapeutic and orga-
nizational progress. We also
try to answer the question of
erythropoietin security.
Keywords
Erythropoietin
Supportive care
Mucositis
Emesis
Cancer
patients présentant des nausées et vomissements
liés aux protocoles de chimiothérapie reçus. Il est
classé en risque élevé (plus de 90 % de risque de
nausées et vomissements induits par la chimiothé-
rapie [NVIC]), risque modéré (30 à 90 %), risque
faible (10 à 30 %) et risque minimal (moins de 10 %).
À ces risques liés aux protocoles de chimiothérapie
s’ajoutent des facteurs personnels tels que l’âge,
les comorbidités, les médications, le tabagisme et
l’alcoolisme.
Haut risque
Une triple association aprépitant-sétron-corticoïde
(APC) à J1 suivie d’une double association aprépitant-
corticoïde à J2 et J3 a le meilleur potentiel antiémé-
tique dans les NVIC des protocoles de chimiothérapie
à haut risque. Ce schéma permet de réduire le risque
de NVIC aigu de 19 à 33 % selon les études, versus
7 à 17 % avec le doublet classique (sétron-corti-
coïde) [p < 0,01]. Le risque est également diminué
pour les NVIC retardés (24 à 32 % de risque avec le
doublet aprépitant-corticoïde, versus 45 à 53 % avec
les corticoïdes seuls [p < 0,001]). L’amélioration de
la qualité de vie est importante : avec l’aprépitant,
la chimiothérapie n’a que peu ou pas d’impact chez
74 % des patients, versus 64 % avec le traitement
de contrôle (p < 0,01).
Risque modéré avec anthracycline
dans le cancer du sein
Avec le même protocole que pour les NVIC de risque
élevé, l’ajout de l’aprépitant permet de réduire le
risque émétique de J1 à J5, celui-ci passant de 41 %
à 24 % (p < 0,001), et d’améliorer la qualité de
vie, en obtenant un impact minimal chez 63,5 %
des patientes, versus 55,6 % dans le bras contrôle
(p < 0,019).
Risque modéré sans anthracycline
et hors cancer du sein
L’utilisation d’un doublet sétron-corticoïde à J1
a montré sa supériorité dans les NVIC aigus. Les
sétrons ont permis de réduire le risque, versus
placebo, celui-ci passant de 88 % à 33 % (p < 0,001) ;
cette réduction peut être renforcée par l’association
d’un corticoïde. Il n’y a pas de différence d’efficacité
entre les différents sétrons en dehors du palonosé-
tron, qui possède une activité retard intéressante.
Pour les NVIC retardés, les corticoïdes seuls ont une
efficacité supérieure à celle du placebo, les sétrons
n’apportent pas de bénéfice supplémentaire et ont
plus d’effets indésirables. L’utilisation d’un corticoïde
en monothérapie à J2 et J3 est donc recommandée
dans cette classe de risque.
Risque faible
L’utilisation d’un corticoïde en monothérapie a
montré sa supériorité versus placebo ou absence
de traitement ; elle est donc recommandée.
Prophylaxie non médicamenteuse
Les techniques de stimulation de points d’acupunc-
ture ont montré un intérêt dans différentes études
randomisées et sont reconnues comme utiles dans
la prévention des NVIC. Elle nont pas été intégrées
dans les recommandations MASCC/ASCO en raison
du facteur opérateur-dépendant et de leur difficulté
d’accès.
Traitement curatif des nausées
et vomissements
Le métoclopramide a montré sa supériorité sur le
placebo et une efficacité équivalente à celle des
sétrons. L’halopéridol na été testé que lors d’études
sans bras contrôle. Les nausées et vomissements
sous opioïdes sont soulagés efficacement par de
nombreuses molécules (dropéridol, ondansétron,
cyclizine).
Nausées et vomissements liés à une occlusion
digestive
Plusieurs techniques sont efficaces (chirurgie, stent,
sonde naso-gastrique, octréotide) ; leur utilisation
doit dépendre de l’évaluation du patient et de chaque
situation individuelle.
Constipation
La méthylnaltrexone est une nouvelle molécule
antagoniste des récepteurs µ testée dans une étude
de phase III randomisée en double aveugle versus
placebo, avec une seconde phase d’extension en
ouvert (4). Ce nouveau traitement a pour objectif
La Lettre du Cancérologue Vol. XVIII - n° 1 - janvier 2009 | 65
DOSSIER THÉMATIQUE
d’obtenir un effet laxatif pour les patients constipés
(moins d’une selle toutes les 72 heures) sous traite-
ment antalgique de palier 3 (opioïdes). Cette étude
portant sur 133 patients sous opioïdes depuis au
moins 2 semaines, à dose stable depuis 3 jours au
moins, a été présentée au congrès de l’ASCO 2008,
et publiée dans le New England Journal of Medicine
au même moment. L’analyse des données a montré
une efficacité chez les patients constipés sous trai-
tement laxatif standard, avec un succès chez 48 %
des malades (versus 15 % dans le bras placebo) dans
les 4 premières heures suivant l’administration de la
première dose de méthylnaltrexone (0,15 mg/kg s.c.).
Ce traitement ne traverse pas la barrière hémato-
méningée et n’interfère donc pas avec l’action
centrale de l’antalgique. Un effet laxatif est obtenu
chez 52 % des patients au cours des 4 administra-
tions sous-cutanées complémentaires éventuelles,
versus 8 % des malades sous placebo. Ce traite-
ment est en cours de commercialisation et devrait
permettre une amélioration de la qualité de vie non
seulement des patients constipés sous opioïdes mais
également des soignants, en limitant le recours à
des manœuvres d’évacuation manuelle.
La vérité
sur les érythropoïétines ?
Les réflexions sur l’innocuité d’un traitement par
EPO ont pris une large place dans les discussions des
milieux oncologiques durant cette année 2008. À la
suite des décisions des tutelles américaines avec la
blackbox durant l’été 2007, les prescriptions d’EPO
ont été réglementées. La reprise des recomman-
dations de l’European Organisation for Research
and Treatment of Cancer (EORTC) de 2007 a été
publiée cette année dans le Lancet Oncology afin
d’encadrer au mieux les prescriptions (5). Les causes
évidentes d’anémie doivent, en premier lieu, être
détectées et traitées (carence martiale, hémorragie,
hémolyse, etc.). La prescription sera envisagée en
cas d’hémoglobine inférieure à 12 g/ dl, soit pour une
anémie symptomatique et un taux d’hémoglobine
entre 9 et 11 g/dl, soit pour une anémie asympto-
matique et un taux d’hémoglobine inférieur à 12 g/ dl
en présence de facteurs de risques individuels (âge,
comorbidités, etc.). L’admi nistration d’EPO doit
être proposée de manière individuelle en fonction
de données cliniques (état général, risque coro-
narien, âge, retentissement de l’anémie) et biolo-
giques (taux d’hémoglobine). Le taux cible fixé est
de 12 g/ dl d’hémoglobine ; le traitement doit être
arrêté en cas de dépassement ou de progression
trop rapide (augmentation supérieure à 1 g/dl en
2 semaines). Il doit également être interrompu en
l’absence de réponse au bout de 6 à 8 semaines.
On utilisera la dose minimale efficace, fixée, dans
les recommandations, à 450 UI/kg/sem., 2,25 µg/
kg/sem. ou 6,75 µg/kg/3 sem.
Les résultats de l’étude BRAVE portant sur le cancer
du sein métastatique et visant à évaluer l’effet de
l’époétine β sur la survie des patientes recevant
une chimiothérapie par anthracycline et/ou taxane
ont été présentés par M. Aapro (6). Les patientes
incluses dans cette étude ouverte randomisée et
multicentrique ont reçu de l’époétine β selon les
recommandations de 2007 de l’EORTC (taux cible
d’hémoglobine : moins de 13 g/dl) à la dose de
30 000 UI/sem. pendant 24 semaines. Il n’y a pas
eu de différence en termes de survie, critère prin-
cipal de l’étude, entre le bras traité par époétine β
et le bras contrôle (hazard-ratio [HR] = 1,07 ; IC95 :
0,89-1,30 ; p = 0,448). Il n’y a pas eu de différence
non plus en termes de survie sans progression (SSP)
[HR = 1,07 ; IC95 : 0,87-1,33 ; p = 0,522). En outre,
un bénéfice significatif en faveur du bras traité
par époétine β a été retrouvé sur la survie sans
transfusion et sans anémie sévère comparative-
ment au bras contrôle (HR = 0,59 ; p = 0,0097). Il
y a eu plus d’épisodes thromboemboliques dans
le bras traité par époétine, mais sans différence
sur l’incidence des événements thromboemboli-
ques sévères (mettant en jeu le pronostic vital).
Cette large étude portant sur 463 patients a été
menée selon les recommandations de l’EORTC de
l’époque (2007), qui préconisaient un taux d’hémo-
globine cible entre 12 et 13 g/dl, avant décision de
la Food and Drug Administration (FDA). Notons
que la révision de ces recommandations, limitant
la cible à 12 g/dl, conduit à réduire encore le risque
lié à l’époétine β.
Insistons sur le fait que, avec un suivi strict des
recommandations dans le cadre d’un traitement
par EPO, aucune preuve d’un impact péjoratif de
ces molécules sur la survie globale (SG) ou la SSP
n’a été retrouvée.
Les recommandations de l’EORTC en 2007 indi-
quaient l’inefficacité et la mauvaise tolérance du
complément martial oral associé au traitement par
EPO (5, 7). Un complément martial intraveineux
semblait apporter un bénéfice en association avec
les EPO. Une étude randomisée multicentrique de
phase III a comparé l’efficacité du fer intraveineux
associé à la darbépoétine chez des patients cancé-
reux anémiés en cours de chimiothérapie pour
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Soins de support en oncologie
DOSSIER THÉMATIQUE
Rétrospective 2008
des tumeurs solides (8). Trente-trois centres ont
randomisé 149 malades traités pour une durée
d’au moins 12 semaines dans le cadre de cancers
pulmonaires, gynécologiques ou colorectaux et de
cancers du sein. Le taux d’hémoglobine à l’inclusion
était inférieur ou égal à 11 g/dl, suivant en cela les
recommandations de bonne pratique énoncées plus
haut. Les patients ne présentaient pas de déficit en
fer (ferritinémie > 100 ng/ml ; coefficient de satura-
tion > 20 %) et ont reçu de la darbépoétine α 150 x
1/sem., pendant 12 semaines. La randomisation
consistait à répartir les patients entre un traitement
par gluconate de fer intraveineux à la posologie de
125 mg/sem. et l’absence de complément en fer.
Lobjectif principal était la réponse hématologique
(hémoglobine 12 g/dl) et les objectifs secondaires
étaient le délai de réponse, le recours à la transfu-
sion et l’évolution de l’hémoglobine. La réponse
hématologique a été meilleure dans le bras traité
par l’association darbépoétine-fer i.v. (76,7 % versus
61,8 % ; p = 0,0495). La réponse après 4 injections
(en incluant les patients dont la dose de darbépoé-
tine avait été doublée pour non-efficacité durant
les 4 premières semaines) était de 92,5 % versus
70 % (p < 0,0033), en faveur du bras association. Il
n’y a pas eu de toxicité supplémentaire en relation
avec le traitement par fer intraveineux (9,6 % versus
7,9 % ; p = NS).
L’ajout de fer intraveineux à la darbépoétine majore
donc l’efficacité du traitement, sans toxicité supplé-
mentaire. Ce résultat est important et confirme
les recommandations des sociétés savantes. Un
éditorial du Journal of Clinical Oncology a appuyé
ces observations, qui devraient, à l’avenir, influencer
la prise en charge en nous conduisant à associer,
de manière plus systématique, le traitement par
EPO à un complément par fer intraveineux, ce qui
permet de surcroît une économie budgétaire évaluée
à 100 dollars par semaine (9).
Psycho-oncologie
Un baromètre d’anxiété (distress barometer) a été
proposé par une équipe belge dans une étude pros-
pective portant sur 538 patients cancéreux (10). Ce
baromètre, rapide, associe le distress thermometer
(proposé par les équipes hollandaises, dans lequel
le patient doit coter son niveau d’anxiété sur une
échelle de type thermomètre), à une évaluation de
l’intensité de la détresse sur une échelle colorée
(pâle : pas de détresse ; rouge foncé : détresse impor-
tante). Il est demandé au patient, sur un complément
tenant sur une page A4, s’il souhaite communiquer à
ce sujet et, si oui, à qui (médecin, infirmière, psycho-
logue, assistante sociale ou autre).
Lévaluation menée auprès de patients ambulatoires
en comparaison du questionnaire standard Hospital
Anxiety and Depression Scale (HADS) a montré l’in-
térêt de ce baromètre de l’anxiété, qui possède une
sensibilité de 0,79 pour une spécificité de 0,81, et
se révèle un outil utile pour les praticiens et les
patients, rapide et suffisamment précis pour dépister
la souffrance des patients.
La relation entre la fatigue et les autres symptômes
liés au cancer dans des maladies avancées a été
analysée rétrospectivement auprès de 268 malades
par l’équipe de E. Bruera (11). Aucun lien n’a été
retrouvé entre la fatigue, le sexe, l’ethnie et le
type de cancer en analyse univariée. L’index de
performance status (PS) a été très significative-
ment associé à la fatigue (p < 0,0001). En analyse
multivariée, la fatigue est en relation étroite avec
les items psychologiques (anxiété, p < 0,0001 ;
dépression, p = 0,0019 ; insomnie, p < 0,0001 ;
sensation de bien-être, p < 0,0001). La douleur et
la dyspnée sont également corrélées à cette sensa-
tion (p = 0,0012 et p = 0,007, respectivement). Cette
évaluation, utilisant les échelles FACIT-F (Functional
Assessment of Chronic Illness Therapy Fatigue) et
ESAS (Edmonton Symptom Assessment System),
indique l’importance d’une prise en charge globale
des malades prenant en compte les différentes
souffrances éprouvées.
L’importance de l’écoute et de l’accompagne-
ment de nos patients atteints de cancer n’est
plus à démontrer. On peut toutefois insister sur
la nécessité de renforcer toujours les liens entre
équipes, notamment avec les collègues de psycho-
oncologie. Une étude cas-témoins rétrospective
portant sur les données d’assurances maladie du
New Jersey a permis d’analyser le risque de suicide
dans différentes situations pathologiques chez des
patients âgés (12). Les données ont été collectées
entre 1994 et 2002 ; 1 405 résidents du New Jersey
âgés de 65 ans et plus ont été étudiés. Dix patients
vivants servant de contrôles ont été inclus pour
chaque patient suicidé, et appariés en fonction de
l’âge, de l’ethnie, du sexe, des comorbidités et des
médications. Dans les études ajustées selon les
différents facteurs, la seule condition médicale
associée à un suicide a été une maladie cancéreuse
(odds-ratio [OR] = 2,3 ; IC95 : 1,1-4,8). Les autres
causes liées au suicide ont été les troubles de la
personnalité, un traitement antidépresseur et un
traitement opioïde. Ce résultat montre combien il
La Lettre du Cancérologue Vol. XVIII - n° 1 - janvier 2009 | 67
DOSSIER THÉMATIQUE
faut rester vigilant face à tout patient âgé atteint
de cancer et souligne l’importance de déployer la
coordination des soins de support afin de motiver
un contact voire une prise en charge psychologique
ou psychiatrique.
Dyspnée
Une revue systématique de la littérature menée
jusqu’en 2006 a permis de faire le point sur les
traitements efficaces ou non lors des dyspnées
des patients en phase avancée (13). La dyspnée a
été classiquement évaluée soit par EVA, soit par
l’échelle de Borg, qui classe la dyspnée de 0 à 10,
ces deux méthodes d’évaluation étant validées.
Seule l’administration de morphine par voie systé-
mique se montre efficace, que ce soit par voie
orale ou intraveineuse. En revanche, le nébulisat
de morphine n’a pas d’efficacité démontrée versus
placebo. Les benzodiazépines ne semblent pas non
plus avoir d’intérêt dans la dyspnée, en dehors d’une
action sur sa composante anxiogène. Elles sont en
outre pourvoyeuses d’effets indésirables importants
à type de somnolence. Seule la prométhazine (une
phénothiazine) par voie orale apporte un bénéfice
en cas de difficulté d’utilisation des opioïdes ou
en seconde ligne. Aucune étude n’a pu démontrer
correctement une efficacité des corticoïdes. Les
auteurs concluent que des études randomisées
versus morphine systémique devraient être réali-
sées afin d’établir une efficacité réelle des techni-
ques testées.
Toxicité cardiaque
et thérapies ciblées
L’apparition des thérapies ciblées s’accompagne
de nouvelles toxicités parfois encore mal appré-
ciées. Par exemple, pour les inhibiteurs des tyro-
sines kinases (ITK), la cardiotoxicité a été évaluée
à 10 % par rapport à une diminution de la fraction
d’éjection ventriculaire. Une étude monocentrique
a démontré l’intérêt d’un suivi étroit et didactique
lors du traitement de patients atteints de cancer
du rein métastatique par ITK (14). Un événement
cardiaque a été défini comme une augmentation
des enzymes cardiaques par rapport à l’inclusion,
une arythmie symptomatique nécessitant un trai-
tement adapté, une nouvelle dysfonction ventri-
culaire gauche ou un syndrome coronarien aigu.
Le monitoring proposé aux patients a consisté
en une évaluation systématique des facteurs de
risques cardio-vasculaires. Un examen clinique
à la recherche de signes cardio-vasculaires a été
réalisé à l’instauration du traitement puis 2 fois
par mois. Une analyse biologique (créatine kinase,
créatine kinase MB, troponine) a été effectuée à
l’instauration du traitement puis tous les 2 mois et
en cas d’apparition de symptômes. Un électrocar-
diogramme (ECG) a été pratiqué à l’instauration du
traitement puis tous les mois chez tous les patients
asymptomatiques et en cas d’apparition de signes
cliniques. Une échographie cardiaque a été effec-
tuée à l’inclusion chez certains patients présentant
un risque cardiaque. Cette approche a permis de
détecter 33,8 % d’événements cardiaques chez les
74 patients suivis et traités. Des modifications de
l’ECG ont été notées pour 40,5 % des malades ;
18 % d’entre elles ont été symptomatiques. Une
prise en charge immédiate en soins intensifs a été
nécessaire pour 9,4 % des patients. Cette étude
montre l’importance d’un suivi étroit et défini de
manière à dépister au mieux les événements cardia-
ques. Ces résultats devraient inciter les départe-
ments d’oncologie à une plus grande coopération
avec les équipes cardio-vasculaires. Cette idée de
renforcement de la communication et du travail
en équipe a été reprise dans l’éditorial du numéro
de Journal of Clinical Oncology qui présentait cette
étude (15). Il s’agit là encore d’une coordination
et d’une organisation des soins à proposer aux
patients qui entrent dans le cadre des soins de
support oncologiques.
Où l’on reparle des médecines
complémentaires
Plusieurs études ont déjà montré un impact poten-
tiel des techniques complémentaires et alterna-
tives, telles que le yoga, sur des symptômes divers,
tels que les bouffées vasomotrices (16). Une étude
randomisée versus contrôle a porté sur 60 patientes
prétraitées pour un cancer du sein et souffrant de
bouffées vasomotrices (17). Ces patientes, touchées
plus de 14 fois par jour par des bouffées de chaleur,
ont été randomisées entre thérapie par hypnose, au
rythme de 5 séances de 50 minutes par semaine,
et absence de traitement. L’évaluation a porté sur
la fréquence et l’intensité des bouffées de chaleur,
ainsi que sur le retentissement sur l’activité quoti-
dienne.
La fréquence des bouffées de chaleur a été réduite
de 68 % par rapport à l’inclusion dans le bras
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