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La Lettre du Psychiatre - Suppl. Les Actualités au vol. I - n° 5 - décembre 2005
– ajouter un antipsychotique si aucun
n’a été prescrit en première intention ;
– changer d’antipsychotique.
De plus, la clozapine a démontré son
efficacité dans ces situations de résis-
tance au traitement habituel ; il en est
de même pour l’électroconvulsivothéra-
pie (ECT) dans les épisodes sévères ou
résistants, qu’ils soient maniaques ou
mixtes.
Enfin, soulignons que l’utilisation des
antipsychotiques doit être la règle lors-
qu’il existe des caractéristiques psycho-
tiques associées (manies délirantes).
Dépression bipolaire
Les ressources thérapeutiques restent
insuffisamment développées dans la
dépression bipolaire.
Les recommandations thérapeutiques
actuelles conseillent le lithium ou le
valproate en première intention dans
cette indication.
La lamotrigine (8) est indiquée comme
traitement de première intention par
les Guidelines de l’APA (5).
Une étude contrôlée a, en effet, montré
l’efficacité de cet anticonvulsivant dans
la prévention des rechutes dépressives
chez des patients bipolaires (1). Le
produit n’a cependant pas fait la preuve
de son efficacité dans la manie.
La lamotrigine n’a pas reçu à l’heure
actuelle, en France, l’AMM dans cette
indication. La monothérapie antidé-
pressive n’est pas recommandée dans la
dépression bipolaire en raison du risque
de virage maniaque ou de déclenche-
ment de cycles rapides. Dans les formes
d’intensité modérée à sévère, il est
approprié de mettre en œuvre une thé-
rapeutique associant un antidépresseur
avec un thymorégulateur (lithium, val-
proate ou olanzapine). Dans les situa-
tions cliniques présentant un degré de
sévérité important (risque suicidaire,
sitiophobie majeure, troubles psycho-
tiques associés, aspects catatoniques),
les ECT constituent un choix thérapeu-
tique tout à fait adapté ; les ECT peu-
vent également être mises en œuvre
dans les dépressions sévères survenant
durant la grossesse.
Lorsque l’épisode dépressif survient
chez un patient en traitement d’entre-
tien, l’intervention thérapeutique à
mettre en œuvre en premier lieu est
l’optimisation des doses. Si cette
démarche se révèle insuffisante, on
ajoutera au traitement thymorégulateur
un anticonvulsivant comme la lamotri-
gine, un inhibiteur spécifique de la
recapture de la sérotonine (ISRS), la
venlafaxine, ou encore les inhibiteurs
de la monoamine oxydase (IMAO). Les
épisodes dépressifs avec caractéris-
tiques psychotiques nécessitent géné-
ralement l’adjonction d’un traitement
antipsychotique, mais, là encore, les
ECT constituent une alternative raison-
nable.
Abus de substances associé
Le trouble bipolaire est, dans les deux
sexes, fréquemment associé à un abus
de substances (32). L’abus de sub-
stance peut masquer ou accentuer les
fluctuations thymiques ; il augmente le
risque de passage à l’acte suicidaire et
le risque de rechute, tout en aggravant
le pronostic. Sur le plan thérapeutique,
il est donc indispensable de prendre en
compte cette comorbidité dans le pro-
gramme de soins. Il n’existe que peu
de données émanant d’études contrô-
lées portant sur le traitement pharma-
cologique de ces patients, dans la
mesure où l’abus de substances consti-
tue habituellement un motif d’exclu-
sion de ce type d’étude. Néanmoins,
certains travaux (12) soulignent l’in-
térêt du valproate dans ces situations
cliniques, et un consensus d’experts
datant de 2000 (13) cite ce produit
comme constituant une thérapeutique
de première ligne en cas de comorbi-
dité alcoolique ou d’autre abus de
substance associé. Il conviendra
d’être particulièrement attentif à
d’éventuelles altérations des fonctions
hépatiques : les Guidelines de l’APA
recommandent, dans ce cas, une coor-
dination des soins avec un gastro-
entérologue ou un omnipraticien (5).
Traitement d’entretien
Les thymorégulateurs éprouvés que
sont le lithium et/ou le valproate
constituent les thérapeutiques de choix
en matière de traitement d’entretien
(recommandation de niveau 1 selon les
Guidelines de l’APA). L’olanzapine pré-
vient les récidives maniaques plus que
les récidives dépressives (9, 14, 15) ; la
carbamazépine, l’oxcarbazépine ou
encore la lamotrigine constituent des
alternatives possibles (niveau 2 selon
l’APA).
Pour G. Goodwin et al., le niveau de
preuve en faveur de l’efficacité du
lithium dans la prévention des rechutes
est net pour la manie et un peu
moindre pour la dépression. Il existe en
outre des données consistantes en
faveur d’un rôle spécifique du lithium
dans la diminution du risque suicidaire
(16-18).
Lorsque des antipsychotiques ont été
prescrits en phase aiguë, ils peuvent
être poursuivis durant la phase de
maintenance de six mois ; au-delà de
cette période, il convient d’en réévaluer
la nécessité.
Le traitement d’entretien doit égale-
ment comporter, de façon impérative,
un soutien psychothérapique et des
mesures psycho-éducatives (5). Ces
mesures psychothérapiques revêtent une