La Lettre du Neurologue - Hors-série - avril 2002 7
Le dosage des enzymes musculaires, et tout particulièrement
des phosphocréatine-kinases (CPK), peut lui aussi constituer un
élément d’orientation. Dans les dystrophies musculaires, les
taux les plus élevés sont décrits dans les déficits en dysferline
(parfois supérieurs à 100 fois la normale), puis dans les déficits
en calpaïne ou cavéoline ; un taux presque normal n’est pas
exceptionnel dans les sarcoglycanopathies.
L’étude génétique réalisée d’emblée à partir d’un prélèvement
sanguin est rarement informative. Elle ne se justifie que dans un
contexte familial très évocateur, comme cela est parfois le cas
dans les dystrophinopathies. Cependant, elle ne permet de
détecter que les grandes délétions ou les duplications du gène de
la dystrophine et n’est positive que dans 60 % des DMD et 10 %
des BMD.
La biopsie musculaire reste l’étape essentielle du diagnostic
étiologique dans la majorité des cas.
L’aspect histologique permet de distinguer les myopathies
congénitales (anomalies spécifiques), les dystrophies muscu-
laires (lésions de nécrose et de régénération), les myopathies
métaboliques (lésions de surcharge) et les myosites à inclusions
(vacuoles, etc.).
Le marquage immuno-histochimique est une étape essentielle
du diagnostic des dystrophies musculaires. La plupart des labo-
ratoires d’anatomie pathologique ne disposent que d’anticorps
antidystrophine, antisarcoglycanes et antimérosine. Ces immu-
nomarquages doivent être interprétés avec précaution.
Classiquement, on note, avec les anticorps antidystrophine, une
absence d’immunomarquage dans la DMD et un marquage irré-
gulier dans la BMD. La dystrophine étant une protéine d’an-
crage des autres protéines sarcolemniques, son immunomar-
quage peut également être altéré dans les sarcoglycanopathies.
Une étude immunohistochimique des sarcoglycanes doit donc
toujours être couplée à l’étude de la dystrophine. Son interpré-
tation est elle aussi délicate : en particulier, les déficits en β- et
α-sarcoglycanes s’accompagnent d’une absence totale d’immuno-
marquage des quatre sarcoglycanes.
La technique du Western-Blot permet, par électrophorèse puis
transfert sur une membrane, d’étudier les différentes protéines
musculaires, caractérisées par leur poids moléculaire et leur
immunomarquage. La technique du Western-Blot multiplex per-
met d’étudier simultanément les différentes protéines. Le Wes-
tern-Blot est essentiel pour confirmer ou affiner les résultats de
l’étude immunohistochimique. Il distingue la DMD (absence de
dystrophine) de la BMD (dystrophine anormale ou diminuée) et
des sarcoglycanopathies. Le diagnostic précis des sarcoglycano-
pathies doit prendre en compte le fait qu’une diminution de l’un
des composants du complexe des sarcoglycanes, qui ne peut se
former que lors de la synthèse des quatre protéines, s’accom-
pagne en général d’un déficit secondaire des trois autres. Ainsi,
l’α-sarcoglycane est diminuée dans toutes les sarcoglycanopa-
thies, et il y a un effondrement des quatre sarcoglycanes au
cours des ß- et -sarcoglycanopathies. Si toutes ces protéines
sont normales, on réalise en seconde intention (à moins d’un
tableau d’emblée très évocateur) :
–dans les formes récessives, une étude de la calpaïne, de la dys-
ferline ou de la téléthonine ;
–dans les formes dominantes, une étude de la cavéoline, de la
lamine ou de la myotiline.
Un déficit en calpaïne peut être secondaire à un déficit en dys-
ferline, et les deux protéines doivent toujours être comparées.
Le diagnostic de certitude repose sur la mise en évidence de
l’anomalie génétique. Même dans les formes classiques de dys-
trophie de Duchenne diagnostiquées dès l’étude immunohisto-
chimique, cette étape est indispensable dans la perspective d’un
conseil génétique, d’un diagnostic prénatal ou de la mise en évi-
dence des femmes vectrices. En raison de la multiplicité des
gènes impliqués dans les dystrophies musculaires en particulier,
et, pour chaque gène, de la multiplicité des mutations, ce dia-
gnostic génétique n’est possible que s’il est orienté par la
démarche clinique et anatomopathologique. ■
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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