La Lettre du Cancérologue • Vol. XXII - n° 6 - juin 2013 | 239
L’équipe japonaise de N. Ando et al. (6) a donc mis en
place un essai randomisé multicentrique comparant
2 cures de 5FU-ciplatine délivrées en néoadjuvant
versus en adjuvant pour les carcinomes épidermoïdes
de stade II-III. Cet essai était construit dans l’hypo-
thèse d’une amélioration de 13 % de la survie sans
progression à 5 ans en faveur du groupe néoadjuvant.
Parmi les 330 patients inclus, seuls 75 % ont reçu la
séquence complète dans le bras adjuvant et 85,4 %
dans le bras néoadjuvant. Après analyse intermé-
diaire, la survie sans progression était en faveur du
groupe néoadjuvant mais de manière non significa-
tive. En revanche, la différence sur la survie globale
à 5 ans (qui était un critère de jugement secondaire)
était en faveur du bras néoadjuvant (55 % versus
43 % ; p = 0,04). On peut noter aussi qu’aucun des
patients pN+ du bras adjuvant qui n’avait pu recevoir
de chimiothérapie n’était vivant à 5 ans.
Même si cet essai est négatif sur le critère de
jugement principal, les résultats de cette analyse
intermédiaire ont fait interrompre les inclusions et
conclure que la stratégie néoadjuvante est mieux
tolérée, plus complète et donc plus efficace.
Radiochimiothérapie adjuvante
dans les cancers gastriques
avec curage D2
Les stratégies de traitement du cancer gastrique
varient selon les continents. En Europe, la référence
est la chimiothérapie périopératoire ; aux États-
Unis, la RCT adjuvant et en Asie la CT adjuvante.
La critique principale de l’essai INT-0116 américain
était que la majorité des curages étaient de type
D0 et D1, alors que le curage de référence est le
curage D2 (7).
L’équipe coréenne de J. Lee et al. (8) a donc testé dans
l’essai ARTIST (Adjuvant Chemoradiation Therapy in
Stomach Cancer) 6 cures de capécitabine + cispla-
tine + 45 Grays versus 6 cures de chimiothérapie
seule selon le même protocole en adjuvant dans
les cancers gastriques avec curage D2. L’hypothèse
était celle d'une supériorité de la chimiothérapie
comparée à la RCT. L’objectif principal était la
survie sans récidive (SSR), le suivi médian était de
53,2 mois.
Sur les 458 patients de l’étude, les toxicités étaient
similaires dans les 2 bras. L’essai est négatif sur l’ob-
jectif principal avec une survie sans récidive à 3 ans
de 74,2 % dans le bras chimiothérapie versus 78,2 %
dans le bras radiochimiothérapie (p = 0,862), proba-
blement dû à un manque d’événements (127 versus
227 prévus). Par contre, dans le sous-groupe des
patients N+, la survie sans récidive était meilleure
dans le bras RCT 77,5 % versus 72,3 % (p = 0,0365).
Il n’y avait pas de différence sur le site de première
récidive entre les 2 bras. Cet essai est poursuivi par
l’essai ARTIST II selon la même méthodologie, mais
chez les patients N+.
Chirurgie mini-invasive
du cancer de l’œsophage
Alors que les complications pulmonaires sont au
premier rang de la morbidité post-œsophagec-
tomie, plusieurs travaux ont suggéré un bénéfice de
l’abord totalement mini-invasif (sans thoracotomie
ni laparo tomie) sur la réduction des taux de compli-
cations pulmonaires et sur la durée de séjour (9).
L’équipe hollandaise de S.S. Biere et al. (10) a
publié en 2012 les résultats d’un essai randomisé
multicentrique comparant une stratégie ouverte
(thoracotomie droite + laparotomie) à une stra-
tégie totalement mini-invasive (thoracoscopie +
cœlioscopie). Cet essai était construit sur l’hypo-
thèse d’une diminution de 28 % du taux d’infections
pulmonaires à 15 jours par l’abord mini-invasif.
Avec 115 patients, il a été mis en évidence une dimi-
nution des infections pulmonaires dans le bras mini-
invasif, à la fois durant les 15 jours postopératoires
(9 % versus 29 % ; p = 0,005) et pendant la période
intra-hospitalière (12 % versus 34 % ; p = 0,005),
ainsi qu’une diminution de la durée d’hospitalisa-
tion (11 j versus 14 j ; p = 0,044). Il n’y avait pas
de différence sur le taux de résection R0, le stade
pTNM, ni sur la mortalité postopératoire. Il s’agit
du premier essai randomisé évaluant l’intérêt de
l’approche mini-invasive sur la morbidité postopé-
ratoire. Néanmoins, un certain nombre de critiques
ont été rapportées (11) : la différence de position au
bloc opératoire (décubitus ventral versus latéral), la
ventilation (universus bipulmonaire), l’absence de
La littérature sur les cancers œsogastriques en 2012 permet de retenir qu’une radiochimiothérapie néo-
adjuvante à base de taxane est une stratégie efficace et validée dans les cancers de l’œsophage et de
la jonction œsogastrique localement avancé, que la chimiothérapie est plus efficace et mieux tolérée en
néoadjuvant plutôt qu’en adjuvant dans les carcinomes épidermoïdes de l’œsophage, que la radiochimio-
thérapie adjuvante n’apporte pas de bénéfice de survie après un curage D2 dans les cancers gastriques, que
l’approche mini-invasive semble prometteuse dans les cancers de l’œsophage en diminuant la morbidité
postopératoire, notamment pulmonaire, et que la gastrostomie percutanée radiologique est une technique
faisable, sûre et efficace pour pallier la dénutrition avant un traitement néoadjuvant suivi de chirurgie
dans le cancer de l’œsophage.
Mots-clés
Œsophage
Estomac
Cancer
Chimiothérapie
Chirurgie
Radiothérapie
Abstract
The most important articles
on oeso-gastric treatment
published in 2012 reported
that taxane based neoad-
juvant chemoradiation is
safe and efficient in locally
advanced esophageal and
junctional carcinomas, neoad-
juvant chemotherapy offers
best tolerance and efficiency
when compared to adjuvant
administration in esophageal
squamous cell carcinomas,
adjuvant chemoradiation does
not offer any survival benefit in
gastric cancer having benefited
from a D2 lymphadenectomy,
mini-invasive esophagectomy
seems to decrease postop-
erative pulmonary complica-
tions compared to the open
approach and percutaneous
radiological gastrostomy is safe
and efficient for treatment of
malnutrition in the prethera-
peutic phase even for patients
that will benefit from esopha-
gectomy and gastric pull-up.
Keywords
Œsophagus
Stomach
Cancer
Chemotherapy
Surgery
Radiotherapy